Il ne fallait arriver ni avant ni après leur (pardon de vous casser les pieds avec ces préliminaires qui surprendront les lecteurs du blog qui découvriront l’article dans trois ou quatre ans…).
Masque, gel hydroalcoolique, distanciation, chaises espacées les unes des autres, pas de passage de micro pour poser des questions. Il fallait lever la main et un peu hausser la voix mais voilà nous y étions et il est toujours sympathique d'entendre les auteurs parler de leurs intentions d'écriture. Plus tard ils ont dédicacé à des personnes qu’ils ne reconnaîtront jamais. Il n'y eut pas de selfies, cette manie (que je n'ai jamais approuvée) est devenue obsolète.
Mais le sourire toujours illumina les visages des Beka, puisque c'est ainsi qu'on désigne le duo constitué par Bertrand Escaich et Caroline Roque. Ils étaient accompagné du dessinateur Marko qui est surtout connu pour une série historique sur Verdun et pour animer depuis 2014 une page Facebook intitulé Vivre avec un dessinateur.
Nous étions une poignée (forcément le nombre de participants aux rencontres est en chute libre) aujourd'hui à l'invitation de Babelio à l'occasion de la sortie du dernier livre de la série Le jour où ...
Le titre complet du tome 5 est Le jour où la nuit s'est levée, et il est comme les autres né de la collaboration entre BeKa, à l'écriture, Marko à l'illustration et Maëla (pour la couleur), lui aussi publié chez Bamboo édition.
Bertrand et Caroline s’expriment avec leur joli accent chantant. Ils s'intéressent depuis longtemps à des questions que l'on peut considérer comme appartenant au développement personnel, un domaine qu'il n'a pas été simple de traiter en bande dessinée, même si notre époque est sans doute plus favorable aujourd'hui à ces thématiques qu'il y a quelques années. La série est née de cette envie.
C'est au fil du temps que le terme de "développement personnel" s'est imposé mais ils n'avaient pas réfléchi en ces termes. Le nom de code du fichier était Bonheur, et il l'est resté.
Jusqu'à récemment Marko ne se sentait pas particulièrement attiré par cela mais au fil de leurs collaborations il commence à manifester l’envie de se rapprocher de ce type d'ouvrages.
Bertrand sachant dessiner il sait comment communiquer ses envies à Marko. On devine que le scénario est très précis (souvent il est donné une fois terminé) et déjà structuré en cases avec l’intention du dessin qui est indiquée avec un minimum de mots (sans aller jusqu’à indiquer le cadrage).
Ainsi par exemple la présence de taches noires symbolisant la dépression (par exemple page 45) figurait dans le scénario. De même que l'absence de contour des cases de la page 52. A cet égard Marko précise que son intervention doit guider le lecteur. Par exemple en positionnant les bulles de manière à faciliter la compréhension de l'enchaînement des dialogues. Et s'il est possible d'aller jusqu'à 12 cases il préfère lorsque leur nombre est réduit à huit ou neuf pour améliorer la lisibilité.
Marko fait totalement confiance aux BeKa sur leur manière de cadencer. Inversement ils apprécient que leur complice puisse raconter en dessins exactement, voire un peu plus, que ce que les mots du scénario signifient. Il est arrivé qu'ils le stoppent dans son élan alors que lui-même estimait n'avoir pas achevé son travail. c'est ce qui arriva pour la planche 1 de la première série.
Il s'est inspiré pour la série de la salle circulaire d'une véritable librairie où il s'est rendu en dédicace. Il s'agit de l'Entrée livres qui est la librairie indépendante du centre de Verdun, située dans un secteur piéton, rue Edmond Robin. Il a modélisé la pièce en 3D pour y placer les personnages. On la reconnait particulièrement en haut de la page 13.
Il arrive aux BeKa de fournir des banques de photos, surtout quand leurs personnages voyagent dans des pays où il se sont eux-mêmes rendus. Le voyage est un moyen d’amener d’autres décors, de sortir du huis-clos, et de lancer un mouvement qui amènera d’autres réflexions. En tant que bédéistes ils pensent le décor en sachant qu'ensuite Maëla Cosson interviendra comme coloriste.
Le tome 5 se déroule en hiver, en fin de journée… Une tempête de froid et de neige s’abat sur Paris, bloquant plusieurs personnes dans la librairie de Clémentine. Dont Guillaume et Naori, maintenant installés dans la capitale, ainsi que Chantal l’écrivaine. Cette bulle de temps imprévue sera l’occasion pour chacun de faire remonter ses souvenirs d’enfance, de réfléchir au poids de l’héritage familial, de l’éducation qu’il a reçue, à l’influence de ses parents et de sa famille sur sa vie et ses choix… Jusqu’à ce que la tempête se calme et que la nuit se lève sur un nouveau jour… et peut-être une nouvelle façon de voir et de mener sa vie.
On retrouve Clémentine parce qu'elle est désormais prête à aider les autres. Si elle était incarnée par une comédienne ce serait Isabelle Carré.
Les cinq familles dont l'histoire est racontée dans ce livre correspondent chacune à un schéma type. Les auteurs se sont inspirés de leurs lectures (certaines sont citées dans l'ouvrage, comme la référence à D'après une histoire vraie de Delphine de Vigan ou encore Alexandre Jardin (page 9). Ils auraient aimé utiliser des témoignages mais aucun n'a pu servir pour ce tome là. Ils sont persuadés que les relations que l'on a avec nos parents construisent et déconstruisent notre rapport à la vie.
Tout le monde a quelque chose à enterrer de son enfance mais l'album se veut résolument positif. Comment sortir de l’hérédité ? Et par voie de conséquence du risque de répéter les mêmes erreurs que nos parents ? En parlant, ou en fuyant. Parfois en se rebellant. C'est à chacun de choisir.
D'autres thématiques restent à explorer pour les prochains tomes qui s'inscriront dans une certaine continuité. Ne serait-ce que parce que Naori est enceinte.
Le jour où la nuit s'est levée, de Beka, Marko et Maëla, chez Bamboo édition, en librairie depuis le 26 août 2020
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