La Conciergerie est principalement dédiée à la mémoire de la reine Marie-Antoinette mais je voudrais rappeler qu'elle accueillit la première femme de notre histoire à avoir été guillotinée, Olympe de Gouges, dont un excellent spectacle retrace les derniers mois au Lucernaire et que je verrais bien interprété ici-même.
Située au cœur de Paris, sur les rives de la Seine, inscrites au Patrimoine Mondial de l’Humanité par l’UNESCO, la Conciergerie est un des plus anciens vestiges du Palais de la Cité, résidence et siège de pouvoir des rois de France au Moyen Âge.
Un concierge, nommé par le roi pour assurer la justice dans le palais, transforme une partie du Parlement de Paris en prison vers la fin du XIV°, transformation à l’origine de l’appellation "Conciergerie". A partir de là elle sera l’une des prisons les plus importantes de Paris, devenant un haut lieu de détention pendant la Révolution française avec l’installation du Tribunal révolutionnaire en mars 1793 dans la Grand’ Chambre du Parlement de Paris, rebaptisée salle de la Liberté.
La première photo montre le bureau du greffier dont le livre dans lequel il enregistrait entrées et sorties est posé sur la table.
Les prisonniers célèbres de cette période sont le comte de Montgomery (1574), Ravaillac (1610), la marquise de Brinvilliers (1676), le légendaire brigand Cartouche (1721), le régicide Damiens (1757) et la comtesse de la Motte (1786), Marie-Antoinette (août 1793).
Dans la nuit du 1er au 2 août la reine, incarcérée depuis dix mois à la prison du Temple, est transférée à la prison de la Conciergerie. Elle y est conduite directement dans une cellule totalement isolée des autres détenues.
Elle y est gardée « à vue » par deux gendarmes, jour et nuit, postés dans sa cellule, derrière un paravent qui ne lui confère pas d’intimité ni la moindre tranquillité. Les hommes vivent leur vie sans retenue, bavardant entre eux, jouant aux cartes et fumant. C’est à peu près la même situation que connue Olympe de Gouges et qui est racontée dans le spectacle auquel je fais référence plus haut.
Le procès s’ouvre le 14 octobre. Outre les reproches liés à la trahison et la dilapidation des fonds de la Nation, l’ex-reine est accusée d’inceste sur son fils, le jeune "Louis XVII". Indignée, elle en "appelle à toutes les mères" et à leur compassion. Le 16 octobre, à quatre heures du matin, après 20 heures de débats ininterrompus, le verdict de mort tombe, suivi de l’exécution à 12h15 place de la Révolution (actuelle place de la Concorde) d’une femme devenue vieillards à seulement 37 ans.
De sinistre réputation, la Conciergerie est souvent perçue comme le nouvel "enfer des vivants", comme on appelait la Bastille avant sa démolition : une antichambre menant inévitablement à la mort, particulièrement pendant la Grande Terreur (avril à juillet 1794). Les suspects, transférés depuis d’autres prisons n’y sont incarcérés que pendant quelques jours en attente de leur comparution devant le Tribunal révolutionnaire.
Parmi eux, les Girondins (députés de la convention mis en accusation par les Montagnards), Antoine Lavoisier (père de la chimie moderne), André Chénier (poète), ou encore Danton, lui-même à l’origine du tribunal révolutionnaire.
De nombreuses femmes sont également jugées pour leurs idées comme notamment Olympes de Gouges (auteure de la déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, guillotinée en novembre 93), Charlotte Corday (meurtrière de Marat) et Manon Roland (femme politique devenue égérie des Girondins).
Enfin, Robespierre, passe ses dernières heures dans la prison et est exécuté le lendemain, sans procès.
Au pire moment de la répression, au printemps 1794, jusqu’à six cents hommes et femmes s’entassent dans des cellules sales et surpeuplées, étroites et obscures. La salle dite "des noms" comporte les patronymes des prisonniers les plus connus et ses murs font froid dans le dos.
Après la Révolution, la Conciergerie demeure une prison, plusieurs fois réaménagée pour des raisons de sécurité, mais aussi pour améliorer un peu les conditions d’incarcération. Les détenus célèbres et ceux considérés comme des menaces particulièrement dangereuses pour l’ordre public s’y succèdent : du chef chouan Cadoudal en 1804 à l’anarchiste Ravachol en 1892, en passant par le maréchal Ney, condamné pour son ralliement à Napoléon Bonaparte en 1815, et même le neveu de ce dernier, Louis Napoléon, futur Napoléon III.
En 1815, les Bourbons reviennent d’exil. Frère cadet de Louis XVI, le nouveau roi Louis XVIII tente de faire oublier la Révolution pour légitimer la restauration de la monarchie (1815-1830). La Conciergerie devient l’un des principaux lieux de la mémoire royaliste.
A la demande du souverain, une chapelle expiatoire est érigée en 1816 en l’honneur de sa belle-sœur Marie-Antoinette, en partie sur l’emplacement de sa cellule mais aussi sur celui d’une autre pièce où Robespierre aurait été incarcéré. Il est émouvant de marcher sur le dallage emprunté par tous ces condamnés.
Au fond de la chapelle, le sanctuaire aux murs noirs, tapissé de larmes d’argent, invite au recueillement. Situé à la place supposée du lit de la Reine, un autel en faux marbre est gravé d’un extrait de la dernière lettre adressée par Marie-Antoinette à sa belle-sœur, Madame Elisabeth, avant de partir à l’échafaud.
Le vitrail aux initiales de Marie-Antoinette et les trois tableaux qui ornent les murs remontent également à l’époque de la Restauration.
Le palais a bénéficié de plusieurs restaurations. La Salle des Gens d’Armes fut la première à retrouver son état d’origine. La Salle des Gardes, débarrassée de ses cachots, prit la suite. Puis de 1820 à 1828, une façade néogothique s’élève entre la tour de l’Horloge et la tour Bonbec. De 1847 à 1871, une façade est érigée sur le boulevard du Palais tandis que la Tour de l’horloge est restaurée.
Malgré toutes ces interventions, l’intégrité du plan d’ensemble des salles médiévales est conservée. De même, la valeur esthétique et l’importance symbolique du Palais de la Cité ont été conservés.
La Conciergerie est classée monument historique en 1862. Une partie du monument se visite à partir de 1914. L’activité carcérale est définitivement suspendue somme toute relativement récemment, en 1934.
C’est un monument qui est désormais ouvert à la visite. On peut y voir en vitrine le fauteuil sur lequel Marie-Antoinette se reposait, posé sur un morceau de tapis de l’époque.
La Conciergerie - 2 boulevard du palais- 75001 Paris
Ouvert toute l’année de 9 h 30 à 18 h
Nocturne le samedi soir jusque 20 h
Fermée les 1er mai et 25 décembre
Billet jumelé possible avec la Sainte-Chapelle
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