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samedi 8 août 2009

AUSSI ROUGE QUE POSSIBLE, la fin d'un feuilleton

Le 1er août, je commençais une série de billets sur l'exposition que le Musée des Arts décoratifs de Paris consacre à la couleur rouge . Après les sphères du pouvoir, la décoration, le domaine de l'enfance ... et celui aussi, paradoxalement, du danger, voici le rouge dans le monde des plaisirs comme dans celui de l'enfer. Ce sera le dernier épisode de ce feuilleton.

Certains vêtements, ou plus souvent des accessoires, ne révèlent une touche précieuse de rouge qu’en certaines occasions ou sous certaines incidences. Quel que soit l’objet, la doublure intérieure rouge présente ce caractère contradictoire de dissimulation et de mise en valeur. Le rouge concentre alors sa force expressive dans une dimension secrète et précieuse. On peut y voir l’inévitable association avec le sang, omniprésent mais habituellement invisible, caché sous notre peau, à la fois indispensable et signe de vulnérabilité.

Le rouge est la couleur de l’amour et de l’érotisme. Au Moyen Âge, les prostituées avaient l’obligation de porter une pièce de vêtement rouge afin d’afficher leur statut et que les honnêtes faites ne soient pas confondues avec elles. Une lanterne rouge accrochée sur les maisons closes était aussi un signe distinctif.

Le sous-vêtement rouge sans doute banalisé aujourd’hui est toutefois originaire du monde de la prostitution. La femme outrageusement maquillée de rouge a le désir d’attirer les regards. Mais jusqu'en 1920 les femmes "bien comme il faut" ne se maquillaient pas les lèvres. Puis arriva le Rouge baiser qui fit scandale. Il était alors coloré à l'éosine.

La bouche vermillon a d’ailleurs inspiré aussi bien les affichistes comme Gruau (le rouge émet une courte longueur d'onde que l'oeil humain repère très vite) que les designers de mobilier contemporain : ce sont les lèvres de la célèbre actrice Mae West qui ont inspiré le canapé en forme de Bouche, dessiné par Dali et réalisé par le Studio 65.

Jusqu’au XIXe siècle, les vêtements touchant le corps étaient blancs ou non teints. Deux raisons déterminaient ce non-choix ; l’une morale, les couleurs vives étaient considérées comme impures, l’autre matérielle, les linges ne pouvaient bouillir sans se décolorer. Dès le XIXe siècle, les courtisanes adoptent le rouge , rouge des théâtres dans lesquelles elles se produisent, rouge de la luxure. Au XXe siècle, la mode colorée se répand, la femme s’émancipe et les fabricants ou dentelliers s’adaptent à leur clientèle. A la lingerie aguichante et poétique s’ajoutent les artifices du maquillage, du vermillon des lèvres au rouge des pommettes.
Mais le rouge est aussi la couleur des flammes de l’Enfer. Il évoque encore le sang du Christ versé sur la Croix en rédemption des péchés. Pourtant, au XIIIe siècle, l’espace de quelques années les diables ont été bleus sur les vitraux d’Allemagne ; quand les garanciers souhaitaient inverser la montée en puissance des marchands de guède et d’indigo et jeter le discrédit sur eux en bleuissant l’enfer. En Chine le rougeest la couleur du bonheur.

Par leur somptuosité, les pierres précieuses révèlent plus que toutes autres matières les vertus symboliques de la couleur rouge. Les rois et les élites les ont utilisées très tôt dans leurs ornements. Le rubis prit son nom du latin ruber, rouge. Les espèces plus sombres, tendant au brun, portent le nom de grenats, du latin granatum, grain, inspiré de la forme des cristaux. Ces gemmes portant par leur rareté, toute la sacralité du pouvoir, furent utilisées dans de nombreuses œuvres, illustration des oppositions entre la vie et la mort, l’esprit et la matière.

... fin du feuilleton

Musée des Arts décoratifs jusqu'au 1er novembre 2009
107 rue de Rivoli 75001 Paris Tél. : 01 44 55 57 50
Métro : Palais-Royal, Pyramides ou Tuileries
Autobus : 21, 27, 39, 48, 68, 69, 72, 81, 95

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