Je n'avais pas pu voir Gretel, Hansel et les autres à la Chapelle des Pénitents Blancs pendant le Festival d'Avignon.
J'étais déçue, mais vite consolée car je savais que le metteur en scène est artiste associé de l'Azimut, et que donc le spectacle était programmé au théâtre Patrick Devedjan d'Antony (92). J’avais la certitude de le voir à la rentrée.
Et j'indique tout de suite que le public parisien pourra l'apprécier au théâtre de La Colline du 1er au 17 décembre 2022.
J'avais conservé le souvenir de son Maitre et Marguerite éblouissant au Théâtre de la Tempête et j'attendais beaucoup de celui-ci. C'est le premier spectacle pour enfants d'Igor Mendjisky qui soulignait avec autant de sérieux que d’humour en conférence de presse à Avignon qu'il s'adressait aux adultes, à partir de 8 ans. J’aime beaucoup cette idée qu’un spectacle dit pour enfants ne soit pas exclu des adultes.
Jacob et Wilhelm Grimm sont deux frères allemands, tous deux linguistes. Ensemble, ils ont collecté et étudié quatre-vingt-six contes populaires. En 1812, ils éditent le recueil Contes de l’enfance et du foyer qui rassemble et fixe en quelque sorte des légendes populaires et des histoires jusque là uniquement orales, et racontées depuis des décennies.
Sur le plateau se déploie une vaste chambre d’enfants encombrée d’une profusion de peluches et de jouets, parmi lesquels je reconnais les Playmobil avec lesquels mes propres enfants ont tant joué. Il y a aussi la maison de poupée et le train électrique. Tout y est. Le père (Igor Mendjisky) se plaint que rien n’est rangé et entreprend de mettre de l’ordre (alors qu’en réalité ce n’est pas choquant). Un ami arrive (Sylvain Derby) invité à dîner puis la mère (Esther van Den Driessche) entre en scène. Le père s’énerve et on devine qu’il ne parviendra pas à obtenir des enfants d’aller se coucher sans faire de crise. C’est à trois que les adultes vont alors décider de leur raconter l’histoire leur permettant de s’endormir.
Le metteur en scène s’est bien entendu inspiré de la version des Grimm mais avec l’intention de la retravailler très librement à sa manière, en faisant confiance au regard d’une personne qui a grande importance à ses yeux, sa fille. Voilà pourquoi le titre a été modifié pour donner la première place à la gente féminine. Et de plus en ajoutant la mention « les autres » pour intégrer tous les personnages secondaires.
Le résultat est étonnant. Avec une profusion d’images, de manipulations à vues et d’effets spéciaux, quoique simples à comprendre et accessibles aux enfants. Comme dans le conte, il est question d’une disparition mais la cause n’est pas la même. Alors que chez Grimm les enfants sont perdus dans la forêt par leurs parents chez Mendjisky ils partent d’eux-mêmes et s’ils sont « abandonnés » c’est au second degré qu’il faut comprendre le terme.
On est parti, dit la petite fille, parce qu’il faut grandir. Une remarque qui sous-entend que les enfants seraient plus responsables que les adultes. Et c’est le cas puisque le départ des enfants s’accompagne d’une autre perte, celle des saveurs, suite à l’abus (généré par les parents) du remplacement de la vraie cuisine par des gélules.
La séance à laquelle j’ai assisté était une « vraie » séance scolaire, avec surtout un public de centre de loisirs, n’ayant pas l’habitude d’aller au théâtre. Dans les premières minutes ils sur-réagissaient, répondant aux questions des comédiens, n’hésitant pas à exprimer leurs opinions. Petit à petit ils sont entrés dans l’histoire et ont fini par s’assagir, témoignant de leur intérêt.
Il faut reconnaître que les images sont de toute beauté, captivantes. Par contre, au-delà de la simplicité de la problématique, la multiplicité des personnages ne rend pas la compréhension immédiate et l’enquête qui nous est soumise est complexe.
Où Gretel et son petit frère Hansel sont-ils passés ? Quel est ce monde étrange où plus personne ne prend le temps de se mettre à table ? Tandis que la ville entière les cherche, nos deux héros s’enfoncent dans la forêt, à la rencontre d’un écureuil qui parle, d’une licorne magique, d’une sorcière pas trop méchante… et sans doute aussi d’eux-mêmes.
Les comédiens racontent l’histoire en utilisant les jouets, des peluches devenues marionnettes et des maquettes filmées en direct, des images projetées à la manière du théâtre d’ombres et en jouant avec les échelles. Sans oublier la musique obsédante et répétitive de Jungle de Féli Machado.
Ludique et inspirant, ce conte de notre époque a pour ambition de nous rappeler que oui, le pouvoir d’imagination des enfants peut changer le monde ! A condition, comme le dit un des personnages que l’on prenne soin des histoires.
Gretel, Hansel et les autres d’Igor Mendjisky
Écriture, mise en scène Igor Mendjisky
Avec Igor Mendjisky, Esther Van Den Driessche, Sylvain Debry
Dramaturgie Charlotte Farcet
Animation 2D Cléo Sarrazin
Musique Raphaël Charpentier
Scénographie Anne-Sophie Grac, Igor Mendjisky
Vidéo Yannick Donet
Lumière Stéphane Dechamps
Écriture, mise en scène Igor Mendjisky
Avec Igor Mendjisky, Esther Van Den Driessche, Sylvain Debry
Dramaturgie Charlotte Farcet
Animation 2D Cléo Sarrazin
Musique Raphaël Charpentier
Scénographie Anne-Sophie Grac, Igor Mendjisky
Vidéo Yannick Donet
Lumière Stéphane Dechamps
Le texte de la pièce a été édité chez Actes Sud-Papiers au mois de mai 2022
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