C’est un fait et c’est heureux. On parle différemment du handicap et une sorte de visibilité positive est en train de s’installer progressivement. Pour preuve, les jeux paralympiques ont été très populaires. Les commentaires se concentraient sur la performance bien davantage que sur le physique des athlètes.
Le festival Imago s’inscrit dans cette logique de regarder le handicap sans le stigmatiser. Il est d’abord question d’esthétique artistique et seulement ensuite de déficiences. Le politique par contre est encore en retard, surtout pour ce qui est d’accéder à l’intermittence.
S’agissant du festival, Richard Leteutre (co-directeur avec Olivier Couder) note une évolution manifeste qui se traduit par un afflux de propositions dans de multiples disciplines artistiques et l’intérêt de nouveaux lieux d’accueil. Si elle est présente en Île de France depuis 2016 une des conséquences est l’exportation de la manifestation à Bordeaux cette année.
De plus, Imago Le réseau porte des actions de terrain à travers des rencontres et des colloques dans de multiples lieux répertoriés sur le site.
Le calendrier des spectacles est très conséquent avec 58 lieux qui couvrent beaucoup d’endroits en île de France, auxquels s’ajoute la ville de Bordeaux. Ce ne sont pas moins de 109 représentations qui sont programmées entre le 7 septembre et le 10 décembre. Et il faut ajouter 7 rencontres et 4 expositions.
Vous comme moi ne pourrez pas courir d’un bout à l’autre des 9 départements mais je suis certaine que chacun retiendra plusieurs propositions. Pour ma part j’en ai coché 14.
La plus importante est sans doute Hamlet que la compagnie péruvienne Teartro La Plaza présenta au Festival d’automne (au Théâtre de la Ville en 2023) et qui sera joué les mardi et mercredi 19 et 20 novembre à l’Azimut de Châtenay-Malabry, nouveau lieu partenaire. Il promet le droit à la différence à travers un texte faisant le lien entre les vers de Shakespeare et les mots illustrant le vécu des acteurs. Être ou ne pas être résonne furieusement pour ce groupe de comédiens trisomiques.
Le festival aura démarré avec C’est beau ! le samedi 7 septembre à la Fondation Goodplanet qui a accueilli la conférence de presse de lancement. Avec ce spectacle de danse, scénographié par Diane de Navacelle de Coubertin (ci-contre en compagnie d’une danseuse venue d’Australie) on veut démontrer que le handicap cesse d’être une déficience pour devenir un argument artistique.
J’ai noté qu’il sera donné le jeudi 28 novembre à 19 h 30 au Musée du quai Branly-Jacques Chirac (et je ne saurais trop vous recommander de vous hâter pour visiter l’exposition Mexica qui est prolongée jusqu’au 8 octobre).
À propos de Goodplanet il faut souligner que si Yann Arthus-Bertrand l’a créée pour développer une action militante en terme de transition écologique, il a aussi voulu en faire un lieu qui prône la justice sociale.
La compagnie Lamento a imaginé Danser la faille sous la forme d’une conférence dansée avec une esthétique très forte combinant délicatesse et humour que j’espère pouvoir suivre le jeudi 21 novembre à 19 h à Guyancourt. Ce même soir la compagnie interprétera aussi Tout ce fracas qui éprouvera le corps et ses limites.
Humour encore qui cette fois se combinera avec l’écriture pour faire bon ménage entre Jean-François Auguste et jean Claude Pouliquen pour leur Conversation entre Jean ordinaires que l’on pourra découvrir à Coulommiers le 19 octobre ( mais aussi à Paris à Théâtre Ouvert).
Les HPI, autrement dits les surdoués, ne sont pas mis de côté. Zébrures, la face cachée des HPI a été écrit par Anne-Sophie Nédélec à partir de témoignages. La compagnie du Lézard bleu le jouera le vendredi 8 novembre à 20 h 30 à Buc (78).
L’autisme au sein d’une fratrie et la pression sociale de la normativité sont des sujets qui tiennent à coeur à Emma Pasquer. Voilà pourquoi elle a conçu Atypiques qui sera interprété devant un public de scolaires d’un lycée de Seine-et-Marne. Elle a la conviction que la sensation d’être différent est bien plus universelle qu’on peut le croire. Un second spectacle, Cabane, explore cette question à hauteur d’enfant. Avec sa compagnie, Les Eduls, elle rêverait qu’un (autre) festival programme une version hors les murs. Elle a aussi conçu Ma fille ne joue pas qui combine théâtre et danse et sera présenté à Chelles (77) le 3 décembre.
Le théâtre bilingue en langue des signes a bien entendu totalement sa place dans le festival, notamment avec Les mots qu’on ne me dit pas d’après le texte de Véronique Poulain (j’avais tant aimé ce livre, paru chez Stock) du 21 au 24 novembre à l’IVT.
Les scolaires sont conviés à Faraëkoto, le mardi 26 novembre à Plaisir (78) pour suivre un spectacle inspiré du conte Hansel et Gretel mêlant danse, mots et vidéo.
Place à la musique avec le concert de Luc Boland, le bruxellois demi-finaliste de The Voice, atteint du syndrome de Morsier qui réussit à vivre de son art. Sa chanson Je m’appelle Lou a fait le tour du monde. Il chantera et jouera du piano le 3 décembre aux Lilas (93).
Il y aura aussi du Nouveau Cirque avec l’époustouflant À 2 mètres dans lequel un acrobate atteint de mucoviscidose parvient à tenir debout (ou la tête à l’envers) grâce à l’aide de ses partenaires (et d’un apport en oxygène). J’espère le voir le mardi 3 décembre à 20 h 45 à l’espace Robert Doisneau de Meudon.
Il y aura aussi des visites théâtrales décalées, des marionnettes, du conte, de la comédie musicale, un bal…
Je rappelle que la fondation Goodplanet est elle-même un lieu qui fourmille de propositions passionnantes, aussi bien en intérieur qu’en extérieur, au 1 carrefour de Longchamp, 75016 Paris.
L’article est illustré par la photo de l’œuvre de Bordalo II, un artiste devenu une figure emblématique de l’art écologique contemporain. Le travail de cet artiste urbain né à Lisbonne relève autant de l’art que de la récupération. Il transforme des déchets (peneux, morceaux de plastique, débris métalliques) en oeuvres d’art provocatrices pour mieux pointer la double problématique de la surconsommation et de la pollution.
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