Il y a quelques années Charlotte de Turckheim nous racontait déjà une journée chez sa mère. Ce qui est banal pour les Turckheim ne l'est pas du tout pour nous qui n'avons pas pour habitude d'enchainer au quotidien les catastrophes dans une atmosphère burlesque, délirante et hautement improbable.
20 ans ont passé. Elle y retourne. Rien n'est comme avant et pourtant on ressent la même impression.
La maison reste la même, peuplée de personnages exubérants, surprenants, exaspérants et touchants. Les problèmes n'ont pas évolué, la toiture menace toujours de s'effondrer, le frigidaire n'a toujours pas été réparé et les huissiers sont toujours derrière la porte.
Charlotte va devoir planquer les meubles dans une pièce et faire disparaître la porte... qui fera disparaître la pièce... qui fera disparaître les meubles qui sont cachés dedans. Elle qui comptait sur une bonne petite journée de repos va vite déchanter, à mesure qu'on se réjouit de ces mésaventures parce qu'elle sont source de rire pour nous.
Ce one-woman show donne la parole à une kyrielle de personnages. Je me suis demandé combien Charlotte en interprétait ... passant de l'un à l'autre au cours d'une même conversation avec une agilité phénoménale. Elle est en pyjama, en toute logique puisqu'elle est venue chez sa mère pour y faire une grasse matinée. Le décor est suggéré par le discours mais le cadre du cabaret est propice à faire germer notre imagination.
L'ambiance de la salle est douillette. on s'y sent comme dans une bonbonnière, attablés à des guéridons sous la lumière rosée de petits lumignons, veillés par des angelots accrochés à un plafond bleu nuit parsemé d'étoiles. Le rideau de scène carmin pailleté frémit et l'apparition de Charlotte soulève un tonnerre d'applaudissements.
Si la grand-mère part à la découverte du Paris de Mozart, enthousiaste à l'idée de suivre une conférence sur les passerelles entre l'Islam et la Chrétienté. Charlotte n'a rien envie de faire, peut-être à la rigueur lire un livre.
Impossible de se reposer dans cette maison où on entre comme dans un moulin. Les dialogues, concoctés par Charlotte avec la complicité de Bruno Gaccio, un ami de toujours, claquent sans répit, frôlant le surréalisme, mais toujours savoureux de drôlerie, et qui mettent une ambiance folle sur le plateau. Le texte original a été réécrit en lui insuffisant de la modernité sans lui faire perdre sa dimension comique et tendre à la fois parce qu'il était impossible de caricaturer sa famille sans amour.
La comédienne excelle dans les accents, portugais pour camper la femme de ménage, allemand pour caractériser le colocataire. C'est parfois juste un geste ou une mimique qui leur donne chair. Ils viendront tous saluer à la fin de cette journée éreintante.
Il fallait oser reprendre ce spectacle culte. Patrice Thibaud a aidé Charlotte à relever ce défi avec brio.
Une journée chez ma mère
Spectacle co-écrit par Charlotte de Turkheim et Bruno Gaccio
Interprété par Charlotte de TurkheimMis en scène par Patrice Thibaud
A partir du 10 novembre et jusqu'au 31 décembre 2017
Les vendredi et samedi à 20 heures, dimanche à 17 heures
Au cabaret de la Nouvelle Eve
25 rue Pierre Fontaine, 75009 Paris
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