Je n'avais pas lu le descriptif d'Une vie de Gérard en Occident avant de venir écouter Gérard Potier la raconter ... et à mesure que le spectacle se déroulait je retrouvais une proximité avec un univers que je connais assez bien, celui du conte. Quelques noms me venaient à l'esprit, comme s'il pouvait exister une sorte de fraternité entre celui qui était sur scène et certains autres que j'ai pris tant de plaisir à écouter.
La brève discussion que j'ai eue après la représentation avec Gérard Potier m'a surprise par son refus d'être associé à cet art, comme s'il y avait une sorte d'échelle entre la parole d'un conteur, supposée sans doute être en quelque sorte brute de décoffrage, ou disons un peu sauvage, et celle qu'il porte en se situant dans une lignée sur laquelle on trouve par exemple Joël Pommerat.
Et pourtant en lisant le feuillet remis aux spectateurs je lis bien que Gérard est présenté comme "un griot de notre temps". Dans sa notice biographique je remarque qu'il apprend le théâtre, le conte, le chant, la danse, le collectage d’histoires. Qu'il a participé à la création du festival La Roche aux contes ...
Je peux donc me sentir autoriser à dire -et cela de manière positive- que son spectacle s'inscrit dans cet interstice où se glissent les conteurs contemporains quand ils produisent un travail d'oralité entre le réel et la fiction documentaire.
Une vie de Gérard en Occident serait l’histoire de Gérard Airaudeau. Dans la salle des fêtes de Saint-Jean-des-Oies, on attend la visite de Marianne, une députée qui veut rencontrer "des vrais gens". La table est dressée sur des tréteaux avec ses gobelets en plastique et ses chips premiers prix. Pour faire patienter l'assistance, Gérard raconte sa vie, sa commune, son pays, sa France des années 70 à nos jours.
C'est vraiment Gérard (Gérard Potier) qui raconte ... mais c'est en fait l'histoire d'un certain Bernard, vendéen pur souche, que François Beaune a enregistré pendant des heures avant de s'inspirer de son récit pour écrire son livre. Le comédien s'en est emparé ensuite et en a fait son miel en s'appuyant sur ses propres racines puisqu'il est fils de paysan vendéen. Outre son talent il est probable que ce contexte a été un atout.
L'équipe revendique des références à Rabelais et à Coluche. Peut-être à ce dernier dans l'humour noir qui transparait souvent lorsqu'il s'agit de caractériser le caractère vendéen : ils vivent et se pendent dans le sous-sol de leur maison.
Les culs de plomb estiment que c'est pas la peine d'aller au bout du monde puisque le monde vient chez eux. C'est pourtant sur la chanson de l'Eté indien de Joe Dassin que Gérard et sa femme vont rêver et tomber amoureux. Les paroles promettent un sacré voyage.
Et c'est un sport peu banal, même s'il a le vent en poupe, qui passionne leur fille, le roller derby dont on va apprendre les codes, subtilités est rituels.
Enracinés comme un cep de vigne, mais pas exempts de soucis, notamment d'emploi. Ce sont sans doute les passages les plus difficiles à soutenir, de mon point de vue, que la description des manigances de licenciement et on espère que la députée prendra note de leurs difficulté, en espérant qu'elle arrive.
Gérard Potier joue bien entendu tous les rôles, sans forcer, sans vraiment changer de voix, sauf lorsqu'il mime le travail à l'usine et on pense au si troublant premier roman de Joseph Ponthus, A la ligne. Il trouve les gestes adéquats pour dénoncer la duperie de l'actionnariat ouvrier qu'il nous mime à la manière d'un jeu de bonneteau avec les gobelets vides.
En fait Le comédien a raison. Ce qu'il nous montre n'est pas un conte parce que chez les conteurs il y a toujours une lumière au bout du tunnel, même ténue, même éteinte ... Dans Une vie de Gérard en Occident soit la route fait un coude, soit elle pousse l'individu au bout d'une impasse, avec la justification que c'était joué d'avance : Papa a toujours dit que t'étais con depuis le début !
Et pourtant il y a un grand sursaut : c'est pas quand on meurt qu'on est mort, c'est quand on vous oublie. Alors Gérard a bien raison d'exhumer les copains, Dédé, les collègues, Annie, les enfants ... Il les raconte (conte) avec une sorte d'ironie désabusée et fataliste.
Souvent, il dit ce qu'ils ne sont pas, loin des références imposantes, les Lelouch, De Villiers ou Brel.
Il nous fait réfléchir sur le poids des choses comme le faisait un autre Gérard... Manset, en 1978 avec les paroles de la chanson le Jardin des délices qui clôture le spectacle, avant l'arrivée de la députée qui a peut-être déclaré forfait. C'est vraiment un spectacle qui gagne à être vu en famille, et avec ses enfants (à partir de 14 ans).
Je peux donc me sentir autoriser à dire -et cela de manière positive- que son spectacle s'inscrit dans cet interstice où se glissent les conteurs contemporains quand ils produisent un travail d'oralité entre le réel et la fiction documentaire.
Une vie de Gérard en Occident serait l’histoire de Gérard Airaudeau. Dans la salle des fêtes de Saint-Jean-des-Oies, on attend la visite de Marianne, une députée qui veut rencontrer "des vrais gens". La table est dressée sur des tréteaux avec ses gobelets en plastique et ses chips premiers prix. Pour faire patienter l'assistance, Gérard raconte sa vie, sa commune, son pays, sa France des années 70 à nos jours.
C'est vraiment Gérard (Gérard Potier) qui raconte ... mais c'est en fait l'histoire d'un certain Bernard, vendéen pur souche, que François Beaune a enregistré pendant des heures avant de s'inspirer de son récit pour écrire son livre. Le comédien s'en est emparé ensuite et en a fait son miel en s'appuyant sur ses propres racines puisqu'il est fils de paysan vendéen. Outre son talent il est probable que ce contexte a été un atout.
L'équipe revendique des références à Rabelais et à Coluche. Peut-être à ce dernier dans l'humour noir qui transparait souvent lorsqu'il s'agit de caractériser le caractère vendéen : ils vivent et se pendent dans le sous-sol de leur maison.
Les culs de plomb estiment que c'est pas la peine d'aller au bout du monde puisque le monde vient chez eux. C'est pourtant sur la chanson de l'Eté indien de Joe Dassin que Gérard et sa femme vont rêver et tomber amoureux. Les paroles promettent un sacré voyage.
Et c'est un sport peu banal, même s'il a le vent en poupe, qui passionne leur fille, le roller derby dont on va apprendre les codes, subtilités est rituels.
Enracinés comme un cep de vigne, mais pas exempts de soucis, notamment d'emploi. Ce sont sans doute les passages les plus difficiles à soutenir, de mon point de vue, que la description des manigances de licenciement et on espère que la députée prendra note de leurs difficulté, en espérant qu'elle arrive.
Gérard Potier joue bien entendu tous les rôles, sans forcer, sans vraiment changer de voix, sauf lorsqu'il mime le travail à l'usine et on pense au si troublant premier roman de Joseph Ponthus, A la ligne. Il trouve les gestes adéquats pour dénoncer la duperie de l'actionnariat ouvrier qu'il nous mime à la manière d'un jeu de bonneteau avec les gobelets vides.
En fait Le comédien a raison. Ce qu'il nous montre n'est pas un conte parce que chez les conteurs il y a toujours une lumière au bout du tunnel, même ténue, même éteinte ... Dans Une vie de Gérard en Occident soit la route fait un coude, soit elle pousse l'individu au bout d'une impasse, avec la justification que c'était joué d'avance : Papa a toujours dit que t'étais con depuis le début !
Et pourtant il y a un grand sursaut : c'est pas quand on meurt qu'on est mort, c'est quand on vous oublie. Alors Gérard a bien raison d'exhumer les copains, Dédé, les collègues, Annie, les enfants ... Il les raconte (conte) avec une sorte d'ironie désabusée et fataliste.
Souvent, il dit ce qu'ils ne sont pas, loin des références imposantes, les Lelouch, De Villiers ou Brel.
Il nous fait réfléchir sur le poids des choses comme le faisait un autre Gérard... Manset, en 1978 avec les paroles de la chanson le Jardin des délices qui clôture le spectacle, avant l'arrivée de la députée qui a peut-être déclaré forfait. C'est vraiment un spectacle qui gagne à être vu en famille, et avec ses enfants (à partir de 14 ans).
Quand le monde autour de toi aura tant changé
Que toutes ces choses que tu frôlais sans danger
Seront devenues si lourdes à bouger
Seront devenues des objets étrangers
Où l'a-t-on rangé
Ce bout de verger
François Beaune est né en 1978 à Clermont-Ferrand. Il a publié chez Verticales un recueil d’Histoires vraies : La Lune dans le puits, 2013 (Folio, 2017) et trois romans : Un homme louche, 2009 (Folio, avril 2011) ; Un ange noir, 2011 ; Une vie de Gérard en Occident, 2016. En 2018, il publie au Nouvel Attila Omar et Greg, sur l’itinéraire politique et social de deux militants marseillais du FN partis de l’extrême-gauche, qui lui a valu le Prix du livre du Réel décerné par la librairie Mollat (Florence Aubenas, Jean-Paul Kauffmann et Philippe Lançon faisant partie du jury).
Né en 1960, Gérard Potier intègre à 18 ans une troupe d’art et tradition populaire. Durant les années qui vont suivre, il apprend le théâtre, le conte, le chant, la danse, le collectage d’histoires. Il participe à la création du festival La Roche aux contes, où il présente ses premiers spectacles, Brin d’amour (1988), Carnaval (1989) et Narcisse (1990). En 1993, c’est Beaux et Courageux qui va l’imposer sur la scène hexagonale et internationale. Passionné par les mythologies familiales il co-écrit avec Philippe Raulet S’il pleut vous ramasserez mon linge à partir de témoignages de sa mère, de ses tantes, des femmes de son entourage. Son parcours est jalonné de rencontres déterminantes. Il travaille avec plusieurs metteurs en scène dont Alain Sabaud, François Rollin, Claude Aufaure, Chantal Morel et Joël Pommerat dans Ça ira (1) fin de Louis.
Une vie de Gérard en Occident, de François Beaune
Interprétation et mise en scène Gérard Potier
Collaboration artistique Gérard Baraton
Création lumière Éric Seldubuisson
Création sonore Marine Iger
Du mercredi 8 juillet au dimanche 27 septembre 2020
En juillet et août, du Mercredi au Samedi à 19h30 et le dimanche à 17h
En septembre, du Mercredi au Samedi à 19h15 et le dimanche à 15h
Au Théâtre de Belleville, 16, Passage Piver, Paris XI, tel : 01 48 06 72 34
Production Théâtre de Belleville et Le Bazar Mythique
Partenaires Le Moulin du Roc – Scène Nationale de Niort, Le Grand R – Scène Nationale de La Roche sur Yon, Centre de Production des Paroles Contemporaines (Théâtre de l’Aire Libre et Festival Mythos), St Jacques de la Lande, Ville des Sables d’Olonne, Maison des Arts - Festival au Village (Brioux sur Boutonne) Ville de Cesson Sévigné, Ville de Liffré. Aide à la création Ville de La Roche-sur-Yon, Conseil Départemental de la Vendée, Région des Pays de la Loire
Photo Copyright Jean Freetz
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