On entend le bruit des machineries d’ascenseur alors qu’on s’installe au Théâtre Fontaine pour ce spectacle Plus haut que le ciel qui nous raconte la naissance plutôt chaotique de ce monument devenu incroyablement parisien qu’est la Tour Eiffel.
L’usage du mapping est tout à fait approprié pour situer chaque scène dans les usines Eiffel de Levallois ou, plus tard, sur le champ de Mars.
Outre la qualité de l'interprétation, l'intelligence de la mise en scène, la beauté des costumes, des décors astucieusement modulables, j'ai apprécié d'apprendre le rôle des uns et des autres. On ressort du théâtre en regrettant que l'histoire ait juste retenu le nom d'Eiffel et il était légitime de réhabiliter la mémoire des ingénieurs Maurice Koechlin et Émile Nouguier ... et de Claire, la fille de Gustave, dont j’ignorais complètement l’implication dans ce projet. Et il est intéressant de lui donner vie.
1884, Paris. Deux ingénieurs présentent un étrange projet à l’assistant de Gustave Eiffel. Aberrante, incompréhensible, inutile, la tour qu’ils proposent de bâtir est immédiatement refusée : monsieur Eiffel n’a pas le temps, il est trop occupé par l’écrasante gestion de sa société. Mais il est difficile de balayer d’un geste l’idée du siècle, surtout quand au même instant Claire Eiffel cherche l’étincelle qui redonnera à son père le goût du rêve, de l’aventure et de l’exploit !
Au départ il ne s’agissait que d’utiliser la structure d’un pont pour construire "vers le haut" ce que avec beaucoup d’humour les personnages principaux surnomme "le pylône". Mais techniquement c’est une tour et, qui plus est, devrait être interprétée comme étant l’opposé de la Statue de la Liberté qui, à l’époque, était le monument si je puis dire le plus en vogue, et que l'on doit à Maurice Koechlin.
J’ignorais que Gustave Eiffel était bourguignon. le sachant, il est bien entendu logique qu'il adore le coq au vin. Je n'imaginais pas qu'il ait pu se plaindre d’être en en manque d’inspiration et de ne plus créer grand chose après l’inauguration d’une passerelle à Évreux, que j’ai d’ailleurs vue il y a quelques années.
Évidemment, le nerf de la guerre c’est l’argent et la bataille financière pour permettre aux projets de voir le jour est tout à fait judicieuse. Il est intéressant également d'apprendre que les riverains avaient porté plainte. Il ne fait pas de doute que la construction n'entraînant pas l'enthousiasme à ce stade.
Mais surtout l’interprétation est très enlevée avec des personnages juste à la limite de la caricature, sans jamais être ridicules, bien au contraire, et qui donnent à ce spectacle toute sa saveur.
Il est vrai que 347 marches pour atteindre le premier étage sans ascenseur, c’était une gageure. Mais Gustave Eiffel aura l'idée de génie d'ajouter un ascenseur. L'homme n’apparait pas au départ comme un patron très progressiste. Son évolution est d'autant plus passionnante à la fin du spectacle.
Les scènes sont très courtes, très rythmées. Le spectacle s'échafaude à l'instar de la construction du monument. On a beau connaître l’issue de l'histoire (qui se termine comme on l’imagine), l’action est prenante. et on tremble en apprenant les embuches successives, comme les menaces de grève et la demande d’une cantine. L'architecte aura l’idée de génie de l’installer sur la tour pour le confort des ouvriers ... et pour leur faire gagner du temps.
Elle sera inaugurée en portant la couleur de l’antirouille ... pour l’éternité croyait-on mais cependant elle changera de couleur plusieurs fois. Et je crois savoir qu'une nouvelle teinte est prévue pour son prochain anniversaire. Car elle a déjà 130 ans.
Quelques répliques sont savoureuses : Sans danger pas de bravoure ! C’est si beau vu d’en bas. C’est si haut vu d’en bas !
Je n'avais pas remarqué le surtitrage mais voilà un atout supplémentaire à ce spectacle qui est aussi accessible à tous les âges.
Plus Haut que le CielUne pièce de Florence et Julien Lefebvre
Mise en scène Jean-Laurent Silvi, assisté de Nastassia Silve
Décors Margaux Van Den Plas
Lumières Eric Milleville
Costumes Frédéric Olivier
Musique Romain Trouillet
Du 17 octobre 2019 au 19 janvier 2020
Du mercredi au dimanche 19h00
Au Théâtre Fontaine - 10 rue Pierre Fontaine - 75009 Paris
Location : 01 48 74 74 40
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