J'avais coché ce spectacle dans mon abonnement de la Piscine, influencée probablement inconsciemment par l'époque où, travaillant à Strasbourg, j'avais l'habitude du théâtre brechtien. Mais la mise en scène de Jean Lacornerie n'a absolument rien à voir avec le ton habituel.
J'aurais voulu pouvoir glisser un extrait dans ce billet. Je n'en ai point trouvé. Juste peut-être ce lien avec une critique du site des Trois Coups qui pourra compléter mon point de vue.
J'aurais surtout voulu témoigner de la fougue de la direction musicale de Scott Stroman qui a conduit magistralement l'orchestre des Pays de Savoie. Jusqu'au rappel nous n'avons vu de lui que son dos, ses épaules et ses mains. Il faut dire que j'étais idéalement située au dernier rang, m'assurant une vue plongeante sur la fosse d'orchestre. Ce chef officie sans baguette et se déploie dans une vraie chorégraphie. Ses mains attiraient le regard et c'était merveilleux de les voir donner le ton aux musiciens. On dit de lui que c'est un ancien jazzman et qu'il fut tromboniste. C'est vrai que la musique qui a été jouée ce soir avait des accents très jazzy. La salle entière a adoré Kurt Weill même si Scott Stroman nous a fait chanter qu'on "aime les compositeurs russes".
Lady in the dark a été un succès sur Broadway il y a soixante ans. Aucun metteur en scène français ne s'était encore risqué à la créer en France, tellement on racontait que c’était infaisable. Pourtant Jean Lacornerie a relevé le défi en gardant de l’oeuvre originale le show, la revue, le cirque, l’opérette. Et en nous offrant des costumes et des effets dignes d'un show de David Copperfield.
La trame est relativement simple : Liza Elliot, la rédactrice en chef d’un magazine de mode au titre prometteur "allure", aurait tout pour être heureuse. Mais elle se pose des questions dont les réponses seront décryptées par l'analyse. Resituées dans le contexte de l'époque les séances de psychanalyse devaient étonner le public américain. Aujourd'hui ce sont ses rêves, des fantasmes hauts en couleur, qui nous surprennent davantage : le rêve de glamour, le rêve du mariage et le rêve du cirque ... qui correspondent à trois séquences de l’opéra.
La vie « réelle » est représentée par le théâtre parlé (en français) , et le rêve est représenté par la comédie musicale (en anglais). A écouter les chansons dans leur version originale je me disais que nous rations quelque chose. J'aurais aimé me trouver au cinéma plutôt qu'au théâtre pour bénéficier de sous-titres. Voeu exhausé : une bande-titre s'est mise à défiler sur le haut du rideau de scène. (Soit dit en passant on aurait pu mieux faire comme traduction .... vraiment ....)
Le résultat est joyeux et du bel opéra comme cela est bien vivifiant, jusqu'à "the end, the absolut end" même si cela demeure "spécial" comme je l'ai entendu dire à l'entracte par quelques spectateurs déroutés.
Si j'ai entendu l'héroïne dire "j'étouffais" pour "j'ai tout fait pour comprendre", c'est sans doute un hasard car la psychanalyse n'est que prétexte au spectacle dont le but est de divertir.
Certes Décide-toi ! ne cesse-ton de dire à Liza qui finit par comprendre qu'elle ne doit plus avoir peur d'être celle qu'elle doit être. Il n'y a là rien de bien original. Peer Gynt lui aussi fait la même découverte sans le secours de l'analyse, plus tardivement peut-être.
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