Je n’ai pas lu (pas encore) Qui sème le vent et je découvre donc Marieke Lucas Rejneveld avec Mon bel animal (à paraître chez Buchet Chastel) dont nous avons attendu deux ans la traduction du néerlandais.
La couverture, étonnante, pour encadrer l'adjectif "bel", des guillemets évoquant la ramure d'un cerf dont la tête pourrait être celle d'un de ces trophées que les chasseurs accrochent chez eux en signe de victoire.
Au cœur d’un été étouffant dans la campagne hollandaise, alors que plane la menace de la grippe bovine, un vétérinaire se rapproche d’une adolescente de quatorze ans. Dans son journal, il décrit avec un lyrisme glaçant la relation qu’il entretient avec la jeune fille, qu'il désigne comme son petit animal de luxe.
L'expression apparait pour la première fois page 26. Elle sera récurrente tout au long de la confession qui nous est livrée sous la forme d'une logorrhée sans point de ponctuation.
Cette lecture est une course de fond.
Il faut quelques pages pour prendre le rythme, adapter ses yeux à des phrases dont on ne voit pas le bout, se retenir de ne pas les lever pour plonger dans le dictionnaire, accepter un lexique d’une richesse insensée, goûter les innombrables références musicales, littéraires et picturales, de Proust à Max Velthuijs en passant par Roald Dahl, Leonard Cohen et Pierre Bonnard. Et surtout Samuel Beckett et Stephen King, si judicieusement cité :
Qui sait, en fin de compte, si la voix qui raconte les histoires n’est pas plus importante que les histoires elles-mêmes ? ( p. 383)
La voix, autrement dit le langage.
La voix de Marieke Lucas n’a guère plus de trente ans. Autant dire qu’elle va longtemps longtemps résonner ! Elle mérite amplement le qualificatif de prodige. Elle est d'ailleurs déjà reconnue comme un très grand auteur aux Pays-Bas.
Mon bel animal de Marieke Lucas Rejneveld, Buchet-Chastel, en librairie le 25 août 2022
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