Le film de Rebecca Zlotowski a été présenté en Sélection Officielle à la Mostra de Venise. Les enfants des autres, était programmé au Rex de Chatenay-Malabry (92) dans le cadre de Paysages de Femmes, en complément de trois longs-métrages qui, eux, s'opposaient en compétition officielle.
Rachel (Virginie Efira) a 40 ans, pas d'enfant. Elle aime sa vie : ses élèves du lycée, ses amis, ses ex, ses cours de guitare. En tombant amoureuse d’Ali (Roschdy Zem), elle s’attache à Leila, sa fille de 4 ans. Elle la borde, la soigne, et l’aime comme la sienne. Mais aimer les enfants des autres, c’est un risque à prendre…
Le film est annoncé comme un portrait tout en nuances de la belle-mère, rôle qualifié de délicat et endossé par beaucoup de femmes en raison notamment des recompositions multiples des familles.
S'il y a bien un questionnement sur la place de la femme ce n'est pas tant dans sa position de belle-mère que tout simplement de conjointe. Ali est faible, peu soucieux de respecter les sentiments de sa nouvelle compagne. Il lui préférera sans état d'âme son ancienne femme lorsque celle-ci souhaitera revenir au foyer, sans doute parce qu'il a été vexé d'avoir été quitté.
La réalisatrice a filmé Rachel dans la moindre nuance de ses émotions et c'est très réussi. Elle effectue un sans-faute absolu, ne s'imposant jamais, sachant se placer en retrait quand la situation devient délicate pour la petite fille, supportant ses remarques, ne trichant pas avec ses sentiments, profitant du moindre instant de bonheur (faire le sandwhich pour désigner un câlin à trois), résistant à la tentation du chantage affectif, expliquant la situation à l'enfant et lui disant au-revoir avec des mots simples et vrais, se réjouissant sincèrement à l'annonce de la grossesse de sa soeur. C'est tout cela qui fait la force du personnage.
Rachel slalome entre tous les risques de conflit et d'affrontement avec l'ex-épouse Alice (Chiara Mastroianni) comme avec son amant. Elle navigue aussi entre désir de maternité et désir d'enfant. Ce qui est fort généreux de sa part c'est qu'elle est tout autant disposée à avoir un bébé avec l'homme qu'elle aime qu'à accepter la petite fille qu'il a déjà. Mais ayant dépassé les 40 ans, elle sait qu'elle est à la veille que ce ne soit plus possible de tomber enceinte. Les dialogues avec son médecin (Frederick Wiseman) sont à ce propos assez savoureux.
Rachel est une femme moderne et responsable, estimant que ce ne serait pas la fin du monde de ne pas avoir d'enfant : Je suis même un peu fière d'appartenir au groupe de celles qui n'en ont pas. Et c'est pas comme si je pensais qu'il fallait en avoir pour être complète. Mais c'est quand même cette immense expérience collective, que le monde entier traverse, et à laquelle je n'ai pas accès.
Elle a l'art de sublimer puisque en tant qu'enseignante elle a la possibilité de faire grandir "les enfants des autres". Le film devient un hommage à toutes celles qui, comme elle, se donne sans compter pour le bonheur de personnes qui ne sont pas de leur chair. Ce portrait de femme est magnifique. C'est une déclaration d'amour aux femmes qui n'ont pas d'enfant. Et la performance de Virginie Effira est encore une fois exceptionnelle.
Rachel est aussi guitariste et la bande-son est très belle avec notamment les fameux accords lyriques de Vivaldi et de la chanson française avec Message personnel de Michel Berger, si bien interprété par Françoise Hardy ou les Eaux de Mars par Georges Moustaki (1973).
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