8, avenue Lénine est un documentaire de société, tourné par Valérie Mitteaux et Anna Pitoun démontrant que la France et l’Europe ont la capacité d'accueillir dignement des Roms.
Les réalisatrices sont suivi pendant 15 ans Salcuta Filan, une femme rom et ses deux enfants, Denisa et Gabi, à Achères en région parisienne, depuis leur arrivée et leur quotidien en caravane dans un bidonville, jusqu'à leur premier logement en appartement.
On est très vite absorbé par l'actualité qui se construit sous nos yeux.
Plusieurs séquences sont d'une grande émotion, notamment celle qui filme l'intervention de 150 policiers, suivie de l'impressionnante opération de démolition des caravanes où vivent tant bien que mal des populations d'origine roumaine. C'est d'une cruauté terrible. Surtout que plus la précarisation augmente, plus la reconduite à la frontière devient inéluctable.
Parallèlement l'humanité de tous ceux qui soutiennent la famille est particulièrement touchante et réconfortante. A commencer par l'institutrice qui accueille les enfants dans sa classe et qui, jamais, ne les lâchera dans la nature sans vérifier que tout se passera bien. Non seulement elle enseigne (c'est son métier bien sûr) mais elle transmet un message très fort et très positif à la petite fille : dis toi que dans la vie tu peux changer de boulot quand tu veux.
On remarque que la municipalité (communiste) avance de concert avec le curé, ce qui était peut-être symptomatique de ce qui pouvait se faire il y a presque vingt ans. Elle achètera trois caravanes et c'est ensuite l'installation en dur, avenue Lénine, grâce à l'aide du préfet, pour les trois familles chanceuses. Après le logement, un travail est proposé et tout peut enfin s'enchainer positivement.
Le maire a raison de le souligner : Tu as appris avec nous à ne pas courber la tête.
On comprend que l'histoire est ancienne, mais le film est loin d'être fini, on s'en rend compte à la taille des enfants, et on voit bien que les soucis ne sont pas effacés pour toujours. La vie n'est pas facile pour Salcuta qui bientôt va craindre pour son emploi et pour sa fille, contrainte de s'installer longtemps en caravane avant d'elle aussi pouvoir emménager dans un vrai logement.
Le film présente des images des soirées Nuit debout place de la République, et qu'on aurait tort d'oublier.
La caméra suit aussi Salcuta en Roumanie lors d'un voyage, le temps d'un été. Tu oublies pas le pays dont tu es parti, le paysage ... dit-elle avec émotion alors qu'on la voit travailler à la construction d'une maison. Ce passage a le mérite de la sincérité mais il place un bémol sur la question de l'intégration. On sent combien elle aurait préféré ne pas devoir émigrer et le poids des regrets.
De la même façon on nous dit d'un côté qu'il ne faut pas assimiler les Roms à des voleurs mais on n'a pas coupé au montage le moment où Salcuta explique que ses cousins allaient voler pour ramener à la maison.
On comprend que c'était très dur et que construire sa vie à Achères ait représenté une solution. Mais la rend-t-elle totalement heureuse ? On aurait aimé que les réalisatrices posent la question de manière plus générale. Comment faire pour que la Roumanie puisse assurer une vie digne à ses ressortissants sans qu'ils soient obligés de s'expatrier. On mesure combien leurs coutumes sont essentielles au moment de la scène du mariage ... qui respecte à la lettre les usages.
Par contre, en face, tous ceux qui se sont mobilisés et qui n'ont jamais lâché, même lorsque le maire a perdu les élections en 2014 et que la ville est tombée à droite, n'ont qu'un message : Nous avions raison de nous battre pour vous il y a dix ans. Pour eux le doute n'est pas permis, un roumain qui travaille n'a rien d'étonnant, l'intégration est pleinement réussie et les Roms n'ont aucune "vocation à rentrer chez eux" comme les xénophobes voudraient le faire croire.
Salcuta s'affirme comme européenne, vivant en France mais cette situation est-elle pour autant généralisable ?
8, avenue Lénine, de Valérie Mitteaux, Anna Pitoun, documentaire français, en salle à partir du 14 novembre 2018 (1h 40 min)
On est très vite absorbé par l'actualité qui se construit sous nos yeux.
Plusieurs séquences sont d'une grande émotion, notamment celle qui filme l'intervention de 150 policiers, suivie de l'impressionnante opération de démolition des caravanes où vivent tant bien que mal des populations d'origine roumaine. C'est d'une cruauté terrible. Surtout que plus la précarisation augmente, plus la reconduite à la frontière devient inéluctable.
Parallèlement l'humanité de tous ceux qui soutiennent la famille est particulièrement touchante et réconfortante. A commencer par l'institutrice qui accueille les enfants dans sa classe et qui, jamais, ne les lâchera dans la nature sans vérifier que tout se passera bien. Non seulement elle enseigne (c'est son métier bien sûr) mais elle transmet un message très fort et très positif à la petite fille : dis toi que dans la vie tu peux changer de boulot quand tu veux.
On remarque que la municipalité (communiste) avance de concert avec le curé, ce qui était peut-être symptomatique de ce qui pouvait se faire il y a presque vingt ans. Elle achètera trois caravanes et c'est ensuite l'installation en dur, avenue Lénine, grâce à l'aide du préfet, pour les trois familles chanceuses. Après le logement, un travail est proposé et tout peut enfin s'enchainer positivement.
Le maire a raison de le souligner : Tu as appris avec nous à ne pas courber la tête.
On comprend que l'histoire est ancienne, mais le film est loin d'être fini, on s'en rend compte à la taille des enfants, et on voit bien que les soucis ne sont pas effacés pour toujours. La vie n'est pas facile pour Salcuta qui bientôt va craindre pour son emploi et pour sa fille, contrainte de s'installer longtemps en caravane avant d'elle aussi pouvoir emménager dans un vrai logement.
Le film présente des images des soirées Nuit debout place de la République, et qu'on aurait tort d'oublier.
La caméra suit aussi Salcuta en Roumanie lors d'un voyage, le temps d'un été. Tu oublies pas le pays dont tu es parti, le paysage ... dit-elle avec émotion alors qu'on la voit travailler à la construction d'une maison. Ce passage a le mérite de la sincérité mais il place un bémol sur la question de l'intégration. On sent combien elle aurait préféré ne pas devoir émigrer et le poids des regrets.
De la même façon on nous dit d'un côté qu'il ne faut pas assimiler les Roms à des voleurs mais on n'a pas coupé au montage le moment où Salcuta explique que ses cousins allaient voler pour ramener à la maison.
On comprend que c'était très dur et que construire sa vie à Achères ait représenté une solution. Mais la rend-t-elle totalement heureuse ? On aurait aimé que les réalisatrices posent la question de manière plus générale. Comment faire pour que la Roumanie puisse assurer une vie digne à ses ressortissants sans qu'ils soient obligés de s'expatrier. On mesure combien leurs coutumes sont essentielles au moment de la scène du mariage ... qui respecte à la lettre les usages.
Par contre, en face, tous ceux qui se sont mobilisés et qui n'ont jamais lâché, même lorsque le maire a perdu les élections en 2014 et que la ville est tombée à droite, n'ont qu'un message : Nous avions raison de nous battre pour vous il y a dix ans. Pour eux le doute n'est pas permis, un roumain qui travaille n'a rien d'étonnant, l'intégration est pleinement réussie et les Roms n'ont aucune "vocation à rentrer chez eux" comme les xénophobes voudraient le faire croire.
Salcuta s'affirme comme européenne, vivant en France mais cette situation est-elle pour autant généralisable ?
8, avenue Lénine, de Valérie Mitteaux, Anna Pitoun, documentaire français, en salle à partir du 14 novembre 2018 (1h 40 min)
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