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La publication des articles est conçue selon une alternance entre le culinaire et la culture où prennent place des critiques de spectacles, de films, de concerts, de livres et d’expositions … pour y défendre les valeurs liées au patrimoine et la création, sous toutes ses formes.

dimanche 7 septembre 2025

On vous croit, le premier film de Charlotte Devillers et Arnaud Dufeys

On vous croit aurait bien mérité de figurer dans la compétition longs-métrages de Paysages de cinéastes mais le thème de cette année étant un cinéma de femmes la co-réalisation avec un homme le plaçait hors course.

Nous avons malgré tout eu la chance de le découvrir en avant-première et il a bouleversé le public.

Infirmière de formation, Charlotte Devillers s’est lancée dans la réalisation avec Arnaud Dufeys pour qui il s’agit aussi d’un premier long-métrage. Cinéaste et producteur, il a reçu des prix internationaux pour ses courts métrages, notamment Un invincible été (Berlinale 2024). Il travaille actuellement sur deux autres longs métrages : Faire surface et Les caniculaires.

Nous sommes en Belgique où certaines procédures sont légèrement différentes de ce qui se fait en France mais on en comprend l’essentiel, une fois que nous nous sommes habitués à l’accent de presque tous les personnages, ce qui ne devrait surtout pas instaurer la moindre distance car le sujet est gravissime. Personne ne peut l’ignorer, notamment depuis le si choquant Polisse de Maiwen, qui remonte tout de même à 2011. Et pourtant le public s’étonnait de la mention des statistiques à la fin du film, et qui, là, concerne directement nos enfants avec des chiffres qui sont, je le pense, en deçà de la réalité : En France chaque année 60 000 enfants sont victimes de violences sexuelles. Dans 81% des cas l’agresseur est un membre de la famille et c’est le père à 27%. Une plainte n’est déposée que dans 12% des cas d’inceste. Et seulement 1% fait l’objet de condamnation. (Source CIIVISE rapport novembre 2023).

Les familles protègent leur progéniture des rôdeurs et des prédateurs (qui font cependant la une des journaux) mais les mettent beaucoup moins à l’abri des désirs des proches. Il est donc évident que le danger est surtout intra-familial. Mais cette réalité est si dérangeante que même des professionnels de justice ont du mal à l’intégrer. Voilà pourquoi On vous croit est un film qui doit être largement distribué.

D’ailleurs la projection était synchrone d’une manifestation de femmes à Paris pour dénoncer que la garde des enfants maltraités soit quasi systématiquement accordée aux pères violeurs, au nom du sacro-saint principe de présomption d’innocence, ce que nous disait déjà Céline Salette, venue présenter l’année dernière au festival son premier film, Niki, dénonçant l’inceste que la peintre avait subi de son père, et surtout je dirais le déni du psychiatre qui va jusqu’à brûler la lettre d’aveu du violeur. La réalisatrice affirmait son intention de travailler le sujet en faisant un documentaire, afin d’avoir plus de poids dans la démonstration pour ébranler les consciences.

Charlotte Devillers et Arnaud Dufeys ont à l’inverse estimé que la fiction serait plus forte. Il faut dire que leur méthode consistant à rassembler acteurs professionnels (pour incarner les membres de la famille) et des personnes dont c’est le métier d’être avocats apporte cette dimension de réel qui est utile pour faire entendre ce qu’on a tendance à nier, et que résume parfaitement Alice, la maman des deux enfants concernés : Je pensais que nous serions protégés par la justice mais on dit que mes enfants et moi nous mentons plutôt que croire en ce qu’on a vécu.

La réalisatrice s’est aussi appuyée sur son expérience de femme, de mère et d’infirmière travaillant avec des victimes de violences sexuelles. Elle a beaucoup observé et écouté des patients, ce qui a nourri l’écriture comme la mise en scène et a su saisir les aspects les plus intimes de la réalité du tribunal de protection de la jeunesse. On ne peut plus attendre encore des années que les choses bougent et on espère que le cinéma aura ce pouvoir. La littérature en tout cas s’y emploie activement. Je ne citerai que La familia grande de Camille Kouchner, My absolute darling de Gabriel Tallent, L’enfant réparé de Grégoire Delacourt ou Triste tigre de neige Sinno …

Ça démarre avec une musique stressante comme des coups de poing. Hormis une première scène dans la rue, le temps de prendre un tramway pour se rendre au Tribunal de la jeunesse, et la dernière scène, tout se déroule dans une unité de temps et de lieu, dans le bureau de la juge. Ces scènes d’introduction et de conclusion sont construites de manière à nous immerger dans le parcours émotionnel de la maman, entre son sentiment initial de culpabilité et la réappropriation de son rôle de mère à la sortie de l’audience.

Le spectateur comprend qu’après quatre années de procédures, Alice va aujourd'hui se retrouver devant un juge et qu’elle va jouer sa dernière carte. La garde de ses enfants est remise en cause et doit les défendre pour les protéger de leur père avant qu’il ne soit trop tard. Il dispose d’un indice de taille, le titre du film On vous croit, mais sans avoir la certitude que ce "vous" inclut la mère et ses enfants. Ce pourrait tout aussi bien être le père. Les dialogues sont tellement bien écrits qu’on tremble jusqu’à la fin et que même à ce moment là on n’éprouve pas encore de soulagement.

Ce titre était là depuis l’origine du projet. C’était déjà un slogan qu’on pouvait lire dans la rue, tagué sur les murs en Belgique. Il est tout autant une marque de soutien et de reconnaissance à l’attention de toutes les victimes qu’une invitation pressante à considérer davantage la parole des enfants et des mères protectrices. Et ceci sans jugement de valeur puisque la mère elle-même reconnaît que dans un premier temps, elle a préféré ne pas y croire. "C’était trop violent. Trop inimaginable pour moi ".

Les enfants sont émouvants. La perception que nous avons du père est ambivalente. Laurent Capelluto (qui a hésité avant d’accepter ce rôle dans un contexte de prise de conscience collective en ce qui concerne les agressions sexuelles) parvient à nous faire douter, et sa détresse est palpable lorsqu’il réalise l’impact de ces actes par le fait qu’il ne peut plus offrir de cadeaux à ses enfants.

La mère est poignante. C’est un rôle sur mesure qui a été critique pour Myriem Akheddiou, avec laquelle Arnaud Dufeys avait déjà travaillé. Les avocats sont plus vrais que nature, terrifiants de rhétorique et d’éloquence. La juge doit constamment recadrer les interventions sans pour autant laisser paraître son opinion. Les dialogues sont très forts, alimentant une tension croissante au fur et à mesure des interventions, avec des révélations progressives. La caméra nous place en tant que témoin et juge de cette famille dont nous avons une seule certitude : elle est dysfonctionnelle. De très gros plans nous font ressentir la pression subie. Parfois le mari et son avocate sont flous, alors que madame est nette, mais muette. De longs silences nous font vivre une angoisse abyssale. On ressent tout à fait la peur de la mère. On est saisi par la scène centrale qui est une prise continue tournée en temps réel pendant 55 minutes, principalement en gros plan sur Alice qui subit la prise de parole des autres sans pouvoir intervenir. Et sa propre prise de parole dure tout de même environ 25 minutes. On est également perturbé par les conclusions de l’avocat des enfants qui semble caricatural tant il est dangereusement à côté de la plaque. On tremble que la juge ne le suive dans ses conclusions.

La solitude de cette magistrate est troublante. C’est néanmoins une figure féminine progressiste qui laisse la parole de manière prolongée et égalitaire à chacun, en empêchant les rapports de force et d’intimidation. Pour se préparer à ce rôle Natali Broods  a assisté à plusieurs audiences qui lui ont permis de s’imprégner de la gestuelle et des comportements caractéristiques, et elle a aussi rencontré une juge avec laquelle elle a pu échanger. Son jeu témoigne de la conscience de l’importance d’écouter la parole, de laisser s’exprimer les émotions et de recadrer les débordements de manière douce et respectueuse. Elle incarne l’importance de faire bouger les lignes dans une institution comme la Justice, où les évolutions se font souvent de manière lente et complexe. Et sans remettre en cause la présomption d’innocence il importait de montrer l’importance principe de précaution.

Il faut espérer que ce film puisse mettre en lumière la nécessité d’adapter les procédures judiciaires en matière d’abus sexuels sur mineurs, notamment en raccourcissant le processus. La longueur, la répétition et la multiplication des procédures judiciaires ne peuvent qu’amplifier les traumatismes. Les enfants n’ont pas le même rapport au temps que les adultes et les quatre ans qui sont mentionnés ici sont beaucoup trop longs. On en voit les conséquences médicales (Etienne est quasiment déscolarisé suite à une encoprésie majeure, de sentiment de révolte et surtout la fragilisation du lien entre la mère et ses enfants. Il est crucial d’admettre que pour protéger les enfants, il est essentiel d’épauler la personne qui les défend et les soutient.

Voici pour finir une suggestion de lecture avec le livre Défendre les enfants, écrit par le juge français Édouard Durand.

On vous croit, écrit et réalisé par Charlotte Devillers, Arnaud Dufeys
Avec Myriem Akheddiou (Alice, la mère), Laurent Capelluto (le père), Natali Broods (la juge), Etienne Ulysse Goffin (Etienne), Lila Adèle Pinckaers (Lila), Alisa Laub (avocate de la mère), Marion de Nanteuil (avocate du père), Mounir Bennaoum (avocat des enfants)
Festival de Berlin 2025 – Sélection Perspectives Mention Spéciale du Jury
Prix Sang Neuf, Prix Jury Jeune, Prix exceptionnel d’interprétation, Reims Polar 2025
Prix du Jury Pass Culture
Prix du Jury Jeune et Grand prix du Jury Festival Cinécitoyen de Vannes
Coup de coeur du Pass Culture
Prix du public Solveig Anspach, Ciné rencontres de Prades
Prix du public et Prix du jury 13 eme édition du festival Melies de Montreuil
En salles à partir du 12 novembre 2025

samedi 6 septembre 2025

La petite dernière, le troisième long-métrage réalisé par Hafsia Herzi

Nous avons eu la chance d’assister ce soir à la projection en avant-première de La petite dernière de Hafsia Herzi qui confirme une nouvelle fois qu’on peut être une très grande interprète et aussi une grande réalisatrice.

Tous les enfants sont différents. La maman de Fatima va en prendre conscience tandis que le spectateur mesure l’ampleur du conflit interne qui agite Fatima, la plus jeune des trois filles qui vivent dans cette famille soudée, régie par la bienveillance malgré un père un peu violent, sans mettre de pression excessive sur le fait religieux. On verra que cette mère sera capable de comprendre sa fille sans pour autant le lui dire avec des mots.

Le film commence par des ablutions et une scène de prière matinale qui témoigne des croyances de la jeune fille, encore lycéenne, et manifestement excellente élève. On la voit aussi exercer sa passion pour le football et hésiter à accepter les déclarations amoureuses d’un garçon qui la retrouve en secret (ce qui donne l’occasion de mettre en lumière une forme de romantisme masculin), et on pense alors que c’est par discrétion par rapport à sa famille. La seule ombre au tableau est son état de santé : elle est asthmatique.

Puis elle intègre une faculté de philosophie à Paris, passe de longues heures dans les transports en commun et découvre un tout autre monde que celui de la banlieue, en l’occurrence Clichy-sous-Bois. Alors que débute sa vie de jeune femme, à tout juste dix-sept ans, elle s’émancipe de sa famille et de ses traditions sans jamais les renier. Si Fatima questionne son identité elle le fait en cherchant à s’affranchir des opinions homophobes de son milieu tout en souhaitant concilier sa foi avec ses désirs naissants, fussent-ils pour des femmes.

La petite dernière est le troisième film de Hafsia Herzi, après Tu mérites un amour (Semaine de la Critique, 2019), dans lequel une jeune femme devait déjà gérer un deuil amoureux, et Bonne mère (Prix d’ensemble Un Certain Regard 2021) qui racontait les difficultés d’une femme de ménage quinquagénaire issue de l’immigration et veillant sur ses proches.

Ici, nous avons à la fois la jeune fille et la mère, dans un tout autre contexte, mais qui n’est pas si éloigné de ce que la réalisatrice a pu connaitre dans les quartiers nord de Marseille où elle a grandi. Ce qui a déclenché son désir d’adapter le roman de Fatima Dass c’est d’une part la justesse du propos tout autant que le fait qu’il n’ait jamais été traité au cinéma qui jusque là s’était plutôt focalisé sur la quête d’identité de jeunes garçons.

C’est Hafsia Herzi elle-même qui a écrit le scénario, comme elle l’avait fait pour ses deux premiers films, à ceci près que cette fois elle a suivi la trame d’un roman. Elle a d’ailleurs fait lire chaque version à l’autrice. Le roman, qui s’intitulait lui aussi La petite dernière, est paru en août 2020, aux éditions Noir sur Blanc, dans la collection Notabilia qui promeut des romans dont le style et le ton sont choisis pour leur originalité et leur engagement. Celui-ci avait été largement salué par la critique littéraire.

Fatima Dass disait alors que son roman répondait à un besoin, une urgence, une nécessité et s’être largement inspirée de son expérience sans pour autant avoir écrit une autobiographie fidèle. Bien entendu il y a beaucoup d’elle dans cette histoire. Elle a connu la fierté de sa mère quand elle a été reçue au baccalauréat et la propre mère d’Hafsia Herzi a elle aussi encadré le diplôme … comme beaucoup de parents n’ayant pas suivi d’études ont pu, ou pourraient, le faire. Un spectateur attentif pourra lire le nom de Fatima Dass sur le document. L’émancipation par l’école et la littérature est un grand classique. Et pour ceux qui s’interrogent à propos de l’affiche du film, elle reprend un moment devant le mur de la Grande mosquée de Paris où Fatima est allée demander conseil à un imam au cours d’une scène fort intelligemment construite.

Ce qui l’est moins c’est de ne vouloir renoncer à aucune de ses identités, être française, d’origine maghrébine, musulmane (et croyante), tout autant que lesbienne, quand bien même ce serait un péché  (d’où la colère de Fatima à l’égard de son camarade de classe qui lui, assume son orientation sexuelle). Fatima Dass s’est clairement exprimé en interview à ce sujet : l’homosexualité est un péché dans sa religion mais on n’est pas parfait …

Il était important que cette parole soit portée à l’écran mais ce qui est très réussi c’est surtout que, contrairement à ce que nous sommes habitués à voir, à savoir des films à thèse développant des situations de conflit, désaveu familial, caricatures et autres catastrophes, on ne nous montre pas de drame. C’est une vision de tolérance envers ce difficile chemin vers la réalisation de soi qui, j’ai envie d’ajouter, touche tout le monde. Espérons que ce film contribue à faire évoluer les mentalités, en particulier dans les milieux pratiquants, et ce quelle que soit la religion.

Parmi les acteurs on remarque Ji-min Park qui était à l’affiche hier soir de Vie privée, Mouna Soualem que l’on a déjà vu dans le premier film de la réalisatrice, et Gabriel Donzelli qui fait ses débuts au cinéma, après une entrée remarquée sur la scène théâtrale parisienne. Et bien entendu Nadia Melliti repérée lors d’un casting sauvage, et ex-footballeuse (comme l’héroïne qu’elle incarne) qui a reçu le très mérité Prix interprétation à Cannes (encore une fois décerné à un acteur dont c’est le premier rôle comme Abou Sangaré fut primé du César de la Meilleure révélation masculine dans L’histoire de Souleymane qui avait été triplement primé l’an dernier à Paysages de cinéastes).

On devrait bientôt voir un quatrième film de Hafsia Hefsi qui travaille déjà à une autre adaptation, celle du premier roman de Leila Slimani Dans le jardin de l’ogre.

La petite dernière, écrit et réalisé par Hafsia Herzi, d’après le livre éponyme de Fatima Dass, éditions Noir sur Blanc, collection Notabilia, publié en août 2020
Avec Nadia Melliti, Ji-min Park, Louis Memmi, Mouna Soualem, Melissa Guers, Gabriel Donzelli …
Sortie nationale le 22 octobre 2025

vendredi 5 septembre 2025

Vie privée, un film policier français réalisé par Rebecca Zlotowski

Présenté hors compétition au Festival de Cannes 2025, le nouveau film de Rebecca Zlotowski est à l’affiche en avant-première de nombreux festivals. J’ai découvert Vie privée le 5 septembre en cette soirée d’ouverture en plein air de Paysages de cinéastes dans le parc de la vallée de Chateaubriand en raison d’une météo finalement favorable.

Auparavant nous avons grandement apprécié le récital de la merveilleuse chanteuse interprète et mélodiste Ella Rabeson qui interpréta quelques standards de jazz.

Carline Diallo, déléguée générale du festival, nous a prévenus que nous allions tout au long de la semaine voir un cinéma qui questionne et qui dérange. Nous n’avions alors pas mesuré combien nous aurions de prises de conscience bouleversantes comme je le dirai en conclusion au moment de l’annonce du palmarès.

Si Vie privée a quelque peu secoué les spectateurs, ce n’est pas parce qu’il est un film à proprement parler dérangeant mais parce qu’il provoque la surprise par l’enchaînement de scènes peu classiques et un scénario pour le moins déroutant. C’est en effet assez osé de composer un personnage censé être solide de par sa profession de psychanalyste mais qui devient irrationnel.

Lilian Steiner (Jodie Foster) est une psychiatre reconnue dans sa profession. Elle n’est pas censé laisser transparaître ses émotions mais au contraire aider ses patients à surmonter les leurs. Néanmoins, lorsqu’il s’agit d’un cas de force majeur (la disparition tragique d’une femme -Paula Cohen-Solal- avec qui la relation professionnelle s’est construite depuis neuf ans) c’est peut-être admissible. Finalement cela laisse apparaître l’humanité derrière le masque des certitudes.

C’est le sixième long métrage de la réalisatrice française Rebecca Zlotowski mais sa première oeuvre dans un style policier. Elle a écrit le scénario original avec Anne Berest (ci-contre, photographiée lors de sa venue à Châtenay dans le cadre d’un débat que j’avais animé sur les premiers romans en 2011) et Gaëlle Macé, laquelle avait déjà collaboré au scénario de Grand Central (2013).

Le souci est peut-être que le spectateur ne sait pas trop s’il s’agit vraiment d’une comédie de mœurs se moquant des psys ou d’un véritable thriller. Des séquences d’une fantaisie osée comme les moments d’hypnose par une charlatane (qui a malgré tout d’excellents résultats et qui a l’honnêteté de ne pas réclamer d’argent) ou encore les coups de sang de Pierre Hallan, le patient fumeur (Noam Morgenszten) sans parler des agissements de Simon Cohen-Solal après l’enterrement de sa femme, alternent avec d’autres où la tension et le suspense sont intenses. Et d’autres encore où le cadrage et les lumières appartiennent davantage au registre du rêve. Virginie Efira est souvent une Paula évanescente dont on doute de la réalité.

Pourtant la photographie de George Lechaptois, qui avait assisté Rebecca Zlotowski pour tous les films qu'elle avait réalisés jusqu'à présent, est admirable et nous offre des plans d’une beauté intense, dans des décors que Katia Wyszkop a rendu automnaux, avec une forte dimension onirique.

Chacun appréciera surtout le jeu des acteurs. A commencer par la performance de Jodie Foster qui interprète en français Lilian Steiner, même si on sait que l’actrice parle cette langue parfaitement. Elle fut à l’affiche de plusieurs films français comme Le Sang des autres (1984) de Claude Chabrol ou Un long dimanche de fiançailles (2004) de Jean-Pierre Jeunet mais elle joue pour la première fois en français dans Vie privée et on peut parier que ce ne sera probablement pas la dernière.

Daniel Auteuil campe ici l’ex-compagnon de Lilian, entrainé par celle-ci dans son enquête délirante sur le présupposé meurtre de Paula et nous offre de jolis moments. Sophie Guillemin est une drôlissime Jessica Grangé, hypnotiseuse. Et Mathieu Amalric est le mari troublant de la patiente décédée, que le spectateur soupçonne sans lui accorder le bénéfice de la présomption d’innocence, influencés que nous sommes par les actualités autour des féminicides.

Les apparitions de Virginie Efira ne m’ont pas convaincue. J’en attendais sans doute plus de sensibilité dans l’expression tant elle fut merveilleuse dans le précédent long-métrage de Rebecca Zlotowski Les enfants des autres. Je peux admettre que la réalisatrice ait souhaité la diriger différemment.

On remarquera que le film comporte des scènes qui, sans être des hommages appuyés à des films qui ont déjà été cultes dans le domaine du thriller, les évoquent tout de même avec subtilité, notamment Vertigo d’Alfred Hitchcock qui traite une situation semblable, entre un policier et une femme suicidaire. Également à la récente série française En thérapie. Les cinéphiles feront aussi des rapprochements avec Le silence des agneaux ou Sommersby dans lesquels on a pu voir Jodie Foster.

Enfin sur le plan musical Vie Privée commence avec la musique de Psycho Killer, le tube sorti en 1977 par les Talking Heads décrivant les pensées d'un tueur en série dans un monologue qui donne bien le ton du film : I can't seem to face up to the facts (Je n'arrive pas à faire face aux faits), I'm tense and nervous and I can't relax (Je suis tendu et nerveux et je n'arrive pas à me détendre).

En fin de compte Vie privée est un film d’une grande densité, certes déroutant, mais qui, du coup, mérite d’être revu pour mieux en saisir toutes les subtilités.

Vie privée réalisé par Rebecca Zlotowski
Scénario d’Anne Berest, Gaëlle Macé et Rebecca Zlotowski ; Photographie de George Lechaptois
Musique de ROB (Robin Coudert) ; Décors de Katia Wyszkop
Costumes de Laurence Glentzlin et Bénédicte Mouret
Avec Jodie Foster (Lilian Steiner), Daniel Auteuil (Gabriel Haddad), Virginie Efira (Paula Cohen-Solal), Mathieu Amalric (Simon Cohen-Solal), Vincent Lacoste (Julien Haddad-Park), Park Ji-min (Vanessa Haddad-Park qu'on reverra dans La petite dernière, également présenté en avant-première au festival), et puis Luàna Bajrami, Noam Morgensztern, Sophie Guillemin, Frederick Wiseman, Aurore Clément, Irène Jacob  …
Présenté le 20 mai 2025 (Festival de Cannes 2025) mais sortie nationale prévue le 26 novembre 2025

jeudi 4 septembre 2025

La Realidad de Neige Sinno

Neige Sinno est née en 1977 dans les Hautes-Alpes. Elle a enseigné la littérature au Mexique pendant presque vingt ans.

Elle vivait alors, à partir de 2005, avec sa fille et son compagnon, dans le charmant village de Pátzcuaro, dans l’Etat mexicain du Michoacán, que j’ai visité en 2019 et dont je garde un excellent souvenir. Le lac du même nom est celui qui a servi de modèle au dessin animé Coco et il est vrai qu’on y célèbre chaque année la fête des morts avec faste.

Si Neige Sinno est revenue en France pour s’installer au Pays Basque, elle reste imprégnée de ses années passées au Mexique. La Realidad est le premier livre qu’elle a écrit, initialement en espagnol, mais c’est avec le second, Triste tigre, publié auparavant, qu’elle a acquis une très forte notoriété.

Ce titre de La Realidad est judicieusement choisi parce qu’il évoque pour nous immédiatement la question du vrai et de l’inventé, même s’il provient en fait du nom d’un village situé dans les montagnes du Chiapas, où vivent en communauté des peuples indigènes à l’origine du soulèvement zapatiste dans les années 1990.

C’est un endroit où l’autrice a tenté de se rendre en compagnie de son amie espagnole Maga en 2003. Le voyage n’a pas abouti, mais le mouvement politique en question n’a jamais quitté ses pensées. Je crois d’ailleurs que quiconque est allé au Mexique partagera cet état d’esprit, particulièrement s’il a traversé les territoires où des populations entières font perdurer leurs croyances et leur culture (je pense en particulier dans les Chiapas, à Chomula, à la région de Ocosingo, et même à la ville de San Cristobal où j’ai passé les fêtes de Noël en 2019). Je donne, à la fin de cet article, quelques clés pour mieux comprendre le contexte.

Neige Sinno a d’abord écrit plusieurs fictions sur le sujet et a même envisagé de le proposer à son éditeur sous forme d’essai, ce qui aurait pu l’entraîner à devenir donneuse de leçon alors qu’elle ne veut en aucune façon se prétendre spécialiste du zapatisme comme de l’histoire du féminisme en Amérique. Voilà pourquoi elle s’autorise une certaine subjectivité et ose une non-fiction à la première personne du singulier d’une expérience de vie autobiographique qui se déroule presque sur une vingtaine d’années (en démarrant en 2003). Et quand bien même elle est très lisible, le travail sur la structure du texte est ultra minutieux et s’inscrit dans une dimension expérimentale, qui supporte facilement plusieurs lectures, faute de quoi on ressentira le fameux Ustedes no entienden nada”, vous ne comprenez rien, auquel elle a été confrontée.

La Realidad commence comme un récit de voyage mais il est davantage un récit initiatique et hybride, devenant un roman de formation en relatant le questionnement sur la façon de faire pour se situer d’une manière juste et vivable dans ce monde chaotique où on construit sa place dans le collectif, une fois qu’on s’est débarrassé de sa culture livresque.

On pourrait croire qu’il ne s’agit que de l’expérience de l’autrice mais elle invite le lecteur à douter en l’incluant dans une sorte de conversation s’il est encore là. La question de la place, celle de Neige Sinno comme celle du lecteur est centrale avec la vie, et donc la réalité.

On suit de multiples évolutions. La double culture est très complexe. Et on comprend qu’elle n’avait par exemple pas prévu du tout de devenir féministe comme la vie et les amitiés l’y ont conduite. Elle découvre une espèce de solidarité dans les luttes pour sortir de ce qui opprime, et donc s’affranchir de l’isolement imposé par la stratégie de domination de l’oppresseur, qu’il s’agisse de l’historique domination coloniale ou de genre, ce qui, par le biais de l’empathie, conduit à avoir une position politique, même si c’est par le biais de l’écriture et le désir du collectif.

Si notre héritage philosophique complique notre relation à l’autre, les cultures indiennes à l’inverse permettent aux femmes d’être moins seules. Néanmoins le réel est toujours une limite et parler d’une expérience, c’est déjà la trahir. On ne peut jamais prétendre détenir la vérité, juste s’en approcher, surtout quand on n’a pas le même langage et qu’on pense que nos propres mots sont les plus justes. Malgré toutes ces réserves n’oublions jamais que la première demande des opprimés est d’avoir le droit d’exister, et que donc la parole doit devenir soldat pour ne pas mourir dans l’oubli.

Acceptons alors de dire que ce livre est un récit de voyages dans la réalité ou vers la réalité.  Combien de fantômes murmurent encore dans ce livre ?” se demande la narratrice à la fin. Celui du mystérieux leader zapatiste, le sous-commandant Marcos, ceux des Indiens en lutte du Chiapas, celui d’Antonin Artaud qui en 1936 fit un voyage énigmatique au Mexique, mais aussi les esprits d’une existence en quête d’un lieu autre, et le fantôme de la réalité, celui de nos blessures et de nos illusions, avec une tonalité de magique, indissociable de l’âme mexicaine.

C’est sans doute d’avoir participé à une de ces rencontres féministes au Chiapas, où l’on parla -strictement entre femmes- des violences machistes et des trois mille féminicides annuels au Mexique qu’elle a décidé de franchir le pas et d’écrire son propre témoignage, Triste tigre, ce qui quelque part justifie que je ne le lise qu’après le présent livre.

La Realidad de Neige Sinno, aux Editions P.O.L, en librairie depuis le 6 mars 2025
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mercredi 3 septembre 2025

Quelques essentiels de la Paris Design Week du 4 au 13 septembre 2025

(Mise à jour 24 septembre 2025)
Choisir une exposition ou une rencontre avec des artistes pendant la Paris Design Week n’est pas très facile tant les propositions abondent. Mais comme elles sont toutes qualtitatives l’exercice ne comporte par de risque. Néanmoins je vous recommande particulièrement celles que j’ai vues et qui pourraient bien devenir les incontournables de l’édition 2025. Elles se poursuivent jusqu'au 13 septembre 2025. Et je souhaite particulièrement que cet article vous incite à scruter le programme 2026 à sa sortie si vous avez manqué la présente édition.

J’ai choisi, pour illustrer cet article, une photo de l’installation d’Aude Franjou, les "Coraux de la Liberté" qui se déploie à l’intérieur de la célèbre colonne de Juillet, place de la Bastille (réservations auprès de Maison Parisienne). Y entrer fut un privilège et j’en reparlerai plus loin.

L’expérience de design immersif et inspirant planifié tout au long de cette journée d’avant-première dédiée à la presse française a commencé, dans un autre quartier, place de la Concorde, et célèbre l'imaginaire créatif de Jeremy Pradier-Jeauneau qui avait installé son Labyrinthe à l'Hotel de la Marine
On remarque les Figures chimériques 1,2,3,4 qui sont des sculptures lumineuses en faïence blanche et nacrée réalisées cette année par Johanna de Clisson, représentée bien entendu par la galerie Pradier-Jeauneau. Le mannequin est habillé par la marque Dilara Findikoglu, avec un top Vénus Armour composé de soie, coquillages, perles et épingles. Le pantalon est en cuir de python, percé d’œillets. Les chaussures sont de Manolo Blahnik Vintage /FW25.
J’ai été bouleversée par l’installation monumentale des 577 chaises de l’hémicycle citoyen disposées en arc de cercle à l'Hôtel de Soubise qui abrite les Archives nationales par le Studio 5.5 et “Le Festival du Monde”, en corrélation avec la conservation dans cet endroit de la Déclaration des Droits de l'homme et bien entendu le nombre de sièges de députés à l’Assemblée nationale. Chaque chaise, monocoque en bois, récupérée en partenariat avec Le Boncoin, a été customisée par Claire Renard et Jean-Sébastien Blancpour défendre les valeurs de démocratie et de liberté d'expression. Ces pionniers de l'upcycling ont procédé par découpe et peinture aérosol. Chacune est unique, humanisée et signée à la main.
Les 577 mots n’ont pas été choisis au hasard mais pour questionner notre démocratie et la disposition prend tout son sens. Par exemple Omerta (sur la chaise noire) est entre Coalition et Satire. On repèrera d’autres contrastes comme Pacs à côté de Mariage, ou encore Amour, Gloire et Beauté. Gilet figure à la peinture noire sur un dossier … jaune, avec humour. Espérons qu’un tel dispositif soit susceptible de restaurer un intérêt pour la politique.
Pour que cet hémicycle citoyen n’ait rien d’éphémère, et que les visiteurs puissent en ramener un morceau chez eux, chacune des chaises qui le compose est vendue aux enchères par Drouot Estimations sur le site Drouot.com jusqu’au 21 septembre avec une mise à prix de 100€. Les bénéfices seront partagés entre Le festival du monde et l’association La Chance.

mardi 2 septembre 2025

Les Champagnes Vaucelle, six cuvées d’exception conçues par Thomas Cheurlin

J’avais goûté -en toute modération- une nouvelle marque de champagne au dernier salon Wine Paris en février dernier. Vaucelle était déjà bien aboutie et j’avais très envie d’en apprendre davantage sur cette gamme premium de la Maison Thomas Cheurlin et aussi sur la philosophie et le savoir-faire du viticulteur.

J’ai découvert un homme passionné (ci-dessous, à droite, avec Jeremy Bovy, responsable commercial France et export), leader incontestable d’une équipe performante, très impliquée dans le développement de cette marque très prometteuse, composée aujourd’hui de six champagnes, adaptés à tous les types de palais et moments de consommation, aussi bien des champagnes classiques que des cuvées ayant chacune leur personnalité (vieillissement sous-bois, cépage rare, vieillissement sur lattes plus long, millésimé…).
Un tel résultat ne peut sans doute être l’apanage que d’une maison solidement ancrée dans l’histoire viticole de son terroir. Celle-ci s’est transmise de père en fils depuis dix générations et elle est reconnue sous le nom de Cheurlin pour ses cuvées raffinées et son engagement à préserver un patrimoine vinicole exceptionnel, alliant savoir-faire ancestral et modernité. L’implantation de cette famille dans la Côte des Bar, à Celles-sur-Ource, remonte à la fin du XVIIe siècle, avec Joseph Cheurlin, à une époque où les vignerons travaillaient principalement pour des maisons plus grandes ou pour fournir du vin tranquille.

Edmond Cheurlin œuvra avec d’autres vignerons pour la reconnaissance de leur région et l'appellation d'origine. L’avènement de la méthode champenoise a permis d’évoluer vers la production de champagne après la seconde guerre mondiale.  La création de la marque revient à son fils Raymond Cheurlin (1909-1994) qui commença à vendre aux particuliers. Son fils André Cheurlin (1934-2020), un des grands-pères de Thomas, a investi dans les plus beaux coteaux et agrandi le patrimoine familial.

Aujourd’hui, la Maison reste un acteur familial et indépendant, gérée par les descendants de la lignée dont Thomas Cheurlin est un représentant exemplaire. Elle se distingue par son engagement envers des pratiques respectueuses de l’environnement, favorisant une viticulture durable. (Certification HVE3 et VDC). Nous apprendrons que 10% de la superficie est cultivée en bio, même s’il n’y a aucune communication sur cette caractéristique. Du moins pas encore.

Très étonnante est la collaboration avec l’humoriste Raphaël Mezrahi pour la création d’un champagne 100 % végan, en évitant l’emploi de produits d'origine animale pour la clarification, utilisant plutôt des protéines végétales à base de petits pois (ce qui finalement est devenu la seule technique pratiquée chez Cheurlin).

Les vendanges sont achevées depuis jeudi dernier mais il n’était pas pensable de ne pas commencer cette journée par quelques pas dans les vignes en admirant le splendide paysage de cette Cote des Bar où Celle-sur-Ource fut longtemps le plus grand village champenois avec 500 habitants dont 130 récoltants et une cinquantaine de marques. La Maison Cheurlin et sa vingtaine d’employés à plein temps exploitent 30 hectares et en vinifient 20 de plus. Les effectifs s’accroîent pour vendanges de 60 coupeurs, tel est le nom donné aux vendangeurs.
Le panorama de la Côte des Bar est à couper le souffle. On remarque le village de Celles-sur-Ource, sur la gauche et devant nous les vallées de Laignes, de la Seine, de l’Arce et de l’Ource. Thomas se souvient de la dernière fête du champagne à s’être déroulée dans cette vallée, en 2023, offrant l’occasion de déguster vingt champagnes sur le week-end. Il faudra patienter jusqu’en 2030 pour la prochaine puisque le tour revient tous les 8-10 ans.
On n’a pas eu à déplorer de maladie se réjouit le viticulteur en pointant du doigt dans le lointain les feuilles brunies par une attaque de mildiou. On peut être très satisfait de cette récolte marquée par un bon degré d’alcool et une belle acidité, malgré deux épisodes de canicule qui ont inévitablement provoqué un peu d’échaudage. Thomas Cheurlin se rappelle d’épisodes délicats comme la gelée de la vallée de la Seine l’an dernier.
Le Pinot noir (dont on peut trouver encore quelques rares petites rafles bien mûres et délicieuses) occupe 60% et le Chardonnay presque le reste. Les cépages anciens autorisés par le cahier des charges de l’AOC, ont été replantés comme l’Arbanne, un cépage blanc, plutôt tardif, susceptible de donner des vins vifs, élégants et aromatiques, avec une belle richesse en alcool. Issu d’un croisement naturel le Petit Meslier conférera des notes fumées et des arômes d'agrumes. Le Pinot Gris (ou Fromenteau) est un mutant du Pinot Noir, et donne des vins riches, puissants, avec des arômes de fruits secs et de fumée, d'où son surnom  de "Enfumé". Enfin le Pinot Blanc (ou Blanc Vrai), mutant du Pinot Gris (et donc du Pinot Noir) apporte de l'ampleur, de la puissance et des notes de fruits secs. Il y a aussi le Voltis, un cépage blanc particulièrement résistant aux maladies comme le mildiou et l’iodum, qui le rend performant en terme de besoin de traitements phyto-sanitaires et qui devrait théoriquement bien supporter le réchauffement climatique.

Thomas Cheurlin est expérimentateur dans l’âme et rêve bien entendu de voir chacun des cépages en micro-cuvées ou dans des assemblages particuliers, sous la marque Vaucelle qui devrait compter 120 000 bouteilles d’ici 2/3 ans, alors que la maison familiale Cheurlin en produit 500 000 dont environ un quart part pour l’exportation vers notamment l’Italie, la Belgique, le Japon et les USA. L’annonce de la hausse des taxes américaines a provoqué une accélération des transactions par prudence si bien que cette année l’ensemble des ventes a été assuré sur les trois premiers mois.

Arrêtons-nous un instant sur ce nom qui a été choisi et qui a pris tout son sens. Vaucelle signifie en effet "Petite Parcelle" ou "Vallon/Vallée" en vieux champenois, ce qui s’accordera particulièrement avec les cuvées qui seront parcellaires. Il contient le mot "celle", qui fait directement référence à Celles-sur-Ource, le village d’origine de la famille. C’est également le nom d’une abbaye cistercienne, fille de l’Abbaye de Clairvaux et soeur de l’Abbaye de Mores à Celles-sur-Ource, ayant un lien avec l’histoire du vignoble champenois et de la Côte des Bar.

Déjà en 2000, Thomas Cheurlin avait manifesté la volonté d’orienter une gamme vers la gastronomie avec une présence sur des tables d’institutions et sur le marché international. La marque Comte de Cheurlin en fut le premier témoignage à partir de 2005. Aujourd’hui, Vaucelle va beaucoup plus loin tout en étant la concrétisation d’une devise simple comme l’affirme son créateur :  "l’élaboration de champagnes authentiques, proches de la nature et de nos terroirs."

Et à propos de terroir, il s’agit toujours d’un sol calcaire jurassique kimméridgien, limono-argileux, où le climat continental favorise la maturation optimale des raisins. Il va de soi que les raisins ne proviennent que du vignoble et des parcelles appartenant à Thomas Cheurlin car il est récoltant-manipulant pour Vaucelle. En termes de cépages ce sont les traditionnels champenois, Pinot Noir et Chardonnay mais aussi une part de Blanc Vrai (Pinot Blanc) … en attendant l’emploi d’autres cépages rares et anciens.

lundi 1 septembre 2025

Mon gâteau préféré, un film de Maryam Moghadam et Behtash Sanaeeha

Je voulais voir Mon gâteau préféré réalisé par couple de cinéastes iraniens Maryam Moghadam et Behtash Sanaeeha, dont c’est le second long-métrage, mais j’avais loupé son passage au cinéma et je l’ai vu grâce à la vidéo.

Ce film aborde plusieurs sujets sensibles, à commencer par le mode de vie en Iran aujourd'hui et notamment la privation de liberté du fait de la crainte constante qu’un voisin malveillant ou jaloux ne dénonce à la police un comportement inapproprié selon les lois du pays. Et aussi la solitude affective, le vieillissement, le besoin de réalisation de soi et l'amour chez les seniors. Avec parfois quelques clins d’œil à la situation des femmes dans ce pays : Nous voulions raconter la réalité de nos vies, c'est-à-dire ces choses interdites comme chanter, danser, ne pas porter le hijab à la maison, ce que personne ne fait chez soi " avait déclaré Maryam Moghaddam.

Il met en scène Mahin, une septuagénaire qui, bravant tous les interdits, décide de bousculer sa solitude car elle vit seule à Téhéran, de rompre sa routine et de réveiller sa vie amoureuse en provoquant une rencontre avec un chauffeur de taxi.

En résumé, il s’agit d’un hymne à l’émancipation féminine derrière une mise en scène apparemment inoffensive. On pouvait parier que le régime répressif du pays ne le tolérerait pas. De fait, le couple de réalisateurs a été assignés en justice en Iran, ce qui n’a pas empêché, on s’en doute, que leur film soit sélectionné en compétition dans plusieurs festivals avant de sortir dans de nombreux pays à travers le monde, et notamment à Berlin où leurs comédiens principaux, Esmael Mehrabi et Lily Farhadpour présentent leur photo le soir de la première du film (image Getty).
A noter que le duo avait déjà eu des soucis avec le régime iranien. Leur premier long métrage, Le Pardon, sorti en salles en 2021, racontait l’histoire d’une erreur judiciaire et d’une femme dont la vie est tragiquement bouleversée quand son mari est condamné à mort et qu’elle se retrouve seule avec leur fille à élever. Cette œuvre déjà engagée, était un des premiers films mettant en scène un homme du régime qui, soudain, n’y croit plus. On imagine le coup de tonnerre qu’il a provoqué. Maryam et Behtash ont eu à subir un procès qui a duré très longtemps. Ils ont fini par s’en sortir. Mais aujourd’hui, ils vivent dans l’attente d’un nouveau jugement pour Mon gâteau préféré.

Et pourtant celui-ci est plus léger malgré un fond qui reste grave. Mais il prend d’abord la forme d’une apparente comédie romantique autour de cette femme et de ses amies. Ne pas vouloir finir sa vie seul(e) est un sujet finalement universel et non tendancieux. C’est un paravent pour montrer, de façon presque documentaire, le poids du quotidien en Iran, particulièrement dans les rues et avec le voisinage. On ne se sent jamais tranquille même chez soi, risquant par exemple à tout moment une dénonciation pour tapage si on écoute de la musique un peu fort. Et la fin n’est pas celle à laquelle on s’attendrait s’il s’agissait d’un film américain …

Il faut savoir que le financement d’un film dans un tel pays suppose une grande confiance de la part des producteurs, en l’occurrence publics et privés, très majoritairement européens. Le tournage de Mon gâteau préféré a eu lieu pendant les grandes manifestations dénonçant les violences exercées contre les femmes par les autorités, après la mort de Mahsa Amini, en septembre 2022. Cet évènement était au coeur des Graines du figuier sauvage comme il avait auparavant été le point de départ du livre Badjens.

On peut comprendre aisément que si les scènes tournées en intérieur n’ont pas trop posé de problème celles qui ont été filmées en extérieur, et donc nécessitant une autorisation, ont mis la puce à l’oreille aux autorités qui ont confisqué les rushes (mais dont une copie se trouvait déjà en sécurité en France). une première partie de la post-production avait été engagée avec les réalisateurs mais après le raid, étant assignés à résidence dans leur pays, tout a dû être achevé à distance, ce qui n’était pas simple s’agissant des plans-séquences qui sont longs, et cela a demandé une année de travail.

Maryam Moghadam et Behtash Sanaeeha ont été condamnés depuis par un tribunal révolutionnaire de Téhéran au motif que leur film a été considéré comme une violation des strictes lois iraniennes sur la censure. Dans les scènes intérieures, l'actrice principale Lili Farhadpour ne porte pas de voile. Les deux réalisateurs ont donc été accusés pour "propagande contre le régime" de Téhéran et "obscénité", avec trouble de l'opinion publique. La décision a été rendue le 1er mars 2025 annonçant une condamnation de 14 mois de prison avec sursis et à la confiscation de leur matériel de tournage. Ils ont également été inculpés pour la projection "illégale" du long-métrage, sans autorisation de distribution des autorités iraniennes.

Le tribunal iranien a également condamné le producteur de Mon gâteau préféré, Gholamreza Mousavi, à la même peine que les réalisateurs, à laquelle a été ajoutée une amende de 400 millions de rials iraniens (8 240 euros).

Lors d’un entretien, Mohammad Rasoulof, le réalisateur des Graines du figuier sauvage, s’est exprimé sur la situation de ses deux confrères en attirant l’attention sur le fait que "cette atmosphère sera à l'origine d'une série de nouveaux problèmes, car dans le monde actuel, il n'est pas possible de contrôler le contenu, comme le fait le régime iranien. Il en résultera une répression de plus en plus forte et de nouveaux actes de subversion."

Mon gâteau préféré
Réalisation et scénario : Maryam Moghadam et Behtash Sanaeeha
Avec Lily Farhadpour et Esmaeel Mehrabi …
Prix du jury œcuménique et prix de la critique internationale à la 74e Berlinale
Grand Prix du jury au Festival du film romantique de Cabourg en 2024.
Sortie le 5 février 2025

vendredi 29 août 2025

Jack et Nancy, les plus belles histoires de Quentin Blake

Quentin Blake est un de mes auteurs de littérature jeunesse préférés.

Comme j’avais aimé suivre les aventures à bicyclette d'Armeline Fourchedrue !  J’adore son style tendre et humoristique, qui s’accorde si bien à des histoires un peu fantastiques qui prouvent que l’imagination et la confiance peuvent tout rendre possible.

Et j’aime ses coups de pinceau. Savez-vous à ce propos qu’il fut l’illustrateur des albums de Ronald Dahl ?

On raconte que c’est quand le vent se lève que naissent les meilleures histoires ! C’est ainsi que Jack et Nancy s’envolent, accrochés à un parapluie magique, et qu’Angèle rencontre un minuscule oisillon tombé du ciel lors d’une tempête qu’elle appelle Petit chou.

Mark Evans et Massimo Fenati ont scénarisé les deux contes tirés des albums de Quentin Blake, où l’on parle d’amitié, de découvertes et de départs… mais aussi du bonheur de rentrer chez soi.

Car contrairement à l’intitulé de ce programme cinématographique qui focalise sur la première partie, ce n’est pas une mais deux histoires de 26 minutes qui sont proposées en dessin animé. Jack et Nancy est la première, adapté d’un roman graphique de 1969.
Le frère et la soeur sont des blondinets très imaginatifs, qui ont soudain l’idée de se suspendre à un parapluie. Le vent est fort et l’objet que l’on se transmet dans cette famille de génération en génération est bien entendu magique. Les deux aventuriers vont pouvoir réaliser leur rêve de partir au bout du monde pour visiter une île extraordinaire, y rencontrer des animaux fantastiques et récolter des fruits et des piments exotiques.
Les plus beaux voyages ne peuvent être éternels. Bientôt, leurs parents et leur maison manquent aux deux enfants… Et s’il était temps de rentrer et de raconter leur incroyable aventure ? Il faudra sans doute utiliser le parapluie autrement, comme une barque peut-être.
Petit chou est la seconde histoire. Elle est adaptée d’un roman graphique plus récent, datant de 2002. Angèle est une vieille dame au caractère joyeux qui ne se passionnait jusqu’ici que pour le jardinage et la pâtisserie. Elle est jusque là très heureuse de régaler ses amis ou ses rencontres du parc de ses délicieux gâteaux. Un jour de grand vent, elle trouve un minuscule oisillon tombé du ciel.
Elle le recueille, lui fabrique un nid douillet, le dorlote de manière obsessionnelle et le nourrit plus encore de choses gourmandes choisies en fonction des évènements. Bientôt le Petit chou devient bien trop grand pour vivre à l’intérieur d’une maison. Cette vieille dame est attachante mais ne serait-il pas, à l’inverse de ce qu’ont fait Jack et Nancy, temps de quitter le foyer ?
Ces deux courts-métrages d’animation sont pleins de charme et d’humour absurde, autorisant de multiples rebondissements. D’autres suivront bien sûr. Mais pour le moment ce sont ces deux-là que l’on pourra faire découvrir très bientôt aux enfants au cinéma.

Jack et Nancy, les plus belles histoires de Quentin Blake, Un film de Gerrit Bekers et Massimo Fenati avec la voix d'Alexandra Lamy
À partir de 4 ans 
Sortie en salles le 15 octobre 2025
Et comme un bonheur n’arrive jamais seul, le livre inédit Jack et Nancy de Quentin Blake sortira en librairie le 2 octobre 2025 chez Gallimard Jeunesse. Les parents pourront donc continuer à parler d’amitié, de découvertes et de départs… mais aussi du bonheur de rentrer chez soi, à travers cette merveille d'album conçu par le génial Quentin Blake pour nous emmener très loin dans l'imaginaire.

lundi 25 août 2025

Sans soleil de Jean-Christophe Grangé tome #2 Le roi des ombres

J’avais à peine refermé le tome 1 que je me suis plongée dans le second tome de Sans soleil. Trois ans ont passé et nos héros ne s’étaient pas revus.

Jean-Christophe Grangé dresse une brève mise au point sur la progression de la maladie, car le SIDA reste très préoccupant (p. 22). Est-ce que cela explique que le style ait perdu de la vitalité en terme d’humour malgré, de temps en temps, des injonctions au lecteur, le suppliant : ne riez pas !

En tout cas les références à l’astre sont multiples et fréquentes. En voici quelques unes : fondre comme neige au soleil (p. 75), l’astre luminescent (p. 105), le soleil chatoie (p.115), le soleil est partout, non pas le soleil : l’infini (p. 127), soleil implacable (p. 131), course assassine du soleil dans le ciel (p. 132), coup de soleil (p. 138), le soleil et la mort s’unissent pour ne faire plus qu’un (p. 139), Heidi est submergée par le soleil, noyée d’éblouissement (p. 140), le soleil saigne (p. 144), le soleil ne perce pas la canopée (p. 152), abasourdi de soleil, des soleils ardents, le soleil blanc (trois mentions sur la seule page 218), le soleil revient en percée éblouissante avant de baisser déjà (p. 227), une jungle montante à l’assaut du soleil (p. 293), le soleil au garde-à-vous (p. 307), coucher de soleil rouge ardent (p. 354). Inversement on le compare parfois à la lune qui peut être à son zénith. Un soleil gelé (p. 61).

Et puis bien sûr c’est l’inscription Sans soleil, gravée à l’intérieur de l’anneau dit Prince-Albert qui apparaît pour la première fois p. 151 et revient régulièrement et justifie le titre du diptyque.

Manifestement Jean-Christophe Grangé est féru de musique. Il nous rappelle (p. 21) que Tainted Love, le tube de Soft Cell, qui est universellement connue et appréciée, est devenue une chanson sur le SIDA. Il a recours a deux références musicales pour caractériser les deux tomes. Le premier, "Disco Inferno", est une fameuse chanson des Trammps, créée en 1976 et tirée de l'album éponyme. Il atteint un succès considérable avec l'avènement de Saturday Night Fever, album-événement de la bande originale du film La Fièvre du samedi soir.

Quant au second, "Le Roi des Ombres" est aussi un titre de chanson, écrite et interprétée par Mathieu Chedid bien après la période au cours de laquelle se situe l'action du roman mais sans doute pas choisi par hasard car il y est tout de même question d'hécatombe …

Nous voilà en 1986, soit quatre ans après avoir quitté la fine équipe. Heidi est en vacances à Tanger dans le riad marocain du richissime publicitaire Caroco que nous connaissons déjà. Ségur est évidemment toujours confronté à cette maladie, désormais officiellement appelée Sida, qui ne cesse de faire des victimes. Swift est toujours à la PJ, sans crier victoire tant il est persuadé que le tueur court toujours.

Alors qu'ils n'ont plus de liens, Heidi leur envoie un appel au secours après la découverte du cadavre dépecé à la machette de son hôte... Swift et Ségur volent au secours de la jeune femme et c'est le début d'une nouvelle enquête. La rumeur a enflé à propos du patient zéro. A l’inverse de ce qu’on connaîtra pour la pandémie de Covid, on ne sait pas comment a démarré la maladie en France. La frousse est le seul argument (p. 16). Caroco est donc devenu un pestiféré et sa mort n'est pas une surprise mais la traque sera ponctuée d'épisodes plutôt étonnants.

Ségur manifeste pour el moment une certaine joie à ce voyage car il sent les vibrations de ce qu’il appelle sa Terre promise. Il s’était juré de retourner sur le continent africain qui l’avait tant touché quinze ans auparavant (p. 41). Nous voyagerons avec lui au Maroc, en Afrique noire, au Zaïre et en Haïti.

Le trio va de nouveau collaborer avec la police locale mais dans un pays qui est une dictature royale comme le Maroc elle n’est pas une science exacte (p. 82). Et pourtant, estime son collègue marocain, garder la foi, c’est la moitié du chemin parcouru.

On notera une certaine préoccupation écologique de l’auteur à propos du continent africain, soulignant combien des tas de sacs en plastique s’accrochent aux branches d’arbre faméliques comme des feuilles mortes de la modernité (p. 130).

Ségur entraînera la jeune Heidi -et nous avec- en la convainquant que tout le monde dans sa branche peut vouloir un jour se rendre utile. Quand ils seront en Haïti en juin 1986 ce sera l’occasion de nous faire revisiter l’histoire cauchemardesque, et souvent insoutenable, de ce pays (p. 191-96). Des évènements terribles hélas si vrais qu’il est inutile d’inventer. Il y a vraiment de quoi … être cramponné à sa table de lecture comme un môme à une auto-tamponneuse (p. 191).

Haïti c’est l’Afrique dans un verre de rhum, un patchwork qui cuit au soleil, tranquille (p. 264). Et ce sera là que le dénouement aura lieu.

Sans soleil de Jean-Christophe Grangé tome #2 Le roi des ombres

mercredi 20 août 2025

Patronyme de Vanessa Springora

Son premier roman, Le consentement, avait été une détonation. En lisant la quatrième de couverture du second, Patronyme, j’ai pensé qu’il s’agissait d’un nième ouvrage sur le secret d’un parent autrefois nazi comme beaucoup, hélas, ont couché sur le papier, sans doute dans l’espoir de pouvoir se laver de leurs origines, dont ils ne sont d’ailleurs évidemment pas coupables.

Mais Vanessa Springora est une autrice de grande envergure et une fine analyste. Si bien que non seulement elle confirme ses qualités mais elle réussit à nous captiver par cette histoire qui est aussi un peu la notre pour peu qu’on se sente concernés par la géopolitique européenne.
Elle n'a pas revu son père depuis dix ans quand elle est appelée par la police pour venir reconnaître son corps sans vie. Dans l’appartement de banlieue parisienne où il vivait, et qui fut jadis celui de ses grands-parents, elle est confrontée à la matérialisation de la folie de cet homme toxique, mythomane et misanthrope, devenu pour elle un étranger. Tandis qu’elle s’interroge, tout en vidant les lieux, sur sa personnalité énigmatique, elle tombe avec effroi sur deux photos de jeunesse de son grand-père paternel, portant les insignes nazis. La version familiale d’un citoyen tchèque enrôlé de force dans l’armée allemande après l’invasion de son pays par le Reich, puis déserteur caché en France par celle qui allait devenir sa femme, et travaillant pour les Américains à la Libération avant de devenir "réfugié privilégié" en tant que dissident du régime communiste, serait-elle mensongère  ?
C’est le début d’une traque obsessionnelle pour comprendre qui était ce grand-père dont elle porte le nom d’emprunt, quelle était sa véritable identité, et de quelle manière il a pu, ou non, "consentir", voire collaborer activement, à la barbarie. Au fil de recherches qui s’étendront sur deux années, s’appuyant sur les documents familiaux et les archives tchèques, allemandes et françaises, elle part en quête de témoins, qu’elle retrouvera en Moravie, pour recomposer le puzzle d’un itinéraire plausible, auquel il manquera toujours des pièces. 
Dans ce texte kaléidoscopique, alternant fiction et analyse, récit de voyage, légendes familiales, versions alternatives et compagnonnage avec Kafka, Gombrowicz, Zweig et Kundera, Vanessa Springora questionne le roman de ses origines, les péripéties de son nom de famille et la mythologie des figures masculines de son enfance, dans une tentative d’élucidation de leurs destins contrariés.
Éclairant l’existence de son père, et la sienne, à l’aune de ses découvertes, elle livre une réflexion sur le caractère implacable de la généalogie et la puissance dévastatrice du non-dit.

Comment en serait-il autrement dans une Tchécoslovaquie qui a changé cinq fois de frontières, de nationalité, de régime, prise en tenaille entre les deux totalitarismes du XXème siècle ? À travers le parcours accidenté d’un jeune homme pris dans la tourmente de l’Histoire, c’est toute la tragédie du XXème siècle qui ressurgit, au moment où la guerre qui fait rage sur notre continent ravive à la fois la mémoire du passé et la crainte d’un avenir de sauvagerie.

Patronyme de Vanessa Springora, Grasset, en librairie depuis le 2 janvier 2025

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