Jacques Ferrandez et Yves Camdeborde se connaissent bien. Ils aiment tous les deux la cuisine assaisonnée. Lorsqu’ils s’associent pour commettre un ouvrage il est naturel que ces deux là ne lésinent pas. Leur carnet de croqueurs laisse échapper des notes très variées.
Le souci du goût, la qualité des produits, le respect de l’environnement, la passion pour des métiers exigeants, la volonté de transmettre … toutes ces valeurs sont bien présentes.
Les historiettes sont nimbées d’un humour mordant. Chacune est rehaussée par des dialogues souvent crus, parfois à point, jamais trop épicés.
Yves Camdeborde témoigne de sa passion pour les produits nobles, la truffe, le homard … mais aussi le bio dans les vignobles ou le lait, les appellations, le "travail normal". Il en profite pour aborder les sujets qui ont défrayé la chronique comme le pouvoir de l’argent dans l’industrie agroalimentaire, ou la phobie stupide à l'égard de la viande de cheval, soulignant au passage qu’on n’a jamais entendu parler de cheval "fou". Je partage son avis : dans mon enfance, on répétait que c’était la viande la plus saine et elle était au menu une fois par semaine.
On sillonne la France avec lui et sa bande de copains, faisant escale sur les coteaux du Grésivaudan, la côte de Chausey, et même une halte à la prison d’Angoulême où il peut arriver qu'on égare un couteau comme à la maison dans sa poubelle.
La bande revient systématiquement bredouille, ou presque, mais l'opiniâtreté est toujours miraculeusement récompensée comme si c'était Noël tous les jours.
Le culte du vin est peut-être un peu exalté, si bien qu’on va devoir préconiser une consommation régie par la modération. Il est vrai que les 24 siècles d'histoire de la Côte-Rotie (p. 36) sont aussi impressionnants que le travail de romain consistant à remonter les murs à perpète en raison de la verticalité des coteaux.
C'est l'occasion de tirer le portrait de grandes figures, comme (je pourrais en citer une dizaine) Jean Yves bordier, "le" spécialiste du beurre. Je le connais mais j'ignorais son parcours, depuis la crémerie de Saint Maur en passant par son arrivée à Lannion en 1982 ... pour faire de la voile. La lecture rend savant. Il faut 22 litres de lait pour obtenir un kilo de beurre. Je ne vais pas tout vous raconter ... allez voir la définition du lait (p. 44) et son lien avec l'énergie cosmique. C'est le dernier artisan à travailler avec un malaxeur en bois (du teck) et sans gants parce qu'il vaut mieux avoir des mains propres que des mains sales dans des gants qui pourraient se percer ...
Ce livre est un outil original en raison de sa forme en Bande Dessinée qui permet les ruptures e ton, l'humour, la dérision, sans perdre le sérieux. Il est aussi pédagogique. Savez-vous que le jus d'ortie a précédé l'eau de Javel ? (p. 46) Comme les bons plats, excellent la première fois, encore plus savoureux à la repasse. Vous aurez compris qu'il faut le lire deux fois.
La bande revient systématiquement bredouille, ou presque, mais l'opiniâtreté est toujours miraculeusement récompensée comme si c'était Noël tous les jours.
Le culte du vin est peut-être un peu exalté, si bien qu’on va devoir préconiser une consommation régie par la modération. Il est vrai que les 24 siècles d'histoire de la Côte-Rotie (p. 36) sont aussi impressionnants que le travail de romain consistant à remonter les murs à perpète en raison de la verticalité des coteaux.
C'est l'occasion de tirer le portrait de grandes figures, comme (je pourrais en citer une dizaine) Jean Yves bordier, "le" spécialiste du beurre. Je le connais mais j'ignorais son parcours, depuis la crémerie de Saint Maur en passant par son arrivée à Lannion en 1982 ... pour faire de la voile. La lecture rend savant. Il faut 22 litres de lait pour obtenir un kilo de beurre. Je ne vais pas tout vous raconter ... allez voir la définition du lait (p. 44) et son lien avec l'énergie cosmique. C'est le dernier artisan à travailler avec un malaxeur en bois (du teck) et sans gants parce qu'il vaut mieux avoir des mains propres que des mains sales dans des gants qui pourraient se percer ...
Ce livre est un outil original en raison de sa forme en Bande Dessinée qui permet les ruptures e ton, l'humour, la dérision, sans perdre le sérieux. Il est aussi pédagogique. Savez-vous que le jus d'ortie a précédé l'eau de Javel ? (p. 46) Comme les bons plats, excellent la première fois, encore plus savoureux à la repasse. Vous aurez compris qu'il faut le lire deux fois.
On glanera quelques conseils, parfois incongrus, comme celui qui consiste à choisir dans une nichée le premier chien qui vient renifler votre main. Et on apprend au passage que la chienne est meilleure qu’un cochon pour fouiller la truffe même si elle chiparde ces champignons quand ils sont petits. Et nul besoin d'avoir une bête de race.
Yves Camdeborde est fils de paysans et revendique ses origines béarnaises. Né à Pau, il a travaillé au Ritz, à la Tour d’argent et au Crillon. Il tient désormais Le Comptoir du Relais Saint-Germain, RSG pour les intimes. Ce fut aussi le célèbre jury de Masterchef, un investissement de 4 mois à temps plein qui l’éloignait trop des fourneaux de 2010 à 2013. Il a préféré quitter l’entreprise.
Ce n'est pas pour autant qu'il est devenu sédentaire. Il aime passer du temps avec ses producteurs et il voyage à travers la France cinquante jours par an. Rassurez-vous ils ne sont pas consécutifs. On comprend donc que ces carnets de croqueurs ne soient qu'un premier tome. Le second est prévu l'an prochain et il sera consacré à l'automne.
Yves Camdeborde intervient aussi ici ou là. Aujourd'hui il était à Soissons dans le cadre du Salon du blog culinaire pour exécuter un consommé de ravioles de crevettes et billes de légumes au demeurant un vrai délice (je ne pensais pas avoir la chance de la goûter ... sans doute pour avoir été au bon endroit au bon moment) et dont je vous joins la recette avec le lien ci-dessus.
Je reviendrai dans quelques jours sur l'utilisation de l'eau filtrée avec Brita, devenu tout à fait ordinaire à la maison et systématique, du café à la soupe en passant par l'eau de cuisson du riz. C'est simple : je n'emploie plus l'eau du robinet non filtrée que pour faire la vaisselle ou laver les légumes.
Yves délivrait les explications avec un débit de mitraillette. On reconnaissait l'homme tel qu'il est croqué par Jacques Ferrandez : mon métier c'est un métier d'humains. Quand je connais celui qui produit la carotte je la cuisine pas pareil. J'ai été frappé de voir à l'étranger une vidéo pour expliquer comment on pouvait faire son pain, cultiver ses légumes ... On a la chance, en France, d'avoir des gens qui font tous ces métiers là. Je connais 90% de mes fournisseurs personnellement.
Qu’on ne s’avise pas de lui reprocher de n’être pas locavore. Il répondra qu’il l'est à l’échelon national et qu’il est hors de question qu’il prive ses clients d’un beurre excellent sous prétexte qu’il est produit en Bretagne.
Son discours est entendu et bien accueilli. A Soissons, il était arrêté tous les 50 centimètres pour une photo, une signature, un conseil. J'ai eu la chance de l'observer avant de discuter en aparté avec lui. Il est patient et encourageant. Elégant aussi avec de très jolis boutons de manchette qui embellissent son austère tenue blanche de cuisinier.
Yves Camdeborde est fils de paysans et revendique ses origines béarnaises. Né à Pau, il a travaillé au Ritz, à la Tour d’argent et au Crillon. Il tient désormais Le Comptoir du Relais Saint-Germain, RSG pour les intimes. Ce fut aussi le célèbre jury de Masterchef, un investissement de 4 mois à temps plein qui l’éloignait trop des fourneaux de 2010 à 2013. Il a préféré quitter l’entreprise.
Ce n'est pas pour autant qu'il est devenu sédentaire. Il aime passer du temps avec ses producteurs et il voyage à travers la France cinquante jours par an. Rassurez-vous ils ne sont pas consécutifs. On comprend donc que ces carnets de croqueurs ne soient qu'un premier tome. Le second est prévu l'an prochain et il sera consacré à l'automne.
Yves Camdeborde intervient aussi ici ou là. Aujourd'hui il était à Soissons dans le cadre du Salon du blog culinaire pour exécuter un consommé de ravioles de crevettes et billes de légumes au demeurant un vrai délice (je ne pensais pas avoir la chance de la goûter ... sans doute pour avoir été au bon endroit au bon moment) et dont je vous joins la recette avec le lien ci-dessus.
Je reviendrai dans quelques jours sur l'utilisation de l'eau filtrée avec Brita, devenu tout à fait ordinaire à la maison et systématique, du café à la soupe en passant par l'eau de cuisson du riz. C'est simple : je n'emploie plus l'eau du robinet non filtrée que pour faire la vaisselle ou laver les légumes.
Yves délivrait les explications avec un débit de mitraillette. On reconnaissait l'homme tel qu'il est croqué par Jacques Ferrandez : mon métier c'est un métier d'humains. Quand je connais celui qui produit la carotte je la cuisine pas pareil. J'ai été frappé de voir à l'étranger une vidéo pour expliquer comment on pouvait faire son pain, cultiver ses légumes ... On a la chance, en France, d'avoir des gens qui font tous ces métiers là. Je connais 90% de mes fournisseurs personnellement.
Qu’on ne s’avise pas de lui reprocher de n’être pas locavore. Il répondra qu’il l'est à l’échelon national et qu’il est hors de question qu’il prive ses clients d’un beurre excellent sous prétexte qu’il est produit en Bretagne.
Je suis fier de revendiquer que ma pâte feuilletée je la fais pas. Je dois assurer 300 couverts dans mon restaurant. Je ne pourrais donc pas tout faire moi-même aussi bien que d'autres. Gérard Mulot me fournit une pâte feuilletée fantastique. Elle a un coût mais j'ai la garantie d'une régularité. Ce n'est pas un défaut de s'appuyer sur les bonnes personnes de chaque domaine.Le chef se positionne clairement contre les intermédiaires et préconise aux consommateurs d’acheter sur les marchés ou les ventes directes parce qu'il est important de savoir d’où vient ce qu’on mange, si c’est propre et bon pour la santé.
Son discours est entendu et bien accueilli. A Soissons, il était arrêté tous les 50 centimètres pour une photo, une signature, un conseil. J'ai eu la chance de l'observer avant de discuter en aparté avec lui. Il est patient et encourageant. Elégant aussi avec de très jolis boutons de manchette qui embellissent son austère tenue blanche de cuisinier.
Jacques Ferrandez vit dans les environs de Nice. Ses aquarelles sont délicates. Il restitue des atmosphères et des ambiances qui donnent envie de prendre notre panier et de nous mettre nous aussi en chemin, ce que Yves Camdeborde incite aussi à faire. Tout un programme pour mes prochaines vacances en Bretagne.
Frères de terroirs, de Jacques Ferrandez et Yves Camdeborde, Editions Rue de Sèvres, octobre 2014.
Frères de terroirs, de Jacques Ferrandez et Yves Camdeborde, Editions Rue de Sèvres, octobre 2014.
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