Publications prochaines :

La publication des articles est conçue selon une alternance entre le culinaire et la culture où prennent place des critiques de spectacles, de films, de concerts, de livres et d’expositions … pour y défendre les valeurs liées au patrimoine et la création, sous toutes ses formes.

samedi 30 novembre 2024

Lancement du Prix 2025 des lecteurs d'Antony (92)

Les bibliothécaires des Médiathèques d'Antony (92) ont procédé à la Médiathèque Anne Fontaine au lancement de l’édition 2025 du Prix des Lecteurs en révélant ce samedi les livres sélectionnés.

Ce sont encore une fois 10 romans qui les ont emportés, enthousiasmés ou qui ont fait l’actualité en 2024 en recevant déjà des distinctions prestigieuses.

Le nombre d'exemplaires devrait satisfaire un grand nombre de lecteurs d'autant que d'autres seront disponibles également à la Médiathèque Arthur Rimbaud et qu'il existe aussi des versions numériques :

1- Traverser les montagnes, et venir naître ici de Marie Pavienko, Editions Les Escales, en librairie depuis le 22 août 2024, Nominé pour le Prix du Roman Fnac 2024

2 - Absolution d'Alice McDermott, La Table Ronde, en librairie depuis le 29 août 2024

3 - Badjens de Delphine Minoui, Editions du Seuil, en librairie depuis le 19 août 2024
Finaliste pour le Prix du Roman Fnac 2024

4 - Source de chaleur de Soichi Kawagoe, chez Belfond, en librairie depuis le 22 août 2024

5 - Plus grand que le monde de Meredith Hall, chez Philippe Rey, en librairie depuis le 1er février 2024

6 - Cabane d'Abel Quentin, L'Observatoire, en librairie depuis le 21 août 2024, Prix des Libraires de Nancy- Le Point 2024

7 - Dors ton sommeil de brute de Carole Martinez, Collection Blanche, Gallimard, en librairie depuis le 15 août 2024, Nominé pour le Prix du Roman Fnac 2024, Inscrit dans la première sélection des 16 romans concourant cette année à la 122e édition du prix Goncourt.

8 - Le sang des innocents de S.A. Cosby, chez Sonatine, en librairie depuis le 11 janvier 2024, déjà Grand Prix des Lectrices de ELLE catégorie Policier

9 - Je pleure encore la beauté du monde de Charlotte McConaghy, chez Gaia éditions, en librairie depuis le 7 février 2024

10 - Bien-être de Nathan Hill, chez Gallimard, en librairie depuis le 22 août 2024, Prix littéraire Lucien-Barrière (2024) et Grand prix de littérature américaine (2024)

Deux seulement situent leur action en France. Nous voyagerons en Iran, en Syrie, en Russie, en Ecosse et surtout aux Etats-Unis pour quatre d'entre eux (2, 5, 8 et 10).

Il y a deux policiers (8 et 10), trois fortes histoires d'amitié entre deux femmes (1, 2 et 10), deux autres parlent de violences subies intra-familiales (7 et 9), trois touchent aux écosystèmes (4, 6 et 9), qu'il est question de reconstruction (1, 4 et 6), de dystopies (6 et 7), de fuite (1 et 7) et surtout de dimension politique (2, 3, 4 et 6).

L'an dernier c'était Les Contemplées de Pauline Hillier qui avaient été couronnées. Les débats seront sans doute encore passionnés en 2025. Plusieurs rendez-vous seront proposés entre les lecteurs pour discuter, avec notamment une rencontre surprise le 1er avril 2025.

Pour ma part j'ai déjà lu deux ouvrages que j'ai beaucoup appréciés et vous pourrez lire ma chronique en cliquant sur leur titre : Badjens et Dors ton sommeil de brute
Vous avez jusqu'au 23 mai prochain pour lire, élire votre préféré et … gagner des Chèques Lire !

vendredi 29 novembre 2024

Rêveries d'Automne, photographies de Grégoire de Gaulle

Je ne connaissais pas la galerie KIELLE dont, d’ailleurs, les murs n’accueillent des oeuvres d’art que depuis peu.

C’est un lieu étonnant en ce sens que l’activité principale est d’abord de proposer des bijoux et des vêtements conçus par Ezequiel Doria Medina, un jeune autodidacte débordant de créativité de 26 ans, d'origine bolivienne, naturalisé espagnol.

Fondée à Madrid en 2022, KIELLE Paris a ouvert sa première boutique dans la capitale en mai 2023, où se trouve désormais son siège social. Ezequiel puise ses inspirations dans la nature pour les bijoux, essentiellement en or et pierres précieuses, et dans des textures atypiques pour les vêtements, cherchant toujours à mélanger des textiles de luxe tels que l'alpaga, le cuir et la soie, ce qui donne à ses créations une signature singulière.

J’ai essayé quelques pièces et c’est tout à fait ce qu’on a envie de porter quand on souhaite affirmer son originalité sans risquer de choquer.

La marque a ouvert ses murs à des artistes plasticiens et leurs œuvres et pendant le mois de la photographie ce sont celles de Grégoire de Gaulle qui ont été accrochées le 12 novembre. Le choix est cohérent en cette année de bicentenaire du premier procédé photographique créé par Nicéphore Niepce en 1824.

Le photographe est né en 1955 à Paris où il vit et travaille aujourd’hui. Artiste lui aussi autodidacte, il a commencé la photo à l’âge de 13 ans. Sa manière de regarder le monde est singulière et c’est ce qui a fait le succès des expositions qu’il réalise depuis 1979 en France et à l’étranger.
Intitulée "Rêveries d'Automne", celle-ci (accessible exceptionnellement le lundi 25 novembre, ce qui m’a permis de la découvrir au début de la semaine) se compose de deux séries de clichés. D’abord, des travaux récents avec Ethers et quelques-uns plus anciens de la série Introjections.

On a l’impression que les ciels de Grégoire de Gaulle ont toujours été là tant ils s’intègrent sur les parois comme autant de fenêtres sur un extérieur. Je suis sensible aux ciels, en général, surtout depuis que j’habite dans un appartement situé au troisième étage d’un immeuble d’où je ne me lasse pas de les admirer … et que, parfois, je ne peux m’empêcher de photographier. C’est un cinéma permanent et toujours inédit de formes comme de nuances de couleurs. Certains jours les avions y tracent des lignes qui s’épuisent en pointillés. D’autres fois l'espace semble vide de toute activité.

Je comprends qu’il ait tourné son objectif vers les nuées quelle que soit l’heure, afin de capturer ces quelques instants de grâce en me concentrant sur cet espace diaphane afin d’ôter toute relation à la terre, à la mer, à l’humain.
J’ai commencé à photographier le ciel comme on ferait un portrait, en essayant de capter les variations de ses expressions intimes et mystérieuses. Peints par les plus grands artistes, les ciels nuageux servaient le plus souvent d’arrière- plan aux paysages et donnaient la tonalité au sujet du tableau. L’ambiance ainsi posée pouvait être calme ou tourmentée, apaisante ou inquiétante. En choisissant de photographier le ciel, rien que le ciel, j’ai décidé de focaliser mon regard sur une matière en constante transformation et en mouvement permanent. Sorti de son contexte, le ciel qui était décor devient sujet. Les nuées, autrefois secondaires, occupent toute la place dans le champ de ma vision, prennent toute leur importance, dévoilant leur incomparable majesté.
Le résultat est autant beau que troublant.

Les clichés de la série Introjections, sont en noir et blanc. Ils sont obtenus par l’artiste en projetant ses d’images sur des corps nus, statufiés et éternels. comme sur un écran. Il en résulte une fusion entre la forme et la matière, une image nouvelle, forte et troublante, laissant affleurer le non-dit, pour peu que le spectateur cherche à le voir.
Rêveries d'Automne, photographies de Grégoire de Gaulle
Galerie KIELLE Paris, 250 rue de Rivoli, 75001 Paris - 07 45 05 30 37
Jusqu’au 15 décembre 2024
Du mardi au dimanche de 12h à 19h.
Commissaire de l'exposition Véronique Grange-Spahis
Présence de l’artiste annoncée le vendredi 29 novembre de 16h à 20h

Éthers : Impressions Fine Art avec encres pigmentaires Ultrachrome Pro
Réalisées sur papier Hahnemüle Bamboo 290 g
limités à 6 exemplaires signés et numérotés.

Introjections : Tirages au bromure d’argent + virage au sélénium
réalisés par Jean-Luc Piété sur Ilford multigrade IVFB brillant
limités à 6 exemplaires, tous formats confondus, signés et numérotés au dos.

jeudi 28 novembre 2024

Brasser de l’air et s’envoler de et par Xavier Guelfi

J’ai vu Brasser de l’air et s’envoler juste après un autre seule-en-scène, exceptionnel, celui dans lequel Christine Murillo incarne une pétillante Pauline Carton et il faut reconnaître que passer après une telle comédienne est un challenge difficile à relever.

Annoncé comme spectacle hors norme je pensais que la performance de Xavier Guelfi pourrait être à la hauteur, puisqu’il est question de vol.

On sera tous d’accord avec lui pour convenir que nous nous heurtons à un sentiment général d’impuissance face aux difficultés de notre temps et qu’on a grandement besoin de se réconcilier avec la vie et reprendre foi en la nature humaine. Sa proposition de questionner la morosité ambiante pour donner des réponses aux aquoibonistes est une attente qu’on peut -à priori- facilement partager.

Il admet se raconter en brassant un chaos verbal frénétique et il est vrai que les mots s’entrechoquent à la vitesse d’un baby-foot qui ne marque pas un but à chaque coup. Si ça remue les molécules on se parvient pas toujours à saisir le sens de rotation, hormis dans la très belle scène finale dans laquelle le hublot de la machine à laver essorera les extraits fugitifs de nos plus beaux souvenirs parmi lesquels on reconnaîtra (dans le désordre) les tortues Ninja, Jean-Pierre Bacri et Claude Rich, Nina Simone, Jean-Louis Trintignant, la Callas, Barbara, Balavoine, la voix de Souad Massi et celle d’Agnès Varda s’enthousiasmant à propos de patates en forme de coeur (image tirée du très intéressant documentaire Les glaneuses).

Le comédien se présente en polo bleu avec un morceau de tissu blanc appliqué, et sa botte de poireaux. Il a l'intention de se faire un smoothie pour, prétend-il éviter de se vautrer en s'adressant à un public de plus de 7, 5 personnes, ce qui est largement inférieur au nombre de spectateurs présents.

Faut-il en rire ? On sera tous en phase avec lui pour convenir qu'être ridicule rend humble. Et d'accord avec son oncle qui lui recommande d'arrêter de se poser des questions puisqu'il ne trouvera pas les réponses.

A l'inverse de l'albatros du poète, les ailes angéliques et dorées de l'humoriste ne l'encombrent pas pour marcher sur le sol et sa détermination à s'acharner à vouloir changer le monde reste touchante.
On aimerait que son fauteuil ne se dégonfle pas à l'aune des derniers rebondissements internationaux qui ne nous placent pas dans la meilleure disposition pour rire de toutes les propositions. L'avenir dira qui a raison …

Brasser de l’air et s’envoler de et par Xavier Guelfi
Mise en scène François Rollin
Création Lumière Quentin Maudet
Scénographie Laura Thavenot
Jusqu'au 9 juin 2025 à 19 h 15 ou 21 h 15
Attention le spectacle sera interrompu à partir du 5 janvier pour reprendre le 4 mai
A la Picola Scala - 13, boulevard de Strasbourg - 75010 Paris - 01 40 03 44 30

mercredi 27 novembre 2024

Sono io ? par Danny et Pepijn Ronaldo, père et fils

La première mondiale de Sono io ? a eu lieu le 16 juillet 2021 en Belgique au Miramiro Gand (Circus Cravings) et a été présenté en France d'abord au festival de cirque CIRCA d'Auch. Le spectacle est parti en tournée en Europe et en régions avant de s'installer Théâtre du Rond-Point du 30 mai au 16 juin 2024 puis à L'Onde Théâtre et Centre d'art, de Vélizy-Villacoublay (78). Le voilà maintenant installé à Antony (92) sur le terrain du Pôle national des arts du cirque qui est un des co-producteurs.

Nous sommes accueillis par deux immenses portraits de Danny et Pepijn Ronaldo, peints un peu à la manière de ce que je connais de Jean-Paul Chambaz quand il faisait des décors de théâtre.

Sous le chapiteau, Danny trempe dans une eau fumante à l'intérieur d'une baignoire d'époque, aux pieds en pattes de lion dorées. Une grande lessive pend. Faut du culot pour commencer par une telle scène qui a quelque chose de fellinien.

Danny, imperturbable, rince sa vaisselle sans nous prêter la moindre attention et met à égoutter les assiettes à l'appui d'un magnétophone presque antique qui laisse échapper des musiques … dites de cirque, bien entendu. Et pour cause puisque ce sont des enregistrements de ses propres spectacles qu'il se repait à écouter en boucle en revivant ses exploits passés.

Un peu plus loin, des violons débordent d'une vieille malle. Voilà le clown- comment dire autrement ?- qui marmonne Sono io ! (c'est moi) en se pointant du doigt. Sur les gradins les rires fusent à gorge déployée. Manifestement, cela réjouit l'artiste qui rembobine.

Sono io ? (Est-ce bien moi ?) répète t-il en poursuivant sa vaisselle. Il tord une chaussette grise, commente ce qu'on entend : es final, double salto. La lumière finit par baisser. Les gradins s'assombrissent. Danny monte le son des applaudissements pour déclencher l'envie de nous y mettre.

Il reprend ses marmonnements en italien. Mime les souvenirs qui lui viennent. Fantastico ! Arrive le fils en catimini avec ses bagages. Le père lui offre un caramelo. Le conflit de générations se traduit par une approche apparemment différente de la musique. Le paternel rembobine alors que le jeune homme lui tend une clé USB.

Dans quelques instants on assistera à un (petit) tour de magie très simple avec les papiers d'emballage des bonbons, si banal qu'il en est touchant.

Les racines de Circus Ronaldo remontent loin dans le temps. Danny et Pepijn appartiennent respectivement à la sixième et la septième génération d’artistes circassiens. Leur spectacle est un hommage transgénérationnel et nous devinons que nous allons -si tout va bien- voir se dérouler sous nos yeux un passage de flambeau.

Ce qui est touchant c'est leur façon bien à eux de se lancer des défis, de mettre l'autre à l'épreuve tout en le respectant, quitte à lui filer en douce un coup de main pour qu'il réussisse son numéro. Ainsi le fils apporte au père une main secourable pour l'aider à rattraper un chapeau ou une assiette. A moins que ce ne soit le père qui fasse semblant de ne pas y parvenir tout seul.

De piccolo intermezzo en improvvisazione suivie d'un altro breve intermezzo nous allons assister à une escalade dans la difficulté, dans chaque discipline, y compris en musique, avec une guerre des cuivres dont le traité de paix est imputable à une paire de lunettes.

On entendra régulièrement quelques notes de Terry's Theme, une mélodie composée par Charlie Chaplin pour la musique de son film Les Feux de la rampe, sorti en 1952 et pour lequel il recevrat l'Oscar de la meilleure musique, en 1973, avec ses arrangeurs Raymond Rasch et Larry Russell. Elle a donné naissance aux États-Unis à Eternally, et  en France à Deux petits chaussons (parfois titré Deux petits chaussons de satin blanc), écrite par le parolier Jacques Larue, dont André Claveau et Mireille Mathieu ont fait un enregistrement. On la reconnaitra plus ou moins selon l'instrument : piano, bandonéon, trompette … grosse caisse, trombone ou saxophone.

Le spectacle se poursuivra, très complet, entre numéros musicaux, jonglage, plateau d'équilibre, acrobatie au sol, à bicyclette, dans les airs, mime, danse, ombres chinoises et clowneries raffinées. Ce sera chaque fois une surprise qui semblera résulter d'une improvisation alors qu'elle est sans doute le résultat d'un immense travail. Ils sont annoncés comme des clowns dans le programme mais ils sont autant acteurs et circassiens accomplis si bien qu'on ne peut pas les caractériser uniquement comme des clowns. Etymologiquement le mot vient du germanique klönne signifiant "homme rustique, balourd",  ce qui est à l'antipode de l'impression qu'ils nous donnent, élevant la clownerie au rang d'un art.

On s'inquiètera en voyant Pepijn s'accrocher à une lampe et se balancer les pieds mouillés au-dessus d'une baignoire, laquelle n'est tout de même pas le lieu idéal pour se réceptionner d'une galipette.

Savez-vous qu'on peut jongler et faire des acrobaties avec une contrebasse ? Le père a bien raison d'applaudir le fils qui a mérité amplement la transmission de la chemise comme un flambeau. Il pourra quitter la scène et prendre place dans les gradins où il deviendra spectateur.
On comprend que dans ce spectacle ils ont cherché à nous parler avec tendresse et humour de ce qui les sépare et de ce qui les relie. Ils s'y prennent de la plus jolie manière qui soit, sans renier le passé, sans imposer le futur et font apparaitre une nouvelle voie artistique, commune. On est touché aux larmes avant de reprendre notre souffle pour éclater de rire.

La fin est tendre, riche de sentiments, poétique, paisible. Le combat de coqs n'aura pas eu lieu, bien au contraire. Et devinez qui, discrètement, tiendra le rideau à notre sortie ? 
Sono io ?
Direction : Frank Van Laecke (mise en scène finale)
Création et performance : Danny & Pepijn Ronaldo
Coproduction : Théâtre Firmin Gémier / La Piscine – Pôle national des arts du cirque (Châtenay-Malabry), Theater op de Markt – Dommelhof (Pelt), Miramiro (Gent)
Du 26 Novembre au 1er Décembre 2024 à l'Espace Cirque d'Antony (92)
A 18, 20 ou 20 h 30 selon les soirs
Le dimanche à 16 heures
Recommandé à partir de 12 ans

A signaler qu'au même endroit nous pourrons voir, du 6 au 15 décembre, un autre spectacle du Cirque Ronaldo, Da Capo que je n'ai pas l'intention de manquer.

mardi 26 novembre 2024

9ème cérémonie du Prix Hors Concours 2024

Ce fut, à l'instar de l'an dernier, une belle soirée que cette 9ème cérémonie de remise des Prix Hors Concours 2024, ce mardi 26 novembre à 19h30 à la Maison de la Poésie (Paris), en présence des auteurs, des éditeurs, de la presse et du comité de lecture.

Je vais relater l’essentiel de l’évènement mais vous pourrez, à la fin, accéder à l’enregistrement qui a été fait de la soirée.

Avant de donner les noms des lauréats je tiens à souligner que les gagnants sont (encore une fois) des premiers romans, preuve s’il en fallait que les éditeurs ont eu raison d’avoir l’audace (et le courage) de miser sur des primo-écrivains. Bien entendu Hors concours n’a pas pour mission de les mettre particulièrement en avant puisqu’il est orienté vers la promotion des maisons d’édition indépendantes mais il est intéressant de constater combien celles-ci accordent de l’attention à des auteurs inconnus alors que peut-être les grandes maisons le font en premier lieu dans leur propre intérêt.

En amont de cette soirée, et afin de voter en notre âme et conscience, nous avions lu les extraits de 40 romans dont on nous prévenait s'il s'agissait du début de l'ouvrage ou non. Serait-on convaincu par la narration les dialogues, par les personnages, par l'ancrage du lieu et de l'époque, par la construction du récit, par l'intrigue, par la profondeur du texte, par le style et la langue, ou par l'imagination de l'auteur ? A travers mes votes, j'ai voulu être fidèle à l’esprit de la morale de Hors concours : récompenser une maison d’édition qui n’a pas de prix. Ensuite mon second critère a été l’originalité du propos ET du style tout en retenant des auteurs dont j’avais le plus envie de lire la suite de l’extrait. 

Le fait qu'il s'agisse d'un premier roman compte pour moi et j'essaie de respecter une parité hommes-/femmes même si ce n'est pas un critère déterminant. Je souligne chaque année combien il est difficile de ne retenir que 5 extraits et je ne saurais interpréter pourquoi et comment, cette année encore, le grand gagnant figure dans ma sélection (et un autre livre parmi les 5 soumis au jury final était dans ma première liste). Je suis désolée pour ceux qui n’ont pas été mis en valeur au cours de la soirée mais je me réjouis du choix qui résulte de l’ensemble des votes.

Je me suis demandé si ces auteurs étaient dans la salle. Le port d’un badge faciliterait les rencontres. J’aurais aimé pouvoir discuter avec eux. Notamment Nadège Erika dont le roman Mon petit (encore un premier roman) m’avait enthousiasmée il y a un an, un an déjà, ce qui d’ailleurs pose la question des conséquences de l’attribution de distinctions si longtemps après la parution, au regard de la vitesse avec laquelle les ouvrages disparaissent des rayons des librairies et partent au pilon, et cela alors que, contrairement à des produits alimentaires, la littérature n’a pas de DLC.

C’est une vraie interrogation qui me concerne à chaque fois que j’accepte de participer à un prix même si on peut se dire qu’il n’est jamais trop tard pour découvrir un livre à côté duquel on est passé sans y prendre garde. La situation est un peu différente pour Hors concours, qui, je me répète mais c'est un point important, met en avant le travail l’éditeur. Cependant ce sont les auteurs qui sont interviewés le soir de la cérémonie. Du moins les 5 finalistes.

Gaëlle Bohé, la fondatrice du Prix, avait raison de mettre en avant le potentiel de sensualité de la lecture à travers les performances chorégraphiques des danseurs de la compagnie Avril en Septembre, Inès Valarcher, Lorenz Jack Chaillat et Léa Bridarolli dont la prestation a été orchestrée par Armelle Hédin, directrice artistique. Leur travail mérite que j'ai choisi une photo d'une séquence pour illustrer cet article. Il a été chaleureusement applaudi par le public ainsi que les lectures d'extraits par le comédien David Sidibé (ci-dessous au centre) dont on avait déjà remarqué le talent l'an dernier.
L'extrait lu pendant l'exécution du tableau chorégraphique était celui qui figure dans la bibliothèque Hors Concours que théoriquement nous connaissions tous. Après chaque performance l'auteur était interviewé par un membre du jury. C'est David Medioni, rédacteur en chef d'Ernest ! qui a commencé avec David Naïm et son livre L’ombre pâle, paru aux éditions de l’Antilope dont il a souligné le caractère de quête identitaire et de recherche sur la mémoire d'une famille, écrit avec un certain humour, en inventant des histoires pour accepter ce qui n'est pas compris. En quelque sorte la littérature peut rapiécer des vies.

Donnant par exemple l'occasion à Benoit Fourchard, auteur de Martha, publié par Feed Back, de dire à Stéphanie Dupays, critique littéraire pour Le Monde des Livres, combien son récit était -ou pas tant que çà- autobiographique.
A propos de La Reverdie de Louise Browaeys, publié à La Mer salée, l'autrice a répondu aux questions d'Emmanuel Poncet, de La Tribune Dimanche avec intelligence et humour, en expliquant comment elle choisit une contrainte en commençant l'écriture, qui cette fois-ci fut la couleur verte. Elle a conçu un ouvrage d'une forme hybride entre le roman, le récit et le journal intime, comparant le travail de l'écriture à celui de permacultrice, insistant pour nous dire que l'écriture, la lecture, comme le jardinage, sont des actes de résistance à une époque où tout est compté pour gagner de l'argent à chaque instant.

Enfant, elle se souvient de son père au jardin et sa mère dans la bibliothèque, … l'inverse de Colette, toutes proportions gardées. Lire et jardiner seraient pour elle les deux activités qui permettraient le mieux de se sentir pleinement dans le monde.

Cristina Soler, créatrice de horizonetinfini sur Instagram, jury invitée pour cette édition, a interrogé l'éditeur de Florence Cochet, retenue pour raisons professionnelles. Son livre, Inhumaines, appartient à un genre que les anglos-saxons plébiscitent mais que les français ont du mal à apprécier, les nouvelles. Pourtant, Alexandre Grandjean a fait part de l'intérêt de Hélice hélas pour cette catégorie surtout quand, comme Florence Cochet, on construit une série qui flirte avec plusieurs genres (la science-fiction, la fantasy, le gothique …) pourvu que l'ensemble ait une forte cohérence autour d'un thème (ici la violence) et permette une lecture en continuité.
David Medioni est de nouveau intervenu pour discuter avec Bénédicte Dupré La Tour à propos de Terres promises aux Editions du Panseur qui écrivit son roman en se fixant la contrainte de ne pas utiliser le lexique du western. Son procédé a manifestement séduit une très large audience puisqu'elle figurait dans la pré-sélection du Prix du Premier roman de Chambéry et dans les sélections du Prix du Marque-Page 2025, du Prix Saint-Georges du premier roman 2025, du Prix du Premier roman L'Esprit large, du Prix Verdelettres 2025, du Prix Les Visionnaires 2025 et du Prix du Roman Fnac 2024. Elle était finaliste des Prix L'Usage du Monde 2025 et Coiffard 2025.

Du coup on ne peut pas vraiment dire que la mention du public pour ce roman soit tout à fait en phase avec la base-line d'Hors concours qui vise à distinguer l'édition qui n'a pas de prix, ce qui dans mon esprit en remet absolument pas en cause la qualité de l'ouvrage ni celle de l'éditeur. Et comme cette autrice a raison d'avoir rappelé que lire c'est agir.
Comme annoncé, j'ai gardé le suspense jusqu'au bout pour parler de L’ombre pâle, paru aux éditions de l’Antilope. C'est en compagnie de ses deux éditeurs que David Naïm est revenu sur la scène pour recevoir le Prix Hors concours, écrit en rappelant qu'il le doit à son père qui lui a fait cet immense cadeau de lui léguer un manteau mité de ses silences. 
En quelques mots on peut dire que les éditions de l’Antilope ont été créées par Anne-Sophie Dreyfus et Gilles Rozier en janvier 2016 afin de publier des textes littéraires rendant compte de la richesse et des paradoxes de l’existence juive sur les cinq continents. Si les littératures yiddish et hébraïque occupent une place de choix dans leur catalogue, ces éditeurs publient aussi des traductions d’autres langues et la littérature française y est de plus en plus présente. Ils ont eu la double délicatesse de rappeler que leur existence est subordonnée à celle -préalable- des auteurs, et de souligner combien il est agréable pour un éditeur indépendant de se sentir légitime dans l'attribution d'un prix littéraire.

Vous pourrez vivre ou revivre la cérémonie en visionnant l'enregistrement ci-dessous et rendez-vous est prix pour le dixième anniversaire, l'an prochain !
 

Rappel des 5 finalistes :
Benoît Fourchard pour Martha, aux éditions Feed Back
Florence Cochet pour Inhumaines, aux éditions Hélice Hélas
Louise Browaeys pour La Reverdie, aux éditions La Mer Salée
Terres Promises de Bénédicte Dupré La Tour
David Naïm pour L'ombre pâle, aux éditions de l'Antilope qui reçoit le Prix Hors concours
Bénédicte Dupré La Tour, pour Terres Promises, paru aux éditions du Panseur, qui remporte la mention du public

lundi 25 novembre 2024

Pauline & Carton avec Christine Murillo

Elle arrive fringante, malicieuse, se réjouissant d’une salle comble, faisant sa révérence, un carton (mystère ?) à la main.

Elle va comme on dit, passer à table, c’est à dire nous offrir ses confidences. La table en question n’est pas très solide mais elle tient. A l’image de cette comédienne d’exception.

Et en terme de décor on ne pouvait pas imaginer plus simple ni plus léger que cet équipement de camping. Ne dit-on pas que les comédiens sont des saltimbanques ?

Je suis heureuse de passer cette soirée de dernière avec elle. J'avais affirmé que je viendrais, pas seulement à la comédienne, je me l’étais promis aussi à moi-même mais les mois ont passé et je n’avais pas trouvé de créneau. Mon excuse était que ça n’était pas tous les soirs à l’affiche.

La servante l'accompagne sur la scène. Cette lampe n'est allumée que lorsque les acteurs ont quitté la scène et permet à ceux qui travaillent la nuit de se diriger sans risquer de se faire mal. Elle a la réputation d'éloigner les fantômes. Il n'y a pas à en craindre ce soir alors Christine Murillo l'éteint en s'exclamant : Ah bon Dieu que je suis contente ! Est-elle encore Christine ou déjà Pauline ? Nous entrons de plain-pied dans ses souvenirs et peu nous importe qu'elle péclote côté mémoire.

Elle va régulièrement chercher le mot juste ou jouer à faire semblant. Quand elle butera sur ancillaire je ne suis pas certaine que tout le monde aura compris comme moi qu’elle faisait allusion aux servantes (les domestiques) qu’elle a interprétées si souvent. Toute la soirée elle va nous mener en bateau en faisant semblant de masquer ses pseudos trous de mémoire. Parfois certains spectateurs riront à retardement par exemple lorsqu'elle confondra engrais et anglais. Quelle saveur que ses inventions comme avoir la langue enfouifouinée.

Elle extirpe une brosse et deux barrettes de son carton fourre-tout et soupire qu'avant elle avait le visage lisse et portait des jupes plissées. Les lunettes posées sur un carnet de confessions, elle est devenue Pauline Carton (1884-1974). Elle nous apprend avoir gardé ce nom qui lui avait porté chance puisque c'était celui de son premier rôle, dans la pièce de Pierre Wolff, Le Ruisseau, en 1904. Elle était parvenue à se faire engager alors qu'elle n'avait aucune expérience et elle accepta de ne recevoir aucune rémunération tant le plaisir d'être sur scène la récompensait suffisamment.

Je ne suis pas sûre que Pauline Aimée Biarez aurait fait la même carrière que cette femme au caractère bien trempé qui démontre qu'il n'était pas nécessaire de coucher pour avoir un rôle. Son argumentation est implacable et drôle : elle incite à diviser le nombre de comédiennes (212 000) par celui de directeurs de salles (50 à 60 hommes) pour conclure que si c'était vrai ils auraient tous une vie de martyre.

Une idée en enchaine une autre. Elle adorait la tirade des "non merci" écrire par Edmond Rostand pour Cyrano (Acte II, scène 8). Je l'aime beaucoup également et je vous en sers de petits extraits :

Grimper par ruse au lieu de s’élever par force ? Non, merci. (…)
Exécuter des tours de souplesse dorsale ?… Non, merci. (…)
Faire éditer ses vers en payant ? Non, merci ! (…)
Travailler à se construire un nom. Sur un sonnet, au lieu d’en faire d’autres ? Non,
Merci ! (…) Non, merci ! non, merci ! non, merci !
Mais… chanter, Rêver, rire, passer, être seul, être libre, (…)
Travailler sans souci de gloire ou de fortune, (…)
Sois satisfait des fleurs, des fruits, même des feuilles,
Si c’est dans ton jardin à toi que tu les cueilles ! (…)
Ne pas monter bien haut, peut-être, mais tout seul !

Cette dernière phrase est un bijou. Il faut l'entendre aussi nous dire La retraite de Russie de Victor Hugo en zézeyant. Le titre du poème est L'expiation et elle le maitrise à la perfection. Mais comment fait-elle çà ? Le public, ravi, applaudit.

Il battra des mains à chaque performance. Il faut dire qu'elle imite à la perfection Elviro Popesco, Danièle Gilbert et Michel Simon. C'est un émerveillement de l'entendre chanter que ce soit Par le trou, avec espièglerie, ou Bourvil avec tendresse, ou encore Sous les palétuviers, une chanson qu'elle interpréta en duo en 1934 avec le chanteur d'opérette René Koval au Théâtre des Variétés, pas très loin de la Scala. Elle se moque de Julien Clerc pour qui ils dorment sous le vent de la Californie.

Elle se moque de ses semblables qui lui demandait s'il était bien vrai que Fernandel (qui avait interprété six fois Don Camillo au cinéma) était entré dans les ordres. elle avoue un faible pour les forts (c'est le titre du premier album qu'elle enregistra en 1972), aimer le roman noir, Eddie Constantine (quand il chantait Cigarettes whisky et p’tites pépées). Mais plus que tout c'est le théâtre qu'elle aime avec ses incohérences, sa poussière, ses émotions et ses potins.

Elle évoque Jean Cocteau, Jean Marais et bien sûr Sacha Guitry qui la fit tourner dans une vingtaine de films (elle jouera dans plus de 250 films). On pourrait l'écouter jusqu'au bout de la nuit dérouler ses anecdotes, parfois à demi-mots. Tout est symbolique dans les rares objets qu'elle a glissé dans son carton, à commencer par le bouquet de violettes, en hommage au grand et sans doute unique amour de sa vie, le poète et écrivain genevois Jean Violette avec qui elle fut liée cinquante ans.

Il faut bien finir. On la voit à regret refourguer son tintouin dans le carton. On peut dire qu'elle a fait un carton dans cette Piccola Scala qu'elle remercie sans se risquer à donner la longue liste de tous ceux qu'elle voudrait honorer en rallumant la servante.
Très inspirée elle a composé juste avant de descendre sur la scène, une improvisation sur l'air de la Java bleue, devenue La Scala bleue, qui colle tout à fait à la situation. Nous avons du mal à accepter que la série soit terminée.
Christine Murillo, déjà riche de 4 Molière, a amplement mérité le Prix du brigadier pour cette création et on espère la voir très vite dans un nouveau spectacle.
Pauline & Carton
Adaptation Virginie Berling, Christine Murillo, Charles Tordjman
Mise en scène Charles Tordjman.
Avec Christine Murillo.
A La Scala Paris (La Piccola Scala), boulevard de Strasbourg - 75010 Paris
Dernière représentation le 25 novembre 2024

dimanche 24 novembre 2024

La Promesse de l’art de Patrice Trigano

Il est lourd mais pas pesant. Savant mais pas pédant. Précis mais accessible. Riche mais simple. Autobiographique mais pas nombriliste.

La Promesse de l’art est une invitation que nous fait Patrice Trigano à partager ses passions, du moins beaucoup d’entre elles, car je ne suis pas certaine qu’il ait épuisé les confidences qu’il excelle à distribuer.

Né en 1947, il a arpenté la scène de l'art et observé les artistes comme nul autre et c'est avec son regard que nous allons nous approcher de ceux qui ont représenté la scène artistique dans la deuxième moitié du XX° siècle. Il a obtenu le prix littéraire Drouot pour La Canne de Saint-Patrick en 2010.

Il se penche sur les grands moments de sa carrière de galeriste débutée en 1973, raconte ses réussites, ses craintes, ses doutes, ses échecs, et fait revivre les moments d’exception passés aux côtés des artistes qu’il a exposés et admirés : César, Mathieu, Matta, Hartung, Schneider, Zao Wou-Ki, Michaux, Chu Teh-Chun, Masson, Hélion, Clergue, Hiquily… et point n'est besoin d'être soi-même spécialiste pour apprécier ses confidences.

Les chapitres se découvrent l’un après l’autre à moins que, comme moi, vous ne résistiez pas à chercher dans la table des matières à propos de quel grand nom de la peinture ou de la sculpture vous avez envie d’entendre le point de vue du galeriste. Ou encore scruter dans l’index des noms quelques-uns que vous pourriez avoir approchés de près.

Je me suis ainsi réjouie d’apprendre tout le bien que Patrice Trigano pensait du festival d’Avignon, le in bien entendu dont il cite la formidable mise en scène du désormais célébrissime Thomas Jolly pour Thyeste mais aussi le off avec William Mesguisch dont il salue l’interprétation magistrale qu’il a faite avec Nathalie Lucas de la pièce Artaud Passion qu’il a lui-même écrite, une histoire librement inspirée de la rencontre de la jeune Florence Loeb, fille du galeriste Pierre Loeb avec le poète Antonin Artaud après ses neuf années d’internement (p. 569). Je ne serais pas étonnée qu’elle soit reprise dans le théâtre des Gémaux parisiens que la comédienne vient de reprendre avec Serge Paumier.

J'ai beaucoup aimé le chapitre consacré à Daniel Buren (p. 111), que j'ai eu l'honneur de côtoyer alors qu'il donnait ses ordres à une équipe de 7 assistants en combinaison blanche de coller, positionner, puis à la fin de déchirer. Cette oeuvre renvoyait le spectateur à lui-même, et le public de La Piscine de Châtenay-Malabry avait suivi, une heure durant, comme s'il s'agissait d'une pièce de théâtre, une chorégraphie dont personne sauf (peut-être) l'artiste ne maitrisait pas les codes mais qui nous enchantait. 
Il ne sera jamais rassasié et nous fait la confidence que l'insatisfaction lui donne des ailes (p. 23). Est-ce une raison supplémentaire pour avoir choisi comme couverture le tableau de Magritte intitulé La promesse ? Par fidélité aussi puisque c'est le premier artiste avec lequel il a correspondu, en 1967.

Quelques séries de photos en noir et blanc, pratiquement toutes prises sur le vif, sont une autre forme de témoignages.

Patrice Trigano connait quasiment tous les grands artistes de notre époque. Jusqu'à Robert Tatin dont il a bien entendu visité la propriété fantastique de Cossé-le-Vivien (p. 474), et sa Maison des champs qui m'a charmée autant que l'Allée des Géants a pu me stupéfier.
Ne manquez pas de vous promener dans ce musée à ciel ouvert qui est chaque année le cadre d'un spectacle du festival Les Nuits de la Mayenne.

Ce livre est presque un dialogue tant on a le sentiment que Patrice s’est installé dans le fauteuil d’à côté pour nous livrer ses souvenirs.

Galeriste, écrivain, homme de théâtre, il est l'auteur de nombreux livres qui, tous, mettent en lumière la relation passionnée de l'auteur avec la création sous toutes ses formes. Je rappelle d'ailleurs que j'avais lu de lui L’amour égorgé que je recommandais de lire, et relire …

La Promesse de l’art, Mémoire d’un galeriste de Patrice Trigano, aux Editions du Canoë, en librairie depuis le 1er novembre 2024

samedi 23 novembre 2024

5e édition du Salon du Livre Merveilleux chatenaisien

La 5e édition du Salon du Livre Merveilleux a invité aujourd'hui samedi 23 novembre 2024 les lecteurs à se plonger dans un univers riche et foisonnant sur le thème du rêve, en participant à de nombreuses animations, spectacles, ateliers, à rencontrer de nombreux auteurs et découvrir de 10h à 18h30 des éditeurs atypiques à la Médiathèque (7-9 rue des Vallées) où le salon se déroulait physiquement pour la première fois.

L'équipe a fait preuve d'une fougue insensée en consacrant un an à plier les origamis qui décoraient l'espace. Le résultat est si élégant qu'on espère qu'ils resteront en place le plus longtemps possible.

Pour la première fois la Ville a offert un "Chèque Merveilleux" de 10 € qui avait été envoyé aux parents des écoliers du CP au CM2 début novembre pour permettre aux écoliers de choisir un livre ou un ouvrage disponible sur le stand de la librairie châtenaisienne l’Îlot Livres ou plus tard à la libraire – 56 bis rue Jean Longuet – du 24 novembre au 22 décembre 2024.

Le programme était foisonnant et je ne suis pas étonnée du succès avec 1600 visiteurs.

Côté libraires il y avait L’Îlot Livres et Les Pêcheurs d’étoiles de Fontenay-aux-Roses.

Une vingtaine d'animations variées et de grande qualité ont été organisés de manière à toucher tous les publics. Quatre spectacles complétaient le dispositif. Evidemment il était impossible de tout suivre.

J'ai assisté -de 17 à 18 h 30- à la Lecture musicale de Carole Martinez qui fut un moment de pure magie et davantage un spectacle qu'une lecture. Il mériterait totalement d'être à l'affiche d'une petite salle parisienne comme par exemple le Poche Montparnasse.

D'abord parce que l'auteure a été comédienne et interprète donc admirablement les dialogues de son livre. Nous avons été plongés dans l'atmosphère des roses fauves (2020), un roman écrit en prolongement de l'immense succès de son premier ouvrage, Le coeur cousu, publié en février 2007 et qui a reçu neuf prix littéraires, dont le Prix Renaudot des lycéens 2007. 

La musique de Cristóbal Corbel accompagnait à merveille ce moment puisque le récit fait référence à des coutumes espagnoles. Je reviendrai bientôt sur le travail de ce guitariste aux compositions originales, capable tout autant de jouer en solo que d'accompagner la danse ou le chant. Il se produit seul et fait également partie des compagnies flamenco de Eva Luisa, Paco el Lobo et de Carlos Ruiz. Il vient de sortir l'album "Poema de Luna".
Ce soir sa musique était un dialogue unissant les mots de Carole Martinez comme les pas de la danseuse de flamenco Karine Herrou Gonzalez qui vit son art comme une respiration. Si vous l'avez vue sur la scène de Culture Box en janvier dernier vous pourrez mesurer la chance que nous avons eue de la voir danser.

Cette artiste a été danseuse classique et pianiste, spécialiste de littérature espagnole et de lettres classiques avant de se former à Séville et à Madrid pour devenir danseuse de flamenco. Elle a intégré la compagnie madrilène d’Antonio Reyes, s'est produit sur de multiples scènes en France et à l’étranger, a été invitée à danser dans plusieurs films et spectacles de Tony Gatlif et a travaillé avec de nombreux musiciens reconnus. Son langage chorégraphique est tissé d’intime et d’épure, de corps-percussion et de corps- mouvement. Sa présence dans ce trio a été unanimement saluée.

Carole Martinez est une auteure que j'aime beaucoup. En 2011, Du domaine des murmures a été récompensé par le Goncourt des lycéens et le prix Marcel Aymé décerné par le conseil régional de Franche-Comté. L'adaptation théâtrale que j'ai vue récemment au Lucernaire était prodigieuse. Et j'ajoute que son dernier roman Dors ton sommeil de brute est en lice pour le Prix du roman d'Antony. Autant dire que je reparlerai bientôt de Carole.
L'édition a été présente au cours de la journée avec :
• Les Argonautes. Maison d’édition indépendante, spécialisée en littérature européenne, fondée par Katharina Loix van Hooff en 2021. Emblématique de l’histoire et de la culture d’un pays, d’une ville, d’une région de l’Europe, chaque publication est pensée comme un événement.
• Kiléma. Maison d’édition indépendante dédiée au Facile à lire et à comprendre (FALC). Développé dans un premier temps pour les personnes présentant des troubles du développement intellectuel, le FALC s’étend à d’autres publics comme les lecteurs DYS ou TDAH, les personnes allophones, les personnes en situation d’illettrisme, les personnes vieillissantes ou encore les personnes sourdes.
• Les Éditions du Ricochet. Reconnues pour la qualité éditoriale de leurs albums documentaires, ces éditions ont à cœur de nourrir la curiosité, d’émerveiller et de mettre la connaissance scientifique à la portée de tous.
• Tom Pousse. Les éditions Tom Pousse se consacrent à la publication d’ouvrages destinés à aider les élèves ayant des difficultés scolaires, troubles des apprentissages, troubles DYS, TSA, TDAH et HP. Dans une démarche inclusive, Tom Pousse accompagne désormais les ados dans la lecture grâce à AdoDys, une collection de fictions.
• Les éditions du Panseur, créées en 2019, qui publient de la littérature contemporaine francophone. Dénicheur de nouveaux talents, le Panseur ne se refuse aucun registre littéraire pour le plus grand plaisir des lecteurs.
Des associations avaient répondu à l'appel comme Lire et Faire lire, si active dans les écoles de la commune, et Action éducation qui encourage le développement par l’éducation, en ciblant particulièrement les populations les plus vulnérables.

La Maison de Chateaubriand présentait l’exposition Atala 1801, voyage au coeur d’un roman. Il y avait aussi Doux Rêveurs, d’après l’album d’Isabelle Simler pour permettre aux enfants une immersion et un parcours sensoriel dans l’univers du livre. À partir de 3 ans. Mon petit point m’a dit, par la Maison d’édition Mes mains en or. À la découverte du braille. Et Manga Rakugo, par la Maison d’édition Ki-OOn en lien avec le spectacle Histoires tombées d’un éventail.
Outre Carole Martinez de nombreux auteurs et autrices sont venus tout au long de la journée pour dédicacer leurs ouvrages :
Véronique Foz, l’une des douze lauréat(e)s du concours Émergences de 2020. Sa nouvelle paraît peu après sous le titre Un éléphant dans un chapeau aux éditions Motus (album à partir de 5 ans).
Anouk Faure récompensée par le Grand Prix de l’Imaginaire 2024 pour son travail d’illustratrice sur le roman Les Trois Malla-Moulgars (éditions Callidor). ux saveurs d’océan.
Bertand Runtz, photographe, et alterne nouvelles et romans, avec une prédilection affirmée pour la forme courte, par exemple, Il faudra bien redescendre… (2024)
Estelle Faye qui a reçu une vingtaine de prix littéraires dans le domaine du roman noir pour adolescents ou du Young Adult revisitant les mythes grecs.
Gwen Guilyn, formée à la littérature anglophone, inspirée d’univers tels que ceux d’Edgar Allan Poe, ou encore Faulkner. Elle explore les dynamiques familiales à travers des univers gothiques et mouvants, proches du réalisme magique.
Gwendoline Simon, créatrice d’image animée par l’amour du manga.
Janis Jonevs sur le stand Les Argonautes
Laureen Bouyssou qui a déjà publié une soixantaine de livres et de jeux pour la jeunesse et qui écrit aussi des articles d’histoire et de science pour les hors-séries du magazine Sciences et Avenir.
Malika Doray qui a développé son goût de l’observation des rapports humains au cours de ses études en ethnologie, et qui s'adresse aux tout-petits en évoquant pour eux tous les sujets dans la douceur ou la bonne humeur.
Sandrine Garbuglia, auteure et metteuse en scène qui a collecté au Japon auprès des maîtres japonais de la parole leurs histoires méconnues du public francophone.
Siècle Vaelban autrice de romans jeunesse.
• Tristan-Frédéric Moir, auteur, psychanalyste, onirothérapeute, onirologue et spécialiste du langage du rêve.
Le merveilleux était aussi vivant à travers les compositions végétales et florales des travailleurs de l'atelier décoration florale de l'ESAT VIVRE installé 12 avenue des Fusillés à Chatenay-Malabry.

Rendez-vous est d'ores et déjà pris pour la prochaine édition qui aura lieu dans deux ans.

vendredi 22 novembre 2024

Le flan pâtissier de Grégory Cohen

Je ne sais plus comment elle m’est arrivée entre les mains. Considérant que réussir un flan relève de l’art, à moins d’employer de la poudre à flan (mais avec le risque d’avoir un appareil quasi “collé“ et donc absolument pas agréable en bouche) je m’étais juré d’avoir le cran d’essayer la formule mise au point par Grégory Cohen, que j’ai rencontré il y a quelques jours à l‘inauguration de son nouveau concept de restaurant One Place.

Par honnêteté intellectuelle je mettrai à la fin les proportions conseillées par le chef. Sachez que j’ai diminué un peu la quantité de sucre, la réduisant à 200 grammes, que n’ayant pas de crème liquide j’ai utilisé la même quantité de crème, mais sous forme allégée à 15%, et que faute de fécule de pomme de terre j’ai substitué avec la maïzena. Enfin je n’ai pas réservé au congélateur (trop petit) mais au réfrigérateur ou sur le balcon où la température voisine de zéro était une alliée.

Il faut croire que l’essentiel est dans la mise en oeuvre de la recette (que j’ai par contre suivie à la lettre) puisque le résultat a été tout simplement excellent, comme je n’osais l’espérer. Et il s'est bien accordé à un vin AOP Coteau du Vendomois.

La mise en oeuvre :
- Fouetter un œuf et six jaunes avec le sucre et la maïzena (j’ai utilisé le bras K de mon robot pâtissier)
- Pendant ce temps foncer la pâte dans le moule rond à bord haut et réserver au froid
- Parallèlement, faire chauffer le lait, la crème et la vanille
- Verser ce mélange chaud, mais pas forcément bouillant en 3 fois sur les œufs en continuant de battre
- Mettre la préparation 8 minutes à feu doux, sans cesser de fouetter : la crème ne doit pas attacher
- Laisser la préparation refroidir hors du feu, quitte à la transvaser dans un plat froid
- La verser une fois refroidie sur la pâte, puis mettre le moule 15 minutes environ au frais
- Enfourner 10 minutes à 240°C, puis 35 minutes à 180°C
- Laisser refroidir pour que le flan prenne
- Déguster à peine tiède
Les ingrédients de la recette d’origine :
1/2 litre de lait entier
25 cl de crème liquide
90 g de fécule de pomme de terre
6 jaunes d'œufs
1 œuf entier
220 g de sucre
De la vanille (j’ai pris de la vanille liquide)
Une pâte feuilletée (ou une pâte brisée)

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