samedi 27 avril 2024

Visite du musée Marmottan Monet avec l’application Myze

J’ai profité de ma venue au musée Marmottan Monet à l’occasion de l’exposition En jeu! Les artistes et le sport 1870-1930 pour voir les collections permanentes dont j’avais évidemment beaucoup entendu parler et que je n’avais encore pas approchées.

J’ai été surprise de découvrir qu’elles ne se « limitent » pas à des tableaux de Claude Monet même si bien entendu il y en a plusieurs, et qu’ils sont d’importance considérable. C’est par eux que je terminerai ce billet car je voudrais auparavant attirer l’attention sur des aspects moins connus : la collection des épées, le mobilier, la salle des enluminures, la collection Berthe Moriset.

Mais avant tout je relaterai l’expérience que j’ai faite de l’application Myse-My Selection. C’est une solution digitale permettant aux visiteurs de musées de créer leur catalogue personnalisé. Plutôt que de stocker dans son téléphone les images capturées lors des visites, Myse permet de les imprimer sur place, instantanément, en haute définition dans un livret unique, et accompagnées des informations authentiques des spécialistes, dans la langue de son choix. Myse est une technologie française déployée en partenariat avec chacun des musées où elle est proposée. Vous trouverez toutes les informations sur le site de l’application.

Je ne tairai pas les inconvénients et les limites du système mais je reconnais très sincèrement son intérêt. Il est ridicule de visiter une exposition, le téléphone à bout de bras pour capturer le plus d’images possible qui seront (ou pas) partagées par la suite avec l’entourage ou stockées à jamais sans qu’on se souvienne de quel tableau il s’agissait. Je vois tous les jours des personnes qui mitraillent sans cadrer correctement, en bloquant la vue sur les oeuvres aux visiteurs qui veulent voir l’œuvre de près. Sans parler des flashs qui pourraient me mettre hors de moi. My Selection apporte une solution concrète pour se libérer l’esprit de cela.
A condition bien sûr de ne pas "tout" vouloir, mais pour cela il existe une autre réponse. C’est le catalogue de l’exposition. D’ailleurs je dois mettre un bémol à l’exhaustivité de la formule puisque My Selection se "limite" au fond permanent du musée, du moins pour le moment. Et c’est compréhensible quand on réalise l’ampleur du travail de recueil de données en amont.

Si les cartels sont en français et en anglais (à Marmottan) l’application offre une accessibilité dans de multiples autres langues, y compris le japonais. C’est un énorme point positif. Le cadrage des oeuvres est idéal, l’éclairage aussi. La reproduction sera parfaite, sans reflets ou tête de visiteur intempestive apparaissant devant le tableau ou lui faisant de l’ombre, dans une qualité d’impression remarquable. Le temps d’attente est très raisonnable, On repartira avec son propre souvenir à feuilleter.

On aura choisi la page de couverture du livret  parmi trois propositions et je pense qu’il sera aussi possible d’intégrer bientôt -selon le même principe- une vue d’ensemble d’une pièce du musée parmi les trois ou quatre prévues par les concepteurs.
C’est un peu long de remettre les clichés dans l’ordre souhaité avant de confirmer la sélection mais c’est tout à fait envisageable pour quelqu’un comme moi, un peu maniaque, cherchant à distinguer ce qui relève du mobilier, des différentes sections et de la peinture sans que l’ensemble apparaisse comme un fourre-tout. Et c’est très agréable de conserver malgré tout la version numérique accessible plus tard sur son smartphone, comme en témoigne les impressions écran que j’ai faites depuis pour illustrer cet article :
Vous remarquerez que les descriptions vont plus loin que le titre, l’auteur et la date. Vous constaterez qu’on peut même intégrer les oeuvres majeures prêtées temporairement comme, en ce moment Impression soleil levant de Claude Monet dont le site du musée alerte le public de son absence pour quelques semaines :
Chers visiteurs, L’œuvre Impression, soleil levant de Claude Monet est prêtée exceptionnellement au Musée d’Orsay, du 26 mars au 14 juillet 2024, et ensuite à la National Gallery de Washington du 8 septembre 2024 au 19 janvier 2025. Nous vous remercions de votre compréhension.
Mon seul bémol concerne la gymnastique de jonglage entre l’interface de l’application et la fonction appareil photo de mon appareil pour capturer les images de l’exposition temporaire (ou des objets et tableaux ayant échappé à Myse) car à Marmottant la séparation entre exposition temporaire et fond permanent n’est pas très nette, sans doute pour une question d’espace, sans parler de mon carnet de notes où j’écris l’essentiel pour écrire ensuite mes articles.

Une autre restriction tiendrait à la méconnaissance de son code d’accès, nécessaire au téléchargement de l’application, et à une insuffisance de suffisamment de batterie sur son téléphone, Mais il existe des prises de courant pour remédier à ce dernier souci, à condition d’avoir avec soi son cordon de chargement.

Les concepteurs peuvent exploiter quelques pistes d'amélioration à partir de mon expérience. Mes remarques ne sont pas des critiques mais des suggestions bienveillantes car, encore une fois, j’ai vraiment apprécié le résultat final … qui pourrait gagner un peu en lisibilité car les mots blancs sur fond jaune (dont j’ai bien compris qu’ils respectaient le code visuel de Marmottant) gagneraient à ressortir davantage. On pourrait aussi ajoute la légende (juste le titre et le nom du peintre) de l’illustration de couverture.

Et c'est une bonne idée d'inclure systématiquement l'histoire de ce musée, installé dans le château de La Muette, situé dans le hameau de Passy, que Jules Marmottan acheta en juin 1882. Administrateur de plusieurs compagnies françaises d’énergie et de transport, il est aussi un amateur d’art et réunit une quarantaine de peintures de primitifs italiens, flamands et allemands, au premier rang desquelles une rare Descente de Croix de Hans Muelich. Les statuettes de Malines en bois polychromes et les tapisseries des vies de sainte Suzanne et d’Alexandre illustrent également cette préférence pour l’art de la haute époque et de la Renaissance.

Décédé en 1883 à cinquante-trois ans, Jules Marmottan transmet à son fils unique, Paul, une fortune considérable, ses biens immobiliers et ses collections. Paul demande alors sa mise en disponibilité et renonce à sa carrière de haut fonctionnaire. Après un divorce et un veuvage, il mènera une existence solitaire consacrée à l’étude de l’histoire et de l’art. Auteur prolifique et respecté, il s’impose comme un spécialiste du Consulat et de l’Empire dont il contribue à réhabiliter l’art encore mal connu. Il constituera sa propre collection qu'il réunit dans le pavillon qu’il réaménage dans le plus pur goût Empire.
Vers 1910, Paul Marmottan achète des terrains mitoyens pour agrandir sa demeure qu'il réaménage et procède à des acquisitions majeures, au premier rang desquelles le lit de Napoléon Ier, le Lustre aux musiciennes, le bureau estampillé Pierre Antoine Bellangé, le monumental Portrait de la duchesse de Feltre et de ses enfants ou encore l’exceptionnelle "Pendule géographique" en porcelaine de Sèvres.

Paul Marmottan considère ce fastueux hôtel particulier, ses salons Empire et sa galerie de peinture ancienne comme l’une de ses réalisations majeures. Il lèguera sa demeure à une institution culturelle afin de la préserver et de l’ouvrir au public. Voilà pourquoi l’Académie des beaux-arts hérita du bâtiment et de ses collections à son décès, le 15 mars 1932. Le musée ouvrira deux ans plus tard.

Bientôt l’aura de l’Académie des beaux-arts suscite de nouveaux dons et legs. Le musée enrichit ses collections avec plusieurs dons successifs. Les plus déterminants seront ceux de Victorine et Eugène Donop de Monchy : objets d’art asiatique, peintures, dessins, anciens et modernes, Le Buveur de Frans Hals et Le Fumeur de pipe de Dirck van Baburen et surtout Impression, soleil levant avec dix autres toiles impressionnistes. Car le père de Victorine fut un des premiers soutiens de Claude Monet et de ses amis, alors que Paul Marmottan et l’Académie des beaux-arts les combattaient. Ainsi donc les circonstances firent de l’Académie la propriétaire et la gardienne des collections impressionnistes du musée Marmottan.

Sachant que j’écrirais (aussi) un article sur le musée j’ai fait mes propres photos d'oeuvres qui figurent -ou pas- dans My Selection, même si certaines étaient quasi inphotographiables derrière leurs vitres, comme la série des épées des académiciens dont j'ignorais la présence ici, alors qu'elle y est totalement légitime en raison de l'histoire.
En voici un exemple avec celle de Marcel Marceau, alias Mime Marceau (1923-2007), mime et acteur, élu membre de l'Académie des Beaux-arts en 1991. Il a créé son épée d'acier et de bronze doré avec le sculpteur Jean Cardot et Maréchal pour l'orfèvre Arthus Bertrand. On remarque sur le pommeau le chapeau de son célèbre personnage Bip, surmonté d'une fleur. Un soleil éclate à la base tandis que la demi-coquille symbolise la lune. Sur une face une phrase de Marcel Marceau "l'aube pointe", sur l'autre, sa signature.

Conçue non pas comme une arme mais comme le portrait de celui qui l'arbore chacune est donc riche de symboles et leur découverte est passionnante. Celle de Jacques Taddei, directeur du musée entre 2007 et 2012 a été créée par le joaillier Lorenz Bäumer en or, bronze, citrine, cristal, bois et argent. Elle symbolise l’amour de sa femme (avec un cœur en citrine), et porte la mention seul l’amour peut arrêter le temps.

Des artistes célèbres ont été mis à contribution. Ainsi Georges Mathieu dessina celle de Pierre Dehaye, écrivain et haut fonctionnaire, directeur de la monnaie de Paris, dont les ateliers réalisèrent l'objet en acier, or, argent et bronze. On y voit des quittions, en référence à sa fonction et la coloration de la fusée rappelle son signe astrologique du gémeau.
Tapisserie de l'Atelier Tabard d'Aubusson de 1962, Soleil de Paris de Jean Lurçat (1892-1966)

Dans l'escalier menant au premier étage, est accroché une variation d'une partie de la composition créée par l'artiste pour le restaurant de première classe de l'aéroport d'Orly à son inauguration. Le soleil permet la vie sur terre, c'est pourquoi Lurçat l'introduit sans nombre de ses tapisseries. La masse de l'astre est paradoxalement d'un nori profond, animé d papillons multicolores et s'inscrit en contraste avec le ciel baigné de jaune d'or. la Tour Eiffel, aux structures adoucies et presque végétales, surplombe un filet d'eau courante qui évoque la Seine.

La collection d’enluminures de Jules Marmottan se trouve à l'étage. Plus de trois cents pièces, dont d’importants jalons de l’histoire de l’art signés Lorenzo Monaco, Belbello da Pavia, Girolamo da Cremona, Jean Fouquet, Jean Bourdichon, Jean Colombe, Jean Perréal ou encore Giulio Clovio, constituent l’un des fleurons du musée et plus généralement des collections publiques françaises.
D'autant plus que, en 1981, Daniel Wildenstein offrit la collection d’enluminures que son père, Georges, avait commencé à réunir dès l’âge de seize ans. Trois cent vingt-deux miniatures des écoles française, italienne, flamande et anglaise datant du Moyen Âge et de la Renaissance constituent l’une des premières collections d’enluminures de France.

Auparavant, au sous-sol, on aura admiré plusieurs Monet. des bancs sont utilement placés à distance des oeuvres pour pouvoir les contempler à loisir.
On doit leur présence au fils cadet de Claude Monet, Michel devenu son unique héritier à la mort de son frère, Jean, en 1914. Outre les peintures et les dessins d’Eugène Delacroix, Eugène Boudin, Johan Barthold Jongkind, Gustave Caillebotte, Renoir, Morisot…, Michel hérite surtout des dernières œuvres de son père. La majorité d’entre elles appartiennent à un ensemble de toiles monumentales ayant pour thème les nymphéas.
Entre 1914 et 1926, Claude Monet exécute cent vingt-cinq grands panneaux dont il offre une sélection à la France. Le peintre refusant de dévoiler ces œuvres de son vivant, elles ne sont révélées au public qu’en 1927 (et connues aujourd’hui sous le nom des Nymphéas de l’Orangerie). Leur exposition fait scandale. L’œuvre ultime de Monet entre alors au purgatoire de l’histoire de l’art et Michel, qui possède la plus grande part du reste de ce vaste ensemble, se retrouve à la tête d’un héritage déprécié.
Sans enfant, Michel institue alors le musée Marmottan son légataire universel et renonce à léguer sa collection à l’État. Le musée hérite ainsi de la maison de Giverny et des œuvres restées dans la famille. Plus de cent peintures retraçant la carrière du chef de file de l’impressionnisme intègrent le musée. Outre les chefs-d’œuvre de jeunesse et de la maturité (Le Train dans la neige. La locomotive ; En promenade près d’Argenteuil ; Le Pont de l’Europe, gare Saint-Lazare ; Londres, le Parlement, reflets sur la Tamise…), l’ensemble se distingue par des tableaux monumentaux représentant les Nymphéas et le jardin de Giverny. Ces œuvres inédites du vivant de l’artiste sont présentées au public pour la première fois à leur arrivée au musée. Seul lieu à conserver les ultimes Pont japonais et Maison vue de l’allée aux roses, le musée Marmottan Monet offre par le nombre et la rareté de ses toiles une visite sans équivalent du premier fonds mondial d’œuvres de l’artiste.
Le pont japonais, huile sur toile peinte en 1918

Le pont japonais, détail
Les salons de Paul Marmottan étant trop exigus pour présenter la centaine d'œuvres d’une telle envergure, une salle est spécialement conçue sous le jardin de l’hôtel particulier. En 1970, ces toiles, pour la plupart inédites, sont montrées pour la première fois. Elles constituent le premier fonds mondial d’œuvres de Claude Monet. Dans les années 1990, l’établissement enrichit son nom et se mue en musée Marmottan Monet. On peut notamment y voir une palette de l'artiste.
Plusieurs autres descendants d’artistes ont suivi l’exemple de Michel Monet. En 1985, Nelly Sergeant-Duhem, la fille adoptive du peintre postimpressionniste Henri Duhem, fait entrer au musée de très nombreuses œuvres, dont En promenade près d’Argenteuil de Monet et Bouquet de fleurs de Paul Gauguin.

De même, en 1993, la famille Rouart lègue au musée le premier fonds mondial d’œuvres de son aïeule Berthe Morisot (1841-1895) – soit vingt-cinq tableaux et un ensemble unique d’œuvres graphiques –, ainsi que des dessins et des peintures signés Manet, Edgar Degas, Jean-Baptiste Camille Corot dont elle fut l'élève. Muse de Manet, elle s’impose comme la première femme impressionniste et sera aux côtés de Monet, Renoir, Degas, Pissarro l’un des principaux membres du groupe.

Contrairement à ses collègues, elle ne vendra que peu de toiles, ce qui explique qu’elle soit aujourd’hui encore peu représentée dans les musées.

Le musée Marmottan Monet est une exception, en présentant ses paysages de Normandie, les marines niçoises, jardins fleuris et portraits de jeunes filles en fleur. L'ensemble témoigne de son goût pour les couleurs claires et pastel, son don pour le dessin et sa liberté de facture qui ont fait l’admiration de ses amis.
Vingt-cinq peintures, soixante-cinq aquarelles, pastels et dessins constituent l’unique ensemble muséal permettant d’embrasser l’œuvre de ce grand maître.
Le jardin à Bougival peint par Berthe Morisot en 1884 (que j'ai choisi en couverture du livret)

Musée Marmottan Monet 
2, rue Louis-Boilly 75016 Paris
Ouvert du mardi au dimanche de 10 h à 18 h
Nocturne le jeudi jusqu’à 21 h
Fermé le lundi, le 25 décembre, le 1er janvier et le 1er mai

Myse SAS 14 rue Visconti 75006 Paris - +33 1 46 34 64 53 - contact@myse.museum

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