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La publication des articles est conçue selon une alternance entre le culinaire et la culture où prennent place des critiques de spectacles, de films, de concerts, de livres et d’expositions … pour y défendre les valeurs liées au patrimoine et la création, sous toutes ses formes.

lundi 18 février 2008

BRUNCH AU FLORA DANICA

Coup de griffe pour le Flora Danica

Le Flora Danica, qui aurait été créé en 1955, a été entièrement revu et corrigé en 2002 à la mode 70’ et cela ne peut qu’attirer le Verseau dont j’ai beaucoup de caractéristiques, surtout avec un décor ponctué de jardins suspendus. Que du plaisir à l'horizon !

La perspective de s’éloigner du brouhaha des Champs-Elysées en nous immergeant dans une ambiance design scandinave et de déguster des produits de grande qualité nous met l’eau à a bouche. Nous arrivons vers 12 h 30 parmi les premiers. Est-ce pour cela qu’il fait si froid dans le patio-terrasse ? L’orchidée qui oscille sur la table et la proximité de plantes luxuriantes ne réchauffe pas l’atmosphère. Il est vrai que nous sommes sous une tente. Nous regrettons presque notre choix.

Nous avions hésité avec tant d’autres endroits renommés … En quel point avons nous démérité pour ne pas être assis dans l’espace cosy aux canapés de tissu cramoisi sous les lustres scandinaves que nous avions admiré sur Internet ? Le serveur se précipite pour prendre une commande mais … nous sommes des initiés et nous avons été prévenus que les boissons sont hors de prix. Alors nous le rassurons : nous nous débrouillerons seuls, ne croyant alors pas si bien dire.

Parce qu’au Flora Danica le client qui souhaite du thé, du café ou un jus de fruits n’a qu’à slalomer entre les tables et ramener comme il peut son breuvage jusqu’à sa table. Et les tables sont suffisamment rapprochées pour rendre l’opération périlleuse et vite lassante.

Les jus d’agrumes (pamplemousse ou orange) sont acides. Le jus de pomme sera plus savoureux, mais sans doute un peu trop sucré. Pourquoi n’avons-nous pas le courage de demander une simple carafe d’eau ? Nous en sommes en France tout de même !

Nous allons découvrir le buffet. A première vue, c’est une table très prometteuse. Quasiment trop. Nous sommes venus pour bruncher et les grands classiques font défaut : si vous voulez être surpris par des céréales originales et autres mueslis, par des petits pains, des gelées et confitures, des fruits frais, des œufs et des saucisses … vous êtes sur une fausse piste.

Vous l’aurez compris, le brunch, ici ne se définit pas par la combinaison hardie d’un breakfast et d’un lunch. C’est un buffet. Un beau buffet, très copieux mais un buffet.

Les gros appétits auront de quoi se rassasier, et bien davantage : des harengs cuisinés de multiples façons, des saumons crus, fumés, marinés ou cuits, des crevettes de différentes grosseurs, des charcuteries, des gratins, des viandes, des fromages et moult desserts. On trouve des champignons diversement préparés et même des huîtres. Sauf que abondance ne rime pas avec bombance. Reprenons point par point :

J’ai commencé prudemment par disposer dans une (grande) assiette toute simple, toute blanche, quelques menus échantillons de saumons et d’harengs avec quelques feuilles d’une salade de mâche améliorée de roquette et un soupçon de tarama pour faire joli. Tout fait envie mais il est difficile de prédire si la saveur sera de l’ordre du sucré, de l’amer, de l’aigre-doux … Ce qui m’ennuie c’est de m’apercevoir que le bord de la salade est rabougri et noirci et de sentir des grains de sable crisser sous mes dents.

Je vais essayer une autre combinaison autour d’une déclinaison de champignons et de saumons. Aucune mention de nom de plat. Je ne saurai donc pas si j’ai goûté le saumon à l’aneth façon Gilbert Bécaud …

Le pavé de saumon est très salé. Le garçon, plutôt malin, repropose ses services en terme de consommation. Merci, nous nous désaltérons au jus de pomme auquel nous nous sommes accoutumés. Nous aimerions connaître l’origine du nom Flora Danica mais personne ne peut nous éclairer. Une allusion à une fleur danoise, laquelle et pourquoi ? Ou a un livre botanique ancien ? Et quel est le nom de la plante qui s’affiche sur le mur entier et qui ponctue les cartes ? On nous affirme que c’est de l’aneth. Pourtant cela n’en a pas l’air.

Reconcentrons nous sur nos assiettes !

Deux alternatives pour accompagner les huîtres : le pain au cumin (sucré) ou le schwartzbrot (pain noir aux graines), tout aussi inadéquat. J’avise de le tartiner d’un soupçon de beurre, lequel lui aussi est salé. Le serveur apporte de la baguette. Sa croûte est solide, épaisse. Rien de bien croustillant …

Nous enchaînons sur les charcuteries. Le salami, la grande spécialité danoise, est servi enroulé, et sans peau. Voilà un bon point. Mais tout est décidément trop salé pour nos palais. Une cuillère d’œufs brouillés façonnés en cake adoucit quelque peu nos papilles irritées.

Les serveurs font prestement disparaître les assiettes vides abandonnées sur les tables entre les aller-retour vers le buffet. La jeune femme qui découpe les viandes est d’extrême bonne volonté et tranche des parts généreuses. Elle incite avec chaleur à goûter à tout. Mais le choix de plats chauds est illusoire : peu de différence réelle entre rôti de bœuf, rôti de porc et rôti de veau (proposé avec le jus de viande correspondant) de même qu’entre gratin de choux-fleur et gratin dauphinois.

Mention spéciale néanmoins au koulibiac, qui est réellement délicieux et aux champignons à la moutarde qui sont une heureuse découverte.

Je suis franchement lasse du jus de pomme. Alors je tente une tasse de thé. Surprise par l’arôme j’interroge le barman. Du Marco Polo, madame, le meilleur ! Je connais ce mélange de Mariage Frères, un thé noir de Chine, au goût prononcé de fleurs et de fruits du Tibet doucereux et parfumé. Ce n’est pas le choix que j’aurais fait pour accompagner un repas … Celui-ci est davantage adapté à un five o’clock. Que dire de la tasse Duralex si ce n’est que ce n’est même pas « kitsch » …

Evidemment, il faut bien se résoudre à visiter les toilettes, lesquelles sont abandonnées au sous-sol de l’immeuble d’en face. Le lieu n’a rien de distingué, étonnant pour un restaurant qui se veut très accueillant et élégant, depuis toujours le lieu de rendez-vous d’une clientèle chic et gourmande. Autant dire qu’on en revient transi en regrettant de n’avoir pas songé à reprendre le manteau laissé au vestiaire. Par bonheur la température a grimpé dans le jardin d’hiver comparativement au début du repas.

Le serveur regarde sa montre. Il interroge en débarrassant l’assiette vide : vous passez au dessert ou je vous laisse les couverts ? Il est temps d’approcher la seconde table. Rien de spécial côté fromages, tous très franco-français. Les viennoiseries n’ont plus leur place dans notre menu. Voyons les desserts … la mousse au chocolat (franchement goûteuse fait oublier thé et café), la minuscule part de tarte à l’abricot est savoureuse saupoudrée de pistaches, mais nous n’y voyons rien de danois.

La salade de fruits est plutôt fière –comme on dit chez moi de quelque chose qui râpe le palais- mais au moins j’aurai goûté un fruit qui me faisait envie depuis longtemps : le pitaya ou fruit du dragon, qui cache une chair blanche aux grains noirs sous une peau rose vif. Si on m’avait dit que je ferais cette découverte exotique dans un restaurant scandinave …

La crème brûlée est trop froide pour qu’on en apprécie les arômes. La mousse à la noisette, servie en verrine, est une heureuse surprise. J’apprécie son goût de nougatine et sa texture moelleuse mais je m’interroge sur la teneur en graisse. Je chipote le riz au lait sur gelée de fruits rouges, probablement des framboises et des cerises noires. Sont-ce des brisures d’amandes qui croquent sous la dent ? Ce dessert qu’on disait mythique ne s’inscrira pas des les annales.

Puisque le thé était tiède je vais me rabattre sur le café, toujours dans une tasse de verre transparent. Pour enchaîner avec une nouvelle déconvenue : le contenu du thermos est à peine plus chaud que l’autre. Le breuvage conjugue fadeur et amertume. Même un américain habitué à ce qu’on sert outre-atlantique n’y trouverait pas son compte. Le serveur distribue des expresso d’une table à l’autre … à acquitter en supplément. C’est le comble pour un soit-disant brunch que de ne pas comprendre un café digne de ce nom.

Au final, après un départ alléchant on fait le compte des calories et des grammes de sel. On se dit qu’il y a sûrement meilleur rapport qualité/prix/dépaysement. On s’étonne de suivre des yeux le balai des convives qui empilent les victuailles sur des assiettes déjà débordantes et on se demande si on a un pauvre estomac ou si on se fait une trop haute idée de la gastronomie.

L’addition, sans surprise est malgré tout une note salée. Il est vrai qu’on a déjeuné sur les Champs, la plus belle avenue du monde que l’on quitte avec le tournis comme en témoigne la dernière photo d'un immeuble surréaliste prise au 39 avenue Georges V.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Merci pour cet avis on ne peut plus détaillé. Il se trouve que je vais moi-même bruncher au Flora Danica tout à l'heure, et j'ai comme l'impression que cette formule dominicale n'est pas à la hauteur de la cuisine des autres jours. Il s'agit donc d'un buffet à volonté ? C'est un prix unique, 35 euros non ?

Marie-Claire Poirier a dit…

C'est un de mes premiers articles et il est satisfaisant de constater qu'il a toujours son utilité. Car mon but était d'informer le consommateur avec le maximum d'objectivité et beaucoup de détails (ce qui alors était rare sur les blogs). Mais il faut être prudent car cet avis date du 18 février de l'année dernière et la formule peut avoir beaucoup changé depuis.
Les photos sont de vrais clichés, pris sur place. Oui, c'est un buffet à volonté et très abondant. Le prix était unique mais les boissons (hors café-insipide et jus de fruits) en sus.
Merci de laisser un commentaire actualisé après votre brunch !
Et de donner aussi le lien qui permet de lire vos critiques. C'est toujours intéressant d'agrandir le cercle ...

Anonyme a dit…

Ah oui, j'avais lu 18 février 2009 !... autant pour moi. Eh bien que dire, oui au cours d'un brunch on se contente généralement de jus et de café, ah c'est vrai il y a aussi le thé et le chocolat, ce sont les boissons en sus auxquelles vous faisiez référence ? et en effet elles ne sont toujours pas incluses à la formule. Moi qui ne bois habituellement pas de café, j'ai testé la dosette, ma foi ça se laisse boire. Il y avait du jus d'orange, de cranberry (canneberge) probablement, et de pamplemousse ; pas exceptionnels non plus mais bon. Ils ont laissé de côté la pomme !
Pour ce qui est du placement, nous avons eu de la chance, attablés à côté du buffet pour ainsi dire, pas de faufilades risquées. Le buffet de charcuteries, saumons et salades froides est en effet très fourni, vos photos sont d'actualité ! Le saumon est savoureux, privilégier le frais et pas celui en "crumble". J'ai été particulièrement surprise de la saveur de la salade de crevettes, une sauce quasi aigre-douce ; je n'arrivais à la décrire, un jus de fruits, un peu salé, et bien imprégné des crevettes ?... c'était douteux. La viande était bonne quoique froide. Les oeufs brouillés m'ont un peu écoeurée. Les desserts semblaient plus appétissants cette fois, tarte aux fruits parsemées de pistaches, tarte au citron, industrielle celle-là, trois verrines très sucrées (dont un cheesecake pas convaincant du tout pour la grande amatrice que je suis, avec en première couche une pellicule acide d'un fruit orange que je n'ai pas reconnu de façon certaine), fromage blanc acide aussi - ne pas oublier de sucrer un minimum - avec des graines vertes qui n'étaient pas des pistaches - mais quoi ?...
Effectivement on a la sensation de s'être un peu bâfrés, et aucune saveur ne m'a particulièrement enchantée.

Fjord Nice a dit…

Il est vrai que depuis quelques années le brunch est devenu à la mode. C'est une formule qui me plaît bien mais à avoir trop de choix parfois dans un buffet, on se goinfre carrément et dur dur la digestion ! C'est bien de laisser vos impressions comme ça sur un blog car cela donne une piste sur le resto.

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