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La publication des articles est conçue selon une alternance entre le culinaire et la culture où prennent place des critiques de spectacles, de films, de concerts, de livres et d’expositions … pour y défendre les valeurs liées au patrimoine et la création, sous toutes ses formes.

samedi 21 novembre 2009

Lait noir d'Elif Shafak

J'avais ouvert le livre le 28 octobre dernier, en grignotant des muffins à la pistache.

On m'avait annoncé un essai sur la dépression post-natale et je me sentais guère concernée. En remontant le temps bien avant la conception de son enfant l'auteure mène une réflexion qui dépasse l'anecdote. Elle s’interroge en toute franchise sur sa difficulté à choisir entre la maternité et son métier en craignant de ne pouvoir mener les deux de front. C'est une exploration de la difficulté de tout être humain à prendre des décisions, quand on cherche à concilier l’irrationnel et la sagesse.

Elif Shafak échafaude ses réflexions en les étayant d’exemples puisés dans le monde littéraire (non pas dans les romans, mais dans les biographies de femmes écrivains comme Simone de Beauvoir, Virginia Woolf, Zelda Fitzgerald, Doris Lessing, Sylvia Plath et de nombreux auteurs turques moins proches de nous).

Parallèlement elle analyse le cours de ses pensées en donnant corps à quelques traits de caractère, sorte de voix intérieures, contradictoires, représentées par six petites bonnes femmes auxquelles elles donnent de savoureux noms : Miss Cynique Intello et Miss Ego Ambition, Miss Intelligence Pratique et Dame Derviche, Maman Gâteau et Miss Satin Volupté.
Elle convoque aussi une mythologie orientale qui surprend nos esprits cartésiens, éduquant notre esprit à la culture musulmane. Elle compose un ouvrage inclassable, pour partie autobiographique, pour partie essai psychologique qui force à réfléchir sans être difficile à lire car les concepts sont toujours expliqués en termes simples. Du coup chacun peut se sentir concerné.

A l’instar des CD des artistes de variété elle nous offre en bonus des renseignements pratiques sur la dépression avec un test pour vérifier si on en souffre et des pistes pour en guérir.

Le livre aurait malgré tout gagné à entrer plus vite dans le vif du sujet. On a parfois l’impression que l’auteur va nous égarer mais le ton, tout à la fois ludique et sérieux, nous retient de décrocher. Elle nous ramène sans relâche au poids relatif de l’intuition, face au fatum (la destinée est–elle incontrôlable ?), et pose la difficulté de la remise en question.

Lait noir
, d'Elif Shafak, éditions Phébus, 2009

vendredi 20 novembre 2009

Ce que je sais de Vera Candida, par Véronique Ovaldé

De Rose à Monica Rose le destin boucle une lignée de femmes dans un style coruscant, terme que je ne connaissais pas auparavant, et que j’emprunte à l’auteur (p.50) pour signifier la vivacité de la plume de Véronique Ovaldé et sa prédisposition à décrire l’insolite. Elle dit volontiers que les incongruités l’amusent et que le surgissement de l’étrange lui plait. Qu’elle soit bénie : nous aussi.

La narration du tragique est joliment tournée, positivement baroque, avec poésie, fantaisie et un humour très coloré, qui font accepter de croire à cette histoire dont on a compris qu’elle était de l’ordre du conte philosophique ou du roman d’apprentissage. On se laisse emporter par le monologue intérieur des quatre femmes sans rien mettre en doute. Les sentiments qui sont explorés font le lien entre l’univers irrationnel et des éléments sociologiques qui touchent à l’universel. Rien d’étonnant donc à ce que le livre vienne de recevoir le Renaudot des lycéens.

Deux figures dominent : Rose , l’arrière-grand-mère, dont les maximes résonnent avec sagesse : on ne fait pas toujours ce qui est bon pour soi (p. 52). Dans la vraie vie on ne comprend pas toujours tout, il n’y a pas de notice, il faut se débrouiller pour faire le tri (p.150) ; et puis Véra Candida, la petite fille, qui va devoir affronter de grandes difficultés avec courage et détermination : en déposant sa douleur dans un petit refuge provisoire à l’intérieur de son cœur afin de ne pas fondre en larmes (p. 158)

Véronique Ovaldé ne manque pas de souffle pour tisser une narration qui s’appuie sans cesse sur « la vraie vie », comme elle le dit elle-même et qui pourtant nous promène dans un pays imaginaire latino-américain. C’est un artifice fréquent au théâtre pour mieux vaincre la résistance du spectateur. Véronique Ovaldé a manifestement un message à faire entendre. Le thème du harcèlement, qui imprègne décidément la littérature actuelle (on pense aux Heures souterraines de Delphine de Vigan) est sous-jacent. On se tromperait en disant que le combat est d’ordre féministe. Certes les héroïnes sont des femmes ; Véronique Ovaldé les appelle "ses guerrières"; la vie ne les épargne pas et leur condition y est pour beaucoup mais il y a aussi dans le roman un superbe caractère masculin avec Itxaga, le compagnon de Véra dont l'âme chevaleresque se révèle au cours des chapitres.

Un roman inhabituel, comme le serait la recette d’une spécialité exotique, qui, passé l’effet de surprise, se déguste avec bonheur, qui soulève de vraies questions avec sensibilité, grâce et fraicheur et que l’on n’est pas près d’oublier.

L’auteur a déclaré dans une interview que le lecteur idéal est celui qui finit le livre. Au risque de faire une remarque anecdotique je regrette souvent que les romans s’appauvrissent dans leur dernier tiers comme si la narration s’épuisait. Au contraire celui-ci gagne en puissance tout au long du récit et on ne risque pas de ne pas avoir envie de le terminer. Le secret tient peut-être à trois choses : la double profession de Véronique Ovaldé (qui est aussi le jour éditrice chez Albin Michel), son rituel d'écriture, tous les matins à cinq heures et pour deux heures seulement, et le talent bien sur.

Ce que je sais de Vera Candida, Véronique Ovaldé, Editions de L'Olivier, 300 pages
Le roman a également obtenu le Prix France Télévisions 2009. Ce prix, à l'instar du prix ELLE est décerné par des lecteurs qui se prononcent sur une sélection faite par des professionnels.

mardi 17 novembre 2009

Fakirs d'Antonin Varenne

Je commençais à m’interroger sur mes goûts quand ce livre m’est arrivé. C’est le premier policier concourant pour le prix ELLE que j’ai réellement apprécié.

J’ai beaucoup aimé l’univers trash mais sensible, jamais sordide, d’Antonin Varenne, ses personnages forts, incroyables, si cabossés qu’on ne peut s’empêcher de les aimer. Le titre est au pluriel parce qu’ils sont nombreux ces fakirs, au premier comme au second degré. Le récit décolle rapidement et il faut accepter le surréalisme de la situation, ce qui est facilité par une maitrise parfaite du vocabulaire et de la syntaxe du monde policier.

L’auteur ose avec naturel des métaphores imagées : on bat des persiennes (cligner des paupières) ; on se rince la bouche au détergent ; les mots sont des clous plantés dans du bois.

Il connait bien Paris. Son texte est enrichi de références à des lieux réels comme ce mètre étalon effectivement scellé rue de Vaugirard (p.89), à des cérémonies comme l’inauguration du Pont Alexandre III (p. 104) qui arrivent à point nommé, juste au moment où l’on douterait de la véracité de l’aventure. Le monde qui nous est décrit est suffisamment plausible pour qu’on l’accepte, et suffisamment décalé pour que l’on n’oublie pas qu’il s’agit d’une fiction. L’enchainement des évènements est ainsi rendu supportable.

Le style est proche de celui de Fred Vargas, avec en prime un humour pétillant. Des romans noirs comme cela je suis prête à en savourer plusieurs autres.

Fakirs d'Antonin Varenne, éditions Viviane Hamy, 2009

lundi 16 novembre 2009

LA ROUTE

Vous avez sans doute déjà entrevu ces jours-ci l'affiche de la Route, le film tiré du roman éponyme écrit par Cormac McCarthy. J'avais beaucoup apprécié ce livre, malgré la rudesse du sujet. Et je n'avais pas été la seule puisque après le prestigieux Prix Pulitzer il avait été élu par les lecteurs de la médiathèque d'Antony (92) en juin dernier.

John Hillcoat a tourné l'adaptation cinématographique en Pennsylvanie - autour du lac Erié et dans les zones minières -, en Louisiane - dans les régions frappées par l'ouragan Katrina - et en Oregon, avec Viggo Mortensen et Charlize Theron.

The Road, tel est son nom américain, a été présenté en première mondiale et en compétition le 3 septembre 2009 à la 66e Mostra de Venise, puis aux festivals de Telluride (Colorado), de Toronto, Sitges et Londres.

La Route retrace l'épopée poignante d'un père guidant son fils sur une planète ravagée, dans un monde de cannibalisme. Impossible de lire cet ouvrage qui fait penser au théâtre d'Edward Bond sans éprouver de puissantes sensations physiques. Mais ce n'est rien comparativement à ce que j'ai ressenti en visionnant les bandes-annonces que je renonce à inclure dans le présent billet. Je préfère vous inciter très vivement à lire le livre d'où il émane une certaine poésie et un esprit philosophique très puissant. Trop de violence nuit à la réflexion me semble-t-il.

Pour lire ou relire ce que j'avais écrit à propos du livre cliquer ici.

dimanche 15 novembre 2009

Fragments du désir

La Compagnie Dos à Deux a présenté sa dernière création, la cinquième, sur la très belle scène de l'Onde, à Vélizy (78). L'intitulé, Fragments du désir, fait écho à un roman récemment publié tout comme on pourra ressentir une certaine ressemblance avec le spectacle InSTALLation qui va investir l'Espace Cirque d'Antony (92) à partir du 12 décembre (et dont je parlerai très bientôt).

On constate de plus en plus la volonté des artistes de ne pas construire leur expression à partir d'un seul point de vue. De nouvelles formes de récit, sans véritable narration littéraire, investissent les salles de spectacles, d'où l'emploi judicieux du terme "fragments". On pourrait aussi établir un parallèle avec la Fin d'une liaison de par le même principe de conjuguer les ombres et les lumières.

Artur Ribeiro et André Curtis vont de plus en plus loin en conjuguant onirisme et théâtralité. Cette dernière création marque une rupture avec leurs précédents spectacles. L'écriture scénique s'inscrit tout à la fois dans le théâtre, la danse et la manipulation d’objets et de décors. Plusieurs histoires nous sont racontées, que l'on suivra en tâtonnant puisque les quelques mots entendus ne permettront pas d'en décrypter totalement le sens. Le récit est découpé comme le story-board d'un projet cinématographique. On reconnait malgré tout nettement un embryon familial autour d'un fils (Angelo), d'un père et d'une gouvernante (Olga). Les non-dits instaurent un silence de plomb sans détruire le lien familial qui parfois se réduit symboliquement à un fil. Ce qui est vite évident c'est que personne n'accepte de perdre et que le désir est un carburant vital. Le père vieillit, empêché d'agir par un handicap. Le fils grandit, voulant devenir une femme; il prendra Angel comme nom de scène. Orlando, aveugle, tombera sous son charme sans savoir qui il est vraiment.

Chacun, selon son vécu personnel et sa culture, pourra y voir des références à l'univers des contes, à certaines actrices du cinéma américain, à une philosophie japonisante. Beaucoup d'interprétations sont ouvertes.
Les photos (crédit Xavier Cantat) illustrent la pluralité des lectures qu'on peut faire, entre rêve et fantasme. Des images mystérieuses sont croisées avec des intrusions du monde. Des lignes géométriques habitent les formes et esquissent un univers cubiste, traversé par des échappées baroques : le jeu d’échiquier, la porte de la maison du père, le costume d’Olga, le lustre du repas comme contrepoint à la ligne de la table.

Ajoutez à cela des lumières dessinées par traits et coupures, jouant du clair-obscur et illuminant l'essentiel d'un geste, une partie du corps, une marionnette qui prend soudain vie. Les objets ont plus d'importance que les décors qui ne sont qu'esquissés. Les costumes sont extrêmement travaillés. C'est noir ou blanc, quasi binaire, mais le rouge arrive souvent en contrepoint, fulgurant. Et c'est magnifique !

Les créateurs qualifient leur travail de minimaliste. Je le dirais plutôt maximaliste tant les images sont évocatrices. Tout se dit sans l'emploi de mots. Les émotions sont fortes et nous arrivent parfois comme en langue étrangère. Mais la progression du récit s'organise comme une chorégraphie. Les tableaux se succèdent avec une esthétique très élégante et une gestuelle parfaitement rodée. Attendez-vous à l'étonnement car ce n'est pas un spectacle "classique". Acceptez d'être surpris et vous tomberez dans l'enchantement.

Fragments du désir sera donné en novembre au Vésinet, à Périgueux et à Rungis. Ensuite la tournée se poursuit avec de nombreuses dates que vous trouverez sur le site de la Compagnie. Les lecteurs parisiens pourront venir le voir sur la scène de la Piscine à Chatenay-Malabry le 5 février, au Kremlin-Bicêtre le 18, puis le 9 avril au théâtre Victor Hugo de Bagneux.

mercredi 11 novembre 2009

Noël se profile à Steiner


Le week-end du 28-29 novembre 2009 aura lieu la traditionnelle kermesse de l'école Steiner. Inscrivez-la sur vos agendas. Même s'il fait mauvais temps ce sera un moment quasi-magique qui ouvrira tout grand les portes de l'Avent ou de" l'avant" Noël selon que l'on veut adopter une position laïque ou pas.

Voici le reportage que j'avais fait l'an dernier ... pour vous donner une idée de ce qui vous attend.

Et puis, en bonus, quelques recettes de petits gâteaux de saison conservés dans une boite acquise lors d'une précédente kermesse.

mardi 10 novembre 2009

La fin d'une liaison, de Graham Greene, mise en scène d'Alain Mollot

Alain Mollot a fondé le Théâtre de la Jacquerie en 1975, d'abord pour "parler des petits hommes, de tous ceux qui, à un moment ou un autre de leur vie, sont vulnérables". La Fourmilière en fut le dernier exemple. La pièce, donnée il y a deux ans en région parisienne, dénonçait avec finesse la progression de l'individualisme forcené qui gangrène le monde du travail. L'an dernier c'était Anne-Laure Liégeois qui éclairait cet univers avec l'Augmentation de Georges Pérec (J'en avais rendu compte le 23 novembre 2008. La tournée se poursuit et passera, soit dit en passant les 25 et 26 mars prochain à l'Onde, à Vélizy (78)). Plus récemment encore Delphine de Vigan pointe le harcèlement dans son roman les Heures souterraines.

Alors que les faits de société sont exploités dans tous les domaines, Alain Mollot s'écarte apparemment de cette voie qui longe le militantisme (dont il parle toujours avec prudence) pour sonder autrement l'âme humaine.

En résumé Maurice et Sarah s'aiment à la folie puis plus du tout. Deux ans passent. L'homme n'a pas oublié. Estimant qu'il a été injustement rejeté, il éprouve la furieuse envie de comprendre. Tous les moyens seront bons pour mener l'enquête.

Le roman de Graham Greene a captivé le metteur en scène. L'intrigue rejoint probablement son histoire personnelle mais elle est aussi d'une certaine manière celle de beaucoup de spectateurs. Peu importe que l'histoire se passe pendant la guerre à Londres, elle conserve quelque chose d'universel dans la propension de l'être humain à craindre l'abandon. Chacun de nous est potentiellement capable de tout pour sauver l'être aimé, quitte à accepter d'être davantage fidèle à une promesse qu'à une personne. La pièce revisite en ce sens les notions de peur, de manipulation et de sacrifice. Il y a quelque chose en elle de faustien. Le bonheur a t-il un prix ?

Les acteurs sont formidables. L'interprétation, qui se joue "à une larme près" se contient de basculer dans l'excès. C'est ce qui fait que le spectateur peut prendre alternativement le parti de l'un et de l'autre sans finalement juger. La révélation du motif de la rupture est bouleversante. On devrait pourtant savoir que les choses n'existent que par la perception qu'on en a ; qu'il est facile de se tromper de vérité !

On ne peut s'empêcher de penser au film du même titre de Neil Jordan mais aussi à "Elle et lui" magistralement interprété par Gary Grant et Déborah Kerr. C'est que la scénographie imaginée par Alain Mollot et Jean-Pierre Lescot, grand spécialiste du théâtre d’ombres, est très imprégnée d'un univers cinématographique en noir et blanc.

Sans utiliser la vidéo, en se servant seulement d’ombres chinoises et de décors projetés qui s’animent parfois en séquences ils donnent vie aux flash-backs et permettent de nous affranchir de la réalité objective. C'est aussi la représentation métaphorique de cette histoire d'amour clandestine, partagée entre l'ombre et la lumière, tiraillée entre l'aveuglement et la recherche de la vérité, alternant le sublime et le mesquin, le romantique et le tragique, se situant à fond dans le vrai mélodrame.

Je n'illustrerai pas l'article par une photo du spectacle mais par deux images extrêmes et contradictoires. La première, très sombre, est une reproduction de l'affiche laissant deviner un visage de femme derrière un collage de papier journal. La seconde, lumineuse, montre un couple se déhanchant au soleil couchant. C'est elle qui a été choisie pour accompagner la fiche-programme par l'équipe de la Scène Watteau de Nogent-sur-Marne où je suis allée voir le spectacle le soir de la "première".

L'adage populaire prétend que toute vérité n'est pas bonne à dire. Le héros réalise que la sienne n'est pas bonne à entendre. C'est la jalousie qui a forgé sa propre opinion. En disant à la femme qu'il aime qu'il préférerait mourir que de la savoir avec un autre. Je croyais faire la chronique d'une haine et la haine s'est égarée finira-t-il par reconnaitre trop tard.

Ce n'est pas un spectacle dont on sort en se disant qu'on va changer le monde. Nous n'en sommes ni plus forts, ni plus fragiles. Simplement en alerte : ce qui leur est arrivé hier pourrait aussi bien nous foudroyer demain, pour peu qu'on baisse la garde.

Après 6 représentations sur le grand plateau de la Scène Watteau de Nogent-sur-Marne ... (94) le spectacle sera fin novembre à Saint-Maur-des-Fossés puis au Perreux, au théâtre de Cachan (92) le 3 décembre, à Maisons-Alfort le 5. Il s'installera pour une longue série à Ivry-sur-Seine du 8 au 18 décembre. C'est le théâtre Jean Arp de Clamart (celui-là même où je suis allée voir la Vie devant soi) qui l'accueillera le vendredi 8 janvier 2010 puis le théâtre Firmin Gémier d'Antony le mardi 19 avant Dijon et Morteau.
Il reviendra en région parisienne le vendredi 29 janvier au Centre culturel Aragon Triolet d'Orly. Puis ce sera le théâtre Romain Rolland de Villejuif, dont Alain Mollot est le directeur artistique qui le présentera à son public du jeudi 4 au vendredi 19 février. Ce serait dommage de la rater avec toutes ces dates !

lundi 9 novembre 2009

Quand certaines bibliothèques ne sont pas à la page …

billet mis à jour en février 2010
Il existe des services publics qui ont une capacité de réaction formidablement positive face à un dysfonctionnement. Il y a d'autres qui sont si peu au service des «usagers» qu’on se demande qui est au service de qui. Il faudrait rappeler à leurs dirigeants que leurs émoluments sont directement alimentés par les contribuables. Je connais une bibliothèque (non photographiée et non citée dans l'article) qui en est un exemple agaçant.

Pour ménager un week-end prolongé à ses employés elle n’ouvre plus le lundi. Ses horaires se sont décalés de telle manière que je dois jongler avec mon agenda pour ne pas louper le créneau hebdomadaire qui me permettra d’y faire un saut.

Je veux bien subir cette contrainte quand je désire choisir l’objet d’un emprunt en admettant que cela prend du temps de chercher quel(s) livre(s) on va emmener. Mais pour rendre, non, cent fois non. Je n’accepte pas l’astreinte s’agissant d’un acte qui ne réclame même pas deux secondes d’attention et qui est en quelque sorte plus utile aux autres qu’à moi-même car il faut savoir que ce n’est pas parce qu’on rend des livres qu’on va en reprendre au même moment.

C’est une aberration que de compliquer les retours. Les vidéo-clubs ont compris cela depuis longtemps. Cela fait des années (je n’exagère pas) que j’essaie de convaincre la directrice de cette bibliothèque qu’il faudrait instaurer :

Un nocturne par semaine

Des horaires « flashs » juste le temps de rendre les emprunts, par exemple tous les jours de 18 h 30 à 19 heures

Et au moins une « boîte aux lettres » pour qu’à tout moment on puisse se délester des CD, DVD, livres ou revues. Car ce n'est pas qu'ils profitent du week-end qui me dérange (d'autant qu'ils le méritent) mais d'être pénalisée par l'incapacité institutionnelle à trouver une solution simple pour améliorer le fonctionnement de leur propre service.

Imaginez le temps gagné en lettres de rappel désormais inutiles

Imaginez le raccourcissement des délais d’attente des réservations.

Imaginez le nombre de lecteurs supplémentaires qui pourront lire les nouveautés avant qu’elles ne vieillissent.

Imaginez la fluidité à la banque de prêt (puisque de nombreux retour auront été traités avant l’ouverture au public).

Et coté « usagers » imaginez le gain de temps, d’énergie et la satisfaction de ne pas faire attendre les amis-lecteurs en monopolisant les ouvrages.

Cela reviendrait à considérer les usagers comme des clients, ce qui est comparable à la démarche entreprise par les hôpitaux qui ont rayé le mot « patient » de leur vocabulaire pour le remplacer par celui … d’ « usager ». Mais ce ne serait tout de même pas une révolution.

Pour preuve : il y en a qui y arrivent ! Que toutes les médiathèques qui ne sont pas encore au point prennent modèle sur l'une ou l'autre de ces deux solutions.

La médiathèque d’Antony (92) a une trappe de retour depuis des années dans le mur adjacent à l‘entrée principale. Elle ouvre le dimanche de 14 à 18 heures. Elle fait nocturne le mardi jusqu’à 21 heures. Je ne prétends pas que l’organisation des plannings soit facile mais ces moments là connaissent des records d’affluence, preuve que c’est bien une réponse à un besoin du public. Que les bibliothécaires en soient remerciés !

Les médiathèques de Clamart (92) ne pouvaient pas percer leurs murs pour installer une trappe. Elles se sont équipées depuis un peu plus d’un an d’une drôle de caisse qui recueille les retours à toute heure du jour ou de la nuit. Et cela marche ! La directrice n’y voit que des avantages pour les uns et pour les autres.

La médiathèque du Plessis-Robinson (92) a commandé cette boite à livres après avoir lu l'article, preuve s'il en faut de l'influence (petite mais déterminante) des blogs.

Alors qu’est-ce qui empêche les réfractaires de changer d’avis ? La réponse est d’une telle évidence qu’on en vient à se demander si ce n’est pas par sadisme administratif que certaines institutions sont rebelles au progrès.

Pour connaitre adresses et heures d’ouverture des médiathèques de Clamart : http://www.clamart.fr/
Et celles d'Antony : http://www.bm.ville-antony.fr

Les photos ont été prises sur le site de la Médiathèque François Mitterand de Clamart.

vendredi 6 novembre 2009

Semaine de la Solidarité pour mieux vivre ensemble à Antony (92)

La Ville d'Antony (92) organise en partenariat avec des associations et divers organismes une Semaine de la solidarité du 10 au 17 novembre. Au programme, des conférences, des rencontres, des collectes et des spectacles au service d’un même projet : « Mieux vivre ensemble » !
L'ouverture du Forum s'effectuera le mardi 10 novembre sous le parrainage de Fadela Amara, Secrétaire d’Etat chargée de la Politique de la Ville qui est attendue samedi 14 pour le clôturer à l’hôtel de ville à 18 h 30.
François De Witt, Président de Finansol, animera une conférence sur « L’Epargne Solidaire » mardi 10 novembre à 20 h 30 au Conservatoire.(entrée libre)
De nombreux autres temps forts figurent au programme comme, jeudi 12 novembre la projection du film de Nicolas Hulot « Le Syndrome du Titanic » au Select à 21 h, au cours d'une soirée-débat.

La place Firmin Gémier s'animera Samedi 14 novembre de 10 h à 18 h autour de stands et d'un forum de discussions proposés par les associations, les professionnels de l’artisanat, de l’industrie, les services bancaires, les services publics dans les domaines de la solidarité, de l’insertion, de l’épargne solidaire, du handicap ... Ce sera l'occasion de découvrir le fonctionnement du très intéressant Système d’Echange Local (SEL). Ou de participer à un des deux ateliers « Comment faire plus de projets avec les mêmes revenus ? » et « Connaissance et image de soi » (sur inscription préalable) à 14 h 30 et à 16 h .

Toute cette manifestation veut mettre l'accent sur la préparation à l’emploi, l’accompagnement vers l’entreprise, la gestion du budget familial et l’épargne solidaire. Les niveaux de contribution sont multiples. Les organisateurs espèrent que vous serez nombreux à apporter vos lunettes inutiles, vos baskets trop petites, vos ordinateurs (pourvu qu'ils n'aient pas plus de 5 ans) et les téléphones portables que vous n'utilisez plus : tout cela fera le bonheur de nombreuses personnes qui en ont bien besoin.

Et comme la solidarité ne s'effectue pas à sens unique vous repartirez avec une ampoule basse consommation en échange de l'ampoule électrique "usagée" que vous aurez apportée.

Renseignements complémentaires :
Conservatoire d’Antony :140, av de la Division Leclerc
Cinéma le Sélect : 10, av de la Division Leclerc à Antony
Inscription aux ateliers au 01 40 96 73 38
Et pour connaitre tout le programme sur le site de la ville, rubrique Mieux vivre ensemble

jeudi 5 novembre 2009

Virginia Woolf par Viviane Forrester, Goncourt de la biographie

Alors que le Prix Goncourt "classique" a été décerné à Marie NDiaye pour Trois femmes puissantes (et le Goncourt-Prix polonais à Delphine de Vigan pour les Heures souterraines) c'est Viviane Forrester qui a reçu le Goncourt de la biographie, à Nancy, pendant la manifestation du Livre sur la Place pour son immense biographie de Virginia Woolf.

S'il existe une spécialiste de la question c'est bien Viviane Forrester, et depuis très longtemps. Bernard Pivot, dont elle fut une précieuse collaboratrice reconnait, selon son propre aveu, avoir découvert Virginia Woolf grâce à elle qui réussit à lui imposer un reportage dans sa première émission littéraire, "Ouvrez les guillemets".

Depuis, elle n'a cessé des recherches entreprises avec une détermination archéologique ; elles ne pouvaient qu'aboutir à cet énorme livre qui est bien davantage qu'une biographie et qui tombe à pic tant les références à Virginia Woolf émaillent les romans contemporains. Une des dernières dont je me souvienne est celle de Patrick Poivre d'Arvor qui cite la romancière anglaise à plusieurs reprises dans Fragments d'une femme perdue.

Je ne savais jusqu'alors pas grand chose de Virginia Woolf. Je la connais mieux désormais et je comprends l'hommage appuyé qu'elle a suscité.

Les amateurs de biographie classique seront probablement surpris parce que Viviane Forrester plonge à bras le corps dans la vie de son égérie sans préambule et en se démarquant de la chronologie. Les faits (réels) sont proprement incroyables et la famille Woolf -multirecomposée- inspire une confusion comparable à la dynastie des Plantagenêt pendant la guerre des deux roses. L'arbre généalogique des protagonistes m'a beaucoup manqué jusqu'à ce que je le découvre incidemment... page 313 bien avant d'achever la lecture. C'est une aide indispensable.

Viviane Forrester s'était exprimée avec fougue à Nancy en livrant au public venu l'écouter sur la scène de l'Opéra national de Lorraine les éléments les plus déterminants. J'invite le lecteur à écouter l'enregistrement de cette interview par Bernard Pivot après une introduction savoureuse de André Rossinot.

L'écriture de Viviane Forrester est vigoureuse, affranchie des tabous, osant des expressions étonnantes comme celle-ci (page 150) annonçant que Virginia "va se foutre à la flotte". Il y a aussi de nombreuses redites, au mot près. Mais ces défauts sont mineurs au regard de la somme de détails qui alimentent une analyse passionnée et passionnante, qui prend souvent des airs de conversation.

Virginia Woolf pourrait être la figure emblématique des femmes victimes de harcèlement moral. Conditionnée par une mère distante (elle lui reproche juste avant de mourir de ne pas se tenir droite en la traitant de petite chèvre), par un père maniaque et colérique, endeuillée à nombreuses reprises, Virginia est une proie facile pour un mari qui lui devra sa propre stabilité et son statut mais qui, au lieu de lui en savoir gré, lui fait payer sa dépendance en lui interdisant la maternité et en s'évertuant à la faire passer pour folle ; l'opération est facile dans une société pliant alors sous l'emprise masculine et n'ayant pas besoin de preuves pour croire.

Virginia se protège comme elle peut de ce qu'il est "impossible de dire à haute voix" par des souvenirs-écrans et fera montre toute sa vie d'une énergie, d'une volonté d'exister, de survivre, surtout de ne pas se laisser isoler et faire partie des autres (page 176). L'écriture est toute sa vie. Mais son mari est persuadé y être pour beaucoup (page 83). C'est peut-être vrai, concède Viviane Forrester qui décidément est bien honnête avec le bourreau.

Affolé par l'arrivée de la seconde guerre mondiale il lui propose de se supprimer avec lui. Neuf mois plus tard la reconnaissance du milieu littéraire ne suffit plus à la protéger des démons. Le rempart de ses lecteurs cède. Virginia frotte les parquets de sa maison avec une belle énergie puis elle va se jeter dans une rivière, les poches lestées de pierres.

Aura-t-elle au moins, comme elle l'écrit dans une de ses dernières phrases, porté un dernier regard sur toute la beauté du monde ?

Son mari lui survivra 28 ans. Là encore Viviane Forrester ne porte pas de jugement définitif, considérant qu'un suicide ne résulte pas d'une seule cause mais d'un faisceau d'éléments (page 97) et estimant que ce dont Virginia aura le plus été privée c'est de respect. En ce sens cette biographie peut se lire comme une réhabilitation.

Virginia Woolf, par Viviane Forrester, chez Albin Michel, 2009.

mercredi 4 novembre 2009

La Suisse fait salon dans un bar à fromages

C'est la deuxième année que la Suisse investit une galerie d'art au 38 de la rue Quincampois pour offrir aux parisiens l'occasion de gouter ou de redécouvrir leurs excellents fromages, mais pas que ...

J'en avais parlé l'an dernier le jeudi 20 novembre. Je gage que l'ambiance sera tout aussi sympathique du 7 au 15 novembre 2009 et je suis ravie de pouvoir vous annoncer cette manifestation qui est une belle initiative.

Le décor a changé. La formule a été peaufinée en restant dans une ambiance de convivialité propice au plaisir d'apprendre, de déguster et d'échanger autour des douze meilleurs fromages de Suisse.A l’heure du déjeuner
C'est une table d’hôtes, toujours en accès libre et gracieux tous les midis (de 11 à 15 heures), pour découvrir les délices suisses et déguster des mini-sandwiches servis sur des pains aromatisés en fonction des fromages et spécialement confectionnés par Gontran Cherrier. Par exemple un pain noir à la coriandre pour le Gruyère, un pain aux graines de sésame poivrées et aux écorces d'orange pour l'Emmentaler.

Le soir sur réservation
- Un espace salon feutré avec un « open bar » d’un genre unique proposant une carte exclusive de boissons sélectionnées « accords parfaits » avec les meilleurs accords Fromages de Suisse / vins, jus, cidres, alcools…
- Des cours d’initiation et de dégustations avec des professionnels et des chefs de renoms tels que Alberto Herraïz, Olivier Thiénot, Paul Blouet, Laetitia Gaborit et bien entendu Gontran Cherrier.

Que puis-je vous dire de plus ? Laetitia Gaborit est ans doute la plus jeune et la plus dynamique des Meilleurs Ouvriers de France ! Sacrée en 2007 dans la catégorie fromagerie pour son plateau « voie lactée », elle sait allier la technique, essentielle dans le métier de fromager pour assurer la découpe du fromage, avec l’inventivité, la poésie, mais surtout, partager avec joie sa passion et son savoir-faire.

Paul Blouet est un chef inventif qui revisite les classiques. Ce sont ses créations qui surprendront vos papilles à l'heure du déjeuner.

Issu de trois générations de boulangers et pâtissiers, Gontran Cherrier cultive une véritable passion pour le pain sous toutes ses formes, et le travaille comme un élément à part entière de la cuisine. Jeune chef talentueux et inventif, il a publié de nombreux ouvrages de cuisine dans lesquels il livre ses recettes toutes savoureuses et accessibles. Il anime aussi régulièrement des ateliers de cuisine très prisés du grand public.

Alberto Herraïz est un créateur talentueux qui aime mixer les saveurs ibériques aux mets du monde entier. Dans son restaurant parisien El Fogon, il provoque avec une nouvelle approche des tapas, fusionnant le lien entre sa perception de l’Espagne gastronomique et les techniques culinaires contemporaines. Il va créer à l’envie des nouvelles recettes originales, surprenantes et très accessibles spécialement pour les Fromages de Suisse.

Olivier Thiénot est Directeur et fondateur de l´école du Vin. Diplômé du Wine and Spirit Education Trust de Londres (WSET), il dirige cet établissement depuis octobre 2003. Animateur de dégustations de vins, de conférences et de séminaires en France et à l´étranger, il cumule 15 années d´expérience dans le domaine du vin.

Pour réserver connectez-vous sur http://www.barafromagesdesuisse.com/ et naviguez à votre guise. Attention certaines soirées affichent déjà complet.

mardi 3 novembre 2009

59 ème Salon d'Automne de Sens (89)

Une quarantaine d'artistes étaient invités et j'ai pu les découvrir in extrémis avant la fermeture, ce soir, de cette exposition fort intéressante qui avait démarré le 23 octobre.

Mon regard s'est arrêté sur quelques œuvres. N'allez surtout pas croire que c'est une sélection mûrement réfléchie. Je n'aurais pas pu tout photographier. Et tout choix est un renoncement.

Certains artistes se retrouveront le dernier dimanche d'avril Salle Danton à Arcy-sur-Aube (10) car depuis 2003 les deux villes font en quelque sorte des Salons jumelés à l'initiative d'Alexis Lebian. De quoi limiter le regret pour tous ceux qui ont manqué celui de Sens.

Je salue la gentillesse des organisateurs. Voilà un Salon qui honore ses exposants. Les noms des artistes figurent près de leurs tableaux (c'est assez peu fréquent pour le souligner). Et chaque visiteur se voit remettre gracieusement le catalogue, ce qui est encore plus rare. Puissiez-vous, Sénonais, faire des émules !

Ce flamand rose étonnant (à gauche) est intitulé Tentation par Alexandra Péroux (Sens)
Composition argentée de Mireille PAYEN (Aix-en-Othe)


Sens "le marché" de Hugues de la Taille, invité d'honneur
(Saint-Privé-Saint-Mesmin)







Animal II de Chantal ALLARD (Maillot) qu'on dirait être un koala en peluche





Paysage II de Bernard Boizet (Vareilles) qui me rappelle le moulin de Tan













Sens, par Marcel Flandrin (Gron)



Retour au port d'Eugène Voisin (Souligny)
Le plafond et les murs du Salon méritaient qu'on lève les yeux sur eux. Jugez plutôt :
Pour lire d'autres articles concernant la ville de Sens remonter en avril 2009, vous trouverez quelques reportages en alternance avec quelques recettes.

lundi 2 novembre 2009

Et si on dansait ? d'Erik Orsenna

Prix Goncourt avec L’Exposition coloniale (Seuil, 1988), Erik Orsenna, de l’Académie française, est parait-il, un des auteurs les plus appréciés des Français.

Après La grammaire est une chanson douce, après Les Chevaliers du Subjonctif, après La révolte des accents, il poursuit les aventures grammaticales de son héroïne Jeanne et de son frère Tom avec Et si on dansait ? qu’il annonce comme un éloge de la ponctuation.

Sa lecture m’a promenée. On tourne en rond (ce qui n’est pas illogique pour une danse, j’en conviens), version intellectuelle du facteur n’est pas passé.

On sait tous que le trait d’union annonce le lien. Que l’apostrophe signale la disparition d’une lettre. J’ai par contre appris (p. 95) que les blancs, ces espaces entre les mots, n’avaient été employés en Europe que vers l’an 800, à l’époque de Charlemagne, constituant ainsi les toutes premières ponctuations.

J’aime les parenthèses qui sont autant de grains de sel dans une démonstration. Je ne saurais me passer des guillemets qui épicent mes analyses. Je sème les virgules comme j’avale une gorgée d’eau, pour faciliter l’élocution et retarder le point final.

Le point virgule fait débat. Pour les parisiens ce nom évoquait davantage la salle de concert qui a fait débuter Jean Marie Bigard et Florence Foresti qu’une dissertation. C’est qu’on ne le trace pas par hasard ou par erreur. Sans bonne volonté, sans intention résolue point de point virgule.

Ce n’est pas l’éloge qu’Erik Orsenna en a fait qui pouvait me convaincre ; l’envolée lyrique était bien tentée mais trop brève. Il le qualifie (p.84) d’espèce menacée au même titre que le panda géant, le grand requin blanc, le cacatoès à huppe jaune ou le gecko à queue feuillue … Il construit tout le livre autour d'une métaphore écologique pour le moins excessive. Je connais et je respecte son combat dans la bataille de l'eau (j'y reviendrai un jour prochain en relatant le débat auquel il a participé à Nancy sur la faisabilité de bâtir une ville durable au 21° siècle) mais on ne peut tout de même pas brandir le spectre de la pollution à tout va.

Et puis l’idée n’était pas nouvelle. Sylvie Prioul, avant lui, avait lancé un cri d’alarme avec La Ponctuation ou l'art d'accommoder les textes.

J’aime qu’une porte soit ouverte ou fermée. Le point virgule m’a toujours paru louche et j’avais renoncé à son emploi, de peur de me tromper d’usage. Erik nous dit en substance qu’il donne du rythme à la phrase, sans la couper ; qu’il la réveille ; qu’il la relance. "En substance", parce que son explication est ponctuée de virgules alors que le point virgule me semble être ici le signe congru.

Si j’osais je m’armerais d’un stabilo fluo pour traquer l’animal dans les ouvrages de l’académicien ; je le marquerais d’un trait rose pour mieux en suivre la trace ; je ferais de subtiles statistiques que j’expédierais sur son site ; l’homme a suffisamment de malice pour prendre bien la chose.
Dans le genre faites ce que je dis, pas ce que je fais, c'est un génie. Il n’utilise pas le point virgule. Cela pourrait être drôle de s’en prétendre le défenseur s’il ne prenait pas sa plume d'académicien pour nous l’écrire.

Quand je le trouve enfin c’est dans une fable de La Fontaine qui en compte 6. Doit-on y voir l’explication du titre, sorte d’hommage à la fourmi laborieuse ? Serais-je médisante ? Je trouve enfin (ouf) deux points virgule page 117. Il s’en est fallu de peu que je ne puisse employer le pluriel.

Mais plutôt que de faire des reproches oratoires à ce cordonnier mal chaussé je vais m’exercer à suivre la préconisation. Les lecteurs attentifs auront donc remarqué que depuis quelques jours j’emploie ce petit signe rebelle qui a pratiquement disparu de la littérature. J’accepte donc de rejoindre le maigre bataillon de ses défenseurs pourvu qu’il serve mon style. Nous verrons à l’usage si l’essayer c’est l’adopter.

dimanche 1 novembre 2009

Zoom sur Longwy par Association d'idées

Le temps a été gris toute la journée ; la pluie a trempé les feuilles multicolores que le vent avait rebattues sur le sol glissant ; un vrai temps de Toussaint !

Je cherchais quelles fleurs je pouvais envoyer qui ne soient pas périssables ; qui soient porteuses d'énergie ; qui irradient une certaine joie de vivre puisque la vie continue, toujours.

J'ai aussitôt fait le lien avec les Éditions Association d'idées qui présentaient le quatrième ouvrage de la collection "Zoom" intitulé "Zoom sur Longwy, un autre regard sur les Magiciens de la couleur" au Livre sur la Place le 18 septembre dernier à Nancy.

Réalisé par Denise Bloch avec la collaboration de Rachel Quinet, ce livre se rapproche comme le ferait un zoom numérique au plus près des matières, couleurs et formes des choses qui nous entourent. Il s'agit ici d'une balade iconographique peu ordinaire au cœur des faïences et des émaux de Longwy pétillants de couleur et de lumière. Images symboliques et mots viennent accompagner les visuels des pièces représentées.

Appartenant à la catégorie qu'on désigne sous le terme de "beaux livres" la collection toute entière est purement magnifique et il est bien difficile de dire lequel des quatre a ma préférence. Inutile de chercher plus loin pour d'heureux cadeaux de fin d'année ou pour se faire plaisir. Chaque page est un ravissement. On apprend mille détails passionnants sur les émaux et sur les plantes qui ont inspiré les décors.

Entre Baccarat, Daum, Gallé, et Longwy mon coeur balance mais c'est ce dernier que je vais pour vous ouvrir. J'imagine Patrick Poivre d'Arvor (rencontré lui aussi à Nancy pour la sortie de son dernier livre, objet du billet publié hier) s'attarder page 102 sur la faïence "Mont Violette" bien sûr et apprécier d'apprendre que lorsque Bonaparte rencontra Joséphine de Beauharnais elle portait un bouquet de violettes qu'elle lui tendit. Devenu empereur, il reçut de ses grognards le surnom de "Caporal La violette".

Le livre est un jardin. Avec le chrysanthème (page 16) fleur de saison s'il en est, mais aussi la vigne que Denise Bloch associe à un poème de Théodore de Banville célébrant le Rouge Automne.

Les feuilles or et platine de cette gourde (page 22) ont l'aspect du buis, symbole de la vie qui continue en hiver et dans les autres mondes :

L'été se faufile avec le coquelicot suggéré par ce pot à tabac (page 56) , qui meurt de trembler comme un coeur ardent (sic Francis Jammes)

Une lecture qui donnera envie d'ouvrir les trois petits frères de la collection ; mais aussi d'aller rendre visite au "Musée des magiciens de la couleur" pour admirer grandeur nature la plupart des chefs d'oeuvre de cet ouvrage dont le prix public (35 €) est largement justifié.

Association d'idées, 15 rue du lieutenant Crépin, 54000 Nancy, Tél : 03 83 56 97 71
www.associationdidees.com
Musée municipal des Emaux de Longwy, Porte de France, 54000 Longwy, tel 03 82 23 85 19

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