Publications prochaines :

La publication des articles est conçue selon une alternance entre le culinaire et la culture où prennent place des critiques de spectacles, de films, de concerts, de livres et d’expositions … pour y défendre les valeurs liées au patrimoine et la création, sous toutes ses formes.

mercredi 28 février 2018

Seasonal Affective Disorder de Lola Molina

Seasonal Affective Disorder avait été lauréat du prix Lucernaire Laurent Terzieff - Pascale de Boysson 2017, et le texte fut lauréat des Journées de Lyon des Auteurs. Cette pièce cinématographique annoncée comme une cavale amoureuse est reprise depuis la date symbolique de la Saint-Valentin et jusqu'à la fin du mois de mars.

Au début de la pièce, Dolly (Anne-Lise Heimburger) est dans un bar, sa situation est extrêmement trouble, et il y a cet homme, Vlad (Laurent Sauvage), un peu moins paumé qu’elle, qui lui propose un toit pour la nuit puis de partir avec elle.

Lola Molina, l’auteure, voulait qu’il y ait dans cette substitution du rêve à la réalité quelque chose de la subversion, du désir qui l’emporte sur la loi. L'intention de Lélio Plotton, le metteur en scène était de plonger le spectateur dans un hors-piste poétique, palpitant et amoureux. Ensemble, ils ont fondé la Compagnie Léla en 2007 et travaillent à la création d’espaces privilégiés d’écoute collective lors de la création de spectacles et d’installations sonores.

J'ai été moins convaincue par le recours à la vidéo, surtout parce que j'ai été éblouie par un faisceau lumineux très dérangeant qui a traversé la toile toute la soirée (visible sur la photo des saluts).

L'environnement déréglé, à la fois berceau et lieu hostile est représenté par des images matiérées, qui se teintent d’aplats de couleurs vives et artificielles, censés accompagner les variations des états intérieurs des personnages.

Le recours à un micro devait permettre d’accentuer certains évènements, de créer des gros plans sonores et de donner du mouvement. Les différentes atmosphères des lieux traversés sont légèrement modifiées, amplifiées par la peur ou l’excitation de la cavale. Pour ce faire le théâtre a eu recours à une diffusion en multicanal, mais il est probable que l'endroit où le spectateur est assis est un paramètre qui entre en ligne de compte. Toujours est-il que je n'ai pas vécu l'expérience immersive qui était annoncée.
Je garderai, malgré ces réserves, le souvenir d'un road-trip électrique à la hauteur de la légende de Bonnie & Clyde, porté par deux grands comédiens au travers d'une interprétation sensible, nuancée et néanmoins puissante.

La prochaine installation sonore de la compagnie, Epouse-moi / Arrache-moi, sera une déambulation sonore à partir de poèmes de Laura Kasischke, réalisée par Lélio Plotton et Arnaud Chappatte, en août 2018 à l’Abbaye de Noirlac, Centre culturel de rencontre, jusqu'au 30 novembre 2018. Leur prochain spectacle Nous n’avons pas vu la nuit tomber, écrit par Lola Molina, mis en scène par Lélio Plotton est en cours de production.
Seasonal Affective Disorder
De Lola Molina (texte édité aux Editions Théâtrales)
Mis en scène par Lélio Plotton
avec Laurent Sauvage (Vlad) et Anne-Lise Heimburger (Dolly)
Création sonore : Bastien Varigault
Création Vidéo : Jonathan Michel
Création Lumières : Françoise Michel
Du 14 février au 31 mars 2018
A 21 heures du mardi au samedi
Au Théâtre du Lucernaire
53 rue Notre Dame des Champs - 75006 Paris
Réservations : 01 45 44 57 34
Le 28 mai 2018 au Théâtre la Décale à Vierzon

Les photos qui ne sont pas logotypées A bride abattue sont de Jonathan Michel

mardi 27 février 2018

Une journée chez Bofinger

Etre une petite souris (façon de parler) dans une grande brasserie comme Bofinger a quelque chose de fascinant. on s'imagine toujours des choses qui sont plus ou moins éloignées de la réalité.

Le décor y est magnifique et l'histoire du lieu est fascinante. J'en ai déjà parlé, en 2016 et en 2017, à l'occasion des célébrations que la maison organise le 6 décembre pour la Saint-Nicolas qui est un peu le patron de la maison puisqu'elle est alsacienne.

Je reviendrai sur le sujet en fin d'article pour ceux qui auraient manqué ces épisodes.

Mais avant ce sont les hommes et les femmes qui animent ce lieu exceptionnel que je voudrais mettre à l'honneur. Faire vivre un restaurant représente beaucoup de travail même si chaque personne que j'ai rencontré m'a répondu que ce n'était qu'une question d'organisation. Soit. Il en résulte que coté coulisses, l'ambiance est active mais respectueuse, très loin des séquences de Cauchemar en cuisine.

Vous verrez très peu d'images coté salle. C'est l'activité des fourneaux que j'ai voulu mettre en lumières.

Nous ferons ensuite un petit tour dans le décor si typique du rez-de-chaussée et du premier étage, sans oublier .... les toilettes qui sont peut-être les plus belles de la capitale et qui valent le détour.

lundi 26 février 2018

Cantate pour Lou Von Salomé

Cantate pour Lou est à l'affiche depuis un moment mais une série de contretemps m'a contrainte à venir plusieurs fois pour voir le spectacle, en faisant démentir l'adage jamais deux sans trois puisque la représentation a bien eu lieu ce soir.

Les dates sont maintenant restreintes mais vous pouvez toujours voir la pièce jusqu'au 26 mars, les dimanche (15h) ou lundi (20 h).

Le travail d'écriture entrepris par Bérengère Dautun, qui signe sa première pièce est remarquable et elle a eu pleinement raison (à l’heure où, comme elle le souligne, certains droits de la femme -acquis depuis des années- risquent d’être remis en cause) de retracer la destinée de cette grande figure féminine chez qui tout était exceptionnel : beauté, intelligence, amour de la vie. 

dimanche 25 février 2018

Coco, le dessin animé

Je suis sortie enchantée de la projection de Coco parce que c'est une belle histoire, pleine de rebondissements et parce que j'ai retrouvé tous les codes de la culture mexicaine.

Ils ne sautent peut-être pas aux yeux du public français mais pour moi qui ai passé cinq semaines l'été dernier dans ce pays chaque détail résonnait avec un souvenir, jusqu'à la scène de baignade dans un cénote (vaste puit souterrain) où j'ai eu la chance de nager lors de mon séjour.

Les guirlandes de papier découpé m'y avaient enchantée et j'ai trouvé très logique qu'on les découvre dès le générique.

On est tout de suite dans l’ambiance, en pleine préparation de El Dia de los Muertos, la fête des morts si importante au Mexique et qui se déroule sur deux jours, les 1er et 2 novembre, alors que la Toussaint (dont l'importance n'est pas comparable) ne dure qu'une journée. La fête des morts mexicaine reflète un double héritage, celui des Aztèques, avec leurs traditions pré-colombiennes, et celui des conquistadors espagnols, avec leurs traditions catholiques.

Certains se souviennent peut-être de la scène d'ouverture de Spectre, le James Bond 2015. Déjà, en temps "ordinaire" les crânes et les bougies sont partout.

L’arrière-arrière-grand-mère de Miguel, un garçonnet d'une douzaine d'années, a connu un épisode difficile avec le départ de son mari chanteur et guitariste Ernesto de la Cruz. Elle a décidé après cela d'une part de bannir la musique de sa vie (et de celle de ses descendants) et de faire un métier qui n'a rien à voir avec cet art.

Elle a lancé un atelier de confection de chaussures qui emploie toute la famille, de mère en fils. L'enfant nous raconte qu'elle aurait pu choisir de faire des pinatas, ou des masques pailletés pour couvrir le visage des catcheurs (deux grandes spécialités mexicaines)... en nous montrant en papier découpé ce que cela aurait donné mais non, ce sont les chaussures qui ont eu sa préférence.

On voit le petit garçon cirer des chaussures dans la rue, comme on peut en rencontrer aujourd'hui à chaque coin de rue dans tout le Mexique (même si ce sont maintenant des adultes). De la même façon toutes les femmes portent au quotidien des tuniques ou des robes brodées de fleurs multicolores ... et c'est ce qui m'avait tant surprise partout dans ce pays qui explose littéralement de couleurs.

Le réalisateur Lee Unkrich (c'est lui qui a fait Toy Storyinsiste sur l'importance de la cohésion familiale qui effectivement est essentielle dans ce pays. C'est une obligation de se souvenir des êtres aimés, et de transmettre leur histoire à la nouvelle génération. Mais si un ancêtre a fait quelque chose de répréhensible il est légitime de le bannir. C'est ce qui est arrivé à Ernesto, le créateur de la chanson Ne m’oublie pas que sa fille, (qui est Mama Coco, la grand-mère de Miguel) chantonne encore parfois même si sur la photo qui la représente à coté de son père, celui-ci a la tête déchirée.

Miguel adore son abuelita qui est touchante dans ses efforts pour maintenir une mémoire qui s'estompe de jour en jour. Elle mérite pleinement d'avoir donné son nom au titre du film.

samedi 24 février 2018

Le livre de ma mère

Le journal de ma mère est un texte magnifique que Patrick Timsit rêvait depuis des années d'interpréter. Je m'attendais donc à quelque chose de particulier, dans une mise en scène extrêmement soignée. 

Si le comédien déploie une sensibilité hors pair je quitte néanmoins la salle animée par une relative (et rare) colère. Quelle idée de l'avoir équipé d’un micro ? Le pauvre serait-il devenu aphone? Aurait-il peur de n’être pas entendu dans ce théâtre dont l’acoustique est juste parfaite ?

L’appareil, réglé plein pot durant les premières minutes, suggérait la pièce radiophonique. Comme il fut difficile pour les spectateurs à l’audition normale de se projeter dans l’intimité de la confidence !

La béquille ne s'accorde pas avec le parti-pris de mise en scène puisque Dominique Pitoiset lui fait interpréter le rôle d'un acteur qui répète son rôle, texte à la main, auquel il se réfère très souvent (alors que j'aurais parié qu'il le connaissait par coeur). A-t-on déjà vu des comédiens équipés de micro en répétition ?

Il serait Albert Cohen dans son bureau d'écrivain, en Suisse. L'incongruité provient alors de la présence d'un écran de cinéma en fond de scène, lequel n'existe que dans les bureaux des producteurs de cinéma ou chez les grands patrons d'agence de publicité.

On verra pendant un peu plus d'une heure Patrick Timsit arpenter la scène, s'asseoir, se relever, déclencher avec une télécommande la mise en route d'images, comme si nous assistions à une conférence touristique. Encore une fois rien ne nous place sur le terrain de la confidence. La première image annonce Le livre de ma mère ... on n'en doutait pas.

vendredi 23 février 2018

Guérisseur mis en scène par Benoît Lavigne

La scène est bordée d'une enfilade de chaises métalliques aux couleurs fanées. On se demande si nous n'allons pas être invités à y prendre place un instant. Mais nous ne sommes pas dans une de ces salles de spectacles miteuses où se produisait Francis Hardy, guérisseur de son état mais avant tout artiste. On s'y croirait pourtant.

Assis de trois quarts, l'homme marmonne, ou parle-t-il une langue étrangère ? Il énumère tous les villages reculés d’Écosse et du Pays de Galles en train de mourir où il se produit comme guérisseur. Leurs noms, nous dit-il, ont un pouvoir hypnotique et apporte l'apaisement de leur incantation.

Lui qui se présentait comme le 7ème fils d'un 7ème fils est en fait l'enfant unique d'un sergent. Les initiales de son nom, FH pourrait signifier franc et hardi. On s'apercevra qu'il ment comme un arracheur de dents. Si la franchise n'est pas son fort, il maitrise par contre la hardiesse.

Il pratique la guérison par l'imposition de ses mains et consent, en mimant les gestes qu'il fait sur des gens en proie au désespoir, que oui, de temps en temps ça a marché. Mais neuf fois sur dix il ne se passe rien. Pourtant, avec sa compagne Grace et son imprésario Teddy, il assure chaque soir le spectacle de ses dons exceptionnels, recourant au whisky pour calmer ses angoisses, entre l'absurde et l'essentiel. De retour en Irlande, dans un pub de Ballybeg, la vie de ces trois saltimbanques va soudainement basculer...

Créée en avril 1979 à New York, la pièce a été montée en 1986 au Lucernaire par Laurent Terzieff et jamais rejouée en France depuis cette date. Guérisseur fait de nouveau entendre la voix de Brian Friel(1929 - 2015), le Tchekhov irlandais dans cette pièce mystérieuse et envoûtante.

Chacun des trois protagonistes viendra nous raconter "sa" version de l'histoire. Le guérisseur, interprété par Xavier Gallais – en alternance avec Thomas Durand, est le premier sur scène. Il m'a parfois fait penser au personnage interprété par Gregory Gadebois, autre grand comédien, dans Mon âme par toi guérie.

On ne sait pas encore si ses paroles sont justes ou déformées. Il semble effondré d'avoir raté la mort de sa mère d'un peu plus d'une heure. Il danse, boit, les chaises se fracassent. Il arrive à l'épisode de l'homme tombé d'un échafaudage et paralysé.

Arrive ensuite sa femme Grace (Bérangère Gallotqui se lance elle aussi dans l'incantation. Elle est bouleversante dans sa détresse. C'est là que le bébé est enterré, loin de tout, point final. On devine que le pardon n'est pas de mise. Quel talent pour faire mal !

Elle s'en va, revient, et donne sa version d'une guérison avant d'en venir elle aussi au moment où l'homme est arrivé dans son fauteuil roulant. Elle a souffert d'un manque de reconnaissance de son compagnon dont elle aurait tant voulu les mains sur elle ...

L'impresario Teddy (Hervé Jouval) apporte sa joie de vivre en dansant à la manière de Fred Astaire. Il a le goût des formules : Une vie entière dans le show biz fait de vous un philosophe. Mais ses paroles ne sont pas plus claires que celles des deux précédents. Il refuse de travailler avec ses amis : faut pas que tu les mélanges (au boulot) même si ça te démange.

Etait-il ami avec Harry et/ou Grace ? On peut légitimement s'interroger sur la question. Quand Harry revient pour un quatrième monologue on se demande s'ils tous les trois vécu la même chose. Certes non. Mais ce dont personne ne doute c'est que ces trois là sont en manque d’amour et désespérés.

Alain Delahaye a entrepris de traduire toute l’œuvre théâtrale de Brian Friel. Douze volumes ont été publiés à ce jour. On lui doit aussi la version française de nombreux films, dont Le Patient Anglais, Billy Elliot, Looking for Richard, ainsi que de la série Game of Thrones. Il a raison de le souligner. Guérisseur n'offre pas de réelle intrigue, pas de dialogues, et pourtant le spectateur a l’impression d’un théâtre extraordinairement vivant, d’une richesse humaine inépuisable. Mais Dans le détail les récits divergent parfois profondément, et il devient vite impossible de connaître l’exacte vérité à propos du pouvoir mystérieux de cet Irlandais.

Pour Benoît Lavigne la métaphore est claire. Le guérisseur c’est l’artiste qui doit tous les soirs envoûter son public, capter son imagination, et lui faire croire à l’impossible. Brian Friel nous livre ainsi une réflexion inquiète (mais souvent pleine d’humour) sur le rôle de l’artiste, sur la solitude et sur la douleur de vivre. En ce sens Guérisseur est une pièce unique en son genre que Benoît Lavigne a mise en scène avec sobriété et intelligence.

Il est par ailleurs le directeur du Lucernaire, qui est bien plus qu’un théâtre. C’est aussi trois salles de cinéma Art et Essai, un restaurant, un bar, une librairie, une école de théâtre et une galerie d’exposition. Il appartient aux éditions de l’Harmattan. Il fonctionne à plus de 95% en recettes propres et est membre de l’Association de Soutien pour le Théâtre Privé.
Guérisseur de Brian Friel
Texte français de Alain Delahaye
Mis en scène par Benoît Lavigne
Avec Xavier Gallais ou Thomas Durand, Bérangère Gallot et Hervé Jouval
Au Théâtre Lucernaire
53, rue Notre-Dame-des-Champs 75006 Paris
Du 31 janvier au 14 avril 2018
Du mardi au samedi à 19 heures

jeudi 22 février 2018

Le Salon des Artistes Français fait le bilan de l'édition 2018

Le Salon des Artistes Français a clôturé dimanche 18 février 2018, dans le cadre d’Art Capital, sa 228ème édition avec une belle fréquentation de près de 33 000 visiteurs sous la verrière du Grand Palais et une ambiance générale positive.

Le grand froid n'a pas dissuadé les amateurs d'art comme les professionnels de venir découvrir des oeuvres qui témoignent de la richesse de la création contemporaine, comme on avait pu le constater déjà en  2017.

Du 14 au 18 février 2018, ont ainsi été réunis 650 artistes français et internationaux issus de 30 pays et représentant quelques 1 500 œuvres réparties en 5 sections. Cette année, le nouveau programme culturel accueillait une délégation d’artistes hongrois, une exposition de Street-Art, des visites guidées et une conférence sur l’histoire du Salon.

Parmi les partenaires, figurait le restaurant étoilé Lasserre dont le "nouveau" chef est Michel Roth (que j'avais connu au Ritz). Une reconstitution d'un salon était attractive sous la coupole même si le menu n'y figurait qu'à titre informatif.
Pour Martine Delaleuf, Présidente de la Société des Artistes Français cette édition confirme l’intention principale du Salon : faire découvrir les artistes d’aujourd’hui et toucher un public qui n’a pas l’occasion de venir dans les ateliers, ce qui donne une ambiance particulière dans les allées du Grand Palais tout en permettant aux collectionneurs, galeristes, médias et amateurs d’art de prendre le pouls de ce qui se fait de nos jours, en peinture, sculpture, gravure, photographie et architecture.

mercredi 21 février 2018

Les prix du brigadier 2017 (décernés en 2018)

Danielle Mathieu-Bouillon, Présidente de l'Association de la Régie Théâtrale, et Stéphane Hillel, Président de l'Association pour le Soutien du Théâtre Privé ont présidé la remise des Prix du Brigadier 2017, qui a eu lieu aujourd'hui au Théâtre Montparnasse, dirigé par Myriam Feune de Colombi, dans un morceau du décor du Lauréat.

La Présidente de l'ART a confié sa crainte quant au niveau des finances du fonds de soutien, redoutant que le ministère, comme la ville de Paris (dont l'adjoint au maire Bruno Juillard n'a pas pu venir cette année ... ce dont il s'est excusé dans un adorable texto lu à la salle). Son dynamisme a vite repris le dessus pour rappeler combien il était précieux de collecter des fonds qui permettent de conserver la mémoire du théâtre et s'est adressé à tous les présents : mes chéris ne jetez rien !

Le Brigadier est un prix modeste mais symboliquement puissant. Créé en 1960 il est la plus ancienne récompense accordée au théâtre. C'est la seule que Jean Anouilh accepta de recevoir.

mardi 20 février 2018

Le lauréat

Je sais parfaitement que tout le monde ne l'aime pas mais j'ai a-do-ré le Lauréat. Ce n'est pas une question de nostalgie envers le film avant-gardiste (mythique je sais, très choquant il y a 50 ans), ou la musique de Simon & Garfunkel (on aime toujours autant Mrs Robinson qu'on entend aussi dans le Livre de ma mère à l'Atelier) ou celle de Lou Reed (dont Perfect day fait un carton dans les théâtres) ni d'admiration pour la carrière d'Anne Parillaud.

Pas davantage pour les ramages orangés d'une des robes portées par Françoise Lépine (à l'instar de Marie-Lise Fayet dans Papa va bientôt rentrer ou Mélanie Doutey dans Douce-amère). Tout le monde semble avoir les mêmes idées au même moment. Il faut dire que les années 60-70 inspirent les metteurs en scène.

Ce qui m'enthousiasme dans le travail dirigé par Stéphane Cottin c'est la cohérence entre l'adaptation, la scénographie, la direction d'acteurs (quelle bonne idée de faire jouer des rôles trsè différents à plusieurs d'entre eux), la bande son, et le recours (intelligent, et ce n'est pas toujours le cas) à la vidéo qui nous offre ce qui est annoncé : une comédie de mœurs sur l’Amérique des années 60 aussi drôle que touchante. Car on rit beaucoup.

J'ai entendu beaucoup de critiques sur le jeu d'Anne Parillaud. Elle campe une Mrs Robinson à la diction mécanique, d'une maigreur inquiétante, et c'est ce qui rend touchant son personnage de mante religieuse alcoolique, désabusée et manipulatrice.

Benjamin ... est magistralement interprété par Arthur Fenwick, qui réussit à faire oublier Dustin Hoffman, qui fut le créateur du rôle au cinéma.

lundi 19 février 2018

Les loyautés

La couverture prend tout son sens une fois le livre refermé. Quelle claque ! J'avais énormément aimé D'après une histoire vraie, laquelle ne l'était pas tant que ça ... vraie. Mais je retrouve avec ce nouveau roman la force de la plume de No et moi, ou des Heures souterraines.

Il est bouleversant dès les premières lignes. La manière que Delphine de Vigan a de nous faire toucher le désespoir de la transparente Cécile ou la conviction d'Hélène. Elle brosse de superbes portraits de femmes car on remarquera que les hommes sont plutôt minables (William, le père d'Hélène), déchus (le père de Théo) ou fades (le collègue Frédéric). Les femmes peuvent être agaçantes, mais elles portent la vie et la défendent, sauf la prof de sport, madame Berthelot, odieuse, mais qui n'est pas un personnage principal.

Même si l'analyse d'Hélène est pour partie erronée (Théo n'est pas à proprement parler un enfant maltraité physiquement) il est malmené psychiquement et au bout du compte sa santé est réellement en danger).
Hélène, professeure de SVT, est alertée par le comportement de Théo qui lui évoque ce qu'elle a connu elle-même enfant, à savoir la maltraitance. Elle mobilise l'infirmière scolaire qui ne trouve rien de concluant. Frédéric, son collègue, craint que la jeune femme ne se mêle de ce qui ne la regarde pas. Le pré-ado ne se plaint de rien et ses résultats scolaires sont excellents au début de l'histoire. Les parents sont insaisissables.
Le lecteur saisit tout de suite la gravité de la situation. Delphine de Vigan peint une société à la dérive où la loyauté envers les adultes mène les enfants à la catastrophe. Elle écrit avec la densité d’un roman policier parce qu'on a compris que c'est un compte à rebours qui s'est déclenché. Rien ne dit qu'Hélène parviendra à éviter le pire.

Tous les éducateurs savent qu'un enfant maltraité ne se plaindra pas avec des mots. Aucune souffrance ne le poussera à remettre en cause ses parents, encore moins à les dénoncer, parce que ce serait leur faire du mal. C’est ce qu’on appelle le conflit de loyauté. Quand on a des soupçons on ruse en faisant dessiner l’enfant ou en lui demandant de raconter l’histoire d’un personnage imaginaire dans laquelle on décrypte  ... ou pas. 

Curieusement les gens dont c’est le métier, ou en tout cas qui ont le pouvoir comme infirmière, psy scolaire ... médecin, e font jamais de signalement au procureur de la république. Ils se retranchent derrière secret et neutralité. Mais ils sont très forts par contre pour culpabiliser les enseignants et leur rappeler leur devoir de signalement. Il est assez logique qu'Hélène "bidouille", quitte à franchir la ligne jaune. Parce qu'elle sait que (p. 157) que les enfants protègent leurs parents et quel pacte de silence les conduit parfois jusqu'à la mort. Elle le sait parce qu'elle a vécu une enfance terrible.

Delphine de Vigan montre que la maltraitance se propage d'autant "mieux" que personne ne communique avec personne. Aucun personnage n’a de vie de couple. Ils sont soit célibataire, soit séparés, soit en couple mais murés dans le silence pour protéger une femme malade ou une vie intérieure pas très jolie jolie. Ils ont tous l’air normaux. Est-ce que la vie de "famille" dite "normale" (au sens mathématique) serait devenue ainsi ?

Cécile le reconnait (p. 42) William pense toujours que je me fais des idées. Je ne sais pas quand nous avons cessé de parler. Il y a longtemps, c'est certain. Plus tard elle se souvient de l'atmosphère mortifère qui régnait à la maison quand elle était enfant (p. 66). L'histoire se répète souvent en matière de maltraitance.

Quand Théo retrouve sa mère après un week-end chez son père pour en dire le moins possible il faisait semblant de ne pas comprendre les questions, ou bien répondait de manière évasive. (...) Il lui semblait accueillir la souffrance de sa mère dans son propre corps (p. 53). Et quand il arrive chez son père il a la peur au ventre (p. 72) parce qu'il le sait au bord du désastre (p. 95). Cette terreur il ne peut la partager avec personne, même pas avec son meilleur ami Mathis. Par contre il l'entraine sur la voie dangereuse de l'alcoolisme.

Les chapitres alternent les points de vue exprimés par les deux femmes Hélène et Cécile qui parlent à la première personne et ceux des ados Mathis et Théo que l'auteur fait vivre à la troisième personne, ce qui instaure une distance et symbolise la difficulté à les atteindre.

L'auteure dépeint l'addiction à l'alcool avec beaucoup de finesse et là aussi de justesse. Le résultat est extrêmement prenant. Si un roman mérite l'expression d'écriture à l'os c'est bien celui-là. On n'est pas près de l'oublier.

Les loyautés, de Delphine de Vigan, chez JC Lattès. En librairie depuis le 3 janvier 2018

dimanche 18 février 2018

Papa va bientôt rentrer

Encore une histoire inspirée par une guerre. Ce n'est plus la Première Guerre mondiale comme avec le Petit poilu illustré.

Ç'aurait pu être la guerre d'Afghanistan car l'auteur est parti de l'anecdote des papas plats (flat daddies) que le gouvernement américain faisait parvenir aux familles, comme si posséder une reproduction grandeur nature de son père ou de son mari pouvait compenser l'absence.

Finalement Jean Franco a choisi de situer Papa va bientôt rentrer dans le contexte de la guerre du Vietnam, ce qui permet de voyager dans l'Amérique (conformiste) des années 70, lesquelles ont décidément le vent en poupe. Au moins trois spectacles ont un décor comparable, et les comédiennes semblent avoir la même garde-robe avec des grands motifs orangés, (créés par Juliette Chanaud).

Quoiqu'il en soit cette pièce est une heureuse surprise et on se demande bien pourquoi l'auteur a laissé passer quelques années avant de la proposer à José Paul pour la mettre en scène au Théâtre de Paris, lequel a dû attendre longtemps avant que les trois comédiens soient libres en même temps.

La pièce se déroule sur 24 heures, et 8 mois plus tard. Un drapeau américain en berne dans la cuisine ne laisse pas de doute. Nous sommes aux US, précisément dans l'état du Maine. Il est 13 h 50 et on a compris que la pendule va jouer un rôle important.

samedi 17 février 2018

Le petit Poilu illustré

Beaucoup d'enfants sont venus. Le premier rang leur est réservé. La représentation est très familiale et c'est réjouissant de constater que l'Histoire est un intérêt capable de remplir une salle. Peut-être aussi la réputation du Petit Poilu illustré y est pour beaucoup parce que franchement le spectacle mérite le Prix d'excellence.

Ferdinand (à gauche sur la photo) et Paul ont pour mission de revenir sur terre pour raconter la Grande Guerre (j'ai cru entendre le mot galère), celle de 14-18, en étant drôles.

Une force surnaturelle les fait redescendre sur terre, en costume d'époque, dans une chambre d'enfants encombrée de jouets ... qu'ils vont judicieusement utiliser pour mimer les actions les plus caractéristiques de cette catastrophe dont ils vont rappeler les chiffres accablants : 970 000 morts militaires, huit millions de civils, quarante si on inclut les blessés. Rien n'est comparable au séisme de cette Première Guerre mondiale.

On oublie trop l'ampleur de ces données. Il faut dire que la création du Mémorial de Falaise à la mémoire des victimes civiles de toutes les guerres n'a que deux ans d'existence.

Nos deux loustics ont fait du cabaret avant la guerre. Ils connaissent les ficelles pour faire rire, que ce soit le comique de répétition comme celui de la pantomine. Pour le moment ils commenceront en musique, l’un à la trompette, le second à l’accordéon avec une polka plutôt festive. C'est que nos soldats étaient partis joyeusement, avec la fleur au fusil pour certains, pour se mesurer aux Boches, comme on disait alors ... nos ennemis de l'époque. Ils font bien de le préciser.

vendredi 16 février 2018

L'attrape-souci de Catherine Faye

2001 a marqué les esprits à cause de l’explosion des tours jumelles. Mais il a pu se passer bien d'autres événements terribles. Pour moi c’est l’année du premier infarctus de mon père. Pour Lucien c’est la perte de sa mère. J’écris perte et non pas mort parce que c’est le mot juste.

Dans la librairie de Buenos Aires où il entre avec sa mère, il est captivé par de mystérieuses petites boîtes jaunes renfermant de minuscules poupées que sa mère lui présente comme attrape-souci. Selon une légende, si on leur confie ses soucis avant de s’endormir, le lendemain, ils se sont envolés. Alors qu'il hésite entre plusieurs boites, c’est sa mère qui s’est envolée. Disparue. Lucien part à sa recherche. Se perd. Les vrais soucis commencent.

Au fil de ses errances, rebaptisé Lucio par ses compagnons de route, il fait des rencontres singulières, cartonniers, prostituées, gamins des rues avec qui il se lie, un temps.

Nous allons partager sa vie trois ans durant et suivre l'enquête qu'il mène cahin-caha mais avec détermination sans faille pour retrouver sa mère. C'est un livre qu'on ne lâche pas. Le gamin est sérieux mais c'est encore un enfant. Le talent de Catherine Faye est de nous ouvrir sa tête et son cœur. Chaque scène se déroule devant nous comme si nous étions là-bas, dans ce bout du monde où il serait faux de croire qu’il n’y a plus rien

Ce roman est riche, exotique, envoûtant. Il explose de couleurs et d’odeurs. Les personnages sont extrêmes et pourtant l'auteure les rend cohérents. Commençons par la mère, qui n'aura pas transmis à son fils que des incertitudes. La vie a du joli tu sais, lui avait-elle dit un jour. Sans rien ajouter. Venant d'elle, une phrase douce, c'était une prouesse, alors il fallait s'en satisfaire. (p. 125)

jeudi 15 février 2018

Baby mis en scène par Hélène Vincent

Baby est une pièce mise en scène par Hélène Vincent au Théâtre de l'Atelier et il faut courir la voir pour le sujet, les acteurs, la mise en scène. Tout y est parfait.

On est en Louisiane en plein été  ... Le temps est à l'orage et pour moi qui connais la géographie des lieux je peux vous dire que la chaleur y est torride en été. Il y a de quoi vous taper sur le système quand on vit cloitrés dans une caravane comme Wanda et Al. Normal qu'ils s'abreuvent de bière. On ne peut pas le leur reprocher.

On a compris que la jeune femme (Isabelle Carré) attend un bébé, le cinquième en huit ans, et que ce n'est pas complètement un heureux évènement. Elle est pauvre mais jolie, et ne porte pas les marques des grossesses antérieures (ce qui était aussi le cas de la mère d'Hélène Vincent). Les futurs parents sont très amoureux et adorent leurs enfants. Des dessins maladroits décorent les murs. L'espace est encombré de jouets et de peluches. Même les verres posés sur la table évoquent ceux que les petits se disputent parce que leurs héros sont gravés dessus en couleur.

Le téléphone est coupé. Il faut aller "à la cabine" pour passer un coup de fil. Wanda pose une petite annonce sur le frigo pendant qu'elle s'absente quelques minutes. J'ai trouvé ça dans le journal faut vraiment que tu jettes un coup d'oeil.

Chaque mot compte : "Enceinte ? Couple marié, épanoui, cultivé et très à l'aise financièrement veut offrir à un enfant blanc en parfaite santé une vie heureuse. Différentes formes d'aides envisageables. Appeler en PCV".

mercredi 14 février 2018

Prendre la Saint Valentin par la baguette

La Saint-Valentin est une fête devenue commerciale, mais au Mexique elle est traditionnellement dédiée à l'amour et à l'amitié comme je l'écrivais en vous donnant une recette de petites galettes en forme de coeur.

J'ai eu envie de m'amuser cette année en détournant une expression, marcher à la baguette et la déclaration d'amour du Bourgeois gentilhomme à la Marquise : D’amour mourir me font, belle Marquise, vos beaux yeux ...

On pourra donc offrir à l'être aimé une paire de baguettes à la française ... ou quelques bougies de Mathilde M, ou les deux, sans se ruiner puisque les baguettes sont vendues moins de 15€.

mardi 13 février 2018

Plus de dix ans ... déjà !

2760 articles publiés ... certes en l'espace de 10 ans mais tout de même ... Je n’aurais jamais pensé, quand j’ai démarré l’aventure du blog, qu’une décennie plus tard je serais encore les doigts suspendus au-dessus du clavier à réfléchir aux mots qui caractériseront le mieux l’entrée dans la onzième année, même si depuis douze mois le rythme s'est ralenti.

On n'imagine pas (et après tout tant mieux) ce que cela demande d'effort et de disponibilité pour considérer chaque spectacle, chaque livre, chaque exposition comme si c'était l'unique objet de mon attention.

Mes articles écrits dans le domaine culinaire sont plus faciles, mais ne demandent pas moins d'attention, surtout quand ils sont illustrés par de nombreuses photos.

Je ne suis pas masochiste. Toutes les rencontres sont sources de grand plaisir. Et j'ai des discussions passionnées avec les lecteurs du blog que je croise de plus en plus régulièrement, ce qui me surprendra encore longtemps.

Chaque année je me fais une (nouvelle) promesse comme on peut les lire sur les billets "anniversaire" précédents. Je voulais en 2017 refaire de la radio et c'est avec joie que j'ai intégré en septembre dernier l'aventure du Talk-show sur Needradio pour y traiter des faits de société comme le harcèlement au travail, l'addiction aux écrans, la progression de la chirurgie esthétique, en alternant avec des sujets plus légers comme la croyance dans l'astrologie ou la symbolique des prénoms.

Pour 2018 j'aimerais avoir l'opportunité de publier (sous quelle forme, je l'ignore encore) les reportages que j'ai faits cet été au Mexique. J'y ai passé cinq semaines dans un pays fabuleux, où les paysages sont paradisiaques, et où surtout les habitants sont d'une gentillesse incroyable. J'y retournerai très probablement puisque ma fille s'y installe.
J'ai ramené un millier de photos et plusieurs interviews. Je voudrais partager la culture, les coutumes,  la cuisine et le mode de vie des mexicains et le blog est un espace insuffisant.

On dit que tout vient à point. Un jour pourtant un jour viendra couleur d'orange ... sans doute comme le chantait le poète.

lundi 12 février 2018

La douleur de Emmanuel Finkiel

Juin 1944, la France est toujours sous l’Occupation allemande. L’écrivain Robert Antelme, figure importante de la Résistance, est arrêté et déporté. Sa jeune épouse Marguerite, écrivain et résistante, est tiraillée par l'angoisse de ne pas avoir de ses nouvelles et la poursuite de sa liaison secrète avec son camarade Dyonis.

Elle rencontre un agent français de la Gestapo, Rabier, et, prête à tout pour retrouver son mari, se met à l’épreuve d’une relation ambiguë avec cet homme trouble, seul à pouvoir l’aider.

La fin de la guerre et le retour des camps annoncent à la jeune femme le début d’une insoutenable attente, une agonie lente et silencieuse au milieu du chaos de la Libération de Paris.

Marguerite avait sans nul doute déjà le caractère volontaire qu'on lui connait mais elle n'était pas encore célèbre (même si Rabier la connait pour avoir déjà publié un livre). C'est bien plus tard qu'elle a écrit ce texte, qui résonne désormais avec les mots de la Duras (l'article n'est pas du tout péjoratif mais signifie au contraire sa grandeur).

Mélanie Thierry rend parfaitement tout cela sans jamais surjouer. Elle est le plus souvent très belle, très pâle, très femme, avec les lèvres rouges. Elle semble forte : je n'ai pas peur, j'ai fait un choix et je l'assume. Mais le personnage frôle la folie, et cela dès la première scène où son mari est peut-être derrière la porte où quelqu'un a sonné.

L'alcoolisme qui lui vaudra tant de soucis apparait déjà : le vin change tout, dit-elle et on comprend qu'il supprime toute inhibition, efface la peur, et la rend capable d'audace. On surprend aussi le conseil de Diony de stopper la corydrane, un cocktail d'aspirine et d'amphétamines dont les écrivains abusaient à cette époque.

L'essayiste Dionys Mascolo est interprété par Benjamin Biolay qui confirme son talent de comédien. Il n'est pas le premier chanteur à réussir à conjuguer deux carrières. Comme Aznavour ou Dutronc avant lui. On espère qu'il poursuivra.

Le troisième personnage du trio (où le mari est finalement une figure mineure, un prétexte) est Benoît Magimel qui offre une autre facette de ce que la relation amoureuse offre comme potentiel d'érotisme pour le personnage de Marguerite qui apprécie qu'il lui donne l'illusion de n'être pas séparé de son mari.

Le réalisateur Emmanuel Finkiel n'est pas tombé dans le piège de la reconstitution, même si chaque plan semble juste sur le plan historique. Il capte chaque vertige en un bouquet d'images floues ou noyées dans la brume et la fumée des cigarettes. On ne sait pas toujours si ce qu'on voit est bel et bien réel ou le fruit d'hallucinations, ce qui plaide pour le fait qu'effectivement cette femme est plus attachée à sa douleur qu'à son mari, dont elle divorcera peu de temps après le retour. Elle se complait dans cet état où l'a jeté la culpabilité d'être pleinement vivante. Et le léger tic-tac de la pendule exerce un lent supplice.

dimanche 11 février 2018

Ayez l'oeil, Bibiche arrive

Bibiche est un mot qui m’évoque une relation affectueuse et familiale, la jeunesse aussi, peut-être même l’adolescence. Et bien que je n’en ai plus l’âge il a toujours un fort capital de sympathie.

J’étais donc intriguée par l’apparition d’une ligne de sous-vêtements portant ce nom, imaginant quelque chose de moderne, à la limite de l’impertinence. C’est exactement ce que j’ai découvert en avant-première.

Les modèles ont été dessinés par une équipe de créateurs parisiens, et la fabrication a été conduite en bénéficiant du savoir-faire en corsetterie de Barbara, qui est une marque renommée dans ce segment.

Des armatures et une coupe corbeille feront pigeonner la poitrine. Celles qui ne veulent pas d’armatures trouveront des coupes à leur goût sans être privées de décolleté plongeant. Et si vous ne jurez que par le rembourrage vous serez également satisfaites. C’est peut-être un détail pour vous mais c’est essentiel pour moi : les modèles sont conçus spécialement pour les épaules dites fuyantes (qui laissent glisser les bretelles à longueur de temps) avec un système quasi magique d’attache au milieu du dos, ce qui assure aussi de jolies épaules sous une robe d’été.

samedi 10 février 2018

Du pain riche en omégas 3 avec Mon Fournil

Cela faisait un moment que la machine se reposait. Il était temps de la réveiller.

La préparation de Mon Fournil à l'épeautre et aux graines de chia m'en donne l'occasion.

Attention, bien qu'il ne s'agisse pas de farine de blé elle ne sera pas exempte de gluten, je le précise pour ceux qui ont de réels problèmes de santé.

Sa richesse en acides gras Omega 3 permet de maintenir une cholestérolémie normal.

100g de ce pain permettront de couvrir 80% des apports nutritionnels conseillés en Omega 3. Cette farine est également riche en fibres et source de protéines.

vendredi 9 février 2018

Sans écran, sans jeu vidéo, sans réseau mais avec Sophie Rigal

On le dit de plus en plus et c'est hélas vrai. Les dégâts occasionnés par l'addiction aux propositions de la sphère Internet sont de plus en plus graves.

Sophie Rigal-Goulard a publié trois romans drôles et pertinents qui sont autant des alertes que des réponses et surtout en premier lieu de vrais plaisirs de lecture ... à programmer pour les vacances.

Ce sont les atteintes à la vie privée par suite de publications sur les réseaux sociaux où le harcèlement pousse des jeunes au suicide ou -dans les cas les moins extrêmes- au décrochement scolaire. Marie-Aude Murail fait partie des auteurs de littérature jeunesse qui tirent la sonnette d'alarme depuis longtemps.

jeudi 8 février 2018

Des coeurs pour la Saint-Valentin

On se demande toujours quoi faire d'original pour le 14 février. Quand on sait que les prix des fleurs flambent (et ce ne sont pas les dernières chutes de neige qui auront arrangé les choses en bloquant les transports de marchandises) pourquoi pas offrir des gourmandises aux gens qu'on aime ?

Je n'écris pas le mot "amoureux" en m'inspirant de la coutume qui est appliquée au Mexique où la Saint-Valentin n'est pas "que" la fête de l'amour mais aussi de l'amitié.

J'ai préparé des coeurs. Qui se conservent très bien, donc que l'on peut faire cuire quelques jours avant le moment de les partager.

C'est une recette qui théoriquement permet de faire des biscuits proches des célèbres Petits-Beurre. Ici le secret c'est l'emporte-pièce que j'ai trouvé chez Mathon.

mercredi 7 février 2018

Ces mains sur mon corps de Régine Heindryckx

Régine Heindryckx a une très grande passion, ce sont les livres; A tel point qu'elle a fondé l'association "Lire c'est libre" en 2013 et qu'elle organise régulièrement des rencontres avec des  auteurs.

Une fois par an, depuis janvier 2015, elle réunit un aréopage très conséquent dans les salons de la mairie du 7ème arrondissement à Paris. C'est l'occasion de discuter, de faire dédicacer des romans, et d'assister à des conférences.

Régine lit énormément, chronique régulièrement, partage ses avis et sa passion. Elle a ce qu'on appelle un caractère bien trempé, mais toujours extrêmement respectueux et une sensibilité hors du commun.

Ajoutez à cela que l'érotisme est un autre de ses centres d'intérêt (mais elle en a énormément comme aussi la cuisine et le jardinage) et vous comprendrez que tout cela l'ait inspirée pour écrire.

Et comme on n'est jamais si bien servi que par soi-même elle a courageusement choisi l'auto-édition pour son premier roman, Ces mains sur mon corps.

Vous allez beaucoup aimer si vous avez apprécié 52 nuances de Grey  il y a cinq ans. On est à un niveau d'érotisme très comparable. L'histoire ne s'arrête pas à cela et on peut même dire que ce n'est que l'habillage d'une intrigue beaucoup plus puissante.

Le personnage de Margot (qui n'est pas Régine mais bien une femme de fiction) a vécu un moment particulier qui l'a traumatisée et que l'on découvre par petites touches au travers des hallucinations qui la saisissent régulièrement.

Cette mère de famille, bonne épouse en ce sens qu'elle n'a jamais songé à aller chercher ailleurs le plaisir que son mari ne lui donne pas, va soudainement être envoutée par Romain, à qui elle va proposer de devenir sa maitresse.

L'un comme l'autre ont leur part de secret que nous découvrirons au fil des pages. L'écriture est audacieuse. Régine n'a pas froid aux yeux. Sa Margot revient d'une guerre terrible et mérite tout le bonheur du monde.

Ce premier roman est réussi. J'espère que ses nombreux amis auteurs lui faciliteront le chemin vers un éditeur pour le second.

Ces mains sur mon corps de Régine Heindryckx, éditions Régine Papillon, disponible aussi en Disponible en e book depuis le 6 novembre 2017

mardi 6 février 2018

Connaissez-vous le mug infuseur Cilia ?

Je trouve qu'on est ridicule à s'enthousiasmer pour un "petit" article domestique et pourtant je m'y mets avec ce mug infuseur Cilia® que, vous allez le constater, j'utilise à toutes les sauces ...

Cilia est une marque de Melitta que vous connaissez dans l'univers du café. Elle existe depuis 1908, l'année ou Melitta Bentz inventa le premier filtre à café.

J'y reviendrai tout à l'heure. Il faudrait d'ailleurs célébrer davantage les trouvailles féminines dans l'univers de la cuisine, parce que leur esprit pratique fait des merveilles.

La photo est assez explicite pour mettre en valeur les qualités de l'objet. Sa transparence qui permet  de ne pas verser plus d'eau qu'il n'en faut. Et aussi de juger du degré d'infusion, même si on emploie un minuteur.

lundi 5 février 2018

Le cœur à l’aiguille de Claire Gondor

J'avais rencontré Claire Gondor au Livre de Paris et nous avions sympathisé. Elle m'avait parlé avec flamme de son livre. Je m'étais engagée à être attentive à la sortie. C'est fragile, un premier roman ... Que m'était-il arrivé ensuite ? Je n'ai pas eu le coeur à me lancer dans l'aventure.

J'ai revu Claire à une soirée organisée sous l'égide des 68 premières fois, toujours aussi souriante, et aussi passionnée à défendre son petit, mais sans chercher à imposer quoique ce soit.

J'ai été heureuse pour elle de constater combien Le coeur à l'aiguille avait été aimé et défendu. Evidemment je me suis remise en question. Je n'ai cette fois rien promis mais je l'ai lu et à mon tour j'ai envie de le soutenir.

L'action se déroule quelque part dans une anonyme banlieue parisienne, dans les années 2000. Soir après soir, Leïla  assemble une robe constituée des cinquante-six lettres que lui a adressées Dan, son promis parti au loin.

La trame de leur histoire commune se dessine lentement : leurs rencontres, leur complicité, leur quotidien, les petits riens qui donnent à tout cet amour son relief si particulier. Chaque missive fait ressurgir un souvenir, un paysage, une sensation, qui éclairent peu à peu la géographie de leur intimité passée.

C'est lui qui le lui avait demandé : prépare ta robe, j'ai ma permission (p. 93). J'hésite à vous dire  la tournure que ce projet, dont rien ne dit qu'il sera réussi, va très vite prendre. C'est un défi technique comme le sont les robes conçues en chocolat pour le Salon du même nom. C'est une forme de pèlerinage qui lui permet de revivre les moments passés avec son amoureux. C'est aussi un chef-d’œuvre digne d'une année de compagnonnage.

Cette magnifique déclaration d'amour à un absent est commencée l'été suivant le drame que le lecteur devine. La jeune femme a un rituel, lisant d'abord la lettre choisie, plusieurs fois, jusqu'à en vivre le rythme de ce qu'elle nomme le ballet des mots. Elle boit un thé noir très sucré, grignote des douceurs, et choisira ensuite un fil noir ou un fil blanc. Les phrases étaient vivantes, leurs bras devenaient lianes et s'emmêlaient, les virgules n'étaient que des oiseaux en goguette et les accents des feuilles mortes tordues par le vent (p. 20).

Composée de 56 carrés blancs d'une phrase ou deux, la robe de papier, brodée d’encre sera-t-elle portée un jour et pour quelle occasion ?

Parviendra-t-elle à panser la béance, tromper le désespoir, rassembler les morceaux de son existence en miettes (...) suturer la douleur pour la faire taire enfin ? (p. 43)

Les missives sont autant de pièces de puzzle qui sont assemblées dans un ordre qui n'a rien de chronologique. Chacune vient se placer à l'exact endroit où elle semblait destinée.

L'écriture de Claire Gondor est magnifique et suggestive et le roman est parfaitement construit. Leïla, petite fille, regardait sa mère repriser et coudre après le dîner (p. 12). La quiétude du temps suspendu a imprégné son enfance et c'est en toute logique qu'une fois adulte elle choisisse cette voie salvatrice pour éviter à ses pensées de s'éparpiller après le drame qu'elle a vécu.

Ma douce, je préfère ne pas te parler de ce qui se passe ici. Encore un mois. Un mois et je suis à toi. (p. 28)

Chaque lettre (celle-ci est la 29 ème) est brève. Dan n'est pas démonstratif mais ses phrases sont lourdes de sens et Leïla confie ses commentaires au lecteur. Celle-ci ressuscite des mots d'amour un peu sauvages : le bla-bla, les je t'aime et la guimauve (...) rien que de la parlotte (...) Moi je ne t'embobine pas, au lieu de dire sans faire, je fais sans dire (p. 29). Ces deux là sont fait pour s'accorder.

Chacun des motifs brodés sur le tissu était la réponse de Leïla aux images mentales suscitées par les missives de Dan. Chacun différent mais chacun lié au précédent par une continuité secrète, par le chemin invisible qui ne deviendrait apparent qu'à leurs retrouvailles. (...) A son retour. (...) Elle ne saurait jamais si elle avait réussi ... (p. 21).

Le Coeur à l’aiguille de Claire Gondor, en librairie depuis le 5 mai 2017

dimanche 4 février 2018

Des dents de loup ...

La recette vient de l'Est de la France, peut-être parce qu'il y avait des loups inquiétants dans ces contrées. J'avais envie de tenter ces gâteaux depuis longtemps pour leur forme particulière. Il me fallait un moule adéquat, que j'ai trouvé chez Mathon.

Classiquement les proportions sont de
350g de farine
3 œufs entiers
250g de sucre
250g de beurre

Mais j'ai adapté la recette avec :
165 g de beurre pommade
135 g de sucre en poudre
2 œufs entiers
235 g de farine

samedi 3 février 2018

Maria by Callas de Tom Volf

Après Barbara qui était déjà un film inclassable sur la vie d'une artiste voici Maria by Callas qui est un biopic sous la voie du documentaire. Le réalisateur n'a pas entrepris de casting pour interpréter Callas. il a demandé à Maria de le faire. Et c'est ultra réussi.

Le film commence par les images d’archives d'une interview noir et blanc dont plusieurs extraits seront diffusés régulièrement. Maria Callas y révèle des compétences hors normes de comédienne.

Son visage est très expressif et sa manière de parler exprime une palette d'émotions aussi large que lorsqu'elle chante. On comprend que Bernstein ait dit d'elle qu'elle était de la pure électricité.

vendredi 2 février 2018

Mémoire d'un tricheur

J’avais apprécié Olivier Lejeune, dans ce même théâtre Rive Gauche il y a deux ans, alors qu’il jouait dans Une folie, une pièce que j'avais beaucoup appréciée.

Sa carrière est prodigieusement remplie aussi bien au théâtre qu’au cinéma, et même à la télévision, en tant qu’auteur ou comédien. C’est un boulimique de travail, qui a collectionné les premiers prix.

J’ai eu la chance d’approcher cet acteur après le spectacle. Il revenait de Prague où il avait tourné une scène d'Edmond, film de Michalik dont la sortie est annoncée pour Novembre 2018.

La pression n’entame jamais sa bonne humeur. Cet homme peut tout faire sans tricher. Il est douée d'une mémoire exceptionnelle qui le dispense d'avoir besoin d'un prompteur. Il écrit des pièces de théâtre depuis l'âge de 6 ans …  et j’ai manqué de répartie. J’aurais dû lui demander à quand vos mémoires ?

jeudi 1 février 2018

Rencontre avec Philippe Delerm pour Et vous avez eu beau temps ?

La rencontre a eu lieu hier, à l'initiative de Babeliodans le 11e arrondissement, non loin du domicile parisien d'un auteur que la langue française parlée quotidienne intéresse parce que c’est la vraie vie.

Et vous avez eu beau temps ? est la neuvième publication de Philippe Delerm de textes courts. L'expression est étrange mais l'auteur nous a expliqué qu'il n'y avait pas d'autres mots pour caractériser ce genre d'écrit qui se trouve être le type de littérature avec lequel il existe le plus.

Depuis que Rémi Bertrand lui a consacré un essai en 2005 (Philippe Delerm et le minimalisme positif aux Éditions du Rocher) son style est systématiquement qualifié de minimalisme positif, et il est assez d'accord avec cette analyse.

C'est cette spécialité qui lui a permis d'entrer en 1997 chez Gallimard, par une petite porte, celle de la collection Collection L'Arpenteur pour laquelle il réalisera la meilleure vente avec La première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules.

Il n'a perçu aucun à-valoir (une avance sur les droits d'auteur à venir) et le premier tirage fut limité à 2000 exemplaires. Personne ne se doutait de l'immense succès que cet ouvrage allait être. Il n'avait jusque là publié que de la poésie, aux éditions du Rocher où son éditeur lui avait tout de même affirmé : on est sur que vous êtes un auteur. Un jour ça se saura.

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