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jeudi 6 mars 2014

Sans les meubles de Caroline Sers chez Buchet-Chastel

Caroline Sers est une auteure confirmée, dont le premier livre, Tombent les avions, reçut le Prix du Premier Roman. Il n'empêche, je ne la connaissais pas.

Si son dernier, Sans les meubles, n'avait pas échu brutalement dans ma boite aux lettres il aurait peut-être encore fallu quelques ouvrages avant que je ne la découvre.

Celui-ci pourrait être l'histoire de ma famille, de la vôtre sans doute aussi. Nous avons tous une Tante Jeanne donneuse de leçons, une Tante Camille à la mentalité de suiveuse, une mère qui sera éternellement regardée comme la pièce rapportée. La faune familiale est large d'énergumènes qui empoisonnent la vie à coups de petites phrases assassines. On parvient souvent à s'en soustraire. On les oublie. Un jour ils resurgissent. Il suffit d'une convocation chez un notaire pour qu'on soit obligé(e) de remettre à plat des souvenirs enkystés dans des babioles héritées à des moments fatidiques.
La maison familiale a été vendue à la mort du grand-père, quand il est apparu que de sa modeste fortune il ne subsistait plus rien. Inexplicablement. A la mort de son père, Corinne a dû refuser l’héritage, pour ne pas payer les dettes. Sa mère lui a donné tout ce qui venait de sa famille paternelle, des meubles et des objets pour lesquels elle n'avait aucun attachement.
Corinne, la trentaine, se retrouve avec ses tantes chez le notaire pour régler des années plus tard la succession de sa grand-mère. Ayant perdu son père, elle est en première ligne... Tout se passe bien jusqu’à ce que tante Jeanne demande qu’un inventaire soit fait de tout ce que sa mère lui a donné à la mort de son père.
Héritage accepté, refusé, disputé, la famille Lenoir devra faire face à son passé et à ses petits secrets soigneusement enfouis.
Corinne est une jeune femme moderne, un peu fragile. Elle se voyait travailler dans le théâtre. La réalité n'est pas à la hauteur de ses rêves, mais elle s'en satisfait. Elle est Communauty Manager et son job (bien connu des bloggeurs) consiste à naviguer sur les réseaux sociaux pour veiller à l'image positive des marques de son portefeuille de clientèle.

Ces meubles venus du passé lui furent utiles. Ce fut toujours cela de moins à acheter quand elle a pris son indépendance. Et puis elle les aime. Jusqu'à ce qu'elle découvre qu'ils constituent d'encombrants souvenirs.

Avec subtilité et intelligence, Caroline Sers pousse le lecteur à faire son propre inventaire. Qu'a-t-on conservé chez soi, par respect des anciens, qui plombe le présent à force de nous maintenir le coeur dans le passé ? N'y a-t-il pas d'autres moyens d'entretenir le souvenir ? Vivront-ils plus longuement dans le monde réel ou dans un espace virtuel ? Comment recycler ces "supports de mémoire" ?

Elle explore la vie, la mort, le deuil, l'amour aussi ... brossant le paysage des moments magiques qui permettent de sortir du temps (p. 200).

On la sent autant fille de la ville que de la campagne, amoureuse du texte, malicieuse, furieusement tendance. D'un sujet qui est le point de départ de tant de pièces de théâtre, de livres et de films elle réussit à faire un livre que l'on n'a pas envie de lâcher.

Sans les meubles de Caroline Sers, chez Buchet Chastel, sortie le 6 mars 2014

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