Je suis allée à la découverte de C'est ça l'amour sans rien savoir du film, motivée par le lieu de projection, un cinéma qui programme beaucoup d'avant-premières et de rencontres avec des réalisateurs et des acteurs, ce qui est toujours extrêmement intéressant. Je vous incite vraiment à modifier vos habitudes si vous êtes parisien et à vous abonner à sa newsletter pour être au courant de son actualité. C'est le Sélect à Antony (92).
J'étais tout autant enthousiaste parce que Bouli Lanners figurait au générique, dans un premier rôle (ce qui malheureusement est peu habituel alors que c'est un immense acteur). Enfin c'est un second film, donc avec un enjeu pour la réalisatrice Claire Burger, dont la présence au débat était un dernier atout.
C’est ça l’amour est la chronique de la nouvelle vie de Mario Messina, qui démarre au moment où sa femme Armelle fait ses bagages et quitte le domicile conjugal. Il va devoir faire face à tout, les taches ménagères qui le débordent et surtout l'éducation de leurs deux filles, Frida, 14 ans, qui lui reprochera sans relâche le départ de sa mère et Niki, 17 ans, qui ne souhaite qu'une chose, devenir indépendante.
On découvre Mario à cet instant où il pense que le retour d'Armelle est encore possible puisqu'elle continue à travailler dans la même ville que lui. Il ne sait pas comment s'y prendre pour la reconquérir et va participer à un spectacle d'amateurs ... dans le centre culturel où précisément sa femme est régisseur lumières.
Les choses ne vont pas se passer comme il le souhaite pour de multiples raisons que le spectateur va vivre en adoptant son point de vue, tout en étant touché par la colère de Frida, par la détermination d'Armelle, par la tentative de Niki de jouer le rôle d'une adulte, et par l'humanité dont le personnage d'Antonia fait preuve pour animer le groupe de comédiens amateurs.
Claire Burger reconnait s'être inspiré de son histoire personnelle mais on peut penser qu'elle a fait grandir le personnage du père qui parviendra à entrevoir une autre vie que celle qu'il avait choisie et qu'il pensait durable. Peut-on pour autant qualifier les derniers plans de happy end, je vous en laisse juge puisque le film est catégorisé drame et non comédie.
C’est ça l’amour est le second film de Claire Burger, mais le premier qu'elle réalise en solo, après Party Girl (2014) où l'on rencontrait (déjà) la figure d'une femme libre et forte.
Bouli Lanners incarne un homme qui évolue dans un autre contexte que celui de sa femme puisqu'il est agent de la fonction publique (et on verra combien cet emploi est générateur de stress). Il est aussi père de famille, fragile, généreux et surtout sensible dans tout ce que cette attitude a de positif. Le spectateur peut être admiratif de sa patience à l'égard de ses filles qui, certes l'aiment, mais ne le ménagent pas. Leur rôle est remarquablement interprété avec naturel par les deux jeunes actrices, Justine Lacroix et Sarah Henochsberg. Les clichés sur la masculinité sont bousculés sans que ce papa y perde, à l'instar d'ailleurs du père incarné par Romain Duris dans Nos batailles, réalisé l'année dernière par Guillaume Senez.
La figure maternelle existe bien mais en contre-jour, à tel point que dans la scène où les filles expriment toute leur affection à leur papa on ne la voit pratiquement que de dos (comme sur la photo ci-dessous) mais elle est malgré tout présente ... et bienfaisante.
On aura compris que la réalisatrice ne porte pas de jugement et ne prend pas parti, ce qui est remarquable puisque son histoire familiale n'est pas aussi positive. Elle nous persuade que partir peut être un acte d'amour ... tout autant qu'accepter le départ de l'être aimé. Elle démontre que cette disposition d'esprit, que certains qualifieront de "travail de deuil" permet d'affronter le monde et surtout de continuer à se construire. Car on le sait, on ne "refait" pas sa vie, on la poursuit ... sur un autre chemin.
Elle a choisi de situer l'action dans la ville de son enfance, Forbach, à laquelle elle reste très attachée et dont elle ne minore pas les difficultés économiques. Mais elle insuffle une énergie positive dans le scénario en introduisant des scènes d'improvisation théâtrale, démontrant (comme on le sait déjà) que le théâtre est indissociable de la vie. Elle a d'ailleurs tenu à faire avec un casting en partie non professionnel.
Drame de 1 h 38 min , sorti en salle le 27 mars 2019
Avec Bouli Lanners, Justine Lacroix, Sarah Henochsberg
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