C'est la première année que je peux suivre le défilé de la Fête du Mimosa de Saint-Trojan-les-Bains (17) sur l'île d'Oléron. Elle a eu lieu ce dimanche 18 février 2024 au terme de deux jours de festivité qui ont attiré les habitants et les touristes en grand nombre.
Il y a eu l’avant-veille un concert gratuit de la Philharmonique Oléronaise en l’église de Saint-Trojan-les-Bains et d’une brocante / vide-grenier dans les rues du village.
Les animations ont commencé en fin de matinée dans les rues du centre-ville mais le point d’orgue était le Grand Corso Fleuri composé d’une vingtaine de tracteurs et de chars décorés par du mimosa en fleurs, de bandas et de troupes costumées;
Le cortège s’est ébranlé à 14 h boulevard Pierre Wiehn en direction de la rue de la République, a poursuivi rue du Port et s’est engagé boulevard de la Plage jusqu’à la salle des fêtes où des musiques et des danses folkloriques ont clôturé l’après-midi tandis qu’une fête foraine se déroulait tout le week-end place du Maréchal Leclerc.
La longueur du parcours se justifie par l’attente de 20 000 à 40 000 personnes, malgré une météo capricieuse. Je n’ai supporté que le vent et un petit crachin mais ceux qui sont arrivés tardivement ont carrément dû sortir le parapluie. J’admire la persévérance des milliers de personnes qui se groupaient en bordure de route et des participants qui ont tant travaillé à préparer leurs chars et qui marchaient en costume fragile ou pire, les bras et jambes nus.
On vient de loin, de toute de toute la Charente-Maritime, la Vienne, les Deux-Sèvres, ou de Charente, et il faut s’organiser pour stationner loin de la zone de défilé, car la route principale est fermée à la circulation par sécurité plusieurs heures avant le début de la manifestation. Il n’est pas commode d’accéder, même à bicyclette. Il faut dire que la Cavalcade du Mimosa est une institution très populaire qui, théoriquement marque la fin de l’hiver depuis … sa création en 1959.
Quand j’en parle autour de moi, loin d’Oléron, la surprise est systématique. Les gens pensent que le mimosa ne pousse que sur la côte méditerranéenne. Certes, cet arbre n’a pas toujours existé sur l’île mais il y fleurit et embaume la région depuis plus de 150 ans et il en est devenu un des symboles forts.
Le mimosa appartient au genre des Acacias qui comprend environ 1200 espèces d'arbres ou d'arbustes. La plupart des variétés de mimosas que nous cultivons en Europe ont été importées dans les années 1820 du sud de l'Australie par des botanistes anglais. Il n'est arrivé sur le littoral méditerranéen qu'en 1864 d'où il fut expédié dans toutes les grandes villes de France et d'Europe.
C'est ainsi qu'il arriva à peine plus de trente ans plus tard sur Oléron. C'est à Nicolas Martin (1840-1922), savoyard de naissance, et sa femme Gertrude née Testard (Saint-Trojanaise de souche), que l'on doit l'introduction des premiers plants de mimosa à Saint-Trojan, en automne 1892.
Le couple arrivait de Cannes où il avait fait carrière dans le même établissement hôtelier : lui en tant que cocher, elle comme femme de chambre. Ils ramenèrent des plants pour embellir la villa L'Hermitage, qu'ils venaient d'acquérir. Ils se développèrent vite grâce au microclimat de Saint-Trojan les Bains, avec au moins 3 heures quotidiennes de soleil et des sols assez pauvre et surtout bien drainés voire secs.
Fort de cette réussite, Nicolas Martin implanta d'autres pieds au centre du village et orna sa seconde maison, rue Omer Charlet, qu'il appela "Les mimosas". La commune lui rendit hommage en 1952 en baptisant de son nom une rue située quartier des Gaules, où avait été créé (dans les années 1931-1932), la plus grande mimoseraie de Saint-Trojan-les-bains, sur les terrains de la Société Immobilière de la Pointe de Manson dont Jules Vinsous, architecte, était directeur. Depuis cette zone a été urbanisée.
La création d'une nouvelle mimoseraie fut décidée, sur un terrain communal situé dans le quartier des Bris, à la suite du gel qui sévit sur 3 années consécutives (1985 à 1987) afin de redonner au mimosa la place qu'il occupait dans la cité et pour disposer des fleurs nécessaires à l'organisation de la Fête du Mimosa.
80 pieds furent plantés en mars 1990, afin d'obtenir une floraison échelonnée du 15 Janvier au 15 Mars. De nouveaux plants furent rajoutés en 1995, portant à 110 le nombre de pieds de mimosas. Des plantations diverses : saules, peupliers, érables, vergnes prunus y ont été adjointes pour la protection des mimosas contre les vents du nord et d'est, mais aussi pour éviter que le terrain reste nu en cas de grand gel, en attendant la repousse. Les arbres sont surveillés en raison de leur sensibilité à la cochenille australienne (Icerya Purchasi) et de son prédateur, la coccinelle (Novius cardinalis), australienne elle aussi.
Il existe plusieurs variétés intéressantes comme Le Gaulois, Le Mirandole, ou encore Rêve d'or, enfin le Mimosa des quatre saisons (Acacia retinodes), qui fleurit deux fois par an, une fois en hiver et une fois en automne. Mais c'est surtout la variété mimosa d'hiver (Acacia dealbata), qui est un hybride, que l'on trouve sur Oléron.
Cette Mimosacée est vivace, fleurit de Décembre à Mars et peut monter jusqu'à 10 mètres de haut (30m dans sa contrée d'origine en Australie). Il se plante et se rempote au printemps et automne. Ses fleurs sont jaunes, parfumées (utilisées pour les parfums). Son feuillage est persistant du vert au bleu, ce qui est un atout supplémentaire. Il est rustique mais supporte mal des températures en dessous de 10°C. Sa croissance est rapide, de 30 à 60 cm par an et il est conseillé de le tailler après floraison en ne coupant que les rameaux ayant fleuri. Symbole fort de la culture Saint-Trojanaise, la fleur de mimosa représente la magnificence, l'élégance, la simplicité, la tendresse et l'amitié. Elle évoque la lumière et l'espoir, même dans les moments les plus sombres de l'histoire. C'est pour cette raison que, depuis 1946, et malgré une apparente fragilité, le mimosa est l'emblème de la journée de la femme.
Pour sa 65ᵉ édition, la fête a repris un format classique, après deux ans sans festivités à cause de la crise sanitaire et une version allégée l'an passé. La participation active des diverses associations locales a joué, comme par le passé, un rôle moteur dans la réussite de la fête. Certaines conçoivent des chars, décorent les chars loués, réalisent des déguisements et le jour J, tous les bénévoles animent avec bonne humeur le corso fleuri. Ce fut l'occasion de mettre en valeur le patrimoine local, notamment gastronomique, comme l'oignon Saint-Turjan dont j'ai déjà parlé dans cet article.
Les peluches étaient bien présentes pour réjouir les enfants ainsi que les clowns.
Sans oublier les traditionnels groupes folkloriques comme les Déjhouqués, de Grand Village Plage, fondés par André Botineau.
Ou la branche oléronaise des Saint Georges qui, à l'initiative du maire de Saint Georges sur la Prée (dans le Cher) a eu idée de proposer en 1988, de rassembler les communes de France (mais aussi d'Italie et de Belgique)ayant ce nom pour patronyme commun, 79 communes qui se retrouvent chaque année dans l'une d'elles, ce qui donne l'occasion de découvrir la diversité des paysages, des traditions, de la gastronomie, de défiler derrière leur animal totem, le dragon puisque Saint Georges a la réputation de l'avoir terrassé.
Evidemment les chars, tirés par des tracteurs, petits trains ou voitures furent très applaudis et en retour nous reçûmes des volées de confettis.
Le Corso Fleuri, ce n'est pas en effet pas seulement des chars, comme celui, ci-dessus à droite, du Foyer rural de Saint Denis d'Oléron, mais également des groupes costumées, et des formations musicales plus ou moins exubérantes parmi lesquelles on reconnaissait la Philharmonique oléronaise sans oublier les célébrités locales comme Miss Oléron et sa dauphine :
Certaines sponsorisées comme l'orchestre du café-brasserie La Corniche de La Rochelle :
Les évocations de carnavals mythiques comme Rio ou Venise :
Les associations sportives étaient particulièrement à l'honneur en raison du thème imposé cette année, celui des Jeux Olympiques.
Voici le Tennis-club de Saint-Trojan-les-Bains et la Société des Régates de Saint-Trojan dont la première remonte à 1896 à l'occasion de l'inauguration du Sanatorium par le Président de la République Félix Faure.
Et puis Oléron VTT, le groupe de Capoeira Arte Negra fondé par Mestre Ze Mario et les majorettes de Segonzac, puis Les amis du Tigre qui pratiquent le Gong/Taï-Chi avec leur très long bâton.
Certains chars hissaient haut les couleurs de l'olympisme et des jeux paralympiques.
Tous les âges étaient représentés, depuis la Crèche parentale Boule de Gomme en passant par les Ecoliers du Bout de l'Ile (une association de parents d'élèves de St Trojan et Grand Village)
Les médias s'étaient déplacés en masse pour "couvrir" l'évènement et on assistait à des interviews cocasses car il était hors de question de s'arrêter de marcher.
Reconnaissables à leur blouson bleu ciel, de multiples bénévoles, parfois élus, ont fait en sorte que les chars puissent avancer sans risques pour les admirateurs. Ils ont contenu l'enthousiasme des visiteurs avec diplomatie.
La couleur dominante était évidemment le jaune, même si le soleil a boudé la manifestation et on espère que les touristes auront été convaincu par le caractère bon enfant qui règne sur l'île, pas seulement en été.
Office de tourisme, avenue du port - 17370 Saint-Trojan-les-Bains - 05.46.85.65.23.
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