L’autre jour nous avons marché dans la ville de Mayenne, puis nous avons abordé sur la Meduana. Nous avons aussi admiré le jardin médiéval de la haute cour du château.
Cette fois nous allons nous attarder dans ses extérieurs avant d’en visiter le musée (qui présente une magnifique Vierge de Senonnes en tilleul polychrome) installé à l’intérieur et l’exposition temporaire du rez-de-chaussée. Il n’y a pas très longtemps c’était un centre en art contemporain jusqu’à ce que des fouilles archéologiques, menées de 1996 à 2000, mettent à jour une résidence carolingienne et surtout une très rare collection de jeux de pions des X-XII° siècles qui est désormais exposée dans la aula.
Elle sera traitée dans un article spécifique. Et puis je vous dirai aussi un autre jour où déjeuner pour moins de 20€. De quoi vous donner envie d’y programmer un séjour.
J’aurais dû commencer par une photo du porche qui permet d’accéder à la cour parce que j’ai dû marcher devant sans en remarquer l’entrée. J’ai d’ailleurs renseigné plusieurs touristes ensuite en fin de matinée, preuve que je ne suis pas stupide à ne pas avoir compris qu’il fallait passer par là et traverser un jardin avant de le trouver.
Par contre le marché médiéval programmé le soir-même était parfaitement fléché. A croire que la signalétique temporaire est mieux conçue que la permanente. Une plaque explicative (il faut espérer que les promeneurs la lisent) explique qu’au Moyen-Age, le château était un lieu difficile à attaquer du fait qu’il est érigé intentionnellement en hauteur, sur un éperon rocher, avec un autre obstacle naturel qu’est la rivière. Il n’empêche qu’une basse cour est construite au XIII° pour améliorer encore sa défense et surtout protéger la population en cas d’attaque. En temps de paix le lieu accueille les marchés et les foires artisanales (comme ce soir le marché médiéval). Elle est entourée de remparts et de 14 tours défensives dont la majeure partie est encore repérable aujourd’hui.
Le parc actuel est aménagé au XIX°, conduisant au fond, au château dans lequel le musée met en valeur le passé depuis le X° siècle.
Nous voici donc devant la tour-porte. La pointe de l’éperon rocheux sur lequel s’élève le château est coupée par un rempart, précédé d’une douve sèche, large d’une quinzaine de mètres, aujourd’hui dégagée sur plus de la moitié de son tracé. L’entrée s’y trouvait, en son centre, depuis probablement le XII° siècle. Une passerelle de bois démontable (visible sur la première photo) permettait de franchir la douve. Ce personnage qui veille au-dessus du mur est une œuvre d’art, placée le temps d’une exposition, et qui finalement y est demeuré.
L’entrée a été renforcée par une tour-porte de plan rectangulaire vers le milieu du XIII°. Sa base talutée se prolonge par un glacis appliqué contre la base du rempart. La tour comportait au moins un étage, comme le montre l’ouverture surmontant la porte du côté de la cour. Les archères, visibles sur les côtés, sont identiques à celles de la grosse tour cylindrique qui domine le logis, construite à la même époque.
Vers l’extérieur, l’accès était défendu par une herse dont la rainure a été retrouvée, et par une porte qu’on bloquait, vers l’intérieur, par une poutre coulissant dans l’épaisseur du mur. Ayant franchi cet obstacle, l’assaillant se trouvait sans doute arrêté par une seconde porte, sous une ouverture dans le plafond, ou assommoir par laquelle les défenseurs, réfugiés à l’étage de la tour, pouvaient l’agresser.
A la fin du XIV° ou du XV° une plate-forme plus étroite a été construite en avant de la tour, pour recevoir un pont-levis, remplaçant la passerelle d’origine.
Les meurtrières ne laissait filtrer qu’un peu de lumière et le passage d’une arbalète.
Les murs portent les traces des évolutions successives du Château de Mayenne au cours des siècles : résidence seigneuriale, château fort, prison. Il est une des rares résidences seigneuriales carolingiennes encore visible en Europe. La salle de réception, la tour d’habitation et le cellier y sont très bien conservés. Il est devenu une puissante forteresse au XIII°. A la fin du XVII° c’est une prison. En 1826, de nouveaux aménagements sont entrepris afin d’accueillir plus de prisonniers. La prison fermera en 1934. Le rempart en pierres est interrompu, à gauche du porche d’entrée primitif, par une maçonnerie de briques.
Il s’agit du fond de l’âtre d’une cheminée qui doit dater du X° siècle comme le mur et comme le porche. Une seule autre existe en france dans un édifice carolingien de Doué-la-Fontaine.
Sitôt sa construction achevée le palais a été doté d’une enceinte fermant une tour. L’accès se faisait près d’un des angles de la cour, face au palais, par un porche couvert d’un arc en briques qui est donc le porche d’entrée primitif (ci-dessus). Puis, probablement deux siècles plus tard, l’entrée de la cour a été déplacée de 20 mètres vers le sud pour être au centre de cette face du rempart.
Ces fenêtres d’un bâtiment qui a disparu sont dites géminées, caractéristiques des ouvertures qu’on pratiquait au XII° dans les bâtiments civils et militaires. Elles encadraient une cheminée dont on devine la présence par un appareillage différent du reste du mur. La salle qu’elle chauffait pouvait être la nouvelle salle de réception (aula) des seigneurs de Mayenne.
Entrons dans le château qui est un exemple exceptionnel de palais carolingien construit au X° siècle. Salle de réception, tour et cellier y sont remarquablement conservés.
Le hall du musée accueille une exposition temporaire venant de Toulouse dont l’objectif est de faire comprendre aux enfants comment faire parler le passé. Il faut l’imaginer grouillant d’enfants endossant la veste d’archéologue sous la direction d’animateurs patentés.
Une vitrine retrace, à l’aide d’une étonnante et remarquable collection de personnages Playmobil les différentes époques historiques, de la plus ancienne, en bas, au monde contemporain, en haut.
Je ne m’attarderai maintenant que sur les objets de la vie quotidienne de cette époque conservés dans le musée. La visite (libre) commence par un plan de situation en relief expliquant l’évolution de la ville au fil des siècles par l’éclairage successif de différentes parties révélant l’essor de la ville.
Un escalier permet d’accéder à un espace qui se trouvait initialement à l’extérieur du bâtiment carolingien. Il fut bien plus tard englobé dans la prison. Il ne constituait cependant pas un sous-sol et était comblé de terre jusqu’en 1990. Une porte communique avec la crypte aménagée sous la cour.
Parmi les objets exposés j’ai remarqué ce fer à cheval (à gauche) de mulet (à droite) qui montrent bien la différence anatomique des deux animaux.
Cet anneau et les fragments de cottes de mailles sont assez émouvants tant ils sont anciens.
Dans cette vitrine, des entraves (énormes) pour les pieds des prisonniers sont placées derrière les menottes qui étaient utilisées lorsqu’on devait les faire se déplacer.
J’ai retenu cette vitrine parce que sur la gauche se trouvent des pions de jeux dont la présence prouve que, même en prison, on jouait. Ils étaient grossièrement taillés dans des fragments de poterie ou d’ardoise, témoignant de l’occupation des gardiens comme des prisonniers. Un peu plus loin sont juxtaposés une bille, un gros pion en ardoise et un domino.
On peut aussi admirer la complexité de très belles serrures de coffres (non photographiées). Cette clochette était utilisée pour l’ouverture du marché aux toiles.
Une des pièces les plus émouvantes est pour moi cette Vierge de Senonnes, réalisée par un anonyme, au XI-XII° siècle, en tilleul polychrome, restaurée en 2014 pour la présenter au public, et dont une video de 4 minutes permet de discerner les repeints successifs.
Malgré l’état de conservation on peut distinguer les vêtements de la Vierge, caractéristiques du costume féminin de l’époque romane. Le visage est encadré par une guimpe, un voile léger qui retombe sur le cou. Un second voile, assez court, de forme arrondie, recouvre la chevelure et créé un pli volumineux sous le menton. Le tout est maintenu par une couronne. Le vêtement se compose de plusieurs pièces superposées : une chemise (une chainse), une robe (un bliaut), un manteau (paenula) et une capeline. L’extrémité des manches resserrées de la chemise est visible au niveau des poignets. La robe possède des manches très allongées qui retombent le long du trône. Le manteau est ouvert de façon symétrique sur le buste et on aperçoit l’extrémité de la manche droite au niveau de l’avant-bras. Enfin une capeline recouvre les épaules dont on observe un large pli plat sur l’épaule droite.
Après être descendue dans le soubassement carolingien (où je n’ai rien remarqué d’exceptionnel) j’ai suivi la video qui a été conçue pour nous aider à déchiffrer mille ans d’histoire. Nous sommes dans la aula, c’est-à-dire le hall de réception du palais carolingien, nous explique une voix off. Elle poursuit en expliquant qu’on pouvait y entrer par trois portes qui vont être soulignées d’un trait de couleur.
Après avoir appris que, à l'époque, c’était un plafond de bois, voilà que s’éclaire une première porte.
La seconde porte apparaît, soulignée de rouge. Puis la troisième …
Bien entendu il faut activer notre imagination pour comprendre comment la pièce fut divisée en deux cachots au XIX°. Nous accédons ensuite au premier étage par l’escalier du donjon percé de meurtrières.
Ce retable est en bois peint début XVI° provenant d’une église rurale, sans doute Saint-Mars-sur-Colmont. Il représente le calvaire.
On reconnaît le Christ, Marie-Madeleine, Marie, À l’arrière, l’âme du bon larron est emmené au ciel par un ange. A droite, Saint Jean est accompagné par le donateur (un religieux en surplis). Un groupe de cavaliers est placé devant la croix du mauvais larron, dont un diable rouge saisit l’âme. Au dessus de la croix, quatre panneaux retracent le sacrifice d’Abraham. Sur le dais, des anges tiennent un phylactère, un voile et les instruments de la Passion.
L’artisanat de la poterie connut un grand essor autour de Laval après la Guerre de cent ans. Un nouveau mode de cuisson fut élaboré rendant les vases plus durs et plus imperméables. La céramique qui en résulte et dont voici un exemple est appelée la « rose-bleue » en raison de ses couleurs, intérieur gris bleu, extérieur rose ou orange. On les rencontrera jusqu’en Anjou et dans le Poitou. Du XV° au XVII° les productions lavalloises résistèrent à la concurrence des grès normands, céramiques légères et très dures, obtenues à haute température. Certaines étaient achetées par des producteurs de beurre bretons pour leurs exportations, notamment vers la Normandie.
Sont également exposés plusieurs pièces comme ce mortier à oeil de perdrix, classique du XIV° et typique du Bas-Maine, quoique les anses ornées d’un masque soient rares.
Musée du château de Mayenne - Place Juhel - 53100 Mayenne
Ouvert tous les jours de 10 à 18 h en juillet et août
Les autres mois il est fermé les lundis, sauf fériés
Et ouvert du mardi au dimanche de 10h-12h30 / 14h-17h (ou 18 h de mars à juin, septembre & octobre)
Je signale que le stationnement est gratuit place Juhel.
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