J’avais beaucoup entendu parler positivement de Tsunami de Marc Dugain que je n’avais pas pris le temps d’ouvrir au moment de sa sortie en librairie.
Je me suis rattrapée et … je ne suis pas si convaincue que cela. Peut-être l’aurais-je été davantage il y a quatre ou cinq ans. Mais voilà, les affaires politiques deviennent lassantes, faute de proposer des solutions innovantes. Tant qu’à faire de lire une dystopie j’aurais aimé y trouver un peu d’espoir même si -j’en conviens- c’est pure utopie de ma part.
Le parti pris de l’auteur de nous immerger dans la tête du président de la république (très inspiré de celui qui est aujourd’hui aux commandes) est intéressant, stylistiquement parlant. La France qui nous est décrite est cependant sans surprise de plus en plus agitée.
Cette lecture sera fascinante pour qui ne connait rien à la politique et aux affaires administratives. Pour moi qui ai travaillé en cabinet ministériel (j’étais chanceuse, c’était avant l’emprise des réseaux sociaux) et dans plusieurs institutions il n’y a rien de bien nouveau. On sait tous, et depuis longtemps combien l’adrénaline du pouvoir et la sensation de défier le pire (p. 188) est un carburant explosif.
Scandales passés ou à venir, compromissions, alliances, jeux de pouvoir, amours furtifs … tout cela a toujours existé. J’espérais la révélation de vrais secrets élyséens, comme le livre en faisait la promesse.
Il n’empêche qu’on ne pourra pas dire que personne ne nous aura prévenus. D’ici 2050 le modèle autoritaire (chinois) va faire table rase de la démocratie qui s’est transformée progressivement en médiocratie. (…) La montée des droites extrêmes le montre. (…). Le modèle chinois c’est l’avènement d’un Homo economicus satisfait par le modèle économique et qui échange le mirage de la liberté d’expression contre la prospérité assurée par le parti. Dans notre modèle ultra libéral ce n’est pas vous qui commandez, ni le peuple, ce sont les grandes multinationales qui méprisent l’Etat (p. 166).
L’auteur a sans doute raison quand il écrit que, pour nos dirigeants, il n’est pas question de remettre en cause la croissance comme modèle mais plutôt de la favoriser sans trop abîmer, si c’est possible, l’environnement (p. 114).
Il a sans doute autant raison quand il évoque le tout numérique et les relations contradictoires avec les GAFA. Mais quand il aborde la cause animale je ne peux m’empêcher de penser que c’est peut-être parce que c’est un thème à la mode en citant les écologistes qui se préoccupent du sort des animaux considèrent que les courses de chevaux relèvent de la maltraitante animale provoquée par des malfaisants qui les exploitent à des fins lucratives. Ils organisent des cycles funestes de poulains précipités dans la compétition avant de finir, trois ans plus tard, l’estomac brulé par l’avoine, et les tendons meurtris, sous le couteau du boucher (p. 186).
Il enfonce d’ailleurs le clou un peu plus loin avec humour et une pertinence acide : Comment avoir de la considération pour des hommes qui, pour chasser, mettent autant d’argent dans des tenues de camouflage sur lesquelles ils enfilent des gilets fluorescents ? (p.187).
Ses propos sur la Russie donnent le frisson : La Russie, contrairement aux Etats-Unis ne pratique pas le soft power, c’est à dire un modèle culturel attrayant. Ce qui est attirant pour certains Français c’est que la Russie vénère « la loi du plus fort » et la loi du talion, qu’elle ne fait pas de cadeaux aux islamistes et qu’elle serait comme le dernier bastion de la chrétienté contre les musulmans. Du côté russe, tout ce qui peut affaiblir la France, vue comme le maillon faible, c’est un pas vers la désagrégation de l’Europe. Ils font ce qu’ils savent faire de mieux, la corruption et la manipulation, qui est une de leurs spécialités sur Internet (p. 189).
On doit aussi lui savoir gré d’insister sur les conséquences de l’addiction des enfants aux écrans; il a raison de les qualifier d’alarmantes. C’est un facteur de dégénérescence de leurs aptitudes visuelles. En clair, nous fabriquons des myopes qui vont tranquillement devenir des aveugles. C’est un problème sanitaire majeur qui s’ajoute à l’obésité des enfants qui passent leur temps à manger devant des écrans sans faire de sport (moi pas). Qui dit obésité dit diabète. Et on sait à quel point il rend fragile devant certains virus. S’y ajoutent des problèmes neurologiques. On remarque de plus en plus de dyspraxies, et évidemment parce que l’industrie fait tout pour, on constate des phénomènes d’addiction semblable aux drogues (p. 195).
Rien de nouveau dans ces révélations mais elles ne sont pas inutiles pour sensibiliser davantage les consciences. Alors alarmons-nous de ces vrais problèmes sans se satisfaire qu’il s’agirait de fiction au motif que ce livre en est une.
Tsunami de Marc Dugain chez Albin Michel, en librairie 3 avril 2023
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