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La publication des articles est conçue selon une alternance entre le culinaire et la culture où prennent place des critiques de spectacles, de films, de concerts, de livres et d’expositions … pour y défendre les valeurs liées au patrimoine et la création, sous toutes ses formes.

vendredi 6 juin 2025

Toutes les autres de Clotilde Cavaroc

Je suis venue avant-hier voir spécialement la représentation unique de Toutes les autres en région parisienne, en avant-première du festival d'Avignon.
Clémence est en fauteuil roulant depuis son accident de voiture trois ans plus tôt. Souffrant d'une solitude affective, elle a recours à un accompagnant sexuel pour l'aider à se réapproprier son corps et redécouvrir les plaisirs charnels. Elle trouve chez Antoine non seulement un amant complice, mais aussi une oreille délicate. Antoine tombe sous le charme de cette femme drôle et touchante. Les sentiments prennent le pas sur le contrat de départ. Sentant qu'il a franchi la limite, Antoine décide d'interrompre les séances au grand désespoir de Clémence. 
Vous aurez compris que Toutes les autres parle de l'accompagnement sexuel des personnes en situation de handicap, un moyen parmi d'autres de répondre à la détresse affective et sexuelle de ces personnes souvent reléguées au rang d’ "asexué.es". Sans se vouloir tribune ou plaidoyer, l’intention de Clotilde Cavaroc est de lever le tabou sur la sexualité des personnes handicapées et sur les travailleur.se.s du sexe.

De rouille et d’os, Intouchable, Le scaphandre et le papillon, Gabrielle, Simon de la Montana, Mon inséparable, Patients (tous chroniqués sur le blog, catégorie 7ème art) … beaucoup de films touchent au handicap mais rares sont ceux, même documentaires, qui explorent le sujet tabou de l'accompagnement sexuel. La réalisatrice Kathie Kriegel s’était prêtée avec brio à l'exercice dans son film A fleur de peau, un court-métrage primé en 2023 mais dont aucun extrait n’est encore accessible …

Il n’est donc pas faux de considérer que le sujet reste méconnu et l’autrice a longuement enquêté avant de commencer à écrire dans la continuité d’un court-métrage qu’elle avait tourné en 2022 avec deux comédiens qui sont aussi distribués au théâtre. Primé dans plusieurs festivals, Toutes les autres est à ce jour référencé à l’Agence du court-métrage, au catalogue de L’Extra court, et sur la plateforme Educ Arte.

Sur la scène le décor est sommaire, composé de plusieurs tapis sur lesquels on devine une table et un fauteuil roulant à jardin. Une voix off nous donne l’essentiel des chiffres à connaitre sur le nombre de personnes formées à l’accompagnement sexuel : 150 personnes en 2015 et seulement une trentaine sur le terrain.

On fait connaissance avec les personnages. Antoine (Stéphane Hausauer), infirmier de 47 ans, bouille sympathique, marié, vivant à Strasbourg, bien dans sa peau, donne de son temps à des handicapées 2 à 4 fois par mois comme assistant sexuel. L’activité est légale en Suisse, pas en France où elle est assimilée à de la prostitution, mais peut-on imaginer une condamnation pour délit d’humanité à l’égard de celles qu’il appelle des bénéficiaires

Il fait connaissance avec Clémence (Kimiko Kitamura) au cours d’un entretien téléphonique marqué par l’humour où il la met en garde de ses limites et du tarif de la prestation. Evidemment leur rencontre restitue l’étrangeté de la situation. On se doute bien que malgré tout ce type de relation n’est pas anodin et peut difficilement se limiter à un cadre professionnel même si les assistants bénéficient de réunions de recadrage avec des superviseurs.

A ce stade j’ai pensé au film de Frédéric Fonteyne, sorti en 199, avec Nathalie Baye et Sergi Lopez, Une liaison pornographique dans lequel un homme et une femme conviennent de se rencontrer pour assouvir un fantasme sexuel. Mais insidieusement, des sentiments se font jour et une relation se crée. Le sexe n'est plus la seule chose qui les réunit.

Clémence elle aussi s’attache (un peu trop) et comprenant que des sentiments pourraient prendre le pas sur le contrat de départ et qu'il a franchi la limite, Antoine décide d'interrompre les séances au grand désespoir de Clémence, provoquant un cri déchirant. Mais l’histoire n’est peut-être pas terminée …
L’accompagnement musical est choisi avec pertinence. Avec d’abord Da pacem domineun morceau d’Arvo Pärt, musicien estonien né en 1935, et qui est l'un des plus importants compositeurs vivants. Ses explorations et transgressions musicales influencent beaucoup ses contemporains. La chorégraphie sur La grande cascade de René Aubry est juste magnifique et il faut saluer le travail de Ira Nadia Kodiche qui a parfaitement dirigé les comédiens.

Citons aussi Pointillism de Laurent Dury, Daylight and the Sun d'Antony and the Johnsons et Après la Neige d'Airelle Besson.
 
Je te laisserai des mots de Patrick Watson est une autre chanson qui s’accorde très bien avec le contexte. Enfin quelle autre que Mais je t’aime par Camille Lelouche et Grand Corps malade aurait mieux convenu pour soutenir la déclaration d’amour de la jeune femme ?

On sort conquis par le propos, le jeu et la mise en scène (d’Elise Noiraud). Nous avons vu une femme qui est bien comme "toutes les autres". C’est un spectacle qui mérite toute l’attention du public.
Toutes les autres de Clotilde Cavaroc
Commande de mise en scène Elise Noiraud
Avec Kimiko Kitamura et Stéphane Hausauer
Création lumière François Leneveu
Scénographie Fanny Laplane
Chorégraphies Ira Nadia Kodiche
Mercredi 4 juin 2025 à 16h au Théâtre de Belleville qui reprendra le spectacle à la rentrée
À partir de 12 ans
Au festival d’Avignon à l’Artéphile du 4 au 26 juillet à 15 h 55, relâche les dimanches

jeudi 5 juin 2025

Happy Apocalypse de Jean-Christophe Dollé

Comme le dit Perle dans la bande-annonce de Happy Apocalypse tout n’est affaire que classification et il faut être nommé pour exister. Et la spectatrice que je suis a bien du mal à nommer ce spectacle qui se qualifie simplement  de "théâtre contemporain".

Après "E-génération", que j'avais vu au théâtre Victor Hugo dans le cadre du festival Virtuel.Hom(e), "Mangez le si vous voulez", "Téléphone-moi ", "Je vole… et le reste je le dirai aux ombres", "Allosaurus", "Le hasard merveilleux... Jean-Christophe Dollé présente cette nouvelle pièce qu’il a mise en scène avec Clotilde Morgiève.

Bien sûr on peut estimer que c'est un conte musical électro-pop, une protopie, qui questionne la place de l’humain, une ode à la fragilité où le burlesque, la poésie, l’astrophysique et la métaphysique se croisent dans un tourbillon psychédélique autour de 6 comédiens et 3 musiciens en live qui font vivre des personnages fantasques et quelques animaux pour donner à l’humanité une chance de se réinventer.

Bref c’est un spectacle hybride, donc pleinement cohérent avec le propos consistant à tisser une trame théâtrale à partir de Perle, au prénom clairement choisi sans hasard, résultat du croisement entre une femme et un Varan de Komodo. Elle serait le premier enfant hybride de l’histoire de l’humanité mais beaucoup d’autres humains à tête d’animal vont peupler la scène comme le suggère la photo qui ouvre cet article.

Le titre est autant une oxymore qu'une allitération sachant qu'apocalypse signifie "révélation" en grec. A l'inverse de la plupart des spectacles, celui-ci doit, me semble-t-il, être regardé pour ce qu'il est, sans trop réfléchir, à part deux-trois interrogations évidentes, à propos de ce qui détermine le monstre (où là encore l'étymologie est essentielle puisqu'il est ce qu'on montre), et de tout ce qui alimente l’éco-anxiété grandissante à mesure que l'on souligne les effets de la pollution, du capitalisme et de la croissance exponentielle, du réchauffement climatique et la dégradation de notre planète parallèlement à l'injonction à être heureux.

Au lieu de nous effrayer davantage, les créateurs de ce spectacle invitent les spectateurs à vivre en leur compagnie une folle fête, irrévérencieuse et transgressive.

Pour mieux y parvenir, outre un jeu très fin, mené par une formidable bande d'acteurs (capables d'endosser plusieurs rôles et de danser … et on imagine combien Aurélie Mouilhade a dû les faire répéter). Marie Hervé a imaginé un décor déstructuré, composé de cases sans cesse repositionnées dans un théâtre de théâtre de manipulations (bravo à la technique !) façon puzzle vertical ou tetrix dans une ambiance surréaliste et des couleurs pop et illustrant le théorème selon lequel le vide est une illusion.

L'ensemble baigne dans des tonalités de bleu intersidéral (Simon Demeslayqui parfois est difficile à supporter mais qui permet de focaliser le regard sur certains endroits. La musique, interprétée en live remplit une fonction essentielle. Les trois musiciens (parfois acteurs) sont totalement intégrés dans la progression de l'histoire : le claviériste Noé Dollé, le guitariste et bassiste Laurent Guillet et le batteur percussionniste Pierre Martin-Bànos.

La musique a spécialement été composée pour l'occasion, avec de multiples sources d'inspiration allant de Radio Head à Eminem en passant par Ben Mazué. On reconnaitra aussi le morceau Superman, de .1. Elle emprunte un chemin conduisant du chaos vers l’harmonie et s'il est vrai qu’elle adoucit les moeurs la technologie devrait adoucir l'existence.

Il faudrait sans doute pour cela arrêter de se poser des questions hautement existentielles comme Si tu m'oublies est-ce que j'existe moins ?

Qu’ajouter si ce n’est qu’on rit (aussi) régulièrement … 

Je conseille à ceux qui voudrait en savoir plus sur la genèse d'Happy apocalypse à consulter le dossier de la compagnie qui foisonne de références bibliographiques, iconographiques et musicales extrêmement recherchées. 
Happy Apocalypse de Jean-Christophe Dollé
Mise en scène : Clotilde Morgiève et Jean-Christophe Dollé
Assistés de : Madeleine Fourtune
Avec : Jean-Christophe Dollé, Clotilde Morgiève, Sol Espeche, Yann De Monterno, Géraldine Roguez, Noé Dollé, Rodrigo Viana, Pierre Martin, Simon Demeslay et la voix de Solenn Denis​
Scénographie et costumes : Marie Hervé
Création lumières, création machinerie plateau, régie générale : Simon Demeslay
Mise en son : Georges Hubert
Musiques : Jean-Christophe Dollé, Noé Dollé, Laurent Guillet et Georges Hubert
Chorégraphie : Aurélie Mouilhade
Couture : Julia Brochier
Perruques : Julie Poulain
Masques : Olga Reis
Coach vocal : Amélia Donnier
Assistanat régie générale : Lili Dollé​
Au Théâtre des Gémeaux Parisiens
Du 4 au 11 juin à 21h sauf le dimanche 8 juin à 17h
Relâche mardi 10 juin
Sera au Théâtre 11 pendant le festival d'Avignon du 5 au 24 juillet à 22h35
À partir de 13 ans
La photo qui n'est pas logotypée A bride abattue est de © Alessandro Gallo

mercredi 4 juin 2025

Avoir le réflexe Vendômois pour choisir un Gris

Je connais le travail des Vignerons des Côteaux du Vendômois, la variété de leurs vins, souvent bio, et qui sont commercialisés à des prix très raisonnables, ce qui bien entendu n’exclut pas de les consommer avec modération.

Les cuvées de Gris 2024 sont juste en bouteilles, ce qui me donne l’occasion de vous en reparler aujourd'hui avec un Coteaux du Vendômois Gris Montagne Blanche 2024 de la Cave Coopérative du Vendômois, dont le prix de vente (donné en fin d'article) signe un excellentissime rapport qualité/prix.

Je rappellerai d’abord, au risque de me répéter, que le cépage utilisé est le Pineau d’Aunis qui affectionne particulièrement ces terroirs de première côte. Il est issu du prieuré d’Aunis (près de Saumur) au XIème siècle. Ce cousin du Chenin Blanc s’est beaucoup développé dans le Vendômois depuis le début du XXème siècle et il constitue de nos jours la particularité de cette Appellation d’Origine Contrôlée.

La Montagne Blanche est un promontoire rocheux de tuffeau de couleur claire. Le donjon du chateau de Vendôme y fut autrefois érigé. Le Loir se divise en plusieurs bras au pied de la ville. Les vignobles se sont développés sur les coteaux et bénéficient d'un microclimat propice à la culture de la vigne. Le Pineau d’Aunis s’y exprime magnifiquement et confère aux Gris du Vendômois une typicité tout à fait originale.

C'est le terroir de silex rose qui apporte vivacité acidulée et élégance au vin tandis que l’argile lui confère rondeur et fruité. Les raisins ont été récoltés à pleine maturité, avec une superbe arrière saison, alliant la fraîcheur naturelle du Pineau d’Aunis à une belle intensité aromatique.

Pour les férus d’œnologie j’ajouterai que la vinification a été le résultat d’un pressurage pneumatique léger, d’un débourbage statique du moût 24 h suivi d’une fermentation à 14°C en cuves inox thermorégulées et d’un élevage sur lies fines pendant 4 mois.

La robe est saumon, avec des reflets argentés. Le nez est fondu et fruité, avec de la fraise, de la pêche de vigne et d'agrumes parmi lesquels on reconnaît le pamplemousse rosé. Des notes poivrées viennent soutenir les arômes de fruits murs et la pâte de coing.

La bouche est désaltérante et fraiche, avec une belle amplitude. Servir ce vin sur un melon avait de quoi surprendre mais la confrontation préparait le palais pour la suite.

On peut le proposer sur des charcuteries, des sushis, des gambas flambées, un filet de rouget, un rôti de veau et des fromages de chèvres affinés. Je l’ai associé à une tourte pousses d’épinard et saumon, aussi simple que bonne.
Je l’ai préparée avec une pâte feuilletée parce que je voulais ce coté beurré et croustillant. J’avais déposé des pousses d’épinards parmi lesquelles j’ai placé des morceaux de saumons d’environ 3 cm sur 2. J’ai nappé de 4 œufs battus avec un verre de lait et une cuillerée de maïzena.
Gris Montagne Blanche
Coteaux du Vendômois AOC
Cave Coopérative du Vendômois – 41100 Villiers sur Loir
Prix de vente à la cave 6 euros, 12 magnum

mardi 3 juin 2025

Les Dactylos, mise en scène d'Éric Chantelauze

Il ne faut pas craindre d'entendre un texte d'une horreur insensée sur l'état d'esprit de ce qu'on appelait le personnel de bureau. Certes, leur travail a considérablement changé depuis 60 ans. L'ordinateur a remplacé la Remington que j'ai remarquée (par hasard) dans la vitrine d'une boutique en sortant du Conservatoire de Versailles.

Alors qu’Eric Chantelauze change de costume dans les coulisses du théâtre Montansier où il vient d'interpréter Joseph Kessel dans Le chant des lions, son nom apparaît le même jour au générique d'une pièce en tant que metteur en scène.

Il s'agit d'une comédie sociale et romantique se déroulant au début des années soixante dans un bureau new-yorkais mais qu'on ne s'y trompe Les Dactylos mêle une certaine forme de mélancolie à un humour mordant.

Elle a été écrite par Murray Schisgal, un dramaturge, scénariste, producteur de cinéma et acteur américain (1926 - 2020). Ses pièces n’ont commencé à être connues en France que lorsque Laurent Terzieff décida d’en adapter plusieurs, dont Les dactylos, en 1963. Il a été le formidable scénariste du film de Sydney Pollack Tootsie, dans lequel il interpréta le rôle de Party Guest en 1982.
A partir d'une scénographie simple (mais efficace) Éric Chantelauze dirige avec finesse Jérôme Rodriguez (Paul) et Valentine Revel-Mouroz (Sylvia). Les premières minutes font penser à la manière de jouer de Jacques Tati dans les années 70. Les déplacements sont raides et caricaturaux à l'extrême … jusqu'à ce que le spectateur devine que le moindre geste est intentionnel pour signifier le niveau de routine et de conformisme des personnages. Comme ce sera jouissif de les voir ensuite "perdre les pédales".

Pour le moment ils commencent leur journée de bureau en retard mais Sylvia, qui arrive en claquant des talons, aura eu la présence d'esprit de reculer les aiguilles de la pendule murale. L'honneur de la jeune femme est sauf. Il est à la hauteur de sa promotion entant que "surveillante de tout le service" (à savoir juste deux personnes).

En une heure de temps, semblant se dérouler sur une journée, c'est toute leur vie qui défile sous nos yeux. Au tout début Sylvia Payton prend très au sérieux la mission de formation que lui a confiée son patron : apprendre le travail à Paul Cunningham, qui vient d’être engagé pour la seconder à taper des adresses à la machine. A la moindre des erreurs de ce collègue qui prétend être un peu rouillé cette employée consciencieuse qui "prend tout sur elle" est psycho-rigide et se révèle être une véritable miss catastrophe. 

Elle ne résistera pas longtemps au plaisir de lui révéler les manies du patron. Travailler n'empêche pas de parler et d'essayer d'en savoir plus sur la personnalité de chacun, quitte à le soumettre à une alternative truquée dont il se sortira par une réponse absurde. Le spectateur a bien compris ce qui est en train de se tramer mais se demande malgré tout jusqu'où la mise en scène va nous entrainer.

La surenchère semble sans bornes et enfle dans une forme de ping pong intellectuel au cours duquel chacun dit ses blessures sans parvenir à l'approbation de l'autre. le ton monte même si Sylvia prétend ne pas être énervée. Le ton bascule dès qu'elle a vu en Paul un homme à séduire et réciproquement. Rires et rapprochement nourrissent l'enthousiasme de la jeune femme qui envisage le mariage qu'il faut urgemment annoncer à la famille : Je vais appeler ma mère et vous votre femme. Mais le collègue n'entend pas les choses de cette oreille. On assiste à une crise très violente qui emprunte tous les codes du boulevard. Tout est prétexte à un effet comique.

Le temps semble avoir passé brutalement et cruellement. Les corps se sont dégradés. Les confidences deviennent amères. La misère intellectuelle refait surface et on découvre l'alcoolisme de Paul, qui déploie ses ambitions dans un déni remarquable. Ils tombent d'accord pour s'estimer tout seuls dans un monde cruel et solitaire, signant un nouveau rapprochement aussi fugace que le premier.

Ils sont désormais chacun dans sa bulle de folie et de démesure … mais consciencieux jusqu'au dernier instant. Murray Schisgal a composé une partition malicieuse et grinçante sur le quotidien monotone des employés de bureau. Eric Chantelauze s'empare du moindre effet comique possible pour en souligner une forme de détresse aussi noire qu'absurde, en poussant le curseur de l'humour le plus loin possible.
On rit et on croit l'époque révolue mais il existe sans doute encore des gens qui raisonnent comme ces deux employés qui sont confondants de sentiments médiocres, et qui ne réaliseront jamais leurs rêves, faute de s'en donner les moyens. 

Ce que réussissent formidablement les comédiens, ce n'est pas tant de les incarner, c'est de se livrer à ce qu'on appelle un numéro d'acteurs et il est hors normes. La musique choisie pour clore le spectacle est un dernier clin d'oeil puisqu'il s'agit de Can't Take My Eyes Off You (Je ne peux pas te quitter des yeux) chantée par Andy Williams. Le titre a été créé en 1967 par Frankie Valli et il est devenu un des titre les plus repris au monde, de Muse à Amanda Lear, en passant par Lauryn Hill, et même Line Renaud. 

Les Dactylos de Murray Schisgal
Adaptation de Laurent Terzieff
Mise en scène d'Éric Chantelauze
Avec Jérôme Rodriguez et Valentine Revel-Mouroz
Création dimanche 1 juin à 19h00 dans le cadre du Mois Molière 2025
Conservatoire à rayonnement régional de Versailles Grand Parc - Auditorium Claude Debussy - 24, rue de la Chancellerie - 78000 Versailles
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Le Mois Molière renforce son lien avec le festival d'Avignon. Après le succès de l’aventure d’un nouveau lieu de spectacle dans l’ancien Carmel d’Avignon où les spectacles ont fait quasi salle comble rapidement, une nouvelle demande a été adressée à François de Mazières par les propriétaires du réputé théâtre du Petit Louvre pour assurer sa programmation. Le Mois Molière sera ainsi présent dans trois salles du Off.

Les dactylos seront joués du 5 au 26 juillet à 18h15 au Petit Louvre, 23 rue Saint-Agricol, 84000 Avignon

lundi 2 juin 2025

Peacock, premier film de Bernhard Wenger

L'AFCAE a encore une fois mis à l'honneur un premier film et c'est une excellente découverte que celui du réalisateur autrichien Bernhard Wenger qui a été projeté ce soir par les salles adhérentes.

Son titre original, Peacock, parle sans doute dans toutes les langues. En français, on connait ce que signifie faire le paon. L'animal est symbole de beauté et de vanité mais on sait tous qu'il ne vole pas très bien et que son cri est affreux, ce qui ne le rend pas très sympathique même si ses plumes sont convoitées … pour orner un chapeau.

Les première minutes sont (volontairement) déroutantes. On comprend mal pourquoi il serait préférable de ne pas éteindre un incendie trop vite. Ni à quoi rime le billet que la femme tente de faire accepter à cet homme qui la raccompagne après un concert qu'ils ont agréablement suivi ensemble.

La révélation est stupéfiante. Nous allons suivre les pérégrinations professionnelles, et par voie de conséquence également personnelles, de Matthias (Albrecht Schuch) dont le travail consiste à être le partenaire idéal, en toutes occasions. Il peut donc aussi bien endosser le costume du parfait petit ami, du fils modèle ou même du sparring-partner pour vous entrainer à rompre avec un mari violent.

Par contre, et c'est là que la situation devient à la fois tragique mais aussi furieusement comique, il ne parvient plus à être lui-même dans sa vie quotidienne.

Bernhard Wenger a puisé l'idée du scénario en 2014 dans les agences pour "louer un ami" qui existe au Japon depuis au moins vingt ans déjà. Il est allé dans ce pays pour rencontrer des employés, et comprendre la raison d'être de ces agences et la manière dont les employés se préparent pour revêtir leurs rôles. Il a été touché par les confidences d'une personne qui est confrontée au dilemme de ne plus savoir qui elle est vraiment.

Ce qui renforce le mystère de la situation c'est que le personnage de Matthias, bien que dérouté, et presque paniqué, ne réagit pas autrement qu'en adoptant une passivité angoissante qui interroge le spectateur. Quel part de responsabilité Matthias a-t-il dans ce qui lui arrive ? Se pourrait-il qu'il ne soit que la victime d'un système perverti ? Et surtout, pourra-t-il rompre le cycle infernal, et si oui comment ?

Peacock est une comédie noire qui frôle le drame existentiel pour nous offrir une réflexion satirique sur les constructions sociales, les rôles qu'on s'acharne à jouer et les identités fabriquées. L'originalité de la mise en scène est renforcée par le fait que les effets comiques ne sont pas générés par les dialogues ou très peu, mais par l'absurdité des situations. Par exemple par la présence d'un énorme chien ou au contraire d'un minuscule animal. Et par la déconnection d'une maison où tout est régi par l'électronique.

Quand sa petite amie Sophia (Julia Franz Richter) lui demande quel vin il veut boire, il répond "comme tu préfères". Ce qui peut passer pour de la politesse sonne la fin pour Sophia :"Tu n’es plus une vraie personne", dit-elle à Matthias avant de le quitter.

On pourra penser à l'humour noir anglais ou à la manière pince-sans-rire que l'on a de s'exprimer dans les pays scandinaves mais sans mettre de coté le sens de la tragédie qui est particulier en Autriche. Si bien que le film prend parfois des allures de thriller quand l'aspect tragique devient effrayant, comme l'est le ronflement des pompes d'alimentation de la piscine.

Matthias va devoir travailler sur lui-même et sur ses problèmes, comme le lui suggère son ami et collègue David (Anton Noori). Mais rien ne semble fonctionner. Comme le paon de l’établissement où Matthias part en retraite, il devra rejeter le perfectionnisme afin de … peut-être … vraiment se trouver.

Matthias ayant parfois l'allure d'un robot, j'ai pensé au film I'm Your Man (Ich bin dein Mensch ou L'Homme idéal au Québec, ou Je suis ton homme). Dans ce film allemand réalisé à partir d'une nouvelle d'Emma Braslavsky par Maria Schrader et sorti en 2021 une scientifique acceptait, dans le cadre d'une expérience, de cohabiter avec un robot humanoïde, entièrement programmé en fonction de son caractère et de ses besoins. Il devait incarner l'époux parfait pour Alma, dont, jusqu'ici, la vie se résumait à la recherche scientifique.

Si la musique originale est composée par Lukas Lauermann, la bande son emploie fort astucieusement Unchained Melody par The Righteous Brothers

Peacock, premier film de Bernhard Wenger
Avec Albrecht Schuch, Julia Franz Richter, Anton Noori …
Festival de Venise 2024 - Semaine de la critique
Les Arcs Film Festival 2024 - Prix du Public et Mention spéciale du Jury Jeune
Festival Music & Cinema Marseille 2025 - Prix de la mise en scène
Sortie en salles le 18 juin

dimanche 1 juin 2025

Le Chant des Lions de Julien Delpech et Alexandre Foulon

Le Mois Molière est devenu un rendez-vous qui s'inscrit rituellement sur mon agenda pour la quatrième année consécutive (même si je l’avais découvert en 2014 au Potager du Roi mais à l’époque Versailles me semblait être au bout du monde).

J’essaie désormais chaque année de voir quelques créations. Impossible d’assister à toutes les représentations, elles sont « trop » nombreuses (330 cette année sur 62 lieux) mais j’approuve totalement la volonté de François de Mazières créateur du Mois Molière et désormais maire de Versailles de vouloir ce festival accessible à tous les publics, et dans tous les quartiers. Une des preuves en est la gratuité de multiples séances, ou leur tarif symbolique fixé à 2 €.

Il avait insisté au cours de la conférence de presse d’annonce du Mois Molière sur la place accordée au théâtre contemporain … et à la musique, ce qu’illustre parfaitement la création de la nouvelle pièce de Julien Delpech et Alexandre Foulon Le Chant des Lions (ci-contre à coté de Charlotte Mazneff).

Traditionnellement le festival ouvre dans la Cour de la Grande Écurie du Roi, donc en plein air et même si l’endroit ne permet pas l’installation de lumières comme dans une salle de spectacles ni la projection d’images dont les metteurs en scène adeptes de lapping sont du coup privés, j’avoue que l’extérieur apporte une dimension particulière, une atmosphère que nous apprécions tous comme un moment hors du temps.

La météo était incertaine hier, pour le premier soir de création. La metteuse en scène Charlotte Mazneff a fait pression pour ne pas faire courir de risque au décor et au dispositif technique. Le Théâtre Montansier a dû ouvrir spécialement pour accueillir l’équipe. On comprend pourquoi quand on découvre la scénographie d’Antoine Milian, à la fois sophistiqué et simple.
Elle permet au spectateur de passer en un claquement de doigt de l’appartement de Kessel à une salle de restaurant ou une scène de cabaret, tout autant qu’un wagon de restaurant pour finalemetn se retrouver dans le bureau de De Gaulle puis dans les studios d’enregistrement de la BBC.
A cour, une sorte de standard téléphonique sera le quartier général d’un curieux ingénieur du son, artiste en bruitages (Thierry Pietra ci-dessus avec Elodie Colin) qui, outre une infinité de second rôles lui donnant l’occasion d’un joli travail sur les voix et les imitations, nous révèle les coulisses de plusieurs bruitages : battements de coeur, déflagration, train, …, une averse et des claquements de bottes allemands, et même de la musique avec un verre. C’est Mehdi Bourayou, compositeur et acteur (ci-dessous à droite de Charlotte Mazneff), qui a imaginé cet univers sonore dans lequel il a même réussi à intégrer un extrait de la Symphonie de la machine à écrire de Leroy-Anderson, qui annoncerait presque le spectacle suivant, Les dactylos, qui sera créé au Conservatoire (et auquel je consacrerai un article très bientôt).

Côté lumières nous avions été prévenus que le temps avait manqué pour installer le dispositif tel que Moïse Hill l’avait prévu (et la difficulté aurait encore été supérieure en extérieur en fin d’après-midi) mais le résultat était déjà très prometteur.

Ce spectacle raconte la genèse du Chant des Partisans qui fut composé dans le but d’unir et de motiver les résistants afin qu’ils jouent un rôle décisif lors du Débarquement sur les plages normandes. C’était l’air préféré de son père, ce qui explique son émotion lorsque les deux auteurs, Julien Delpech et Alexandre Foulon, lui ont proposé de le monter. Ayant monté récemment avec eux Les téméraires à propos de l’affaire Dreyfus, elle ne pouvait qu’être partante pour cette nouvelle aventure.

Il ont travaillé un an à l’écriture en jouant avec la chronologie et en faisant de cette chanson, qui fut écrite par Maurice Druon et Joseph Kessel une double déclaration d’amour. Celle de Joseph, surnommé le lion à Germaine Sablon (1895-1985), et celle de Lazare Kessel, le frère de Joseph (1899-1920) à Léonilla Samuel, parents de Maurice. Ce dernier couple apparaît régulièrement par le biais de flash-backs.

C’est un spectacle de théâtre qui accorde une place de choix à la chanson, ce qui donne l’occasion aux auteurs de nous faire entendre quelques-unes de la trentaine qu’enregistra Germaine Sablon et dont nous n’avons guère conservé en mémoire que le Chant des partisans.

Une part importante est aussi consacrée au travail de l’armée des ombres à laquelle appartenait Katia Gangardt, la deuxième épouse de Joseph Kessel (avec d’autres célébrités qui n’apparaissent pas dans la pièce comme Marcel Pagnol ou Gastion Gallimard). On devine le rôle que Germaine a joué dans la Résistance. Engagée dans la France libre, elle poursuivit la guerre en tant qu'infirmière jusqu’en Italie et en France. Elle sera décorée après la Libération de la médaille de la Résistance et de la Croix de guerre, et plus tard la Légion d’honneur, ce qui fait d'elle la plus décorée des chanteuses. Elle méritait bien que sa mémoire soit honorée un jour sur une scène de théâtre !

Les dialogues se concentrent sur un moment de la vie amoureuse du Lion, partagé entre Katia et Germaine, bien avant qu’il ne rencontre Michèle Winifred O’Brien à Londres en 1944, la fameuse "beautiful darling" et qui sera sa troisième épouse.

La vie de Kessel a sans doute été simplifiée par les auteurs en raison de sa complexité. Ils ont conservé l'essentiel pour servir le propos du spectacle. Ceux qui sont voudront absolument démêler l’authentique de l’invention trouveront les clés, scène par scène, dans le livre qui publie le texte de la pièce.

Ils ont en tout cas réussi à ciseler de jolis dialogues pour des comédiens qui s’en emparent avec délice. Kessel (Eric Chantelauze) refuse de se laisser enfermer dans un livre comme une fleur dans un herbier. Katia (formidable Élodie Colin qui incarne aussi la Carpe, une résistante d’un courage exemplaire) accepte qu’on ne mette pas un lion en cage mais qu’on le laisse gambader jusqu’à ce qu’il revienne.

Après plusieurs péripéties inspirées par les évènements historiques, qui permet à Thibault Pinson d’incarner plusieurs personnages savoureux, viendra l’instant de la création d’une chanson qui unisse, rassemble, fédère. Un lyrisme sans borne est à l’œuvre : Je veux sentir siffler les balles au-dessus de ma tête (…) Ton arme c’est ta plume, ta chance c’est de pouvoir (encore) écrire.

On connait les qualités de Vanessa Cailhol autant à l’aise comme comédienne (sa dernière apparition dans Maupassant Inside était prodigieuse) que comme chanteuse (on se souvient de sa présence dans Courgette, qui lui valut un Molière l’an dernier). Il faut saluer sa présence joyeuse et sa voix superbe. Elle nous a offert une magnifique interprétation de Mon homme et bien entendu le fameux Chant des partisans qu’elle démarre presque a capella pour la finir en chœur. Nous sommes le 30 mai 1943, et ce morceau est enregistré pour le film de propagande Three Songs about Resistance (d'Alberto Cavalcanti).

C’est lorsque les choses ne sont pas raisonnables que tout devient possible. Ce spectacle est intentionnellement émouvant mais il présente aussi beaucoup d’instants humoristiques, dosés avec précision.
Le Chant des Lions de Julien Delpech et Alexandre Foulon
Mise en scène et dramaturgie de Charlotte Matzneff
Avec Mehdi Bourayou, Vanessa Cailhol, Éric Chantelauze, Élodie Colin, Thierry Pietra, Thibault Pinson
Scénographie Antoine Milian
Musique Mehdi Bourayou
Lumière Moîse Hill
Costumes Corinne Rossi
Création Mois Molière 2025 le 31 mai à 20h30 et le 1er juin à 17h00
Théâtre Montansier - 13, rue des Réservoirs - 78000 Versailles
Tarif : 2 € • Réservation obligatoire

Festival Off Avignon 2025
Du 5 au 26 juillet à 14h40, Relâches les mercredis 9, 16 et 23 juillet
Au Théâtre des Gémeaux - 10 rue du Vieux Sextier - 84000 Avignon

vendredi 30 mai 2025

Fantasia, le troisième album de Dahlia Dumont

J'ai glissé Fantasia dans le lecteur de mon autoradio (oui, ça existe encore dans les voitures un peu anciennes) et ma vision des choses a aussitôt été modifiée. Dahlia Dumont y fait preuve dès le premier morceau d'une vitalité qui vous inonde sans prévenir.

Je ne connaissais pas cette artiste dont j'ai compris, quand est arrivé Fantasia (piste 5), le titre qui a donné son nom à l'album, qu'elle n'était pas française, ce qui explique qu'elle chante surtout en anglais, évidemment à la perfection.

Son accent est charmant quand elle s'exprime en français, dans deux chansons, Fantasia et L'Opossum (piste 11). Et d'une manière générale le travail sur la voix est exemplaire, tantôt légère et haute, tantôt grave.

Ecoutez Semi-automatic Trinquet (piste 3). Comme c'est enjoué, avec un très joli accompagnement musical digne parfois d'un orchestre de rue de la Nouvelle-Orléans, parfois l'accordéon d'un cours de danse sud-américaine. Et pourtant, écoutez les paroles. La chanteuse ose y dénoncer la courageusement la prolifération des armes aux États-Unis, illustrant la volonté de l’artiste d’utiliser sa musique comme un vecteur de messages importants. Preuve que la dame a des choses à nous dire.

Est-ce intentionnellement que Fantasia se déploie (à partir de 2 minutes 36) sur le même accompagnement musical que le si fameux sketch de La drague qui immortalisa le duo Guy Bedos/Sophie Daumier en 1973 ?

J'aime beaucoup Consent (piste 7) et ses accents exotiques qui vous évoqueront sans doute nombre de souvenirs pop-rock ancrés dans les années 80 et qui ont sans doute participé à la culture musicale de l'artiste, expliquant l'aspect mosaïque sonore de l'album. Mais là encore il faut décrypter les paroles autour du consentement.

Avec cet opus audacieux, Dahlia Dumont propose un voyage musical unique, décryptant la spiritualité de notre époque, porté par une voix envoûtante sur un son organique, mêlant très habilement world roots, folk, électro-pop, reggae, klezmer, rythmes latinos, blues et soul dans lesquels on reconnait le son du (petit) ukulélé de Dahlia mais aussi deux violons, des cuivres, un accordéon et bien d'autres encore que je cite tous à la fin de cet article. C'est un travail d'équipe minutieusement coréalisé par le batteur, ingénieur de son et mixeur Julien Tekeyan, et le pianiste Marc Bizzini

Souvent comparée à Joni Mitchell, Carole King ou Patti Smith, Dahlia Dumont a sans conteste réuni autour d’elle une famille de musiciens multiculturels et cet album est le fruit d’une très riche collaboration.

Il a fallu pas moins de six ans de création entre la France et les États-Unis pour donner naissance à ce troisième album, disponible sur le label Single Bel, dont trois années pour les enregistrements qui ont été effectués en France, au Studio Single Bel par l’ingénieur de son Olivier Hudry et au Studio POA Tekeyan, par les ingénieurs Julien Tekeyan, Louis Jos et Axel Vacher, mixage de Julien Tekeyan, et masterisation par Marcus Linon de Greasy Records.

Dahlia Dumont a grandi à New York auprès de parents immigrés, puis a vécu au Sénégal et en France. Elle est profondément originale, libre, engagée et humaine. Sa musique brasse des influences du monde entier parce que l'artiste s’est toujours entourée de musiciens d’horizons culturels divers et mêle à ses compositions une palette d’instruments provenant de partout. Ecouter Fantasia équivaut à se lancer dans un voyage intersidérant à la croisée des styles et des genres.

Fantasia de Dahlia Dumont
Avec la voix et l’ukulélé de Dahlia Dumont, la batterie et les percussions de Julien Tekeyan,  le piano de Marc Bizzini, la basse de Rafael Leroy et Yoshiki Yamada, les guitares de Benjamin Chabert, l’accordéon diatonique et le trombone de George Saenz, les contrebasses de Yoshiki Yamada et Benjamin Chabert, les synthétiseurs de Marc Bizzini et Julien Tekeyan, les violons de Karen Brunon et Sylvain Rabourdin, le violoncelle de Mathilde Sterna, le fiddle d'Elena Moon Park, la trompette et le flügel de Jackie Coleman, le dobro de Fabien Taverne, l’hélicon de Raphaël Gouthiere, le beatbox (Elan Freudenthal – le frère de Dahlia), le duduk armenien (Artyom Minasyan) et le batucada live (Komando Bidon), les chœurs d'Izaiah Graves “Zaí XP”, Geoffroy "Jeff" Tekeyan, Nicole Rochelle et Aurélie Sureau.
Enregistrement au Studio Single Bel par l’ingénieur de son Olivier Hudry et au Studio POA Tekeyan, par les ingénieurs Julien Tekeyan, Louis Jos et Axel Vacher, mixage de Julien Tekeyan, et masterisation par Marcus Linon de Greasy Records.
Disponible chez Single Bel depuis le 25 avril 2025 et sur toutes les plateformes digitales.

jeudi 29 mai 2025

Le festival S en S, 1er festival parisien du Seul.e en Scène recommencera l’année prochaine

On commence à avoir pris l’habitude d’aller au Théâtre des Gémeaux Parisiens que, forts de leur expérience avignonnaise, Nathalie Lucas et Serge Paumier ont ouvert dans l’Est parisien, au 15 rue du Retrait. C’était en septembre 2024 et la programmation avait d’emblée séduit les premiers spectateurs.

On avait bien compris, le jour de l’inauguration, que le duo était déterminé. Pour preuve, les réjouissances s’étaient déroulées sur deux journées.

Et comme ce sont des directeurs aussi audacieux que courageux ils se sont lancés dans un autre défi, celui de faire aimer les Seul. e en Scène en leur dédiant le premier festival du genre en profitant d'un mois de mai calme en terme de nombre de représentations. Ainsi donc, pendant toute cette période, ils ont affiché 12 spectacles dont certains avaient déjà fait leurs preuves, mais aussi des créations, qui sont en quelque sorte des avant-premières du Festival Off d'Avignon.

Par ordre chronologique de programmation : Dans les forêts de SibérieRossignol à la langue pourrie - Les frottements du coeur - L'Arlésienne - Le livre oublié - La Fleur au fusil - Un coeur simple - Madame Marguerite - La promesse de l'AubeZoom -Madeleine Béjart, une femme libre  - Cache Cache 

J’en avais déjà applaudi 6. Je n’ai eu la disponibilité de n’en voir que 2 supplémentaires, auxquels je tenais particulièrement d’ailleurs et (comme je le supposais) j’ai été conquise et je n’ai hélas pas trouvé la disponibilité pour assister à une représentation de 4 autres. 

Mais avant de poursuivre, mettons nous d’accord sur ce terme de seul en scèneSuffit-il d'interpréter un monologue ou d’être seul sur un plateau pour qu’on puisse qualifier le travail par cette appellation ? Le terme désigne pour beaucoup un one-man-show (ou one-woman-show), qui sont plutôt du domaine de la variété, de l’humour ou du conte.

Quand on se penche sur la programmation de cette première édition on remarque qu’elle recouvre néanmoins une large palette de styles. Mais ce sont toujours des spectacles très aboutis, avec une véritable mise en scène, un décor, des costumes, et … derrière le texte un propos fort, lequel a parfois été écrit par un écrivain célèbre, ou un auteur de théâtre reconnu. Ce sont des moments de théâtre complet qui se trouvent interprétés … par un(e) comédien(e) confirmé(e).
Ce festival correspond à un vrai besoin puisque Serge Paumier m’a confié qu’il recevait une centaine de dossiers chaque semaine. Il a été très bien accueilli coté spectateurs et a attiré un public conséquent. A tel point que Nathalie Dumas et Serge Paumier ont déjà décidé de réitérer en préparant une seconde édition de ce festival qui est destiné à se pérenniser, et même à se développer.

Alors que William Mesguich fut le parrain cette année, ce sera Delphine Depardieu pour la suivante. 

La programmation est bien avancée et sera définitivement bouclée en novembre de manière à pouvoir la formaliser dans une brochure qui sera disponible en décembre. Elle devrait comporter 80 levers de rideau sur tout le mois de mai (soit quasiment le double de la première édition), qui ne seront pas limités aux week-ends, en jouant tous les jours.

Le festival s’étoffera autour d’une vingtaine de propositions artistiques. Il pourrait y avoir un spectacle alliant théâtre et danse avec un grand nom de la danse qui vient de quitter l'Opéra (Mathieu Ganio ?).

La fille de Florence Arthaud ayant accordé les droits du livre de sa mère "Cette nuit la mer est noire" écrit en collaboration avec Jean-Pierre Bachelet aux Edition Arthaud, Nathalie Lucas pourra présenter Une femme à la mer, dans l'adaptation de Jean-Benoît Patricot et la mise en scène de Stéphane Cottin.

On devrait pouvoir assister à un spectacle autobiographique écrit par William Mesguich sur son histoire familiale et son parcours de comédien.

Il se pourrait malgré tout qu'un spectacle "hors festival" soit présent sur le créneau de 19 heures. Il est en effet question que la famille Demasure, de Joseph Gallet, Elodie Wallace (Ma famille en or) y emménage pour un moment.

Si vous avez comme moi loupé Les frottements du coeur sachez que Katia Ghanty reviendra la saison prochaine aux Gémeaux Parisiens de septembre à mars, deux fois par semaine. Ce sera l'unique exception : les autres seuls en scène seront présentés en mai. On pourra aussi applaudir William Mesguich et son Richard III, et chaque lundi de septembre à février Anne Coutureau avec Andromaque qui fut un grand succès l'année dernière au théâtre de l'Epée de bois. Il y aura bien d'autres choses encore !

Le duo a cependant entretemps une autre épreuve, celle du festival d'Avignon, avec une programmation qu'ils qualifient de "emballante", avec des spectacles mis en scène par des artistes auxquels le public est fidèle : Jean-Philippe Daguerre, Chritophe Lidon (avec Le roi se meurt de Eugène Ionesco dans lequel joue Nathalie Lucas), Bouvron, Virginie Lemoine, Christophe Malavoy, Anne Bouvier, William Mesguich …

S en S, 1er festival parisien du Seul.e en Scène du 1er au 31 mai 2025
Théâtre des Gémeaux Parisiens - 15 rue du Retrait - 75020 Paris

Du 05 au 26 juillet 2025 (festival d'Avignon)
Théâtre des Gémeaux Avignon - 10 rue du Vieux Sextier - 84000 Avignon

mercredi 28 mai 2025

Jan (sur un air de jazz) d'Emmanuelle Pol

La quatrième de couverture m’a donné envie de lire Jan (sur un air de jazz) qui vient juste de paraître chez Finitude.

Cette lecture aura été très fluide. Chaque chapitre est surmonté d’un chapeau, comme on dit dans le jargon de l’édition, lequel, en italiques, est un commentaire musical d’une dizaine de lignes. Comme j’aimerais savoir si bien décrire un morceau quand je dois faire une critique d’album ou de concert !
Un dimanche d’été, désœuvrée, elle est entrée par hasard dans un club de jazz de Bruxelles. Jan était au piano et elle est tombée amoureuse. De l’homme, de l’artiste. Émerveillée par leur complicité et leur entente charnelle, elle s’investit dans cette histoire avec une ferveur qui la surprend elle-même. À soixante ans, elle sait le prix du bonheur et c’est avec une passion que l’âge n’a pas émoussée qu’elle fera tout pour le protéger.
D'elle on ne saura jamais son prénom mais on apprendra à la connaitre à mesure qu'elle nous livre -à son rythme- ses confidences à propos de Jan, de son étrange ami Josef, de la mère de ce célèbre (mais fictif) pianiste et plus généralement de sa vie. On progresse lentement dans l’histoire. Il faut accepter le tempo qui nous est imposé et patienter pour en approcher les secrets et en comprendre les clés, tout autant le "tout va bien " récurrent de Jan que le "ça me suffit" de son amoureuse.

Ce n’est pas une forte contrainte parce que l’écriture d'Emmanuelle Pol est superbe. En voici un exemple, extrait d'un très beau portrait de Josef sur deux pages magnifiques pour décrire la personnalité du chat de gouttière maléfique qui gonfle ses poils pour impressionner l’adversaire (p. 56).

L'autrice doit avoir conscience que les lecteurs ne lisent pas un livre d'une traite. Que bien souvent il est ouvert après une difficile journée de travail et que la disponibilité à entrer dans l'histoire, ou à s'y replonger, n'est pas immédiate. Du coup ces débuts de chapitre représentent, à l'instar d'une citation, une aide à se préparer à entendre la suite et je les ai beaucoup aimés.

Elle nous offre un portrait sensible d'un homme au prénom qui sonne bien (p. 75) essentiel en effet pour devenir musicien. Sa déclaration d'amour à l'égard de cet homme qui révèle un talent inhabituel pour la cuisine (p. 106) s'étend largement à son univers musical, au jazz qui est un genre réclamant de formidables capacités d'adaptation (p. 90) mais aussi pleinement à la Belgique qui est devenue son pays d'adoption. Le chapitre XXI racontant un week-end dans la région touristique de Spa est un bijou.

Emmanuelle Pol est née en 1965 à Milan, d’une mère française et d’un père italien. Si elle a passé son enfance en Suisse elle vit depuis vingt-cinq ans à Bruxelles et connait très bien ce territoire fortement attachant. Jan est son septième roman.

Jan (sur un air de jazz) d'Emmanuelle Pol, Finitude, en librairie depuis le 14 mai 2025

mardi 27 mai 2025

Mensis II, le second album du duo de Marta et Ange

En appelant leur second album Mensis II le duo de Marta et Ange s'adresse à ceux qui les connaissent déjà. J'ai mis le temps mais j'ai suivi leur piste comme ils le proposent dans leur très élégante reprise de Mobilis in Mobile (piste 7).

Savez-vous que telle était la devise du capitaine Némo et que c'est la raison pour laquelle l'Affaire Louis Trio l'a emprunté pour leur quatrième album, sorti en 1993 ?

Ce sont peut-être les moments qui composent plus ou moins directement des hommages aux sonorités des années 70 et 80 qui font de cet album un objet assez étonnant dont la pochette (réalisée par Charles Guillemantsemble extirpée d'une malle aux souvenirs retrouvée dans le grenier d'un aïeul.

On dit qu'il faut aller chercher leurs influences dans la pop des Wings, la soul et les violons de Barry White, ou le psychédélisme rock de Tame Impala. J'en ai repéré d'autres mais le résultat leur est très personnel.

La très longue intro de guitare de Arimna (piste 1) suivie de la voix parlée de Marta, et d'Ange, évoque une première rencontre. En français puis en italien, installant la sensualité avant l'annonce d'une autre couleur musicale. Si vous écoutez attentivement peut-être croyez-vous, comme moi, pendant 4 secondes, très précisément entre 1 minute 40 et 1 minute 44 (et l'impression se répète à 2 minutes 38) qu'ils vont poursuivre avec Marcia Baïla, une chanson devenue culte qui a lancé la carrière des Rita Mitsouko et qui figurait sur leur premier album du même nom, en hommage à Marcia Moretto, en 1984 … Quand je vous disais que ces années là infusent Mensis II.

Si Marta et Ange ont réellement séjourné à Rimini, cette ville italienne située sur la côte adriatique, qui autrefois s'appelait Arimna, aucun doute qu'il ont dû se déhancher sur la musique des Rita.

La voix de Marta se fait légère et chaude, alertant le français et l'anglais. Comme elle est touchante quand elle reprend Mr Bojangles (piste 10) d'abord sur un simple accompagnement de guitare acoustique. Nous donnant envie de danser enlacés sur un parquet.

Le duo nous entraine avec ce disque dans les méandres de nos mémoires, nous réconciliant avec le temps qui passe et qui compose le terreau de leurs créations.

On pense certes à l'été qui arrive, aux températures qui grimpent, à notre désir de vacances et de soirées sur des plages mais on est aussi plus simplement entre amis à partager un moment intime.

Une autre planète (piste 4) suggère immédiatement la référence à une autre galaxie. La chanson suivante (piste 5) marque le retour à Rimini et à la voix parlée pour nous rassurer : Tôt ou tard il n'est jamais trop tard pour y croire … Tout va bien

Elle et lui (piste 6) est construite à la manière d'un dialogue de film, mélange les voix et les accents, et on devine pourquoi.

La voix d'Ange s'exprime elle aussi, sur May 1997 (piste 8).

L'oscillation entre pop et nostalgie démontre qu'on peut être fan des des années 70/80 et ne pas bouder une modernité affirmée. De même, sur le plan musical, Ange, qui est multi-instrumentiste, ne s'interdit pas un violon très romantique sur The down of Soraya (piste 9) qui reviendra tout au long de The Twilight of Soraya (piste 12). L'une et l'autre se passent de texte.

L'album se termine par une dernière évocation, très particulière, très cinématographique, que j'ai mis du temps à isoler. Premier samedi du mois (piste 13) est sans doute un clin d'oeil à la diffusion ce jour là du Journal du hard à minuit sur Canal+ à partir de 1991. On discerne dans les parole des allusions à des fantasmes et des bribes de confidence : Tout est prétexte à aimer et à se sentir entouré. En fait il n'y a pas de véritable criminalité, il n'y a que des souffrances. Les putains ont un corps qui n'a plus de limites.
Ecoutez attentivement et vous reconnaitrez aussi quelques accords empruntés à Gainsbourg.

Outre cet album très ciselé il faut regarder les clips qui procurent des sensations complémentaires. C'est sans grande surprise (mais avec un immense plaisir) qu'on suit le film de vacances super 8 de Arimna (piste 1) réalisé par Julie Perfezou. Rupture de ton avec Tôt ou Tard, superbe clip en noir et blanc réalisé par Fabrice Leseigneur. Nouveau changement de cap avec Shooting Stars Edit Radio (piste 2), tourné par Lionel Payet Pigeonqui nous propulse dans le désert d'une planète inconnue science-fictionnelle digne de Dune

Si vous devenez fan de Mensis vous irez aussi voir Fade to Grey, qui il y a deux ans, était encore dans un autre registre, jouant sur le dessin et les couleurs.

Mensis_Vol. II est sorti en avril 2025 et très franchement je sais déjà que je ne veux pas louper le Vol III.

lundi 26 mai 2025

Cache-cache de et avec Vanessa Aiffe-Ceccaldi

Je ne voulais pas manquer Isabelle Andreani dans son interprétation de Madeleine Béjart. Je ne voulais pas davantage faire faux-bond à Vanessa Aiffe-Ceccaldi dont je savais combien la création de Cache-cache était importante pour elle.

C’est une chance que le Théâtre des Gémeaux Parisiens présente des avant-premières avignonnaises. Il faut s’en emparer.

Si j’ai choisi une photo de Vanessa joyeuse et décontractée, prise sur le vif, après le spectacle c’est parce que c’est comme ça que je la connais le plus. Elle dégage une énergie folle et il ne faudrait pas s’arrêter au thème de son seule-en-scène pour la caractériser.

Pas plus d’ailleurs que par le rôle d'Alix qu’elle interprétait en 2022 dans le film réalisé par Alexandra Lamy (qui est marraine de Cache-cache). Touchées rend compte des parcours de résilience de différentes femmes qui ont subi des violences conjugales et/ou sexuelles. Il a été récompensé au Festival de la Fiction de La Rochelle. Le sujet est hélas d'actualité depuis que des voix se sont élevées pour dénoncer des faits trop longtemps considérés comme des "affaires de famille" et à propos desquels Vanessa a une position pour le moins militante.

Difficile de concevoir une scénographie plus simple avec d’abord juste une chaise. C’est que les lumières et la scénographie (de Régis Romele qui signe brillamment là sa première mise en scène) vont composer autant d’espaces que nécessaires à la narration.

La comédienne emprunte le masque de Thelma pour raconter un jeu de cache-cache qui va tourner mal le 30 juin 1984. Elle a 11 ans et elle est victime d’un cousin, ce qui constitue déjà en soi un traumatisme important. Sa mère en ajoute un autre, qui fera l’effet d’un coup de massue : son père n’est pas son père, ce que tout le monde savait, … sauf elle.

La mère, dont Vanessa restitue à merveille les paroles doucereuses ponctuées de Mon ange, comme les tics (ah cette façon de tenir sa cigarette !) est une femme pour laquelle le spectateur ne ressent aucune empathie. On la laissera se plaindre à longueur de qu’est-ce que je t’ai fait ? Elle est détestable, et pas seulement parce qu’elle ne sait cuisiner que des endives au jambon. C’est pourtant elle que la fille appelle parfois à l’aide … Mais c’est auprès de sa grand-mère qu’elle trouvera l’affection qui lui permettra de trouver la force de continuer à vivre.

Je ne sais trop comment vous convaincre que l’interprétation de Vanessa est captivante tant elle réussit à incarner une large palette d’émotions. Peut-être en vous disant que j'ai parfois songé à Eva Rami (qui reçut l'an dernier le Molière du Seul/e en scène pour Va aimer) et que je suis depuis plus de 6 ans. A Elise Noiraud aussi. Ces deux comédiennes ont écrit une trilogie à partir de leur histoire familiale. Vanessa suivra-t-elle la même voie ?

L'autofiction est une des spécificités qu'on retrouve fréquemment dans les seuls/es en scène, en toute logique parce qu'il faut bien que la marmite déborde faute d'exploser. Tant de personnes doivent puiser dans leurs ressources personnelles pour affirmer leur personnalité et triompher de violences intrafamiliales ! Leur talent est une porte de sortie pour progresser en sérénité. Puisse ce type de témoignage être autant salvateur pour celui/celle qui nous le livre que pour nous qui le recevons !

Sur le plan de la forme, ce spectacle est admirablement construit et Vanessa nous touche par son énergie débordante. Ses mots, parfois ceux, jamais impudiques, et son jeu restituent l'enfant, l'adolescente, la jeune adulte et la femme qu'elle est devenue (sans compter de multiples personnages) sans changer de costume -ce qui témoigne de sa force d'interprétation- en provoquant parfois nos larmes, souvent nos rires aussi, accompagné d'une bande-son très réfléchie. Sur le fond, Cache-cache appartient à ceux qui démontrent que la honte doit changer de camp. On se réjouira malgré tout que la mère finira par s’apitoyer : c’est toi qui as vécu ça ma fille … ?
Cache-cache de et avec Vanessa Aiffe-Ceccaldi
Mise en scène de Régis Romele
Costume Black Baroque by Marie-Caroline Béhue
Marraine officielle Alexandra Lamy
Du 24 au 31 mai 2025
Au Théâtre des Gémeaux Parisiens - 15 rue du Retrait - 75020 Paris
Puis à 19 h 05 au Petit chien, du 5 au 26 juillet 2025 (relâche les 8, 15, 22 juillet) pendant le festival d’Avignon
À partir de 12 ans

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