Milan est un éditeur qui compte dans le secteur de la jeunesse et qui a eu la riche idée de penser aux omnivores culturels pour leur proposer des encyclopédies d'un nouveau genre sous le nom de Milan et demi.
J'ai dégusté celles qui sont consacrées au vin et au fromage. Les titres figurent au singulier sur les couvertures dans une approche très conceptuelle.
Le label publie simultanément ces deux livres tout à fait complémentaires sur deux produits que l’on croit connaître et au sujet desquels on a beaucoup encore à apprendre.
Parlons du Fromage
C'est un domaine que je connais bien. J'ai eu la chance de pouvoir faire des reportages sur plusieurs spécialités, comme le Sainte-Maure, Pont-l'Evêque ou Livarot. J'ai imaginé plusieurs recettes avec le fromage comme ingrédient principal, dont la Météorite d'Ambert avec la fourme du même nom.
Je savais que l’emmental a des trous, à l’inverse du gruyère. Par contre je n'avais jamais entendu parler de la Rigotte de Condrieu (p. 64). J’ignorais que, pour le protéger des attaques d'insectes, le banon était à l’origine enveloppé dans une feuille de vigne, remplacée maintenant par du châtaignier, lequel emballe aussi le Mothais (p. 132).
L'éditeur a donné carte blanche aux Nouveaux fromagers pour mettre en avant une soixantaine de produits. Ces jeunes gens passionnés ont été les premiers, en 2013, a imaginer une box de 4 spécialités pour réjouir les papilles de leurs abonnés. Chaque description est concise mais précise sur l’essentiel. Sachant que le mot fromage est dérivé de forme c'est sans surprise que leur nom soit en rapport avec leur allure. L'origine du mot crottin (p.126 ) est tout de même très étonnante, sans aucun lien avec une crotte. Le Lavort (p. 20) était autrefois moulé dans des moules à boulets de canon. Et qui l’eût cru ... chabichou (p. 134) est une déformation de cheblis qui signifie chèvre en arabe.
Le roquefort est la plus vieille appellation française (1925) tandis que le Brillat-Savarin (p. 36) n'a été créé que dans les années 30.
J'en sais davantage sur les croutes lavées qui m'ont toujours fascinée. Les auteurs m’ont donné envie de découvrir le Niolo (p.94) une brebis à croûte lavée, ... comme l'Echourgnac (p.104) lavé à la liqueur de noix.
Je dois bientôt participer à une dégustation de Selles-sur-Cher (p. 130) et je retiens l’idée de demander une version confite.
Et je saurai désormais reconnaître un Ossau-Iraty fermier d’un laitier selon que la tête de brebis est poinçonnée de face ou de profil.
De nombreuses anecdotes, toutes fondées, ajoutent une pointe de sel à l'ouvrage dont on peut s'inspirer pour agrémenter d'un quizz un moment convivial de dégustation autour d'un plateau de fromages. Par exemple la période de production du Mont d’Or, uniquement du 15 septembre au 15 avril, ou la forme du Neufchâtel (p. 146) destiné à séduire les anglais pendant la guerre de cent ans. Manger du fromage plutôt que faire la guerre, tel pourrait être sa devise.
Talleyrand était un fin connaisseur et son art de la diplomatie a eu des conséquences. Il a popularisé le Brie de Meaux (p. 166) et on lui doit d'avoir sabré la pyramide du Valençay pour ne pas irriter Napoléon.
On apprend aussi comment composer le plateau presque parfait, en tenant compte de la meilleure saison, découper les fromages dans les règles de l’art selon un principe de justice (p. 101) et avec quels pains les servir. Les accords vins-fromages (p.136) sont expliqués avec simplicité. Je n'ai pas été surprise de lire la recommandation de proposer un vin blanc moelleux ou un porto sur une pâte persillée. Par contre je n’aurais pas parié sur un champagne avec un Brillat-Savarin.
Comme vous le constatez les illustrations de Thomas Baas sont modernes et évocatrices de la spécificité de chaque fromage, avec une tendresse et un humour digne de la plus pure tradition affichiste.
Et le Vin ...
Pour traiter ce sujet l'éditeur s'est tourné vers un autre le site Internet e-commerce, celui des Grappes qui a choisi de mettre en avant des producteurs plus que des crus.
Malgré une couverture semblable le volume sur les vins n’obéit donc pas au même principe même s'il suit lui aussi une logique régionale.
Il se démarque des livres-photos et guides pratiques en s'inscrivant dans la démarche de l’agriculture raisonnée et des circuits-courts. Le tour de France qui est proposé au lecteur s'appuie sur les coups de cœur de la plateforme de vente en ligne qui met en relation les vignerons et les consommateurs. Ce qui importe en premier lieu c'est la personnalité et le savoir-faire du vigneron.
Les Grappes en connaissent plus de 700 parmi lesquels ils en ont sélectionné 80. En nous conduisant de domaine en domaine, les auteurs justifient chaque choix avec des arguments précis. Ça fait envie.
Sam Brewster a conçu des illustrations qui sont une invitation au voyage dans les vignes et les terroirs.
Un glossaire des nouvelles pratiques en viticulture et un index des différentes appellations présentées dans le livre figurent en complément à la fin de l'ouvrage. Par contre aucune adresse n'est mentionnée. rendez-vous est donc donné sur le site des Grappes.
Vin, un tour de France des vignerons, présenté par Les Grappes
Fromage, une sélection du meilleur de nos régions, par Les nouveaux fromagers
Tous deux publiés chez Milan et demi, en librairie depuis le 4 octobre 2017
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