Aujourd'hui c'est balade gourmande à Saint-Germain-des-Prés avec Lauranie Nonotte, la créatrice d’Esprit Chocolat. Au programme : trois chocolatiers d’exception et un salon de thé. Le but annoncé est de découvrir des univers différents, d’apprendre à déguster des chocolats et surtout bien sûr de passer un moment agréable sans complexe.
Lauranie connait très bien les boutiques qu’elle a choisies. Elle nous met d’emblée à l’aise : aucune obligation d’achat n’a été convenue et on pourrait aussi bien demander quelques carrés ou une tablette qu’acquérir un kilo. Les vendeuses auront le même sourire. Le conseil est à retenir pour ceux qui veulent découvrir de nouvelles saveurs sans prendre trop de risque.
Première étape chez Hugo et Victor, le choc contemporain
Cet espace ultra mode a été inauguré il y a un an dans un quartier chic par deux amis d’enfance. Une nouvelle boutique vient d’ouvrir au marché Saint-Honoré. Toutes deux ont été conçues dans un style très architecturé, dans l’esprit d’un cabinet de curiosités par le décorateur Francis Krempp à partir d’un concept moderne de quadruples déclinaisons. Autour de trois saveurs stars – le chocolat, la vanille et le caramel – présentes tout au long de l’année et de cinq autres saveurs qui, elles, changent au fil des saisons et ne laissent percer leur mystère que de façon éphémère. Parmi elles, le combava, un citron vert, a fait le succès de la maison. La grenade et la figue ont également été très appréciées.
On parle d’un nouveau temple de la pâtisserie haut de gamme à emporter qui commence à faire une jolie concurrence au célébrissime Pierre Hermé qui officie en quasi voisin. En fait il serait plus juste de parler d’émulation. Il est plus profitable de se positionner près d’un grand nom que dans un désert commercial. Le choix est toujours positif pour le client.
Sylvain Blanc sélectionne les produits de saison et les matières premières comme pour un restaurant. Ce sont les Vergers Saint-Eustache qui fournissent les fruits, la vanille vient de Tahiti et le chocolat de mini-productions très qualitatives. Le combava pousse désormais sous serre dans le Sud de la France. C’est lui le Victor du duo dont le nom aurait pu désigner un salon de coiffure s’ils avaient conservé leurs prénoms, Hugues et Sylvain.
Hugo est Hugues Pouget. Il a officié chez Guy Savoy dont il a été le chef pâtissier et il a gagné le championnat des desserts en 2003. Il excelle à la réinterprétation de pâtisseries traditionnelles surnommées les « Hugo » alors que les « Victor » sont des pâtisseries plus classiques, destinées à ceux qui veulent redoper leurs souvenirs d’enfance avec originalité. Je reviendrai pour me faire une opinion entre les deux versions.
Les demi-sphères aux saveurs de saison ont un cœur coulant de caramel qui ferait succomber les plus réticents. Enfin leur sommelier propose un vin qui s’accorde, bouscule, ou exalte chaque saveur.Nous goutons une demi-sphère de chocolat blanc au saké. Cet alcool particulier a besoin d’être chauffé pour libérer sa puissance aromatique mais le chocolat blanc joue un rôle de parfait révélateur. La demi-sphère est facile à prendre en main, et plus commode à travailler que la forme classique. C’est Patrick Roger (que nous verrons tout à l’heure) qui en a eu la primeur. Le moulage convient particulièrement à l’association avec un caramel fondant. Et sans dévoiler les secrets de fabrication on peut révéler que leurs techniques sont savantes. Ainsi le combava est parfois utilisé pour son jus, son zeste ou ses feuilles (celles-ci sont infusées dans le caramel pour parfumer les demi-sphères).
Les évocations à l’univers littéraire sont sobrement présentes sur les murs et dans les emballages. A Noël la buche elle-même avait pris la forme d’un livre.
Deuxième étape chez le créatif ligurien, Jean-Charles Rochoux
Nous poursuivons avec la minuscule boutique de Jean-Charles Rochoux qui embaume le chocolat. L’atelier est au sous-sol et on y travaille en permanence. D’ailleurs la serveuse invite plusieurs clients à revenir en fin d’après-midi quand la variété qu’il souhaite sera de nouveau disponible.
Ce chocolatier est le spécialiste des truffes, de la ganache à la rose, et son chocolat au basilic lui a valu un prix en 2005. L’homme n’est pas classique et ne résiste à aucun défi. Il rebondit sur la moindre idée, faisant chocolat de toute critique ou plainte.
Pour qui lui confie adorer fumer un cigare en dégustant un chocolat il créé Habanos (octobre 2008), une ganache infusée de notes de tabac blond dont la puissance est à son comble après plusieurs secondes en bouche. Il va jusqu’à les glisser dans un coffret argenté très masculin.
A cet autre adorant les fruits frais il propose la tablette du samedi, un chocolat enrobant des fraises fraiches uniquement quand elles sont de saison et qui ne souffrent pas d’attendre plus de 48 heures pour être consommées.
C’est encore lui qui s’inspire de la girolle qui racle la tête de moine (un délicieux fromage quand on le découpe avec cet appareil) pour faire des copeaux de chocolat, nature ou épicé qui seront délicatement posé sur des tartines à l’heure du goûter, comme autrefois.
Il est connu pour écrire des messages sur les tablettes, composer des lettres en chocolat que l’on offre comme des initiales. Aucun modèle ne résiste à son art du moulage, et ses réalisations sont aussi belles et aussi précises que des sculptures de bronze qui ornent les vitrines de sa boutique aux allures de bonbonnière où l’inventivité se manifeste partout.
Il parvient à réconcilier amertume et raffinement. Je me surprends à rêver à des saveurs insensées qui seraient de nouveaux défis qu’un jour j’oserai peut-être lui confier …
Troisième étape chez Patrick Roger, la valeur sure
Ses boutiques éclosent comme des champignons dans un sous-bois et il y fait frais en permanence. Originaire du Perche, Patrick Roger aime les matériaux un peu bruts comme le bois qui recouvre le sol, le métal estampé comme un moucharabieh sur les podiums de présentation, les simples boites carrés des chocolats vendus en vrac comme dans un magasin d’usine.
Sa boutique est un palais oxymorial. Ses sculptures sont toujours un évènement. Il ose en ce moment fêter la Saint Valentin et son amour pour les femmes avec des seins ... en chocolat, dans plusieurs tailles possibles, renfermant une mousse caramel onctueuse à la fleur de sel.
Mais n'allez pas croire que l'homme est un provocateur. C'est avant tout un artiste au grand cœur travaillant dans le respect du produit. Il avait réalisé pour le Téléthon un sapin de 10 mètres de hauteur, le maximum possible sous la voute de son laboratoire. Il a l'esprit de famille. Son neveu et sa fille sont ses modèles. Et il aime aussi cultiver son potager.
Il est Meilleur Ouvrier de France et a été sacré chocolatier de l’année dans le guide Pudlo 2011.
Dégustation chez Cacao et Chocolat
Quelques rues plus loin nous faisons halte pour déguster les chocolats choisis spécialement par Lauranie et parfaire nos connaissances en matière de cacao. Elle nous rappelle que la boisson que les Incas buvaient n'avait pas la douceur de ce qu'on appelle aujourd'hui un chocolat chaud. C'était un mélange de cacao et de pâte de maïs broyée avec des épices et de l'eau, renforcée par du piment pour lui donner de la vigueur. La tasse qui nous est apportée est un savant dosage de chocolat, de crème et de piment d'Espelette. Un régal !
Elle nous explique tout le processus depuis la fleur jusqu'à la torréfaction en nous donnant de précieuses indications sur les pourcentages de cacao des différents chocolats :
le blanc : avec 20% de beurre de cacao et 80% de lait et sucre ;
le au lait : 40% de chocolat et 60% de lait-sucre
le noir : 70% de beurre de cacao et de pâte (60% pour le beurre, 40 pour la pâte) et 30% de sucre
Elle nous rappelle qu'une dégustation mobilise les cinq sens. D'abord la vue avec la forme, la couleur et l'aspect. Puis l'odorat pour repérer les arômes, y compris ceux qu'elle qualifie de négatifs (comme le brûlé, le moisi, le chimique, les notes animales, le cuir ou l'alcool). Le toucher n'est pas en reste pour apprécier la couverture et la garniture. Quant à l'ouïe elle se manifeste par le cassant de la tablette et le croustillant d'une bouchée ou d'un caramel.
Le goût est le plus sollicité. Il va falloir apprécier l'attaque, le milieu et la fin de bouche, l'acidité, le sucre, le sel et l'amertume.
Nous commençons à l'aveugle. Lauranie nous recommande de nous pincer les narines avant de croquer puis de libérer le nez ensuite afin d'apprécier d'un coup les arômes qui sont brutalement libéré par un effet dit "retro-nasal". Cela fonctionne très bien et nous pouvons reconnaitre la cannelle, les poivres, la girofle, la muscade pour les plus chanceux d'entre nous. Il s'agissait d'une tablettes aux épices de Jean-Claude Rochoux. Avec un peu d'expérience nous maitriserons mieux cet art de la dégustation.
Arrive ensuite une ganache noire, très crémeuse, de Cacao et Chocolat où je repère vite la fève tonka, parce que je la connais pour l'avoir déjà appréciée (voir ici et là quelques recettes faites avec cet épice).
Puis c'est un praliné à l'ancienne de Patrick Roger, probablement le chocolat préféré de Lauranie qui avoue avoir du mal à résister à cette gourmandise.
Nous arrêtons là nos expérimentations gustatives. On pourrait continuer, mais ce ne serait pas raisonnable et il faudrait d'abord nous "nettoyer" le palais en croquant une pomme granny. Par contre nous poursuivons encore un peu en échangeant nos impressions sur des tendances à la mode. Comme la fondue au chocolat, qui se marie bien avec la fraise (quand elle est de saison), le kiwi, la mandarine et la banane.
Les soins esthétiques au chocolat divisent les opinions. Certes le beurre de cacao a des propriétés hydratantes, mais moins que le beurre de karité. Il est difficile d'accepter le principe de détourner des produits comestibles de leur usage premier mais ce peut-être une belle expérience, malgré un cout plutôt prohibitif.
Lauranie a pleinement rempli sa mission de découverte, de partage et d'approche de chocolatiers d'univers très différents. Elle alterne deux circuits, qu'elle change tous les trois mois. Nous avons donc encore d'heureuses visites à programmer ... Cette spécialiste qui a l'avantage d'être polyglotte a d'autres projets, comme celui de devenir l'ambassadrice du chocolat français en Espagne, en Italie et en Suisse, et pourquoi pas ensuite au canada et aux U.S.A.
On imagine très bien combien la clientèle internationale se presserait dans le salon d'un grand hôtel pour participer à une séance de dégustation "made in France" tant il est vrai que nos chocolatiers sont encore des maitres incontestés en la matière.
Quant à nous, après un ultime test au bar des arômes nous pourrions, pour quitter cet univers en douceur, aller voir au cinéma les Émotifs anonymes, une belle histoire romantique et humoristique dont l'action se situe dans une fabrique de chocolat. Isabelle Carré et Benoît Poelvoorde interprètent deux émotifs dans des registres différents et autant savoureux. Ou revisionner le film Chocolat avec Juliette Binoche dans le rôle d'une chocolatière qui en ouvrant une confiserie à proximité de l'église, bouscule un paisible village en période de carême.
Carnet d’adresses :
Esprit chocolat, contact au 09 53 42 65 42
Hugo et Victor, Boutique Rive Gauche, 40 boulevard Raspail 75007 Paris
Tel : 01 44 39 97 73,
Jean Charles Rochoux 16 rue d’Assas 75006 Tel : 01 42 84 29 45
Patrick Roger, 91 rue de Rennes 75006 Paris
Tél : 01 45 44 66 13 ou encore 47 rue Houdan 92330 Sceaux Tél : 01 47 02 30 17
Cacao et chocolat, 29, Rue de Buci, 75006 Paris Tél : 01 46 33 77 63
Lauranie connait très bien les boutiques qu’elle a choisies. Elle nous met d’emblée à l’aise : aucune obligation d’achat n’a été convenue et on pourrait aussi bien demander quelques carrés ou une tablette qu’acquérir un kilo. Les vendeuses auront le même sourire. Le conseil est à retenir pour ceux qui veulent découvrir de nouvelles saveurs sans prendre trop de risque.
Première étape chez Hugo et Victor, le choc contemporain
Cet espace ultra mode a été inauguré il y a un an dans un quartier chic par deux amis d’enfance. Une nouvelle boutique vient d’ouvrir au marché Saint-Honoré. Toutes deux ont été conçues dans un style très architecturé, dans l’esprit d’un cabinet de curiosités par le décorateur Francis Krempp à partir d’un concept moderne de quadruples déclinaisons. Autour de trois saveurs stars – le chocolat, la vanille et le caramel – présentes tout au long de l’année et de cinq autres saveurs qui, elles, changent au fil des saisons et ne laissent percer leur mystère que de façon éphémère. Parmi elles, le combava, un citron vert, a fait le succès de la maison. La grenade et la figue ont également été très appréciées.
On parle d’un nouveau temple de la pâtisserie haut de gamme à emporter qui commence à faire une jolie concurrence au célébrissime Pierre Hermé qui officie en quasi voisin. En fait il serait plus juste de parler d’émulation. Il est plus profitable de se positionner près d’un grand nom que dans un désert commercial. Le choix est toujours positif pour le client.
Sylvain Blanc sélectionne les produits de saison et les matières premières comme pour un restaurant. Ce sont les Vergers Saint-Eustache qui fournissent les fruits, la vanille vient de Tahiti et le chocolat de mini-productions très qualitatives. Le combava pousse désormais sous serre dans le Sud de la France. C’est lui le Victor du duo dont le nom aurait pu désigner un salon de coiffure s’ils avaient conservé leurs prénoms, Hugues et Sylvain.
Hugo est Hugues Pouget. Il a officié chez Guy Savoy dont il a été le chef pâtissier et il a gagné le championnat des desserts en 2003. Il excelle à la réinterprétation de pâtisseries traditionnelles surnommées les « Hugo » alors que les « Victor » sont des pâtisseries plus classiques, destinées à ceux qui veulent redoper leurs souvenirs d’enfance avec originalité. Je reviendrai pour me faire une opinion entre les deux versions.
Les demi-sphères aux saveurs de saison ont un cœur coulant de caramel qui ferait succomber les plus réticents. Enfin leur sommelier propose un vin qui s’accorde, bouscule, ou exalte chaque saveur.Nous goutons une demi-sphère de chocolat blanc au saké. Cet alcool particulier a besoin d’être chauffé pour libérer sa puissance aromatique mais le chocolat blanc joue un rôle de parfait révélateur. La demi-sphère est facile à prendre en main, et plus commode à travailler que la forme classique. C’est Patrick Roger (que nous verrons tout à l’heure) qui en a eu la primeur. Le moulage convient particulièrement à l’association avec un caramel fondant. Et sans dévoiler les secrets de fabrication on peut révéler que leurs techniques sont savantes. Ainsi le combava est parfois utilisé pour son jus, son zeste ou ses feuilles (celles-ci sont infusées dans le caramel pour parfumer les demi-sphères).
Les évocations à l’univers littéraire sont sobrement présentes sur les murs et dans les emballages. A Noël la buche elle-même avait pris la forme d’un livre.
Deuxième étape chez le créatif ligurien, Jean-Charles Rochoux
Nous poursuivons avec la minuscule boutique de Jean-Charles Rochoux qui embaume le chocolat. L’atelier est au sous-sol et on y travaille en permanence. D’ailleurs la serveuse invite plusieurs clients à revenir en fin d’après-midi quand la variété qu’il souhaite sera de nouveau disponible.
Ce chocolatier est le spécialiste des truffes, de la ganache à la rose, et son chocolat au basilic lui a valu un prix en 2005. L’homme n’est pas classique et ne résiste à aucun défi. Il rebondit sur la moindre idée, faisant chocolat de toute critique ou plainte.
Pour qui lui confie adorer fumer un cigare en dégustant un chocolat il créé Habanos (octobre 2008), une ganache infusée de notes de tabac blond dont la puissance est à son comble après plusieurs secondes en bouche. Il va jusqu’à les glisser dans un coffret argenté très masculin.
A cet autre adorant les fruits frais il propose la tablette du samedi, un chocolat enrobant des fraises fraiches uniquement quand elles sont de saison et qui ne souffrent pas d’attendre plus de 48 heures pour être consommées.
C’est encore lui qui s’inspire de la girolle qui racle la tête de moine (un délicieux fromage quand on le découpe avec cet appareil) pour faire des copeaux de chocolat, nature ou épicé qui seront délicatement posé sur des tartines à l’heure du goûter, comme autrefois.
Il est connu pour écrire des messages sur les tablettes, composer des lettres en chocolat que l’on offre comme des initiales. Aucun modèle ne résiste à son art du moulage, et ses réalisations sont aussi belles et aussi précises que des sculptures de bronze qui ornent les vitrines de sa boutique aux allures de bonbonnière où l’inventivité se manifeste partout.
Il parvient à réconcilier amertume et raffinement. Je me surprends à rêver à des saveurs insensées qui seraient de nouveaux défis qu’un jour j’oserai peut-être lui confier …
Troisième étape chez Patrick Roger, la valeur sure
Ses boutiques éclosent comme des champignons dans un sous-bois et il y fait frais en permanence. Originaire du Perche, Patrick Roger aime les matériaux un peu bruts comme le bois qui recouvre le sol, le métal estampé comme un moucharabieh sur les podiums de présentation, les simples boites carrés des chocolats vendus en vrac comme dans un magasin d’usine.
Sa boutique est un palais oxymorial. Ses sculptures sont toujours un évènement. Il ose en ce moment fêter la Saint Valentin et son amour pour les femmes avec des seins ... en chocolat, dans plusieurs tailles possibles, renfermant une mousse caramel onctueuse à la fleur de sel.
Mais n'allez pas croire que l'homme est un provocateur. C'est avant tout un artiste au grand cœur travaillant dans le respect du produit. Il avait réalisé pour le Téléthon un sapin de 10 mètres de hauteur, le maximum possible sous la voute de son laboratoire. Il a l'esprit de famille. Son neveu et sa fille sont ses modèles. Et il aime aussi cultiver son potager.
Il est Meilleur Ouvrier de France et a été sacré chocolatier de l’année dans le guide Pudlo 2011.
Dégustation chez Cacao et Chocolat
Quelques rues plus loin nous faisons halte pour déguster les chocolats choisis spécialement par Lauranie et parfaire nos connaissances en matière de cacao. Elle nous rappelle que la boisson que les Incas buvaient n'avait pas la douceur de ce qu'on appelle aujourd'hui un chocolat chaud. C'était un mélange de cacao et de pâte de maïs broyée avec des épices et de l'eau, renforcée par du piment pour lui donner de la vigueur. La tasse qui nous est apportée est un savant dosage de chocolat, de crème et de piment d'Espelette. Un régal !
Elle nous explique tout le processus depuis la fleur jusqu'à la torréfaction en nous donnant de précieuses indications sur les pourcentages de cacao des différents chocolats :
le blanc : avec 20% de beurre de cacao et 80% de lait et sucre ;
le au lait : 40% de chocolat et 60% de lait-sucre
le noir : 70% de beurre de cacao et de pâte (60% pour le beurre, 40 pour la pâte) et 30% de sucre
Elle nous rappelle qu'une dégustation mobilise les cinq sens. D'abord la vue avec la forme, la couleur et l'aspect. Puis l'odorat pour repérer les arômes, y compris ceux qu'elle qualifie de négatifs (comme le brûlé, le moisi, le chimique, les notes animales, le cuir ou l'alcool). Le toucher n'est pas en reste pour apprécier la couverture et la garniture. Quant à l'ouïe elle se manifeste par le cassant de la tablette et le croustillant d'une bouchée ou d'un caramel.
Le goût est le plus sollicité. Il va falloir apprécier l'attaque, le milieu et la fin de bouche, l'acidité, le sucre, le sel et l'amertume.
Nous commençons à l'aveugle. Lauranie nous recommande de nous pincer les narines avant de croquer puis de libérer le nez ensuite afin d'apprécier d'un coup les arômes qui sont brutalement libéré par un effet dit "retro-nasal". Cela fonctionne très bien et nous pouvons reconnaitre la cannelle, les poivres, la girofle, la muscade pour les plus chanceux d'entre nous. Il s'agissait d'une tablettes aux épices de Jean-Claude Rochoux. Avec un peu d'expérience nous maitriserons mieux cet art de la dégustation.
Arrive ensuite une ganache noire, très crémeuse, de Cacao et Chocolat où je repère vite la fève tonka, parce que je la connais pour l'avoir déjà appréciée (voir ici et là quelques recettes faites avec cet épice).
Puis c'est un praliné à l'ancienne de Patrick Roger, probablement le chocolat préféré de Lauranie qui avoue avoir du mal à résister à cette gourmandise.
Nous arrêtons là nos expérimentations gustatives. On pourrait continuer, mais ce ne serait pas raisonnable et il faudrait d'abord nous "nettoyer" le palais en croquant une pomme granny. Par contre nous poursuivons encore un peu en échangeant nos impressions sur des tendances à la mode. Comme la fondue au chocolat, qui se marie bien avec la fraise (quand elle est de saison), le kiwi, la mandarine et la banane.
Les soins esthétiques au chocolat divisent les opinions. Certes le beurre de cacao a des propriétés hydratantes, mais moins que le beurre de karité. Il est difficile d'accepter le principe de détourner des produits comestibles de leur usage premier mais ce peut-être une belle expérience, malgré un cout plutôt prohibitif.
Lauranie a pleinement rempli sa mission de découverte, de partage et d'approche de chocolatiers d'univers très différents. Elle alterne deux circuits, qu'elle change tous les trois mois. Nous avons donc encore d'heureuses visites à programmer ... Cette spécialiste qui a l'avantage d'être polyglotte a d'autres projets, comme celui de devenir l'ambassadrice du chocolat français en Espagne, en Italie et en Suisse, et pourquoi pas ensuite au canada et aux U.S.A.
On imagine très bien combien la clientèle internationale se presserait dans le salon d'un grand hôtel pour participer à une séance de dégustation "made in France" tant il est vrai que nos chocolatiers sont encore des maitres incontestés en la matière.
Quant à nous, après un ultime test au bar des arômes nous pourrions, pour quitter cet univers en douceur, aller voir au cinéma les Émotifs anonymes, une belle histoire romantique et humoristique dont l'action se situe dans une fabrique de chocolat. Isabelle Carré et Benoît Poelvoorde interprètent deux émotifs dans des registres différents et autant savoureux. Ou revisionner le film Chocolat avec Juliette Binoche dans le rôle d'une chocolatière qui en ouvrant une confiserie à proximité de l'église, bouscule un paisible village en période de carême.
Carnet d’adresses :
Esprit chocolat, contact au 09 53 42 65 42
Hugo et Victor, Boutique Rive Gauche, 40 boulevard Raspail 75007 Paris
Tel : 01 44 39 97 73,
Jean Charles Rochoux 16 rue d’Assas 75006 Tel : 01 42 84 29 45
Patrick Roger, 91 rue de Rennes 75006 Paris
Tél : 01 45 44 66 13 ou encore 47 rue Houdan 92330 Sceaux Tél : 01 47 02 30 17
Cacao et chocolat, 29, Rue de Buci, 75006 Paris Tél : 01 46 33 77 63
3 commentaires:
Miam !! Pourquoi les blogs ne permettent-ils pas de goûter, ou au moins de sentir ? Ton article met véritablement l'eau à la bouche...
Certes ... Je crois qu'il y a eu des expériences en ce sens au cinéma, mais peu concluantes.
La force de l'imagination est bien supérieure, et heureusement car les livre les premiers font rêver.
La dégustation du chocolat mobilise en effet les 5 sens... et il faut savoir embrasser un chocolat : le placer délicatement entre ses lèvres et percevoir la sensation lorsqu'il fond délicatement...
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