La photo n'a pas été prise à Gaza, et l'eau qui coule au pied de ces immeubles n'est pas la mer. Mais, en ce début de soirée, l'image était belle. On se serait cru très loin, pas à Paris en tout cas. Et pourtant l'avant-première était programmée dans la capitale, au cinéma MK2 quai de Loire, non loin de la passerelle où Arletty a immortalisé sa gueule d'atmosphère dans le film de Carnet, Hôtel du Nord. Sauf que la scène avait été tournée en studio ...
La magie du cinéma !
Une bouteille à la mer est un titre déjà utilisé par Luis Mandoki en 1998. Il se trouve que c'est, en raccourci, presque l'intitulé d'un roman que Valérie Zenatti avait publié en 2005 à l'École des loisirs, plus précisément Une bouteille dans la mer de Gaza, et qui va être réédité avec l'affiche du film en guise de couverture.
Synopsis :
Malgré la forme épistolaire du roman, Thierry Binisti avait immédiatement vu des images, mais il se doutait qu'une collaboration très étroite serait nécessaire avec son auteur. Ils ont de fait travaillé la main dans la main, comme rarement au cinéma. Ils co-signent le scénario qui est une transposition très libre, parfois un peu éloignée du roman afin de montrer comment on vit des deux cotés. Tant qu'à faire d'être trahie, autant le faire soi-même, dit en riant Valérie.Dans ses précédents livres elle avait déjà soutenu les deux légitimités, même si elles se heurtent dans la douleur. Elles ne sont pas incompatibles à ses yeux et la jeune femme estime que c'est une question de temps. Le conflit est long mais "de basse intensité" comme le jugent les politologues. Il n'empêche qu'il lui arrive de passer, comme elle le dit elle-même "de l'espoir au découragement, et de se sentir pleine de colère". Mais on ne peut pas renoncer à vouloir un monde meilleur. C'est pourquoi un livre, et maintenant un film comme celui-ci est si important, pour rappeler simplement que derrière tout conflit il y a des êtres comme vous et moi qui voudraient juste vivre leur vie.
La collaboration s'est étendue aux repérages, au tournage, au mixage, au montage et bien entendu au choix des comédiens. Naïm est interprété par Mahmoud Shalaby qui jouait déjà dans Jaffa et des Hommes libres. A noter que Jaffa avait été programmé dans le Festival Paysages de Cinéastes il y a deux ans, et que j'en avais brièvement rendu compte. Valérie rêvait que sa mère soit interprétée par Hiam Abbass, jusqu'à ce que le hasard la fasse la rencontrer dans un café parisien, et qu'elles deviennent amies.
Il n'y a pas de symétrie entre les personnages. Ils n'appartiennent pas aux mêmes milieux sociaux. Et le film n'est pas une ultime version de Roméo et Juliette. La relation entre Naïm et Tal est a priori impossible, mais leur "rencontre" est authentique. Elle est aussi métaphorique de l'entente qui pourrait -qui pourra- advenir entre les deux pays ... avec encore beaucoup d'années de patience sans doute. Parce que, comme le juge un des personnages, le conditionnel est un temps indispensable pour les Palestiniens.
Pour des questions de sécurité et de risque d'enlèvement, Israël ne laisse entrer aucun israélien à Gaza. Le film a donc été entièrement tourné en Israël sur une période courte de 35 jours, et avec un planning très dense de 14 heure de travail journalier. L'équipe était mixte et Gaza a été reconstituée dans des villes arabes israéliennes. Par contre, et c'est une première dans l'histoire du cinéma, ils ont bénéficié d'une autorisation de tournage exceptionnelle pour la séquence du passage d'Erez, entre Gaza et Israël. Avoir pu sortir en quelque sorte de la fiction sur ce lieu même du vrai Check Point est hautement symbolique.
Un des mérites du film est aussi d'avoir réussi à transposer un roman pour adolescents en une écriture cinématographique capable de concerner un public d'adultes, et d'avoir aussi une dimension universelle. Car aller vers l'autre c'est se regarder aussi.
Une des différences majeures c'est la place que le mail prend à la lettre. En signifiant aussi qu'Internet est le pigeon voyageur du XXI° siècle.
On est surpris par les images. Parce qu'on est loin de penser que les vagues puissent être si belles sur la cote de Gaza, d'un vert turquoise très tendre, qu'il puisse y avoir autant de vent et que la lumière soit si blanche.
Le rôle de la langue française est intéressant. Au-delà de l'aspect rendu obligatoire pour des raisons de coproductions il faut remarquer que la France est l'unique représentation étrangère à Gaza par l'intermédiaire du Centre culturel français. Et puis Tal est d'origine française. En étant le tiers qui permet de se parler cette langue apporte une vraie respiration. La manière qu'a notamment la mère de Naïm de lui demander, à un moment crucial de lui dire quelque chose en français est tout à fait emblématique de cette dimension affective.
Quant à la jeune Pascale Bonitzer, elle a une manière de jouer qui rappelle Charlotte Gainsbourg, dont un poster orne d'ailleurs sa chambre.
Valérie est un auteur que j'aime beaucoup même si j'en parle peu sur le blog, me limitant souvent à faire référence à un livre ou un autre, à l'occasion d'un billet sur le Salon du livre ou une autre manifestation. C'est à peine si je lui ai consacré quelques lignes à propos de sa collaboration à Il va y avoir du sport mais je reste tranquille et je suis heureuse d'avoir ici eu l'occasion de chanter ses louages alors qu'elle n'est pas à coté de moi, respectant ainsi la mise en garde du Talmud.
La sortie d'Une bouteille à la mer, programmée initialement sur les écrans pour le 28 décembre est reportée au 8 février. Le film a déjà reçu 2 prix et 8 nominations dans plusieurs festivals.
La magie du cinéma !
Une bouteille à la mer est un titre déjà utilisé par Luis Mandoki en 1998. Il se trouve que c'est, en raccourci, presque l'intitulé d'un roman que Valérie Zenatti avait publié en 2005 à l'École des loisirs, plus précisément Une bouteille dans la mer de Gaza, et qui va être réédité avec l'affiche du film en guise de couverture.
Synopsis :
Tal est une jeune française de 17 ans dont la famille s'est installée à Jérusalem. L'explosion d'un kamikaze dans un café de son quartier la révolte et la pousse à agir, à sa manière. Elle écrit une lettre à un Palestinien imaginaire à qui elle exprime ses interrogations et son refus d'admettre que seule la haine peut régner entre leurs peuples. Elle glisse cette lettre dans une bouteille qu'elle confie à son frère, militaire près de Gaza. Quelques semaines plus tard elle reçoit un mail de Naïm, le mystérieux "Gazeman" ...Comme beaucoup de réalisateurs, Thierry Binisti cherche régulièrement à travers les livres quel pourrait être son prochain projet. Le livre de Valérie avait canalisé son désir de comprendre le conflit israélo-palestinien et raconter une histoire portant ces interrogations qui l'animaient depuis ses précédents films. Il a par ailleurs réalisé, dans un tout autre registre Oh boy ! en 2007 pour la télévision.
Malgré la forme épistolaire du roman, Thierry Binisti avait immédiatement vu des images, mais il se doutait qu'une collaboration très étroite serait nécessaire avec son auteur. Ils ont de fait travaillé la main dans la main, comme rarement au cinéma. Ils co-signent le scénario qui est une transposition très libre, parfois un peu éloignée du roman afin de montrer comment on vit des deux cotés. Tant qu'à faire d'être trahie, autant le faire soi-même, dit en riant Valérie.Dans ses précédents livres elle avait déjà soutenu les deux légitimités, même si elles se heurtent dans la douleur. Elles ne sont pas incompatibles à ses yeux et la jeune femme estime que c'est une question de temps. Le conflit est long mais "de basse intensité" comme le jugent les politologues. Il n'empêche qu'il lui arrive de passer, comme elle le dit elle-même "de l'espoir au découragement, et de se sentir pleine de colère". Mais on ne peut pas renoncer à vouloir un monde meilleur. C'est pourquoi un livre, et maintenant un film comme celui-ci est si important, pour rappeler simplement que derrière tout conflit il y a des êtres comme vous et moi qui voudraient juste vivre leur vie.
La collaboration s'est étendue aux repérages, au tournage, au mixage, au montage et bien entendu au choix des comédiens. Naïm est interprété par Mahmoud Shalaby qui jouait déjà dans Jaffa et des Hommes libres. A noter que Jaffa avait été programmé dans le Festival Paysages de Cinéastes il y a deux ans, et que j'en avais brièvement rendu compte. Valérie rêvait que sa mère soit interprétée par Hiam Abbass, jusqu'à ce que le hasard la fasse la rencontrer dans un café parisien, et qu'elles deviennent amies.
Il n'y a pas de symétrie entre les personnages. Ils n'appartiennent pas aux mêmes milieux sociaux. Et le film n'est pas une ultime version de Roméo et Juliette. La relation entre Naïm et Tal est a priori impossible, mais leur "rencontre" est authentique. Elle est aussi métaphorique de l'entente qui pourrait -qui pourra- advenir entre les deux pays ... avec encore beaucoup d'années de patience sans doute. Parce que, comme le juge un des personnages, le conditionnel est un temps indispensable pour les Palestiniens.
Pour des questions de sécurité et de risque d'enlèvement, Israël ne laisse entrer aucun israélien à Gaza. Le film a donc été entièrement tourné en Israël sur une période courte de 35 jours, et avec un planning très dense de 14 heure de travail journalier. L'équipe était mixte et Gaza a été reconstituée dans des villes arabes israéliennes. Par contre, et c'est une première dans l'histoire du cinéma, ils ont bénéficié d'une autorisation de tournage exceptionnelle pour la séquence du passage d'Erez, entre Gaza et Israël. Avoir pu sortir en quelque sorte de la fiction sur ce lieu même du vrai Check Point est hautement symbolique.
Un des mérites du film est aussi d'avoir réussi à transposer un roman pour adolescents en une écriture cinématographique capable de concerner un public d'adultes, et d'avoir aussi une dimension universelle. Car aller vers l'autre c'est se regarder aussi.
Une des différences majeures c'est la place que le mail prend à la lettre. En signifiant aussi qu'Internet est le pigeon voyageur du XXI° siècle.
On est surpris par les images. Parce qu'on est loin de penser que les vagues puissent être si belles sur la cote de Gaza, d'un vert turquoise très tendre, qu'il puisse y avoir autant de vent et que la lumière soit si blanche.
Le rôle de la langue française est intéressant. Au-delà de l'aspect rendu obligatoire pour des raisons de coproductions il faut remarquer que la France est l'unique représentation étrangère à Gaza par l'intermédiaire du Centre culturel français. Et puis Tal est d'origine française. En étant le tiers qui permet de se parler cette langue apporte une vraie respiration. La manière qu'a notamment la mère de Naïm de lui demander, à un moment crucial de lui dire quelque chose en français est tout à fait emblématique de cette dimension affective.
Quant à la jeune Pascale Bonitzer, elle a une manière de jouer qui rappelle Charlotte Gainsbourg, dont un poster orne d'ailleurs sa chambre.
Valérie est un auteur que j'aime beaucoup même si j'en parle peu sur le blog, me limitant souvent à faire référence à un livre ou un autre, à l'occasion d'un billet sur le Salon du livre ou une autre manifestation. C'est à peine si je lui ai consacré quelques lignes à propos de sa collaboration à Il va y avoir du sport mais je reste tranquille et je suis heureuse d'avoir ici eu l'occasion de chanter ses louages alors qu'elle n'est pas à coté de moi, respectant ainsi la mise en garde du Talmud.
La sortie d'Une bouteille à la mer, programmée initialement sur les écrans pour le 28 décembre est reportée au 8 février. Le film a déjà reçu 2 prix et 8 nominations dans plusieurs festivals.
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