Publications prochaines :

La publication des articles est conçue selon une alternance entre le culinaire et la culture où prennent place des critiques de spectacles, de films, de concerts, de livres et d’expositions … pour y défendre les valeurs liées au patrimoine et la création, sous toutes ses formes.

vendredi 30 octobre 2015

Martin, Boire & Manger 24 bd du Temple

Une armée de couverts est au garde-à-vous, dressés dans de gros pots, attendant les bons vivants. S'il faut qualifier l'endroit d'un qualificatif c'est bien celui là qui s'impose. On vient chez Martin pour boire et manger. C'est le contrat de base et il n'y a pas à discuter.

On arrive plutôt en force, histoire d'installer une ambiance dès le début de la soirée. Et d'être sur d'avoir une table parce qu'on ne réserve pas en dessous de 5 personnes.

C'est une adresse où l'on arrive "les yeux fermés". Inutile de chercher un menu, il n'y en a pas. Quant aux vins, la carte change tous les deux jours parce que les séries sont assez courtes. La politique de la maison est d'acheter de petites collections. Ici les habitués n'ont pas d'habitude. Sauf celle de faire confiance.

Loïc Martin, l'ancien barman du Passage, est associé et règne au bar. Il a l'expérience des vins avec quelque 250 références, travaillant avec Audrey, sommelière et fille de vigneron. Les bouteilles qui sont sélectionnées sont majoritairement issues de la biodynamie. Plus on clame cette spécificité moins on l'entend mais quand on goûte on perçoit la différence. Il n'est donc pas besoin de le mentionner sur la carte.

L'endroit revendique d'être avant tout un bar où la pinte est à quatre balles et où on peut dîner pour vingt (balles). Et Loic est aussi spécialiste des gins.

Le chef est Peter Orr (au centre sur la photo ci-dessous). D'origine australienne, il a travaillé 8 ans à Londres avant de devenir le numéro 2 du Passage, un fameux bistrot entre la rue Amelot et le boulevard Richard Lenoir qui décidément peut être considéré comme le modèle du lieu.

Il élabore des petites assiettes originales qui se renouvellent sans cesse, parfois au cours d'un même service uniquement avec des produits de saison, et si possible du marché.
Il cuisine volontiers les abats, sans les acheter chez Metro. Le troisième associé, Edouard Bergeon (à gauche sur la photo ci-dessous) adore manger et s'investir corps et âme dans un projet. C'est lui qui a posé la moquette il y a deux jours, fait la peinture hier. Il fait glisser les photos de son compte Instagram pour me faire saliver. Il a ramené du miel d'un récent séjour en Corse (il réalise des documentaires qui le font voyager). Le cochon arrive entier de Bourgogne. Voici la tête, et puis le pâté qu'on a fait dans les cuisines, au sous-sol. Et le voilà qui m'entraine jusqu'à la chambre froide.
C'est vrai que les morceaux sont appétissants. Qu'il s'agisse de viande comme de légumes. En majorité ceux de Joël Thiébault, le maraicher gourmand, qui amène ses produits d'exception sur les marchés parisiens du XVI°, rue Gros les mardis et vendredis et place du président Wilson les mercredis et samedis. Il faut arriver tôt parce que tout part très vite.
Le résultat est au rendez-vous. Ils sont sublimes même tout simplement lavés et servis crus avec une vinaigrette ou cuits avec un beurre maison.
Peter n'a pas de légume tabou. Il prépare les choux de Bruxelles en sachant qu'ils risquent de rebuter. Alors le serveur encourage en promettant que si ça plait pas ce ne sera pas sur l'addition. Une fois goutés, il n'y a plus d'appréhension parce que ces petits choux qui ont été baignés dans une eau citronnée avec de la menthe avant leur cuisson n'ont rien à voir avec le souvenir qu'on peut en avoir gardé d'un déjeuner de cantine. Actuellement ce sont des choux rouges qui ont été préparés et qui embaument la cuisine.
La soupe mijote gentiment sur le fourneau. Tout est préparé sur place, même les buns s'il y a des hamburgers de prévus.
Pour le moment le restaurant n'est ouvert que le soir mais le projet est de commencer à l'heure du déjeuner l'an prochain. Il y a encore des aménagements à terminer mais l'ancien PMU se métamorphose progressivement en bistrot cosy en conservant un décor simple et brut, avec des poutres et des pierres apparentes, de grands radiateurs, des étagères bricolées à partir de casiers à bouteilles, des assiettes de grès venant de La Borne, un village de potiers situé dans le Berry et que je connais bien. Chaque dernier week-end de novembre je vais rencontrer une potière qui me surprend toujours avec ses nouvelles créations à prix modestes. Cela se passe à l'école Steiner, à Verrières-le-Buisson (91) et je vous encourage à y faire un tour bientôt.
L'endroit fêtera sa première année le 28 novembre prochain et ce sera barbecue de midi à minuit pour l'occasion. L'équipe est confiante. Sans être dans les guides ils comptent 150 à 250 assiettes le soir et ont la chance de refuser beaucoup de monde. 
Une seule (petite) ardoise passe de table en table le soir et le serveur explique les plats. C'est le coté "petites assiettes à partager" qui plait à la bande, comme à la clientèle.

La musique n'est jamais très forte, pour ne pas couvrir les conversations et privilégier la vitalité de l'ambiance qui est sous la responsabilité des convives.

Coté dessert cela reste simple avec des fruits de saison, une tarte au citron, une ganache chocolat et quand on a de la chance, une Pecan Pie dont Quina la pâtissière (à droite sur la photo) est la spécialiste.
Et puis, bien sûr beaucoup de fromages parfaitement affinés qui s'allieront avec les vins. Comme ces chèvres frais en provenance directe du Maine-et-Loire ou quelques autres du Quercy.

C'est une région qu'Edouard Bergeon affectionne. Il y a réalisé le documentaire les Fils de la Terre à partir de la vie quotidienne de Sébastien Itard et qui a été adapté au théâtre par Elise Noiraud et que j'ai vu il y a deux semaines. Et il soutient la démarche des éleveurs qui commercialisent leur lait et leurs fromages sous le nom de Vallée du Lot.

Il défendra aussi Alexandre Bain à qui on vient de retirer le droit de mentionner Pouilly Fumé sur ses bouteilles pour d'obscures intérêts, parce qu'il travaille dans son chai à l'abri de tout procédé technologique et oenologique, sans ajout de levure, de sucre, d'enzymes, ni de de colles. Son reportage s'intitulera "la vie sans AOC".

Il s'apprête à partir en Ethiopie pour tourner un 52 minutes pour France 5 sur les petits producteurs de miel. Le sujet est d'actualité et de magnifiques photos sont exposées actuellement sur les grilles du Jardin du Luxembourg.
Pour Edouard ce sera le début d'une série qui l'entraînera à la découverte du poivre, du riz, du safran ... que l'on peut s'attendre à retrouver dans les assiettes du restaurant sous l'impulsion des jeunes chefs avec qui il s'est associé.

Il ne faut pas quitter ce quartier du boulevard du Temple sans aller chiner dans la Boutique Bis Solidaire qui est presque en face du restaurant, au numéro 7 (tel : 01 44 78 11 08). Elle offre à tout le monde, hommes et femmes, l'opportunité d'enrichir sa garde-robe de vêtements griffés, sans dépenser une fortune et faire oeuvre de réinsertion sociale.

J'y ai vu de très jolies robes et chaussures à moins de 10 euros. C'est déjà une référence dans le monde de la mode.
Les photos qui ne sont pas logotypées A bride abattue proviennent de la page Facebook du restaurant.

Aucun commentaire:

Articles les plus consultés (au cours des 7 derniers jours)