L'Augmentation est une pièce de Georges Pérec au titre prometteur, montée en coproduction avec le Centre Dramatique de Montluçon.
Mise en scène par Anne-Laure Liégeois , cela devient un évènement à ne pas louper. Le Théâtre Firmin Gémier d'Antony (92) avait misé sur cette création, propulsée comme temps fort du 18 au 30 novembre.
Plusieurs rencontres ont été programmées pour aller au devant d'un public qui ne connait pas forcément Georges Pérec.
Mise en scène par Anne-Laure Liégeois , cela devient un évènement à ne pas louper. Le Théâtre Firmin Gémier d'Antony (92) avait misé sur cette création, propulsée comme temps fort du 18 au 30 novembre.
Plusieurs rencontres ont été programmées pour aller au devant d'un public qui ne connait pas forcément Georges Pérec.
Laurent Letellier, assistant à la mise en scène, s'est chargé des bibliothèques. Je l'ai rencontré dans la superbe médiathèque de Chatenay-Malabry. Il connait -forcément- très bien l'oeuvre de cet écrivain. Il analyse, compare, lit quelques extraits, suscite l'envie d'en apprendre davantage sur un auteur réellement génial, sorte d'Einstein littéraire, avec qui la ressemblance n'est pas que physique. Cet homme avait le cerveau en ébullition permanente.
L'augmentation est une courte pièce : une cinquantaine de pages que j'ai eu le temps de lire avant d'aller au théâtre. J'avais aussi -hier- rencontré l'équipe artistique au cours d'un débat avec le public. C'est une excellente idée de programmer le jeudi une séance à 19 heures 30 ... à condition que cela se sache. Croyant arriver en avance pour 20 heures 30 je me suis en fait pointée en retard. J'ai loupé le spectacle mais suis restée pour entendre Anne-Laure Liégeois, disons ALL pour simplifier -parce qu'il faut toujours simplifier.
Malgré tout je n'étais pas convaincue. Ayant travaillé 20 ans en entreprise j'ai vécu de près ou de loin suffisamment de situations frustrantes ou injustes pour ne pas avoir envie de les voir montées en épingle sur une scène de théâtre. Je sais trop bien qu'il est illusoire d'espérer une augmentation de salaire et qu'il faut déjà s'estimer heureux d'avoir du travail et de le conserver, même si ce n'est pas facile tous les jours.
La lecture de la pièce avait été savoureuse mais ne m'avait pas fait changer d'avis : aller entendre le texte sur scène n'était pas devenu prioritaire dans un emploi du temps très chargé.
La lecture de la pièce avait été savoureuse mais ne m'avait pas fait changer d'avis : aller entendre le texte sur scène n'était pas devenu prioritaire dans un emploi du temps très chargé.
MAIS ... dans une mise en scène d'ALL il fallait peut-être attendre pour juger ...
D'emblée je confesse que j'ai eu tort de douter. J'ai passé un moment formidable et si je pouvais j'y retournerais. Le spectacle est complet : chorégraphie, musique, découpage des dialogues ... tout a été pensé avec humour, intelligence et générosité.
D'emblée je confesse que j'ai eu tort de douter. J'ai passé un moment formidable et si je pouvais j'y retournerais. Le spectacle est complet : chorégraphie, musique, découpage des dialogues ... tout a été pensé avec humour, intelligence et générosité.
Çà commence comme au cinéma. Les entrées et sorties des comédiens claquent comme des diapositives avec un rythme de générique de film. D'aucuns y ont vu une référence à Matrix. D'autres ont cru voir des gesticulations que Jacques Tati aurait pu faire dans Mon Oncle. Une lumière stroboscopique aurait provoqué le même effet.
A l'avant-scène plusieurs toiles reflètent des vues du plateau filmé sous divers angles. Puis les comédiens se figent avec un large sourire. Un silence s'épaissit sur la scène. C'est fini ? me demande mon voisin. Je sais que non et donc je supporte parfaitement ce moment de calme. Mes yeux se perdent dans la forêt lointaine qui s'étale sur le mur du fond. Ce type de photographie grandeur nature était très à la mode dans les années 70. Seule la machine à eau est anachronique et bien contemporaine de notre époque actuelle.
Nous avons tout deviné alors que les comédiens n'ont encore rien dit : la communication sera difficile. L'épaisseur du silence est à la mesure de la dignité de l'employé. Comme une métaphore du défi à relever. Le face à face avec le supérieur hiérarchique sera terrible. ALL nous avait prévenus : Un homme et une femme, comme à la création. Sauf que c'est pas le paradis.
Les dialogues s'ouvrent sur "Vous avez mûrement réfléchi". Le public se retient d'approuver.
Les tableaux s'enchaînent avec une énergie à couper le souffle. Après le silence les spectateurs sont soumis à une nouvelle contrainte : écouter le texte dans un débit inhabituel. Il s'apparente alors à une musique répétitive qui évolue sensiblement. Un peu comme le Boléro de Ravel.
Les comédiens sont épatants dans leur capacité à changer de peau pour faire vivre de multiples facettes de tous les personnages. Olivier Dutilloy semble aller jusqu'au suicide "en live", sorte de Christ crucifié sur l'autel des vanités économiques. Anne Girouard est époustouflante.
Vous la connaissez forcément : c'est elle la reine Guenièvre dans la série française Kaamelott. Elle a aussi joué dans le feuilleton Marie Besnard, l'empoisonneuse. Elle a tourné en 2007 dans le film L'Auberge rouge, et fait une apparition dans Enfin veuve en 2008.
La scène de la fête ponctuant la remise de la médaille du travail est un morceau de bravoure. Illustrée musicalement par Gimme, gimme, gimme de ABBA. Rappelez-vous. Ecoutez et savourez :
give me, give me, give me a man, after midnight
Dans ce tube des années disco le groupe aimerait que, comme les stars de cinéma atteignant le bout de l'arc-en-ciel, on puisse faire fortune en trouvant là un chaudron rempli de pièces d'or, caché par des leprechauns, des lutins typiques du folklore irlandais. Mais les paroles de la chanson se poursuivent en regrettant que le monde réel soit si différent :
Les comédiens sont déchainés et les spectateurs totalement bluffés. Après cela on n'entendra plus jamais le groupe ABBA de la même oreille. Les applaudissements prendront une allure d'ovation totalement méritée.
ALL regrette de n'avoir pas rencontré Georges Pérec. Nous aussi. On imagine très bien ce qu'ils auraient fait ensemble : un théâtre pétillant et décapant. Il va falloir qu'elle poursuive sans lui parce que nous, on attend le prochain comme une fête.A l'avant-scène plusieurs toiles reflètent des vues du plateau filmé sous divers angles. Puis les comédiens se figent avec un large sourire. Un silence s'épaissit sur la scène. C'est fini ? me demande mon voisin. Je sais que non et donc je supporte parfaitement ce moment de calme. Mes yeux se perdent dans la forêt lointaine qui s'étale sur le mur du fond. Ce type de photographie grandeur nature était très à la mode dans les années 70. Seule la machine à eau est anachronique et bien contemporaine de notre époque actuelle.
Nous avons tout deviné alors que les comédiens n'ont encore rien dit : la communication sera difficile. L'épaisseur du silence est à la mesure de la dignité de l'employé. Comme une métaphore du défi à relever. Le face à face avec le supérieur hiérarchique sera terrible. ALL nous avait prévenus : Un homme et une femme, comme à la création. Sauf que c'est pas le paradis.
Les dialogues s'ouvrent sur "Vous avez mûrement réfléchi". Le public se retient d'approuver.
Les tableaux s'enchaînent avec une énergie à couper le souffle. Après le silence les spectateurs sont soumis à une nouvelle contrainte : écouter le texte dans un débit inhabituel. Il s'apparente alors à une musique répétitive qui évolue sensiblement. Un peu comme le Boléro de Ravel.
Les comédiens sont épatants dans leur capacité à changer de peau pour faire vivre de multiples facettes de tous les personnages. Olivier Dutilloy semble aller jusqu'au suicide "en live", sorte de Christ crucifié sur l'autel des vanités économiques. Anne Girouard est époustouflante.
Vous la connaissez forcément : c'est elle la reine Guenièvre dans la série française Kaamelott. Elle a aussi joué dans le feuilleton Marie Besnard, l'empoisonneuse. Elle a tourné en 2007 dans le film L'Auberge rouge, et fait une apparition dans Enfin veuve en 2008.
La scène de la fête ponctuant la remise de la médaille du travail est un morceau de bravoure. Illustrée musicalement par Gimme, gimme, gimme de ABBA. Rappelez-vous. Ecoutez et savourez :
give me, give me, give me a man, after midnight
Dans ce tube des années disco le groupe aimerait que, comme les stars de cinéma atteignant le bout de l'arc-en-ciel, on puisse faire fortune en trouvant là un chaudron rempli de pièces d'or, caché par des leprechauns, des lutins typiques du folklore irlandais. Mais les paroles de la chanson se poursuivent en regrettant que le monde réel soit si différent :
fatiguée de la télé
j'ouvre la fenêtre et je fixe le noir de la nuit
mais il n'y a là rien à voir, personne en vue
il n'y a pas âme qui vive là
personne qui entende ma prière
j'ouvre la fenêtre et je fixe le noir de la nuit
mais il n'y a là rien à voir, personne en vue
il n'y a pas âme qui vive là
personne qui entende ma prière
Les comédiens sont déchainés et les spectateurs totalement bluffés. Après cela on n'entendra plus jamais le groupe ABBA de la même oreille. Les applaudissements prendront une allure d'ovation totalement méritée.
Nous espérons doublement la revoir prochainement sur la scène antonienne, ou sur le plateau chatenaisien. En toute légitimité puisque ALL a fait ses débuts au théâtre avec la troupe du Campagnol à Châtenay-Malabry dans le cadre de Une ville se raconte. Elle vivait alors en voisine, à Verrières-le-Buisson. Des années plus tard elle participe à des projets que Marc Jeancourt orchestre avec beaucoup d'énergie (les tournées océanes) . Forcément, les liens se sont encore renforcés quand il a pris la direction du complexe. ALL sera toujours partante pour revenir à Antony.
L'augmentation, de Georges Pérec, au Théâtre Firmin Gémier d'Antony, du 18 au 30 novembre,
jeudi 19 h 30, dimanche 17 heures
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