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jeudi 12 juin 2025

Comment s'annonce le Festival d'Avignon …

(mise à jour le 26 juin 2025.
Je croyais avoir recensé toutes mes envies mais j'ai ajouté quatre à cinq spectacles)

Le festival d’Avignon s’annonce plus foisonnant que jamais avec cette année le strict alignement des dates pour les deux entités, le In et le Off du samedi 5 au samedi 26 juillet. Le Off annonce 57 évènements et 1729 spectacles dans 139 lieux et le In 300 représentations et plus de 400 rendez-vous, ce qui porte l’ensemble à plus de 2000.

Sans compter tout ce qui est proposé en parallèle tout au long des journées, débats, rencontres, soirées privées, assises, inaugurations et vernissages, concerts … avec l'ajout tout récent de 27 concerts qui investiront les théâtres les jours de relâche pour promouvoir 52 artistes émergents.

Pour ne donner qu’un exemple dans le Off, La Factory se déploie sur cinq lieux en intra muros, accueille soixante spectacles et sept événements en date unique pour célébrer ensemble, avec audace et sans concession, cette grande fête des arts vivants.

Tout en reconnaissant qu’en moyenne les salles ne sont remplies qu’à 50% la première semaine, les organisateurs estiment que c’est une chance pour le public mais on sait pourtant que trop de choix tue le choix. Et chaque année voit l’ouverture de nouveaux théâtres, plus de rencontres, bref un élargissement de l’offre alors que les festivaliers réduisent la durée de leur séjour en raison principalement des coûts des hébergements.

C’est un débat sans fin. D'autant que des professionnels affirment -et je les approuve- leur intention de demeurer dans un "artisanat artistique" sans verser dans l'industrie. Parmi les projets mis en place en 2025 il y a la création du village TADAMM destiné aux enfants et aux familles dans l'école Simone Weil avec des ateliers de médiation., l'ouverture d'un point de vente Ticket'Off, la carte Off à 2€ pour les 14-25 ans.

70 salles ont été labellisées sur la base d'un cahier des charges de bonnes pratiques professionnelles, témoignant là encore de la volonté de placer le public au coeur des préoccupations. Des soirées seront dédiées aux auteurs/trices. Et le développement international se poursuit.

Le Festival In invite une langue, l'arabe, le Off invite un pays, le Brésil. J’ai choisi avec humour une illustration mettant à l’honneur un des plats emblématiques de toute l'Amérique latine, l’empanada, ce petit chausson en pâte feuilletée, parfois en pâte à pain, farci de viande, de poisson, d'œuf, de pomme de terre ou d'autres ingrédients, selon les coutumes de chaque région et de chaque pays (c’est un péruvien sur la photo).

Même en restant 10 jours à raison de 4 spectacles quotidiens (ce qui représente un gros budget et une fatigue conséquente, surtout en période caniculaire), on ne verrait "que" 40 spectacles, …moins qu’une goutte d’eau. D’où la nécessité de préparer sa venue et d’où l’importance des recommandations.

J’ai balayé les programmations. Voici que j’ai déjà vu, et chroniqué, et que je recommande. Pour chacun j’ai indiqué le lien. Attention j’ai pu voir le spectacle dans un autre lieu que celui où il se jouera à Avignon et la distribution peut avoir changé, certains spectacles ayant plus de 4 ans mais restent des valeurs sûres.

Sachant combien il est difficile de s’y retrouver j’ai classé par horaire en mentionnant autant que possible le jour de relâche quand je le connaissais. Les nouveautés sont des spectacles programmés cette année pour la première fois au festival. Ils peuvent avoir été joué plus ou moins longtemps en région parisienne. Voici un florilège de plus de 70 spectacles sur lesquels je voulais attirer votre attention.

Parmi les dernières créations, jouées très peu de fois en avant-première parisienne, et auxquelles j’ai assisté en voici 10 que je recommande particulièrement :

Juste Irena, la bouleversante création de Cédric Revollon, à 10 h 50 relâches les mardis au Théâtre de l’Entrepôt -1 ter, boulevard Champfleury

Toutes les autres, texte Clotilde Cavaroc, mise en scène Elise Noiraud, avec Stéphane Hausauer et Kimiko Kitamura à 15 h 55 à l’Artéphile, relâche les dimanches. La pièce sera reprise du 5 au 28 octobre au Théâtre de Belleville à Paris.

Dans le silence des paumes, de et mis en scène par Florian Pâque, à 12 h 30 au Théâtre du Train bleu - Salle Maïf, relâche les vendredis 11 et 18 juillet, reprise ultérieurement au Maif Social Club

Cache-cache, le seule en scène de et avec Vanessa Aiffe-Ceccaldi à 19 h 05 au Petit chien, relâche mardi

Les dactylos, dans la formidable interprétation de Jérôme Rodriguez et Valentine Revel-Mouroz à 18h15 au Petit Louvre, 23 rue Saint-Agricol, relâche les mercredis

Le chant des lions dans l’excellente mise en scène de Charlotte Mazneff à 14h40 auThéâtre des Gémeaux - 10 rue du Vieux Sextier, relâches les mercredis

Madeleine Béjart, une femme libre avec la prodigieuse Isabelle Andreani à 11 h 45 à La Luna, relâche les vendredis 11 et 18 juillet

Opérapiécé Opus 2 pour l’immense plaisir de redécouvrir autant de morceaux musicaux d’opéra et de variété, admirablement interprétés par Marion Lépine et Aurore Bouston à 17 h 55 au théâtre Episcène d’Avignon à 17 h 55 (sauf lundis). A partir de 8 ans 

L'Homme Héron à 21h35 au Figuier Pourpre - Maison de la Poésie d'Avignon, pour allier poésie et politique en musique, relâche les jeudis

Happy apocalypse, la nouvelle pièce de Jean-Christophe Dollé qu'il met en scène avec Clotilde Morgiève à 22h35 au 11. Avignon, sauf les 11 et 18 juillet

Et puis l’exposition Les clés du festival à la Maison Jean Vilar

mercredi 14 juin 2023

Mes recommandations pour Avignon 2023

Je n’ai pas reçu cette année la programmation du If et je ne l’ai pas cherchée parce qu’il est peu probable que j’aille en Avignon cet été.

Je vais concentrer mes recommandations sur le In et le Off et ce sera déjà énorme.

Commençons par le In dont les « grands » spectacles sont donnés dans la cour d’honneur du Palais des papes. Voilà pourquoi j’illustre cet article par ce tableau peint en 1900 par Paul Signac, que j’ai récemment découvert au Musée d’Orsay.

L’exposition de Christophe Raynaud de Lage reste accessible et je vous encourage à aller la voir à la Maison Jean Vilar.

Le bleu est cette année la couleur du In, si bien qu’avec les trois clés toujours rouge et le fond blanc du papier nous sommes sous les auspices du drapeau national.

Comme j’aurais aimé programmé dans mon agenda :

Welfare mis en scène par Julie Deliquet dans la cour d’honneur (et revoir à cette occasion la comédienne Evelyne Didi que j’ai vue jouer sur cette même scène quand j’étais attachée de presse du Théâtre national de Strasbourg).

Retourner dans la carrière Boulbon (encore un souvenir !) pour Le jardin des délices par Philippe Quesne. C’est une chance que Arte en ait prévu la captation.

J’avais très envie de découvrir Carte noire nommée désir de Rébecca Chaillon au lycée Aubanel parce qu’on m’a beaucoup parlé d’elle, à tel point que ma curiosité est attisée.

La Maison Tellier & Friends pour Emily Loizeau à l’Opéra Grand Avignon

Et bien entendu By Heart de Tiago Rodrigues dans la Cour d’honneur. Ainsi que Dans la mesure de l’impossible, également deTiago Rodrigues, qui sera programmé à 16h à l’Opéra Grand Avignon suite à l’annulation du spectacle Les Émigrants de Krystian Lupa.
Passons donc maintenant au Off qui, encore cette année, approche les 1600 propositions comme je le notais après la conférence de presse de lancement.

Je donnerai d'abord mes coups de coeur, les spectacles que je serais prêtes à défendre envers et contre tous, parce que je les ai déjà vus, appréciés, et chroniqués (donc les liens bleus conduisent vers mes publications), en les classant par horaire, du plus tôt au plus tardif, car je sais ô combien ce critère est essentiel pour organiser sa journée.

Je n’ai sans doute pas tout noté et pourtant, même en restant dix jours, vous ne pourrez pas voir toutes mes recommandations, ne serait-ce que parce que les horaires se chevauchent, et que beaucoup ont choisi le mercredi comme jour de relâche. Il serait donc stupide d’en donner plus encore mais bien entendu ma sélection n’est pas limitative.

mardi 5 mai 2020

Entre Voix confiné avec Miguel-Ange Sarmiento

J'ai hésité à la meilleure façon de présenter Miguel-Ange Sarmiento qui est le septième invité des Entre Voix confinés car cet artiste a de nombreuses cordes à son arc. Il est comédien, chanteur, professeur de théâtre, ... et tant d'autres choses encore.

Je le connais depuis de longues années et son talent provoque la surprise pour chacun de ses spectacles, chroniqués ici.

Nous aurions pu facilement passer une heure ensemble. C'était d'ailleurs prévu, pour un Entre Voix classique, dans les studios de Needradio mais les grèves de transport de la fin 2019 nous ont obligés à remettre à mi-mars ... et voilà que le confinement nous a contraints une fois de plus à remettre.

Il explique avec philosophie comment il apprend à "négocier avec le temps" et songe à vivre différemment. Il se livre à une analyse très juste de la situation des artistes et du festival d’Avignon avant d'envisager plusieurs scénarios.

Vous l'entendrez à la fin interpréter Soy qui est une chanson qu’il a adaptée en espagnol.

Ce billet est illustré d'une photo prise en 2016 pendant le récital Jukebox d'émotions, programmé à Paris au théâtre Les Rendez-Vous d’Ailleurs.

lundi 13 avril 2020

Le blog a 13 ans

Il fallait bien que cela arrive ... Un jour le blog passerait le cap des 13 ans. Signe de chance si l'on en croit Claude Lelouch ....

J'aurais dû écrire ce billet il y a deux mois, comme je le fais chaque année à la mi-février, mais la situation devenait surréaliste, partagée entre les pressions et la crainte d'une contamination. Manque de chance, je suis tombée malade.

2020 sera une année blanche diront bientôt les artistes empêchés de se produire devant le public, et les écrivains suivront en souffrant d'être privés de rencontres dans les librairies et dans les salons avant de songer à employer des moyens dits virtuels, comme Zoom et Skype pour maintenir les liens.

Année noire pour les malades et leurs proches.

Année grise au final ? Qui vivra verra.

2019 aura été en tout cas une année riche d'événements dont je n'ai pas toujours rendu compte suffisamment sur le blog. Notamment le festival d'Avignon où j'ai peut-être vu "trop" de spectacles ...

J'ai adoré l'expérience du Grand bazar des Savoirs au Théâtre Firmin Gémier la Piscine. Partager cinq de mes passions (le théâtre, le Mexique, l'écriture, la cuisine, la radio) avec le public aura réactivé mon envie d'écrire au-delà de l'espace du blog et de le faire également déborder un peu de sa ligne éditoriale. Voilà pourquoi j'ai publié une série de nouvelles, presqu'une dizaine, mais il en reste à venir. Et j'ai d'autres projets d'écriture dont j'espère pouvoir parler en février 2021, ce qui prouvera que les mois prochains n'auront pas été "blancs".

J'avais exprimé il y a trois ans mon souhait de combiner l'écrit avec l'oral, en l'occurrence à la radio. En dix-huit mois j'aurais enregistré 170 chroniques et 71 émissions. C'est beaucoup et l'heure viendra de faire des choix, faute de s'épuiser, et de ne parvenir à faire la radio qu'au détriment du blog.

En ces jours si particuliers, qu'on espère ne pas devoir revivre, nous sommes nombreux à reconsidérer notre vie, et nos priorités. Je ne vais pas échapper à ce bilan.
Parallèlement, et là encore, rien d'extraordinaire à cela, nous sommes nombreux à vouloir agir, et sortir de l'enfermement, d'une manière ou d'une autre. La mienne passera par des interviews de personnalités qui se livreront en toute intimité, mais avec pudeur, à travers des "Entre Voix confinés", enregistrés par téléphone, dans un format plus court que ceux que je faisais en face à face en studio uniquement. Ce sont tous des amis, ce qui explique que, pour une fois, j'emploierai le tutoiement. 

Il y aura
Ils vont dire en quoi le confinement aura été propice pour eux à vivre différemment. On pourra les ré-entendre à partir du 15 mai en suivant ce lien. J'aurais adoré poursuivre ce type d'émission mais la direction de Needradio n'a pas voulu continuer alors que la France se déconfinait, même lentement.

Ces entretiens m'ont amenée à remettre en question ma façon d'interviewer même si je n'ai pas à rougir de ce que je faisais dans les Entre Voix classiques. Et que sans doute il y aura davantage de portraits sur le blog, en version écrite.
Et si 2020 était une année ... orange !

dimanche 10 novembre 2019

Comment j’ai dressé un escargot sur tes seins avec Miguel-Ange Sarmiento

J'avais vu une version de ce texte du dramaturge Matéi Visniec qui m'avait exaspérée (et c'est plutôt rare).

Je m'étais juré de ne jamais réitérer l'expérience. C'était avant de savoir que Miguel-Ange Sarmiento allait interpréter le texte, sous la direction de Rémi Cotta, qui assure aussi une scénographie que je qualifierai de ... totalement évidente, sans pouvoir vous la raconter parce que je ne veux pas vous priver du plaisir de la découvrir. Effet de surprise garanti !

En conséquence les photos sont banales et il va falloir me faire confiance.

J'ai été envoutée par la qualité du jeu du comédien qui rend plausible ce qui pourrait être absurde. Quelle poésie lorsqu'il avoue avoir déposé son coeur sur la table ! Et qu'il s'agisse d'une table de camping ne change rien à la beauté des sentiments et à la poésie du contexte.

Il parait que ce fut un succès dès sa création au Théâtre le Bout, rue Frochot en février dernier. Je veux bien le croire et je confesse donc que je suis passée à coté  ... comme j'ai pu louper l'Ombre, la première pièce si magnifique d'Alma Brami, heureusement reprise en ce moment au Studio Marie Bell. Voilà deux seuls-en-scène, très différents, mais qui tous deux sont servis par d'immenses comédiens. Car le théâtre n'existe que vivant.

Dans Comment j’ai dressé un escargot sur tes seins, une femme use de ses charmes pour séduire, enflammer, galvaniser son amoureux. Mais aussi pour le fuir, lui revenir, le retenir, le quitter ou l’envahir. Et lui, étourdi par la valse que lui impose sa Muse, est prêt à subir son propre équarrissage pour la conquérir et lui prouver son amour.
L'art de Miguel-Ange est de nous entrainer dans cet imaginaire si particulier qui par moments frôle la magie. Une bande-son qui fait la belle place au chant des grillons et à quelques cris d'oiseaux. Quelques accessoires savamment choisis. Une mise en scène précise. Le charme opère. La comptine enfantine est vite oubliée. Il nous fait croire au miracle amoureux qui conduit à la métamorphose.
Il y a des textes qui semblent avoir été écrits pour un comédien en particulier. Il faut croire que celui-ci a trouvé son "maitre" puisque Miguel-Ange Sarmiento a décidé de l'interpréter aussi deux fois en espagnol, qui est sa langue maternelle. L'exercice lui a plu. Alors il va récidiver bientôt en italien et en anglais, qui sont d'autres langues qu'il maitrise parfaitement. Et il jouera aussi en japonais ... au Japon, preuve que cet escargot va voyager très loin.

Comment j’ai dressé un escargot sur tes seins de Matéi Visniec
Mise en scène et scénographie de Rémi Cotta
Avec Miguel-Ange Sarmiento
Au Théâtre de la Contrescarpe
5 rue Blainville - 75005 Paris
En novembre : les samedis 9 et 23 à 14h30.
En décembre : les samedis 7 et 21 à 14h30.
En janvier : le samedi 4 à 14h30.
Attention, représentations des 23 novembre et 21 décembre en espagnol, et les autres jours en français

La photo qui n'est pas logotypée A bride abattue est de Fabienne Rappeneau

dimanche 11 décembre 2016

Pasolini Musica par la compagnie L’Arsenal d’Apparitions

La Générale de presse de Pasolini Musica a eu lieu le lundi 21 Novembre au Théâtre de Ménilmontant, 15 rue du Retrait 75020 Paris (Métro Gambetta). Cette représentation en avant-première a permis donner aux parisiens un avant-goût de ce spectacle musical qui est déjà programmé tous les jeudis à 20h30 dans ce même théâtre à partir du partir du 19 Janvier et jusqu’au 16 Février 2017

La création avait eu lieu quelques jours plus tôt au Théâtre de Chaoué à Allonnes (72) et des reprises sont prévues courant 2017 à Alençon (61), et au Festival d’Avignon Off 2017.

Pier Paolo Pasolini est mort assassiné en 1975 sur la plage  romaine d'Ostie. Il n'avait que 53 ans. Poète, romancier, scénariste, pamphlétaire, auteur dramatique, réalisateur et acteur, il est l'artiste italien le plus célèbre du XX° siècle. Il n'est cependant pas nécessairement bien connu.

On peut lire sur l'affiche en dessous d'une photographe faite en 1953, une de ses maximes : Il faut s'engager non seulement  dans l'écriture mais aussi dans la vie. On entendra cette recommandation à la fin du spectacle, quasiment en conclusion.

Ce spectacle musical (pour une chanteuse lyrique, une comédienne-chanteuse, un comédien-chanteur, un comédien et une multi-instrumentiste) nous montre la force de la vitalité de Pasolini dans toutes ses dimensions, y compris joyeuse.

La soirée commence avec une douce chanson troublée par des aboiements. Les notes de piano s'imposent sur le chant des cigales. Le romancier répondra à quelques questions dans le cadre d'un entretien pour Télésoir. Il ne cherche pas à flatter son interlocuteur et d'emblée jette que le peuple italien est le plus analphabète qu'il ait rencontré.
Miguel-Ange Sarmiento, qui est chanteur, danseur et comédien, se glisse à la perfection dans la peau du personnage. Ses partenaires ne sont pas moins intéressants et la répartition des rôles est équilibrée.

Stéphanie Boré, mezzo-soprano surprend très vite (parce que je ne la connais pas) avec la pureté de son interprétation de la Norma de Bellini (chanté autrefois par la non moins merveilleuse Maria Callas. Mais elle sera autant crédible en actrice qu'en paysanne) à peine entaché par le son de la machine à écrire du poète qui ne s'arrête pas souvent de travailler. On assistera toute la soirée au processus de création artistique selon Pasolini : genèse d’un poème, fragment d’une répétition, élaboration progressive d’un texte qui deviendra une chanson.
Nous sommes dans son studio/atelier de création, encombré d'une table de travail sur laquelle est posée sa machine à écrire, d'une rangée de vieux sièges de cinéma, de servantes (lampes sur pied pour des répétitions de théâtre), d'un piano droit et d’autres instruments encore sous des housses.

À l’avant-scène, un poste de télévision se déclenche parfois inopinément pour faire entendre les questions de journalistes provocateurs, auxquels Pasolini répond de plus ou moins bonne grâce. Il faut malheureusement se trouver dans les tout premiers rangs pour en saisir le sens.

La présence de ce type d'écran est tout à fait justifiée quand on sait combien Pasolini dénonçait notre aliénation à cette parole autoritaire que le média déverse sans mesure en se cachant derrière le masque de la démocratie, comme si quelqu'un d'irréprochable pensait pour nous.

Une deuxième comédienne-chanteuse (Eva Kovic) figure d’autres personnages populaires imaginés par l’artiste. Il arrive que certains de ces personnages chantent, accompagnés au piano droit acoustique, au clavier numérique, au violon ou à l’accordéon (par Solène Ménard).

Le spectacle se situe clairement en dehors d'une volonté pédagogique. Il ne s'agit pas de tout nous dire de la vie de cet artiste mais de restituer son engagement dans la défense de la sacralité du monde et la critique de son temps, et cela uniquement à travers des textes composés par Pasolini lui-même et traduits par René de Ceccatty, Vigji Scandella, Jean-Pierre Milelli, Jean Rougeul et André Roche.

La lumière souligne l’aspect non réaliste de la représentation. Elle vient rythmer et ponctuer le texte ou la musique autant que révéler des espaces de jeu. La mise en scène d'André Roche n'autorise aucun temps mort, aucune complaisance et l'ensemble est immédiatement puissant, animé de la "vitalité désespérée" propre à l'artiste.
La scène figure aussi, à certains moments, un espace mental dans lequel les souvenirs et les songes de l’artiste prennent forme. Des images naissent alors, projetées sur les murs (création de Éric Minette), sur les instruments ou même sur le corps des acteurs : des images fixes - photos anciennes de paysages italiens, portraits de ses jeunes amants, images de rassemblements politiques – et des images animées figurant des lucioles, symboles pour Pasolini d’un temps et d’un espoir révolus, alors qu'il se souvient, dira-t-il, du triste chant des grillons. On peut juste regretter que (pour le moment) ces images ne soient pas suffisamment reconnaissables.

Ne me mens pas est une très belle chanson (interprétée par Miguel-Ange Sarmiento). On a envie de noter toutes les paroles si justes qui résonnent encore avec actualité : les quelques personnes qui ont fait l'histoire sont celles qui ont dit non. / Scandaliser est un droit / Tout est politique.

On reconnait certains documents d'archives, comme la voix de Philippe Bouvard. Mais nul n'a besoin d'être érudit pour être saisi par le bruit des vagues, parce qu'on comprend que c'est bientôt fini, même si l'esprit du poète subsiste. On en sort remué, presque bouleversé, préférant conserver le souvenir de l'extrême dynamisme du jeu des comédiens et la joie qui se dégage dans de nombreuses scènes.
S'engager dans l'écriture comme dans la vie ne dispense pas d'être optimiste !
Pasolini Musica
Textes et chansons de Pier Paolo Pasolini
Avec Miguel-Ange Sarmiento, Stéphanie Boré, Eva Kovic, Solène Ménard (ou Livia Naas en alternance), et André Roche
Adaptation et mise en scène d’André Roche
Musiques originales de Dmitri Negrimovski
Théâtre de Ménilmontant (Salle Le Labo), 15, rue du Retrait, 75020 Paris
Les jeudis 19 et 26 janvier et 2, 9 et 16 février 2017, à 21 h

Photos de © Denis Tribhou

lundi 20 juin 2016

Jukebox d'émotions avec Miguel-Ange Sarmiento

Programmé initialement pour une soirée, le Jukebox d’Emotions de Miguel-Ange Sarmiento sera encore à l'affiche lundi prochain au Rendez-Vous d’Ailleurs, toujours à 20h.

Le jukebox a rythmé la vie dans les bars et les cafés jusque vers les années 90 et c'est l'arrivée des CD qui a marqué son déclin. C'est toujours un objet mythique, collectionné par de nombreuses vedettes comme Christophe.

En choisissant cet intitulé pour son récital Miguel-Ange annonce qu'il y aura de la nostalgie. En annonçant des émotions il gomme la référence à l'automatisme de ces appareils, dont on sélectionnait les pistes après avoir glissé une pièce de monnaie.

Il cumule les talents, à commencer par la comédie, mais c'est la chanson qui lui procure les plus fortes ... émotions, le mot est dit. La partager sur scène lui est quasiment vital.

Son entrée en scène est facétieuse (on entend sa voix sans le voir et soudain son visage perce le rideau), pour masquer sans doute une appréhension qu'il n'aura pas aussi forte lundi prochain, étant donné le niveau des applaudissements qu'il a récolté ce soir.
Je n'ai pas changé ... j'avais envie de te revenir ... ces paroles de la chanson de Julio Iglésias datent de 1979 et il est certain qu'il a pu l'écouter en boucle sur son mange-disques orange.

Il enchaine avec Padam, Padam, immortalisé par Edith Piaf, alternant fort harmonieusement voix parlée et voix chantée.

Miguel-Ange est réaliste et la présence d'un public nombreux le touche vraiment, en ces jours où des compétitions internationales et des manifestations sollicitent tout le monde. Nous apparaissons à ses yeux comme des résistants. Mais sait-il alors que nous n'avons aucun mérite puisque nous sommes venus pour le plaisir ?

Ainsi soit-il. Ce n'est pas moi qui le dit, mais lui qui chante Louis Chédid. et qui nous fait comprendre soudain que ce n'est pas du cinéma, mais la métaphore joliment dite du choix de sa fin de vie.
Ainsi soit-il / Tel est le nom du film / Travelling sur un corbillard qui passe
(...) Ainsi soit-il / Tel est le nom du film / Alors la caméra zoome arrière 
Et tu r'montes dans l'hélicoptère.

Il poursuit avec une chanson (peu connue) de Françoise Hardy oh je voudrais que tu m'enterres / mais demain je s'rai loin très loin ...

Pas question d'assombrir l'atmosphère. La lumière passe du bleu au rouge et c'est Back in the market of love, qu'il a coécrite avec Alice Bassié qui en a écrit la musique, et Jean-Christophe Déjean les arrangements, façon bossa-nova.
Il chante en français (quasiment sans accent), en espagnol (naturellement) et aussi en italien. Il nous apprend (en tout cas à moi) que Pasolini a été (aussi) auteur de chansons populaires, à propos d'amour, comment pourrait-il en être autrement pour qui disait que ceux qui comme moi ont eu le destin de ne pas aimer selon la norme finissent par surestimer la question de l'amour.

La soirée est émaillée de confidences, de questions-réponses avec le public, sans que ce soit au détriment du tour de chants, bien au contraire. Beaucoup d'humanité se dégage des échanges.

Quand reviendras-tu ? que l'immense Barbara a créé en 1987 n'a pas pris une ride. Et les paroles du Chanteur malheureux de Claude François (1975) ont le potentiel pour nous tirer une larme. Miguel-Ange a raison de le souligner : les plus belles chansons d'amour chantent le désamour.
Non sans humour il voudrait nous faire croire que Non je ne regrette rien d'Edith Piaf serait la seule à être optimiste. Je dirais qu'elle exprime une capacité à la résilience.

Il faut encore avoir du chaos en soi pour pouvoir enfanter une étoile qui danse écrivait Nietzsche dans Ainsi parlait Zarathoustra.

Pour finir, une chanson qui parle de départ, Porque te vas, immense tube chanté par Jeanette tout l'été 76, et qui était la musique du film Cria Cuervos de Carlos Saura. Tu m'oublieras disent les paroles.
Rien n'est plus faux comme l'ont démontré les applaudissements adressés aussi au pianiste Nicolas Urtreger.

Il faut espérer une présence plus régulière sur la scène en tant que chanteur. Miguel-Ange ne peut pas être partout. Il doit assurer la tournée du spectacle "Le Front Pop" de Christina Rosmini. Bientôt reprendront les répétitions de "Pasolini Musica", une création conçue et mise en scène par André Roche où il interprète le rôle de Pier Paolo Pasolini. Le spectacle devrait être joué à Paris du 19 janvier au 16 février tous les jeudis au Théâtre de Ménilmontant et ensuite au Festival d’Avignon en 2017.

Jukebox d'émotions, concert de Miguel-Ange Sarmiento
Les Rendez-vous d'Ailleurs
107 rue des Haies, 75020 Paris

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