Les questions autour de la santé, et singulièrement des hôpitaux, défraient la chronique très régulièrement.
C’est à se demander si les français peuvent encore avoir confiance dans le système hospitalier en général, dans les urgences en particulier.
Dans un tel contexte, le film d’Eric Guéret est intéressant car ce n’est pas une fiction. Le spectateur suit le premier stage en internat de cinq étudiants en médecine qui intègrent les Urgences de l’hôpital Delafontaine de Saint-Denis (93), en pleine période d'épidémie Covid.
Premières Urgences est une immersion de six mois dans un service qui est, on s’en doute, débordé et victime des restrictions budgétaires. Et comme dans bien des services, c’est la personnalité du patron (ici Mathias Wargon qui bien entendu interprète son propre rôle) qui permet de faire tourner la maison, comme on peut le constater au fil des séquences.
J’ai vu ce film en avant-première. Il sortira sur les écrans le 16 novembre. C’est un documentaire mais il a été conçu de telle manière qu’on s’attache aux personnages principaux, Amin, Evan, Hélène, Lucie et Mélissa, dont on partage les hésitations et les questionnement. Certes, les malades ne sont pas absents mais, pour une fois, c’est le point de vue des soignants qui est privilégié et ce n’est que justice car on remarque combien leur position est complexe.
Après 5 années d’études, ils vont faire ici leurs premiers pas de médecins. Certains veulent être généralistes, d’autres spécialistes, mais tous doivent obligatoirement faire un stage aux urgences. Un passage obligé qu’ils abordent dans un mélange de crainte et d’excitation. Ils vont pour la première fois aller seuls au contact des malades et passer enfin de la théorie à la pratique. Ils ont appris à faire un diagnostic et ont depuis peu le droit de prescrire des médicaments. Mais les urgences c’est l’épreuve du feu. C’est le service par lequel la ville entre dans l’hôpital. Toutes les pathologies et traumatismes y arrivent.
L’hôpital Delafontaine est situé, comme la moitié du territoire français, au cœur d’un désert médical, et cette question est un axe fort du documentaire, surtout dans une région fortement frappée par la pauvreté. Pour beaucoup de ses habitants l’hôpital est l’unique accès aux soins et cet aspect va dérouter les étudiants.
Nous, ici on fait de l’humanitaire à 5 kilomètres de Paris. Mais heureusement qu’on est là car ce ne sont pas les cliniques privées qui vont s’occuper de nos patients. En plus, un tiers n’ont ni papiers, ni de quoi payer, confie Mathias Wargon à son équipe.
Mathias Wargon, médecin urgentiste et docteur en sciences, est, depuis 2017, à la tête des urgences et du SMUR de l’hôpital Delafontaine. Il est aussi chargé de mission à l’ARS et président de l’Observatoire régional des soins non programmés d’Île-de-France. Il est l’auteur de Hôpital : un chef-d'œuvre en péril paru chez Fayard en avril 2022.
La caméra est présente sans être intrusive. Les émotions ne sont pas mises de côté mais elles restent contenues pour autoriser une proximité sans empêcher un certain recul qui permet l’analyse. C’est un documentaire qui serait alors plus engageant qu’engagé, et c’est un regard très encourageant alors, je le répète, qu’on tire à boulets rouges de tous côtés sur le service public.
Cette expérience particulièrement intense dans l’hôpital public, renforcera ou fragilisera-t-elle leur vocation ? Quelle a été leur motivation à choisir cet hôpital ? Auront-ils envie de devenir urgentistes ? Et si ce n’est pas le cas, cette expérience aura-t-elle une influence sur leur manière d’exercer la médecine ?
A souligner qu’il y a aussi une réflexion sur la pédiatrie qui est au coeur de l’actualité en ce moment.
Premières urgences, un documentaire d’Eric Guéret
Distribué par Haut et CourtAu cinéma le 16 novembre 2022
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