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La publication des articles est conçue selon une alternance entre le culinaire et la culture où prennent place des critiques de spectacles, de films, de concerts, de livres et d’expositions … pour y défendre les valeurs liées au patrimoine et la création, sous toutes ses formes.

vendredi 4 juillet 2025

Ma cuisine méditerranéenne, Yalah ! de Grégory Cohen

J’avais eu la chance de goûter quelques-unes des spécialités de Grégory Cohen le soir de l’inauguration de OnePlace qui, sur un même lieu, présente toutes sortes de cuisines avec un focus particulier sur la cuisine méditerranéenne qui est le pilier des racines du chef.

Cet endroit s’appelle Yalah et il n’est pas surprenant qu’il soit le sous-titre du livre, ce qui permet aussi de le distinguer de celui de Mohamed Cheikh, vainqueur de l'édition 2021 de Top Chef, qui en a publié un du même intitulé, sur lequel je n’ai pas d’avis car je ne l’ai pas eu entre les mains.

Rien d’étonnant non plus à ce que ce soit ce chemin qu’il nous invite à suivre à ses côtés pour explorer la cuisine méditerranéenne en 66 recettes authentiques, savoureuses et qui plus est équilibrées. De la chakchouka aux keftas en passant par le baba ganoush, les bourekas, la moussaka ou encore le couscous, chaque plat met à l’honneur des ingrédients frais et naturels, avec une place centrale accordée aux légumes, allant jusqu’à prévoir une version végétarienne de la moussaka. Evidemment il sera de notre responsabilité de trouver sur les marchés les meilleures aubergines, des tomates juteuses, des poivrons colorés, de cueillir les herbes aromatiques de nos jardins et de puiser parmi les épices ensoleillées de nos réserves … pour, nous aussi, mettre sur la table une cuisine de partage, goûteuse, saine et nourrissante, et ensoleillée, même en hiver.

On y trouve donc des plats que nous connaissons tous et que nous avons goutés au moins une fois (mais qu’on ne sait pas forcément reproduire) : le houmous, le tzatziki, les falafels, le taboulé, le pain pita, le riz pilaf, la chatchouka, le couscous, le baklava. Mais aussi des recettes moins fréquentes comme le muhammara (p. 37), condiment parfait dans un sandwhich et qui nous transportera en Syrie, l’avgolemono (p. 49), une moussaka végétarienne (p. 91).

Quand le chef prévoit un burger il est composé de viande d’agneau hachée, de légumes de saison et d’une sauce au yaourt épicée (p. 153). La plupart des plats sont familiaux comme le gratin de pâtes qu’on sert en Grèce (p. 124).

Bien entendu vous pouvez aller directement au comptoir de Yalah où je conseillais, dans mon précédent article, de s’installer près d'une niche blanchie à la chaux, les pieds posés sur un des grands tapis qui créé une atmosphère de vacances.
Libre à vous de vous lancer ensuite. Vous aurez toutes les clés. Grâce à ce livre je vais pouvoir me lancer dans la spanakopita (p. 120) dont je m’étais régalée en Crète et que je n’aurais jamais imaginé réaliser. Je ferai découvrir les tacos levantins (p. 147) à ma famille mexicaine dès mon prochain séjour là-bas. Il est évident qu’à la première occasion je me lancerai dans le toum (p. 137) et peut-être oserai-je tenter un harissa maison (p.163) avec les piments que je ramène chaque année de Mexico.

Personne ne m’avait expliqué la technique de la vapeur d’eau finale qui procure son moelleux aux kéfiés (p. 105) et j’ai apprécié la version du plat avec en boulettes de poisson, directement cuites dans la sauce (p. 57).

Si j’ai du zaatar dans mes placards je parierais que la formule de Grégory Cohen (p.165) est plus parfumée, ce que je vais m’empresser de vérifier. Enfin, de tous les desserts, j’ai un penchant pour le mouhalabieh (p. 179) que je n’ai encore jamais fait moi-même. Ce livre m’en donnera l’occasion.

Il est généreux en ce sens qu’il révèle non seulement les recettes mais encore les trucs et astuces qui nous permettront de reproduire les plats les plus emblématiques. Cela aurait suffi à notre bonheur mais Grégory Cohen va plus loin en expliquant ce qu’il ne faut surtout pas faire, en donnant ses petits secrets de chef et en ajoutant même une astuce bonus. Et comme le dressage est essentiel il nous offre son savoir-faire.

Tout est clairement formulé selon une charte graphique d’une simplicité rare en matière de livres de recettes. Je n’ai par contre pas compris pourquoi toutes les recettes n’étaient pas illustrées car il est essentiel d’avoir un aperçu du résultat qui souvent, à lui seul, déclenche l’envie de cuisiner.

La pédagogie est pourtant poussée très loin puisqu’il nous indique comment faire pour obtenir un résultat satisfaisant si nous n’avons pas sous la main tous les ingrédients recommandés. On a donc des alternatives malignes qui nous sauveront la mise. Le ton est celui de la confidence, ponctué d’anecdotes en clin d’oeil aux traditions familiales, aux cuisines de rue, aux marchés bruyants et parfumés d’Athènes et de Tel-Aviv, d’Istanbul à Beyrouth.

Alors, comme il le dit lui-même, Yalah, à nous de jouer ! Suivons-le et laissons libre cours à notre imagination … en suivant le conseil de son ami Vavros : la tradition n’est pas une prison, c’est une inspiration.
Grégory Cohen (en tablier blanc ci-dessus), chef et entrepreneur, créateur de lieux de vie, chroniqueur dans Grand bien vous fasse ! sur France Inter où il partage déjà des recettes simples et conviviales, est à la tête de six restaurants et a fondé le groupe OnePlace. Papa de quatre enfants, il partage sa passion des voyages et de la cuisine à travers ses livres.

Ma cuisine méditerranéenne, Yalah ! de Grégory Cohen, Editions Leduc, Collection Animae, en librairie depuis le 16 mai 2025

jeudi 3 juillet 2025

Boule Vide Son Sac En Public dans un nouvel album

Je ne connaissais pas Boule et je l'ai "rencontré" en écoutant son dernier album, un peu intriguant puisque la pochette au graphisme ultra géométrique prend le contrepied du nom de scène de Cédrik Boulard.

Il a trouvé le juste intitulé pour caractériser l'objet Boule Vide Son Sac En Public.

L'ours polaire (piste 1) commence fort en n'hésitant pas à frôler la vulgarité. Il faut situer ce choix dans le contexte d'un enregistrement en public, essentiellement des amateurs du style particulier de l'artiste, oscillant toujours entre la figue et le raisin.

Avec l'Avion (piste 2), autrement dit Appareil Volant Imitant L’Oiseau Naturelon pense, après la superbe intro musicale menée par la guitare (dans laquelle Boule excelle), écouter une jolie déclaration d'amour mais si on est attentif aux paroles on décryptera vite le second degré à travers l'image de la civière et l'allusion aux anti-douleurs. On entendra aussi la critique d'un monde qui ne se concentre plus sur l'essentiel, à savoir, les sentiments qui peuvent lier deux êtres à jamais. Ce morceau donne le "vrai" ton de l'album, tout en tendresse.

Nouveau revirement de situation avec Le poisson (piste 3) auquel répond, vous l'aurez deviner, Le poison (piste 4) puisqu'il est décidé que Boule soufflera alternativement le chaud et le froid.

Le percolateur (piste 5) est d'une drôlerie crasse. Il faut un sens très aiguisé de l'observation pour l'avoir écrite. L'ironie ne l'effraie pas et le surréalisme pourrait bien être sa philosophie.

J'ai pensé à ce stade qu'il serait judicieux -peut-être- d'aller fouiner du côté de l'origine de la formule "vider son sac" qui aujourd'hui signifie "exprimer le fond de sa pensée", "dire ce qu'on a sur le cœur". Mais, au départ, l'expression, qui vient du milieu juridique, avait un sens beaucoup plus basique. Au XVII° siècle, les avocats rangeaient en effet l'ensemble des documents nécessaires pour plaider dans des besaces et "vider son sac" équivalait à mettre de l'ordre dans les dossiers et à les hiérarchiser. C'est un peu ce que fait Boule dans ce tour de chant au carré après trois années de tournée en solo.

Il retrouve les joies du collectif avec ce quatuor complice et redoutablement efficace : Fabrice Lhomme à la contrebasse, Sonia Rekis à l’accordéon – qui apporte des couleurs de musiques du monde magnifiques – Freddy Holleville aux percussions et lui à la guitare, au banjo et au chant. Ensemble ils revisitent les meilleurs titres de vingt ans d'une carrière menée tambour battant, vingt ans déjà, sans jamais tomber dans la nostalgie, mais en distillant une émotion brute, un humour ravageur et une sincérité désarmante.

Dès les premiers mots Mélanie (piste 10) la tonalité de la voix m'évoque le chanteur wallon Julos Beaucarne, lui aussi un sacré poète, grand conteur, et dont la philosophie de vie reste bouleversante. On peut aussi parfois sentir une atmosphère québécoise. Mais sous les mots jolis le message est terrible puisque sujet est celui des violences faites aux femmes.

La plupart des morceaux sont très dansants. Valse, mazurka ou cha-cha-cha, parfois une bourrée comme on peut encore en danser dans une fête villageoise, ou encore la java pour accompagner Politesses et banalités (piste 12), et même un air de klemzer sur Pensez à voir un psychologue (piste 14).

Les pizzas (piste 13) commence comme une fable écologique avec la probable disparition des mésanges charbonnières. C'est très vite une diatribe contre ceux (et celles) qui bouffent des pizzas en tripotant leur i-phone à la con.

Comme il a raison de pointer les dégâts du train-train et du numérique avec Je ne touche plus (piste 15) qu'il annonce comme une chanson d'amour alors que c'est de désamour qu'il est question.

Et que dire du Loup et le Chien (piste 17), superbe réécriture de la fable de La Fontaine.

Enregistré en public au Trianon Transatlantique de Sotteville-lès-Rouen, le 18 octobre 2024, l’album capture une soirée d’exception : la salle est pleine, l’ambiance brûlante, les rires fréquents, les silences éloquents. Boule, toujours entre deux éclats de rire, alterne chansons marquantes et anecdotes croustillantes, coups de gueule intimes et envolées poétiques. Forcément, il emballe le public. La finesse de ses textes, son humour ravageur et sans concession et sa sincérité évidente en font un artiste particulièrement attachant, sans doute un des plus étonnants de la chanson française.

Une véritable découverte pour moi !

Boule Vide Son Sac En Public
Cedrik Boule : Guitares, banjo
Fabrice Lhomme : Contrebasse
Sonia Rekis : Accordéon 
Freddy Holleville : Percussions
Vache à Lait Productions
Dans les bacs à partir du 24 mai 2025

mercredi 2 juillet 2025

La liste 2 mes envies de Grégoire Delacourt

Je n'avais pas encore lu La liste 2 mes envies quand j'ai rencontré Grégoire Delacourt il y a quelques jours.

Il avait été principalement question au cours de cette soirée animée à la médiathèque d'Antony par Amandine Lochmazeur de son dernier livre, Polaroïds du frère, dont j'ai rendu compte ici.

Depuis, j'ai lu cette Deuxième liste et je suis heureuse de dire que cette lecture est vraiment réjouissante. D'ailleurs je note qu'il emploie deuxième et pas seconde, ce qui pour un puriste de la langue française de son niveau pourrait être signifiant. Cela voudrait-il dire qu’il ne s’interdit pas d’écrire un troisième opus ?

La Liste de mes envies avait connu un succès qu'on peut qualifier de phénoménal avec 1,5 million d'exemplaires vendus pour ce best-seller international traduit en trente-cinq langues, adapté au théâtre, puis au cinéma et qui sera de nouveau sur la scène … cet été en Avignon, à 13 h 30 à l'Ancien Carmel d'Avignon, dans la continuité du Mois Molière versaillais, cette fois dans une interprétation totalement féminine avec Gwénaël Ravaux (relâche les 11 et 18 juillet).

Ce deuxième roman avait véritablement propulsé la carrière de Grégoire Delacourt et il n’était pas question, ni nécessaire, d’écrire une suite. Mais les choses ne s’enclenchent pas forcément dans une logique prévisible … Sont arrivés le Covid et le confinement que l’écrivain estime avoir vécu dans une atmosphère étrange à New-York (où il réside la plupart du temps maintenant). Face à l'ampleur de la pandémie (près de 160 000 cas recensés et plus de 17 000 morts confirmés ou probables), Donald Trump envoya le "USNS" (United States Naval Ship), un navire hôpital de la U.S. Navy de 272 mètres de long pour 70.000 tonnes et d’une capacité de 1000 lits.

A son entrée à Manhattan, le 30 mars 2020, il était survolé par des hélicoptères de chaînes de télé, salué par de grands jets d’eau propulsés depuis les bateaux-pilote de la ville et accueilli dans un silence religieux par le maire de New-York et de nombreux curieux. Grégoire fut lui aussi impressionné par ce colosse marqué d'immenses croix rouges.

Sa mission était d’accueillir les malades non contaminés par le virus mais ayant besoin de soins urgents, donc de soulager les hôpitaux submergés par la crise. Il repartira sans avoir jamais tourné à plein régime et aura traité moins de 200 personnes. Mais on ne le sait pas encore.

L’atmosphère est sinistre. Grégoire avoue avoir besoin (comme beaucoup à l’époque) de légèreté. De plus, il vient d’achever L’enfant réparé et il aimerait préserver sa part joyeuse. Je le comprends pleinement car cet ouvrage m'a bouleversée encore bien davantage que Polaroïds

Il se souvient alors de Jocelyne, la mercière, dont régulièrement les lecteurs lui demandent des nouvelles. Il se dit que ce serait marrant d’aller voir comment elle a évolué. Il décide de repartir mentalement à Arras qui, soit dit en passant est une très jolie ville dont j'adore les grandes places.

Ce fut un exercice difficile de retrouver son phrasé mais palpitant, de nature à provoquer de la joie(car l'aventure est racontée à la première personne mais comme le souligne l’auteur On est qui on veut quand on écrit, donc on peut être une femme)Les phrases en italiques ocre sont celles que que je l’ai entendu dire lors de la rencontre, ou tirées du roman, et dans ce cas le numéro de la page figure entre parenthèses.

Dans La Liste de mes envies, Jocelyne avait gagné dix-huit millions qu'elle refusait d'encaisser. Dans La Liste 2 mes envies, il lui en reste quinze, et un seul désir : les dépenser.

Il est vrai que Grégoire Delacourt réussit, avec cette suite très attendue des lecteurs, son pari des retrouvailles avec cette femme plus surprenante, plus drôle et plus touchante que jamais. De ses années de publicitaire il a conservé l’amour des mots et le formidable talent de les faire surgir inopinément ou de les associer pour créer des métaphores, des oxymores, bref d’enrichir le récit. Pour première preuve le titre du roman qui résonne différemment selon que je l’écris ici ou qu’on le lit sur la couverture. On notera d’ailleurs que le changement d’éditeur (de JC Lattès à Albin Michel) ne se sent pas tant les visuels sont cohérents.

Je me suis dit que Grégoire Delacourt devait se porter mieux, que L’enfant réparé avait été une écriture bénéfique et qu’il pouvait continuer sa route d’écrivain du bon pied.

mardi 1 juillet 2025

J'ai gouté le Vin Gris Coteaux du Vendômois – Tradition du Domaine Brazilier

Le carré gris et le B en relief signant le Domaine Brazilier signalent le type de vin sur une élégante étiquette. Ce Gris Tradition issu du cépage Pineau d’Aunis est typique du Vendomois et la cuvée 2024 ne déroge pas à la règle.

Je l’affirmais déjà il y a quelques semaines dans cette publication : on ne se trompera pas en ayant (en toute modération cependant) le réflexe de penser aux Gris du Vendômois quand on cherche un vin léger, semblable aux rosés.

Je rappelle que le vin gris est une variante du vin rosé, à macération très courte et donc à robe très claire. Celui-ci est d’un rose très pâle et il exprime ces arômes d’épices qui en font toute l’originalité avec un nez fruité, poivré et floral, une attaque fraîche en bouche.

Il a été parfait tout au long d’un menu estival composé d’une salade niçoise revisitée, de médaillons de porc aux petits légumes et d’une assiette de fruits de saison.
Pour la Niçoise, les photos ont valeur d’explication. J’ai assaisonné du riz, des poivrons jaunes et rouges, des radis coupés en bâtonnets, une poignée de haricots verts, des crevettes décortiquées, quelques œufs durs et les inévitables olives noires, sans oublier un hachis de menthe du jardin et de ciboulette.
Le porc a été disposé sur un fond de purée de potimaron et a été accompagné de carottes, petits pois et haricots.
Comme fruits, des tranches d’orange, des fraises et quelques framboises qui répondent très bien aux notes florales de pêche blanche, de pivoine, et de rose.
Vous pourriez le garder jusque 3 ans, mais est-ce indispensable ? Je signale à ceux qui voudraient découvrir ce joli terroir qu’une randonnée est organisée par les vignerons le 31 août prochain (départ à 8 h 45). Le point de rendez-vous est à la Gare du Train Touristique de la Vallée du Loir, 384 bois Quatrevault, 41100, Thoré la Rochette.

Voici le lien pour vous y inscrire ici. La billetterie consiste en une réservation mais l’activité ne donne pas lieu à une facturation.

Domaine Brazilier - Vin Gris Coteaux du vendômois – Tradition 
17 rue des Écoles
41100 Thoré La Rochette
06 07 59 35 46 - vinbrazilier@wanadoo.fr

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