Delphine Bertholon aime les drames qui commencent mal et qui se terminent sur une ouverture sur l'espoir et la lumière. Au motif que la vie est pire que n'importe quelle fiction (p. 141) elle s'en donne à coeur joie pour concocter des romans qui seraient un point de départ idéal pour un scénariste de films d'horreur en panne d'inspiration. Elle en a fait plusieurs brillantes démonstrations avec Twist, en 2008, l'Effet Larsen en 2010, et Grâce l'an dernier. Le soleil à mes pieds n'échappe pas à la règle.
Dans ses livres, la mère est toujours en souffrance, première victime d'un détraqué, d'un handicap ou pire ... le père absent ou empêché, les enfants en quête d'identité. Il y a des secrets, des fantômes, des non-dits familiaux et le cadre exerce une influence sur les personnages comme si l'endroit où ils vivent leur ressemblait, à moins que ce ne soit l'inverse.
Tout part cette fois d'un putain de fait divers sans coupable (p. 93 et 145) avec une première victime, la mère, et l'action tourne autour de son fauteuil à bascule en ellipse, entrainant la Grande et puis la Petite.
Deux ans d'écart seulement entre elles (si on s'en tient à l'âge civil), qui pèsent très lourd et des tempéraments diamétralement opposés. La quatrième de couverture présente la Petite fragile et ravissante, se protégeant du monde dans le cocon de sa chambre de bonne; la Grande nymphomane, tyrannique et machiavélique s'agitant dans la ville. On nous promet que si le sort semblait avoir scellé leur destin, les rencontres parfois peuvent rebattre les cartes.
C'est la Petite qui parle. Elle raconte ... le soleil à ses pieds, qu'elle va retrouver dix-huit ans plus tard, et suivre la piste de l'énigme.
La couverture fournit un indice flagrant : des sandales, décolletées sur l'avant, des talons de bois peint avec des brides en liens autour de la cheville. Dorées. Démentiellement dorées (p. 113) qui seront une pomme de discorde entre les deux soeurs.
Vivent-elles en symbiose comme l'anémone et le poisson-clown ? L'une est-elle sous emprise de l'autre ? Laquelle croire ? Se laver, c'est un peu s'effacer (p.42). Et au rythme où la Petite récure elle n'existera bientôt plus. Encore heureux qu'elle parvient à se calmer un peu en jouant à la télékinésie ou à la détective en découvrant un mot doux (p. 54) pour laisser au temps le temps d'enclencher un processus de résurrection.
L'histoire tangue habilement entre horreur et policier, avec un détour sur ces Grands Boulevards (p.103) que je connais désormais si bien que j'ai cru un instant que nous allions entrer au Manoir de Paris où la Grande aurait une place toute légitime.
Le soleil à mes pieds de Delphine Bertholon chez Jean-Claude Lattès, ISBN 978 2709 6310 82, sortie le 22 aôut 2013
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