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La publication des articles est conçue selon une alternance entre le culinaire et la culture où prennent place des critiques de spectacles, de films, de concerts, de livres et d’expositions … pour y défendre les valeurs liées au patrimoine et la création, sous toutes ses formes.

samedi 21 avril 2018

Mon loup,114 rue de la Condamine à Paris

Il y a des plats dont on se souvient très longtemps. S'il ne fallait en retenir qu'un chez Mon loup ce serait ce poireau rôti ... mais commençons par le commencement.

Le restaurant, ouvert il y a quelques semaines dans ce quartier très vivant des Batignolles est le petit frère, en plus grand, de Ma biche, située dans le "cul de Montmartre" au 12 rue Véron. Une légende voudrait que les deux animaux se soient rencontrés à une période de grande disette et aient élevé un certain Médard qui serait à l'origine de la permaculture.

Ce sont deux copains (un mot que j'aime beaucoup car il signifie qui partagent leur pain), Pascal et Serge, qui les ont choisis pour appeler leurs restaurants, avec pour objectif un approvisionnement le plus bio possible et 100% direct producteur qu'ils ont décliné en promesse : un paysan dans ton assiette, te voilà bien dans tes baskets.

C'est écrit en toutes lettres sur la devanture mais le plus important est tout de même justement ce qui arrive sur la table.
David est le nouveau chef depuis trois semaines et il a commencé à modifier la carte. Les Couteaux au beurre de Maracuja sont pour le moment abandonnés. Le soir il prépare des tapas, qui sont servis au bar comme quelques bulots, dégorgés au gros sel avant d'être ébouillantés avec un jus de citron pour leur apporter de la fraicheur. Ils se dégustent avec une mayonnaise maison aillée et relevée de piment d'Espelette. On l'accompagnera d'un Ventoux 2017 Les Cardelines. Mais on pourrait tout autant se désaltérer d'un extraordinaire (et le mot est faible) jus de pomme du Domaine de la Beaudrière qui a un goût de pommes confites, et qu'on espère pouvoir acheter dans l'épicerie adjacente, la Tanière, dès que les travaux consécutifs à un malencontreux dégât des eaux auront été terminés. 


Une formule express permet de déjeuner pour 12,5€ entrée/plat ou plat/dessert. Le soir le choix est plus large et les photos qui vont suivre ont été indifféremment prises à l'un ou l'autre service.

J'ai adoré le Poireau bio rôti façon mimosa et sa sauce moutarde en grains. Son arrivée surprend. Il fond en bouche. C'est un régal, y compris le bout des feuilles rendu croquant par la cuisson au four. 
Le pain aussi est appréciable. Il est maison, pétri à partir d'une farine bio. Et l'eau (plate ou gazeuse) est tirée au comptoir pour limiter l'empreinte carbone.


Le Foie gras de canard du Sud-Ouest, confiture de figues reste un classique, bien exécuté. Les foies ont macéré dans un mélange d'alcool sec (un Cognac)  et de vin doux (le Pipi d'Ange) qui lui assurent une tendresse extrême. Ce vin est une révélation. Il est plus léger qu'un Montbazillac, moins sirupeux qu'un Sauternes, parfumé sans que le raison domine comme le ferait un Muscat.

Serge est fils de restaurateur et a enchainé les expériences dans des restaurants. Il a réalisé des films ethnographiques sur le monde paysan une dizaine d'année dans le Ventoux. Il connait personnellement le producteur qui a donné le nom de son fils à ce vin qu'il travaille d'une manière particulière, en laissant légèrement fermenter le moût de raisin. Plusieurs petits films vidéo qui donnent la parole aux paysans pour parler de leur travail sont à retrouver sur le site du restaurant.
D'autres entrées sont à la carte : le Gaspacho de betterave bio des frères Desmonts qui est une crème d'une grande douceur à peine acidulée ou les Croquettes végétariennes de petit épeautre.
Vous aurez remarqué le caractère un peu désuet, mais charmant de la vaisselle, pour la plupart chinées dans des vide-grenier. La décoration, signée par Pascal, qui a travaillé aussi bien dans le monde du théâtre, de la mode que dans celui de l’hôtellerie.

Il a instauré une atmosphère de maison de famille dont les membres auraient beaucoup voyagé. Les plumes de paon font cercle autour d'un luminaire. Un vase 1950 apporte une touche de couleur sur un coin d'étagère.


L'opus incertum a été conservé au sol des toilettes, immenses, où l'on pourrait avoir envie de s'installer pour lire une partie de la journée. Des armoires anciennes ont une seconde vie comme placard mural. Des statuettes nichent dans quelques interstices. On a le choix entre table carré ou ronde, chaises de bistrot ou banquette de cuir Chesterfield.
Des flacons de parfum sont reconvertis en huiliers pour des huiles fumées ou à la saveur particulière. L'un d'entre eux contient malgré tout un whisky utilisé pour flamber la viande du burger.
Des portraits de famille sont posés sur une commode alors qu'en face, un loup flamboyant surveille la scène. Il est la création d'une artiste qui vient souvent en voisine, Patricia Ducept.


En plat le choix est large, entre la fraicheur d'une belle Salade de maquereau mariné-truite fumée-oeuf parfait-concombre-oignons rouges ou le Turbot rôti, julienne de légumes sauce beurre blanc légèrement anisée, à moins de préférer de la viande comme le Burger Auvergnat (C. Rus Aveyron) bun bio, chèvre, figue séchée qui sera accompagné de pommes gaufrettes ...

... ou un Foie d'agneau de Normandie qu'il a vu "sur pattes" il y a une quinzaine de jours. Bientôt il cuisinera les côtelettes, puis un confit : on va le présenter de toutes les façons de manière à ce que le client comprenne que la star, c'est le produit. Il vous parle avec amour d'un petit jus d'agneau qu'il est en train de préparer avec de la poitrine et du collier.
Le plat sera conseillé avec un puissant Cote-du-Rhone 2011, du même Domaine des Cardelines que précédemment. Cela faisait une éternité que je n'avais pas mangé un tel plat qui me ramène en enfance. Chez Mon loup il n'y a pas que le décor qui évoque la famille d'une grand-mère.

La cuisine de David est simple, pas alambiquée. Le légume est juste rôti, on l'a vu plus haut. La viande n'est pas noyée dans le jus. Elle doit être "naturellement" bonne sans qu'on ait besoin de la recouvrir d'une couche de sauce. On donnera malgré tout un pot de moutarde au client inconditionnel de l'aromate. 
Au moment du fromage un Brie de Meaux affiné pourra vous être proposé avec, et c'est surprenant, un Beaumes-de-Venise Fenouillet. Ensuite, après cette cuisine de grand-mère qui "remplit le ventre"  le dessert pourra être une pâtisserie de cuisinier comme un cheesecake aérien,  une ile flottante ou un riz au lait.
Ce fut aujourd'hui une Nage d'orange à la badiane, parfumée d'eau de fleur d'oranger avec quelques pointes de Chantilly, lamelles d'orange confite et crumble de sésame. L'assiette est posée devant moi à température ambiante et tous les parfums qui s'en dégagent attisent mon palais pourtant satisfait jusque là. J'apprécie que les fruits ne soient pas glacés.
Je ne serais pas complète si j'omettais de parler de Nicolas, qui est bien davantage qu'un serveur ... impertinent dans la pure tradition parisienne. Le soir il fait le show en remplissant les verres de champagne devant des clients amusés par sa dextérité. Il officie aussi bien sur au bar où il confectionne des cocktails.
L'ambiance est toute autre. La façade voisine s'anime sous les facéties du facteur de Jacques Tati et la cour intérieure des images en noir et blanc de Playtime. Il est donc particulièrement recommandé de réserver la table ronde pour le dîner.
Pascal et Serge ont encore des projets sous le coude et on peut parier que l'offre va continuer d'évolue. La prochaine étape sera l'ouverture d'ici fin mai des portes jaune vif de la Tanière, toute proche, en complément du restaurant. Cette épicerie "paysanne" d'un nouveau format s'inscrit dans la suite logique de l’aventure, avec la volonté de démocratiser toujours plus les bons produits et les producteurs qui travaillent dans l'ombre.

On pourra y commander chaque semaine son panier de légumes cultivés par Stéphane Desmont avec des idées recettes associées, mais aussi acheter les produits en provenance directe des paysans (vins et alcools bio, légumes secs et céréales en vrac, chocolat, café...) ou ceux fabriqués avec amour par l’équipe de Mon loup (terrines, rillettes et autres poissons fumés...).
 
Avec Serge à la recherche des meilleurs produits, Pascal et Nicolas en salle, David aux fourneaux, aidé par Din, on se sent ici comme à la maison.
Mon loup
114 rue La Condamine
Paris 17ème
09 51 55 24 29 contact@monloup-restaurant.com
Déjeuner et dîner du mardi au samedi
Brunch le dimanche de 12h à 17h Happy Hour de 17h à 20h
Épicerie & Table d’Hôte Ma Biche
12 rue Véron
Paris 18 ème
01 42 58 22 20 contact@mabiche-restaurant.com
Dîner du lundi au dimanche
Lunch le samedi et Brunch le dimanche de 12h à 17h

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