lundi 10 novembre 2025

La Femme la plus riche du Monde de Thierry Klifa

Bien sûr qu’il faut aller voir La femme la plus riche du monde, présenté hors compétition au dernier festival de Cannes et dont on remarquera au passage que l'affiche es d'une sobriété inattendue.

Ce film est bien plus jouissif que ne l'aurait été un biopic sur Liliane Bettencourt. Il nous aurait inhibés parce qu’on aurait hésité entre mépris et compassion. Ici on comprend illico qu’on est dans un registre de tragicomédie et on peut se régaler sans arrière-pensée.

Le scénario, évidemment inspiré de la vie et des rebondissements de cette célébrité est cousu sur mesure de répliques qui font mouche. Comme c'est drôle de l’appeler Marianne. Les rôles sont équilibrés, de manière à ce qu’aucun acteur/trice ne s’approprie le haut de l’affiche.

Certes Isabelle Huppert culmine de grâce et d’intelligence, Laurent Laffitte endosse sans doute son meilleur costume, prenant l’accent des beaux quartiers comme s’il y était né, mais il y a aussi Marina Foïs, fille dolorosa aimante et jalouse, Raphael Personnaz dévoué et ambigu, aussi discret qu'essentiel, Mathieu Demy naturel et innocent, André Marcon en mari dépassé par les évènements, sans oublier la sublime Anne Brochet qui retrouve un rôle à la hauteur de son interprétation de Roxane dans le Cyrano de Bergerac de Rappeneau. Certes la présence de Betsy est fugace mais superbe en femme libre, d’une beauté enrichie par les années et chantant à ravir.

Les joutes verbales entre les personnages évoqueront parfois les Liaisons Dangereuses de Stephen Frears (1988). On verra aussi certains rapprochement avec la série Succession, et pur cause puisqu'elle évoque également les luttes internes d’une famille ultra riche. Il y a un côté thriller qui pimente une projection extrêmement distrayante jusqu'au bout.

Pour ceux qui voudraient connaitre le fin mot de la (vraie) histoire François-Marie Banier a été condamné pour abus de faiblesse à quatre ans de prison avec sursis et 350 000 € d'amende, ainsi qu'au paiement de 158 millions  de dommages et intérêts à Liliane Bettencourt (qui ne seront pas réclamés en vertu d’un accord avec la fille pour clore la procédure). Son compagnon sera condamné à dix-huit mois de prison avec sursis. Un ministre et un président de la république sont bel et bien mêlés à l'histoire mais blanchis … et ce ne sont pas eux qui sont nommés dans le film. Des toute façon cette affaire et trop complexe.

A propos de costumes, les tenues qui ont été choisies pour  le personnage de Marianne Farrère (et on salue le style Chanel qui est une des maisons habillant les acteurs) en font presque un film documentaire sur une époque et sur une classe sociale. Thierry Klifa a eu raison, avec le concours de Jürgen Döering et Laure Villemer, de soigner le choix des 70 costumes différents portés par Isabelle Huppert. Ils parviennent à suggérer l’extrême richesse du personnage sans la surligner.

Le décor est lui aussi emblématique, faisant contraster un hotel particulier art déco de l’ouest parisien (en réalité la Villa Empain de Bruxelles), un loft au pied de la Tour Eiffel, et une résidence secondaire de bord de mer en Grèce.

La musique du film est signée Alex Beaupain, compositeur fétiche de Christophe Honoré, avec qui Thierry Klifa avait déjà collaboré sur son dernier long-métrage, Les Rois de la piste (2023).

La Femme la plus riche du Monde de Thierry Klifa
Avec Isabelle Huppert, Marina Foïs, Laurent Lafitte, Raphaël Personnaz, André Marcon
En salle depuis le 29 octobre 2025

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