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lundi 12 juin 2017

Night in white Satie au théâtre du Rond-Point puis au Festival d'Avignon off 2017

Il y eut une représentation exceptionnelle de Night in white Satie en septembre 2016 au Théâtre du Rond-Point. C'est la seconde version, donnée le 12 juin 2017, dans une formation plus resserrée, que j'ai vue et qui sera à l'affiche au Théâtre du Balcon, pendant le Festival d’Avignon du 7 au 30 juillet.

Le spectacle s'inscrit dans la célébration de l’anniversaire de la naissance d’Erik Satie (150 ans en mai 2016), à l'initiative de l'Adami qui gère et fait progresser depuis 60 ans les droits de plus de trente mille artistes-interprètes en France et dans le monde. le 18 octobre prochain ce sera Bob Dylan qui sera à l'honneur.

Pierre Notte a bénéficié d'une grande liberté pour évoquer cet immense artiste qu'était Satie, et qui a influencé tous les arts. Comédie, musique, chanson et danse se répondent sur scène et composent un spectacle très original et très réussi.

Il est impossible de résumer la soirée, même si le metteur en scène le fait très bien : Une maison de famille avec piano à queue. Et cuisine.
On dîne, chaque soir, on parle. Débats. On chante, on grignote. Mais les phrases sont de Satie, les chansons aussi. Un jeune homme, Eric Satie lui-même, génie familier, parle peu, ne s’y retrouve pas, dans cette famille où l’on rend des hommages, où on parle de tout, de rien, dans le vide, alors il danse. Il bouge, il quitte la famille et la tribu, le clan, casse les codes, misanthrope peut-être, et il danse, s’échappe, s’évade.
On dîne toujours, on rêve d’être un autre, une autre, une Diva de l’empire, un chat adoré, d’être soudain hors de cette catastrophe : les autres, le clan, comme Satie fuyait le monde, drôle et fou, cinglant, cassant, perdu. On en fait un cabaret, avec de la danse, du chant, des drôleries et du tragique, un repas tout en blanc, une fête funèbre, un vrai cabaret refuge de ceux qui ne trouvent pas leur place dans le monde. 
On dit du Satie, on chante du Satie, on joue du Satie, on fait du Satie, on danse et on devient Satie, on le raconte, on l’incarne, on déploie sa folie, on la danse et on la chante. 

Les interprètes, Kevin Mischel, Anita Robillard, Nelson-Rafaell Madel, Donia Berriri ont de multiples talents. Ils sont danseur joueur, chanteuse comédienne, comédien chanteur, pianiste chanteuse… Nicole Croisille est bien plus qu'une guest-star sur le plateau où elle tient complètement sa place. Il parait qu'elle a connu Satie et Ravel quand ils étaient adolescents, ce qui lui permet de nous offrir d’insolentes citations : On peut tout faire avec trois trompettes. Tout.

Erik Satie est né le 18 mai 1866 à Honfleur (Calvados) mais il a vécu aussi à Arcueil où il est enterré Des enfants lui rendent d'ailleurs un joli hommage dans une des salles du Rond-point et il faut souhaiter que cette exposition suive le spectacle en Avignon. (voir illustrations en fin d'article)

Erik, enfant, a fuit l’école et sa rigidité, avant de choisir les militaires. Mais pas longtemps. Il aurait découvert la musique tzigane au détour d’une rue, avant de devenir le roi des cabarets, du music-hall. Il invente des titres dingues (Gymnopédies ; Gnossiennes ; Trois morceaux en forme de poire... ) pour titiller Debussy. Il écrit des petits poèmes et des grands Mémoires d’un amnésique. Toujours paradoxal. Il danse avec Picabia, déteste Wagner, bichonne Picasso. Ravel refuse la légion d’honneur. Mais toute sa musique l’accepte. Pour lui, Apollinaire aurait inventé le mot "surréaliste". Personnellement, je ne suis ni bon ni mauvais. J’oscille, disait celui qui appelait touriste un habitant d'une tour.

Il a pris goût pour la misanthropie, a cultivé l’hypocondrie, et la mélancolie. Il prétendait préférer les chiens à ses compatriotes. On ne sait si ce fut intentionnel mais il aurait préféré attendre la postérité pour devenir l’un des compositeurs les plus importants de l’histoire de la musique.

Si vous êtes en Avignon cet été je vous recommande une halte au théâtre du Balcon pour assister à cette représentation très polymorphe et très réussie pour évoquer l'univers si particulier de ce musicien hors normes. Toutes les disciplines sont à la fête la nuit avec Satie !

Pierre Notte, qui nous a déjà convaincu de son talent cette année avec C’est Noël tant pis  sera très présent au festival d'Avignon. Outre Satie, il présente l'excellente Histoire d'une femme au Théâtre Les 3 Soleils à 13h40. 
Night in white Satie L’Adami fête Satie
Texte et musiques de Erik Satie
Conception, textes additionnels, mise en scène, Pierre Notte
Compositeur Erik Satie, arrangements et piano Donia Berriri
Vidéos Mathias Lameda
Chorégraphies Kevin Mischel
Avec Donia Berriri, Anita Robillard, Kevin Mischel, Nelson-Rafaell Madel et Nicole Croisille
Lumières d'Antonio de Carvalho
Son et régie générale, David Geffard
Production déléguée La compagnie des gens qui tombent
Coproduction L'Adami et le Théâtre du Rond-Point

Théâtre du Balcon, Festival d’Avignon
Du 7 au 30 juillet 2017 à 22h15, relâches les 11, 18 et 25 juillet

Une charmante exposition en marge du spectacle :

Erik Satie a vécu à Arcueil. Son parcours de vie et son amour des balades ont motivé les élèves de CM1 de l'école Jean Macé d'Arcueil de l'année 2015-2016 à faire un remarquable travail qui était exposé au théâtre. Ils se sont attelés avec beaucoup de talent à la confection d'un ouvrage sur le patrimoine de leur ville, tel que le musicien l'aurait apprécié, avec le concours de leur enseignante Mme Beauchet et d'une artiste, Marina Simonidhi.
Arcueil était un petit village dans la vallée de la Bièvre, aux coteaux recouverts de vignes. Au XVI° siècle les poètes ont beaucoup chanté Arcueil. Ronsard y trouvait l'inspiration au pied de l'aqueduc romain.  Et Satie a chanté : c'est toy Hercueil, qui encore portes ores d'hercule l'antique nom.
Dans les années 1870, la famille Raspail a construit une usine pour faire des recherches pharmaceutiques et fabriquer des liqueurs qui servaient à bien digérer. La fabrique s'est ensuite transformée en distillerie qui produisait de l'anisette. Elle a été rénovée pour devenir un espace culturel en conservant la charpente de métal.
Cette maison construite entre 1850 et 1870 par Emile Raspail, ingénieur des Arts et Manufactures, maire d'Arcueil fin XIX° siècle. Émile crée la Société Raspail en 1858 pour fabriquer et commercialiser les médicaments à base de camphre mis au point par son père (François-Vincent Raspail, chimiste et homme politique français du XIXème siècle qui a donné son nom à une station de métro). Il a construit des écoles, installé un musée. En 1886 est inaugurée près de l'église la plus connue de ses réalisations, une maison avec deux étages carrés, et un perron orné d'une marquise : la mairie, dessinée en 1883 par l'architecte Ulysse Gravigny.

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