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mardi 29 avril 2025

Les clés du festival - L'aventure du Festival d'Avignon des origines à nos jours à la Maison Jean Vilar, Avignon

Lundi 24 mars avait lieu à la BnF, Site Richelieu, à Paris la conférence de presse de l'exposition Les clés du festival - L'aventure du Festival d'Avignon des origines à nos jours qui sera ouverte au public le 5 juillet 2025 à la Maison Jean Vilar d'Avignon.

La mission de la Maison Jean Vilar est de conserver la mémoire de Jean Vilar, en lien avec la BnF, en garantissant que les trésors communs demeurent accessibles et en bon état. Elle est ouverte toute l’année depuis 1979. Son activité s’intensifie naturellement pendant le festival.

Les habitués du Festival d’Avignon connaissent bien les trois clés qui en sont l’emblème. L’association Jean Vilar a noué un partenariat avec la Bibliothèque nationale de France, désireuse de se développer en région, pour relater l’aventure de cette manifestation depuis sa création et en restituer l’essentiel dans une exposition, dont le commissariat a été confié à Antoine de Baecque.

La date est aussi symbolique que le titre puisque c’est le jour du lancement du Festival In comme du Off. Les festivaliers ne sauront pas où donner de la tête mais par chance cette exposition sera accessible toute l’année (en dehors de la fermeture annuelle en août) et a priori pour une période de 6 à 10 ans.

Ce sera la première fois qu’une exposition sera consacrée au Festival et à plusieurs de ses spectacles qui ont marqué les esprits : Le prince de Hombourg de Jean Vilar, Le Mahabharata de Peter Brook, Thyeste de Thomas Jolly, Saigon de Caroline Guiela Nguyen comme les créations de Thomas Ostermeier, Anne Teresa de Keersmaeker, Rébécca Chaillon et Angelica Liddell.

On pourra par exemple y voir (ou revoir) ce costume porté par Cloé Obolensky, dans le rôle de Gandari, la mère de l’un des deux clans du Mahabharata créé en 1985 dans la carrière Boulbon et qui est un don récent du théâtre des Bouffes du Nord.

Le premier document présenté sera la lettre de René Char à Jean Vilar le mettant en relation avec un couple de marchands d’art préparant pour Avignon et la Grande Chapelle du Palais des Papes une exposition d’art moderne, avec des œuvres de Picasso, Léger, Chagall, Calder et Giacometti et qui souhaitaient accompagner l’événement de concerts de musique française et d’une représentation théâtrale dans la Cour d’honneur. Il fut proposé à Vilar d’y donner Meurtre dans la cathédrale, son dernier succès parisien.

Elle sera immersive et accessible à tous, avec un important dispositif de médiation culturelle. On commencera par l’envers du décor, en expliquant comment se transforment les lieux pour accueillir plus de 120 000 spectateurs à chaque édition.

Ensuite il sera question de la spécificité de cette ville, Avignon, qui se métamorphose rituellement en associant chaque fois des lieux supplémentaires. On reviendra par exemple sur l’ouverture des Carmes en 1967.

Un regard sera posé sur le festival Off qui ne cesse de se déployer depuis le milieu des années 60 jusqu’à inclure aujourd’hui environ 250 salles, et proposer 1600 spectacles par près de 1200 compagnies. C’est lui, il faut le reconnaître, qui donne son ambiance à la ville à travers ses parades, le tractage, l’affichage. Une maquette d’Avignon représentera l’ensemble. On n’occultera pas pour autant qu’il s’agit d’une entreprise commerciale qui coûte fort cher aux jeunes troupes avec la volonté non pas de dénoncer mais de rendre publique l’économie du Off.

Le festival ne serait pas ce qu’il est devenu sans le public. Il était donc logique d’en rendre compte, à la fois à travers les spectacles mais aussi les rencontres en pointant ce que le festival a pu changer dans le cours de la vie des spectateurs. Il est en effet source d’éveil de vocations.

Loin de se dérouler en vase clos il est aussi le miroir du monde et a connu des moments de trouble, notamment en 1968, avec les intermittents en 2003, à travers la Nuit d’Avignon s’inquiétant des élections législatives l’an dernier … Sans parler de son report l’année de la pandémie.

C’est avant tout la vitrine du théatre contemporain, montrant les dernières créations et mettant à l’honneur le travail des artistes, quitte à provoquer des chocs esthétiques. Le choix fut difficile mais il s’arrêta sur 150 spectacles qui furent parmi les plus grands moments du festival dont la trace existe en photos ou/et en captations.

La scénographe Claudine Bertomeu a choisi de travailler sur d’immenses tulles qui pourront autant évoquer un rideau de scène qu’une toile sur laquelle on pourra projeter des images et intégrer ainsi la théâtralité dans le parcours de visite. Plusieurs metteurs en scène ont confié des objets hautement symboliques, des manuscrits de Wajdi Mouawad, la couronne de Thyeste de Thomas Jolly, des objets prêtés par Olivier Py et Valère Novarina. D’autres surprises seront sonores. Chaque année présentera un focus particulier. Ce sera le spectacle Saigon en 2025.
Voici, ci-dessus une page manuscrite de La Servante, un spectacle d'une durée de vingt-quatre heures, sous-titré Histoire sans fin, écrit et mis en scène par Olivier Py, joué par vingt-huit acteurs sans interruption pendant sept jours et sept nuits au Gymnase Aubanel. Olivier Py a été directeur du festival d'Avignon de 2013 à 2022. On le surnomma le triple A parce qu'il y fut acteur, auteur et directeur.

Ci-dessous des notes de 2009 écrites par Wajdi Mouawad pour le spectacle Ciel qui appartient au cycle "Le sang des promesses" avec IncendieLittoral et Forêt.
Enfin une frise chronologique a été pensée pour restituer l’essentiel des 60 ans de festival. Les concepteurs de cette exposition ont déjà réfléchi à la faire évoluer, en renouvelant certaines parties (en puisant dans les archives) mais aussi bien sûr en intégrant de nouveaux épisodes.

Outre l’exposition stricto sensu il y aura, pour compléter le dispositif, des rencontres, des lectures, des projections (offrant un focus sur les artistes programmés cette année au festival) et un spectacle intitulé "Jouer avec les fantômes" qui démontrera par exemple comment les acteurs portaient leur voix à l’époque de Maria Casarès, quand les micros HF n’existaient pas encore …

Si on peut dater la naissance du festival à la première Semaine d’Art en Avignon qui s’est déroulée en septembre 1947, le projet de dédier une sorte de "musée" à la manifestation existait depuis une trentaine d’années. Il était d’autant plus réaliste que l’association dispose de très belles archives, des costumes des créations de Jean Vilar en parfait état, de maquettes, du fond Agnès Varda (qui a commencé sa carrière a Avignon en 1948) et de la montagne de notes de Jean Vilar.
On nous présenta ce matins trois maquettes du décor de Guy-Claude François pour La nuit des rois, montée dans la Cour d’honneur, en 1982, pour la première fois investie par une femme Ariane Mnouchkine, à noter que la place des femmes au festival est devenue une question davantage prise en compte que des questions d’environnement. C’est aussi Guy-Claude qui refait la cour cette année-là. Elle aura été redessiner 6 fois, dont une en 1966 pour accueillir les ballets de Maurice Béjart.

Jean Vilar a fait ce geste inaugural de sortir le théâtre des salles, avec cette Semaine d’Art qui en fut l’acte fondateur dans une démarche de décentralisation et de démocratisation. Le metteur en scène est nommé en 1951 à la tête du TNP (qui était alors encore à Paris) où il crée des spectacles à la fois très austères, spectaculaires, mais combinant exigence et accessibilité. Vilar cherchera dans le milieu des années 60 à transformer, détourner le festival en l’ouvrant à d’autres lieux que la cour d’honneur. Et lorsqu'il quittera le TNP ce sera pour se consacrer totalement au festival.

Il faut savoir ou se rappeler que la question du public était au coeur de son interrogation de Jean Vilar. Il faisait grand cas de la transmission, du partage et de la manière dont l’art pouvait entrer dans la vie des gens en cherchant à gagner de nouveaux publics, et pas forcément des jeunes. Il avait une formule très imagée pour qualifier sa volonté de changement : quand on prend un tournant, il faut le prendre sec.

Un questionnaire participatif interrogera les visiteurs en écho à celui de Vilar. On leur demandera de donner leur souvenir du festival avec une date-clé pour collecter les regards sur l'évènement.

A propos de clés, savez-vous que les trois clés symboliques du festival sont celles de la ville d'Avignon représentant la ville, l'enfer et le paradis ?

Les clés du festival - L'aventure du Festival d'Avignon des origines à nos jours
Commissariat d’Antoine de Baecque
Scénographié de Claudine Bertomeu
Création lumières de Jean Bellorini
Création sonore Jean-Louis Larcebeau
Maison Jean Vilar - Place de l’Horloge - Montée Paul Puaux
8 rue de Mons - 84000 Avignon
Du 5 au 26 juillet 2025 tous les jours de 11 à 20 h
Toute l’année (sauf août) du mardi au samedi de 14 à 18 h

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