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jeudi 30 novembre 2023

Dégustation de Crus de la Vallée du Rhône de la Maison Vidal-Fleury

(Mise à jour 3 décembre 2023)
Antoine Dupré, directeur depuis 2020 de la Maison Vidal-Fleury, avait donné rendez-vous à La Bonne Franquetteà un petit groupe, pour découvrir les derniers millésimes, la veille de l’ouverture du Grand Tasting Paris 2023, organisé par Bettane + Desseauve au Carrousel du Louvre.

La tranquillité et l’authenticité d'un cadre comme ce bistrot emblématique de Montmartre où j’étais venue il n’y a pas longtemps, pour la remise des Prix Pudlo, convenait parfaitement pour approcher plusieurs crus de cette maison qui est la plus ancienne maison de la vallée du Rhône, encore en activité. Elle se dresse au cœur du prestigieux vignoble de Côte-Rôtie, à 30 km au sud de Lyon, sur les bords du Rhône.

Fondée en 1781, elle propose l’une des plus larges gammes de Crus de la Vallée du Rhône, dont elle est spécialiste, avec une vingtaine d’appellations parmi les plus prestigieuses de cette Vallée, aussi bien en Blancs qu’en Rouges et même Rosés. Tous se rassemblent derrière une unicité de design dans l’étiquetage, présentant systématiquement le blason comportant le bleu de la maison depuis sa création, l'ancre qui évoque le Rhône, l'outil avec lequel on déserte la Côte-rotie, et en bas, ce fameux vignoble stylisé et arrosé par un soleil ardent.

S’agissant des Blancs, quatre appellations étaient proposées :
- Un Crozes-Hermitage blanc 2021 (Marsanne 95% et Roussanne 5%), que je déguste en premier lieu et apprécie pour robe jaune pâle avec des éclats dorés, la fraicheur de son nez, son parfum, ses arômes de fleurs blanches avec des notes de melon blanc et de poire et sa finale citronnée. Je l’associerai dans quelques jours avec un saumon rôti aux épices.
- Un Saint-Joseph blanc 2022 (Marsanne 70% et Roussanne 30%), plus aromatique encore que le précédent. Cette appellation se développe sur une succession de terrasses granitiques qui surplombent le fleuve sur une cinquantaine de kilomètres. Elle aussi jaune pâle avec des reflets dorés. Le nez révèle des arômes de nectarines et d’écorces d’orange. L’élevage en fûts de chêne donne de la complexité au bouquet avec des notes de fruits secs et de noix de coco. Le milieu de bouche présente un bel équilibre et la finale est remarquable sur des notes fraiches et épicées.
- Un Condrieu 2021 (Viognier 100%) bien entendu exceptionnel, comme tous les vins réalisés avec ce cépage unique qui lui confère une belle acidité naturelle et une complexité aromatique intéressante. Son nez est frais et fruité mêlant touche florale et note de fruits à coque (noisette, amande). Sa bouche, vive puis structurée, est dominée par des arômes d’abricot et de pêche. La persistance aromatique garantit une belle longueur alors que la finale arrive tout en douceur.
Le Condrieu est l’un de ces vins qui est entré dans le Top Ten de mes préférences dès l’instant où je l’ai découvert pour la première fois. Je l’ai choisi ici pour accompagner l’entrée à cause de la présence du bleu, et sachant qu’il supporterait la vinaigrette.
- Un Saint-Péray 2022 (Marsanne 100%) que je n‘ai alors pas goûté, parce que je savais que plusieurs Rouges attendaient.

S’agissant des Rouges, sept appellations étaient proposées :
- Un Chateauneuf-du-pape 2020 (Grenache 85% , Syrah 10% et 5% Mourvèdre) que je n’ai pas dégusté
- Un Gigondas 2020 (Grenache 75%, Syrah 10% et Mourvèdre) aux superbes arômes de fruits noirs
- Un Crozes-Hermitage rouge 2022 (Syrah 100%), un peu moins puissant que le précédent
- Un Saint-Joseph rouge 2020 (Syrah 100%), pour qui aime les vins tanniques
- Un Cornas 2020 (Syrah 100%), qui est un vin que je ne connaissais pas. Les vignes poussent sur du granit et le vin exprime en conséquence une forte minéralisé. On peut dire qu'il a du mordant.
- Un Côte-Rotie Brune & Blonde 2020 (Syrah 95%, Viognier 5% pour lui conférer du soyeux)
- Un Côte-Rotie Côte Blonde La Chatillonne 2018 (Syrah 88%, Viognier complanté 12%)
Comme "toujours", nous avons procédé classiquement par cette dégustation à l’horizontale avant de dîner en nous focalisant sur une seule appellation, la plus noble, véritable étendard de la maison, la Cote-Rotie Côte Blonde La Chatillonnedans trois millésimes 2017, 2007 et 2006 car ce vin a de très belles possibilités de garde.
J’adore ce vin et je sais très bien qu’il est à juste tire l’orgueil de la maison. Il est cultivé sur des pentes pouvant atteindre les 70% (que tout amateur de vin rêve de découvrir un jour) et cette verticalité en fait le vignoble le plus difficile à travailler de tout le territoire français. Yves Camdeborde en parle dans la bande dessinée Frères de terroirs en citant un autre producteur, car ils sont 63 à en exploiter une parcelle. Il retrace les désastres subies par ces vignobles (p. 37), suite à la Première Guerre mondiale et le phylloxéra. En 1953, il ne restait plus que 57 hectares exploitables, le reste étant retourné à l'état sauvage. Faire pousser des légumes rapportait alors plus que le vin.

C’est à une vraie tentation qu'Antoine Dupré nous soumet pour comparer trois millésimes mais, en sage épicurienne, j’ai eu envie de revenir à un blanc pour accompagner la salade de l'entrée.
Sur le paleron de bœuf, ç’aurait été une offense que de retenir une autre appellation que la Côte rôtie. Nous avions les trois propositions devant nous dans trois verres contenant la même robe rubis. Chacun de nous exprima sa préférence en terme d’années. Il est vrai que plus la bouteille a de l’âge et plus le vin s’est développé.
La Bonne Franquette a ceci de particulier qu’elle a conservé non seulement son charme et son cachet d’origine (qui se remarque au premier coup d’œil à sa décoration) que sa spécificité de bistrot, justifiant totalement le trophée de la transmission attribué à Luc et son père Patrick Fracheboud.

La cuisine n’y a qu’une prétention, celle d’apaiser l’appétit de la clientèle, en s’accordant aux vins qu’elle choisit pour accompagner le repas. La promesse des devises affichées est claire : aimer manger, boire et chanter. Et si le piano resta fermé ce soir, le guitariste Charly nous accompagna avec son sourire, et son répertoire. Nous avons été reçus comme des amis.
La Côte-rotie révélait des saveurs de noisette sur le Saint-Nectaire et bien entendu sublimait la poire. D’une manière générale, le 2007 s’avère encore frais et le 2006 pourra attendre encore quelques années avant que n’explosent ses arômes de sous-bois. Pour le moment, il est déjà très appréciable pour ses tanins soyeux.

Antoine Dupré, qui est à la tête de la Maison Vidal Fleury depuis trois ans, s’est attaché à la région et son admiration pour la diversité et la complexité de ses différents terroirs le pousse à toujours aller plus loin dans la modernisation et la recherche de l’excellence des vins, ce qui lui vaut chaque année plusieurs distinctions internationales.
Il avait choisi l'endroit à bon escient. C’est assez surprenant de constater combien l’endroit peut s’adapter pour convenir aussi bien aux grandes manifestations qu’aux tablées intimes. Et j’imagine que l’ambiance est encore différente en période estivale quand ce sont les touristes qui sont majoritaires.

La Bonne Franquette, 18 Rue Saint-Rustique (ou 2 rue des Saules), 75018 Paris
Ouvert tous les jours
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Quelques jours plus tard, j'avais l'occasion de déguster le Crozes-Hermitage avec un saumon rôti en croute d'épices et un riz blanc.

Cette appellation fait partie des prestigieux crus de la vallée du Rhône septentrionale où Marsanne et Roussanne donnent le meilleur d’eux-mêmes.

La robe est jaune pâle avec des éclats dorés. Le nez est frais. Les arômes de fleurs blanches se combinent avec des notes de melon blanc et de poire. On observe une minéralité prononcée qui convient très bien avec le poisson comme la finale citronnée. En bouche, la pêche blanche se transforme en note miellée avec une petite pointe de sel.
Maison Vidal-Fleury, 48 Route de Lyon, 69420 Tupin-et-Semons
Téléphone : 04 74 56 10 18

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