Hold on, c’est ce qu’on entend au téléphone en Angleterre pour signifier « ne quittez pas » mais la traduction littérale, « accrochez-vous » apporte une dimension supplémentaire à cette création qui a été présentée à l'Onde.
Trois comédiens installés en triangulaire dans un espace épuré de 6 mètres sur 6, dessiné comme un ring ,vont alternativement endosser le casque du salarié télé-acteur ou le poser pour jouer le rôle du chef de groupe-manager.
Alors que le leader mondial, qui a multiplié les plans sociaux ces dernières années, promet un « environnement de travail le plus professionnel et le plus agréable possible », affirmant se soucier fortement du bien-être de son capital humain, le spectacle conçu et mis en scène par Anne Astolfe démontre le contraire. Sans aucune surprise aucune pour tous ceux qui ont travaillé de près ou de loin dans la publicité, le marketing et les études de marché.
Dans le télémarketing, la standardisation commence par l’identité. Qu’on soit homme ou femme, chacun s’appelle Dominique. Une dépersonnalisation qui permet de mettre ses scrupules à distance pour faire du chiffre sans scrupules. Ils sont 500 000 en France si on compte les emplois stables comme les précaires. Certains rentrent dans ce moule ultra-standardisé et font carrière dans ce mode d'organisation sans y perdre leur âme. D'autres ne résistent pas à ces nouveaux Temps modernes, craquent et vont jusqu'à se suicider.
Anne Astolfe, qui signe ici sa première mise en scène, a posé un regard aiguisé, pas tendre mais proche de l'humain, pour que les gens puissent se reconnaitre et offrir aux spectateurs un spectacle grinçant, et noir sur une réalité contrastée.
Sa démarche n'est pas militante. L’objectif n’a jamais été de montrer un documentaire, mais bien de donner un constat avec suffisamment de décalage pour offrir au spectateur la possibilité d'en rire et de se poser des questions. Et si le matériau est vrai on reste toujours dans le théâtre.
Les téléopérateurs sont appelés télé-acteurs. Ils doivent suivre un texte à la lettre, qu’ils lisent sur un prompteur. L’open space est comparable à une scène de théâtre. Souvent, pour sortir du carcan ciselé par le contrôle, la concurrence et l’évaluation permanente, certains se fixent d’autres contraintes, de paroles cette fois, un peu à la manière des oulipiens. Comme par exemple de parvenir à glisser tel ou tel mot incongru dans leur argumentaire.
Les comédiens se sont immergés dans le milieu pour mieux le connaitre, se livrant à une démarche de terrain comme les sociologues l’envisageaient dans le secteur automobile dans les années 70.
Ils ont expérimenté cette réalité, certes brièvement, mais suffisamment, pour ensuite travailler en improvisation et en écriture collective une architecture de spectacle qui tienne en 1 heure 10 au sein d’une structure qui s’appelle le LAABO un texte qui reflète la vérité, les conséquences de ce type de management et les formes de résistance pour ne pas y perdre son âme alors qu’il semble inéluctable de perdre pieds dans l’absurdité des règles de rentabilité où il faut sans cesse répéter les mêmes gestes, se battre pour la prime de fin de journée, être performant, améliorer sa note, attendre la pause de 12 secondes ou même y renoncer, tricher parfois pour être bien vu dès que cela devient vital.
On pense aussi bien sur à l’Augmentation de Georges Perec, dans la mise en scène d’Anne-Laure Liégeois, à la Méthode Grönholm qui fut donnée au théâtre Tristan Bernard la saison dernière, et au Quai de Ouistreham de Florence Aubenas.
C’est drôle, percutant, extrêmement dynamique puisque le texte n’est pas encore figé et que certains passages ne sont pas fixés. Ainsi le troisième comédien à recevoir la contrainte lexicale ignore quel mot il ou elle devra placer (ce soir c'était gratin dauphinois), ce qui induit une dose de stress comparable à la réalité du terrain. Julie Deliquet, Pascale Fournier et Gaëtan Gauvain méritent tous nos applaudissements pour leur performance.
La pièce pose de vraies questions sur la taylorisation des métiers du secteur tertiaire, sur l’infantilisation de leurs salariés et l’absurdité dans laquelle notre société court à sa perte. On sent que les dialogues n'ont pas été inventés. En voici un bref florilège :
Trois comédiens installés en triangulaire dans un espace épuré de 6 mètres sur 6, dessiné comme un ring ,vont alternativement endosser le casque du salarié télé-acteur ou le poser pour jouer le rôle du chef de groupe-manager.
Alors que le leader mondial, qui a multiplié les plans sociaux ces dernières années, promet un « environnement de travail le plus professionnel et le plus agréable possible », affirmant se soucier fortement du bien-être de son capital humain, le spectacle conçu et mis en scène par Anne Astolfe démontre le contraire. Sans aucune surprise aucune pour tous ceux qui ont travaillé de près ou de loin dans la publicité, le marketing et les études de marché.
Dans le télémarketing, la standardisation commence par l’identité. Qu’on soit homme ou femme, chacun s’appelle Dominique. Une dépersonnalisation qui permet de mettre ses scrupules à distance pour faire du chiffre sans scrupules. Ils sont 500 000 en France si on compte les emplois stables comme les précaires. Certains rentrent dans ce moule ultra-standardisé et font carrière dans ce mode d'organisation sans y perdre leur âme. D'autres ne résistent pas à ces nouveaux Temps modernes, craquent et vont jusqu'à se suicider.
Anne Astolfe, qui signe ici sa première mise en scène, a posé un regard aiguisé, pas tendre mais proche de l'humain, pour que les gens puissent se reconnaitre et offrir aux spectateurs un spectacle grinçant, et noir sur une réalité contrastée.
Sa démarche n'est pas militante. L’objectif n’a jamais été de montrer un documentaire, mais bien de donner un constat avec suffisamment de décalage pour offrir au spectateur la possibilité d'en rire et de se poser des questions. Et si le matériau est vrai on reste toujours dans le théâtre.
Les téléopérateurs sont appelés télé-acteurs. Ils doivent suivre un texte à la lettre, qu’ils lisent sur un prompteur. L’open space est comparable à une scène de théâtre. Souvent, pour sortir du carcan ciselé par le contrôle, la concurrence et l’évaluation permanente, certains se fixent d’autres contraintes, de paroles cette fois, un peu à la manière des oulipiens. Comme par exemple de parvenir à glisser tel ou tel mot incongru dans leur argumentaire.
Les comédiens se sont immergés dans le milieu pour mieux le connaitre, se livrant à une démarche de terrain comme les sociologues l’envisageaient dans le secteur automobile dans les années 70.
Ils ont expérimenté cette réalité, certes brièvement, mais suffisamment, pour ensuite travailler en improvisation et en écriture collective une architecture de spectacle qui tienne en 1 heure 10 au sein d’une structure qui s’appelle le LAABO un texte qui reflète la vérité, les conséquences de ce type de management et les formes de résistance pour ne pas y perdre son âme alors qu’il semble inéluctable de perdre pieds dans l’absurdité des règles de rentabilité où il faut sans cesse répéter les mêmes gestes, se battre pour la prime de fin de journée, être performant, améliorer sa note, attendre la pause de 12 secondes ou même y renoncer, tricher parfois pour être bien vu dès que cela devient vital.
On pense aussi bien sur à l’Augmentation de Georges Perec, dans la mise en scène d’Anne-Laure Liégeois, à la Méthode Grönholm qui fut donnée au théâtre Tristan Bernard la saison dernière, et au Quai de Ouistreham de Florence Aubenas.
C’est drôle, percutant, extrêmement dynamique puisque le texte n’est pas encore figé et que certains passages ne sont pas fixés. Ainsi le troisième comédien à recevoir la contrainte lexicale ignore quel mot il ou elle devra placer (ce soir c'était gratin dauphinois), ce qui induit une dose de stress comparable à la réalité du terrain. Julie Deliquet, Pascale Fournier et Gaëtan Gauvain méritent tous nos applaudissements pour leur performance.
La pièce pose de vraies questions sur la taylorisation des métiers du secteur tertiaire, sur l’infantilisation de leurs salariés et l’absurdité dans laquelle notre société court à sa perte. On sent que les dialogues n'ont pas été inventés. En voici un bref florilège :
Allez-y, c’est aussi un divertissement et vous pourrez toujours vous dire que c’est du théâtre. Du vrai.De (18 à 70 ans) et entre (18 et 70) c'est pas pareil ...
La seule question bête est celle qu'on ne pose pas.
Souris, cela s'entend au téléphone.
Suis ton script et trouve ta liberté dedans !
Arriver à l'heure ne suffit pas. A raison de deux secondes de décalage, matin et soir,
ce sont 40 000 appels perdus au bout de plusieurs mois.
Et continuez à suivre la programmation de l'Onde qui persiste à débusquer des spectacles qui interrogent.
Clip étape de travail Hold On/Le LAABO nov 2010 par LeLaabo
Après l’Onde Théâtre et Centre d’Art - Vélizy-Villacoublay, les mardi 8 et mercredi 9 novembre (21h) la tournée passera le samedi 12 (21h) et le dimanche 13 novembre (15h) au Théâtre Jean Vilar – Suresnes, le mardi 15 novembre (14h30 et 19h30) au Théâtre Paul Eluard - Choisy-le-Roi, les jeudi 17 (14h30 et 20h30), vendredi 18 (20h30) et samedi 19 novembre (20h30) au Centre culturel Gérard-Philipe -Champigny-sur-Marne. Ce sera ensuite le vendredi 25 novembre (21h) à L’Arc en Ciel - Théâtre de Rungis, le vendredi 2 décembre (20h30) à La Merise – Trappes, le mardi 6 décembre (20h) à l’Auditorium de Coulanges - Gonesse / Festival Théâtral du Val d’Oise, le jeudi 8 décembre (14h et 20h45) au Théâtre du Vésinet.
Pour plus de renseignements : contact Fabienne Labat, LE LAABO 27, rue Karl Marx 94500 Champigny-sur-Marne, 06 18 10 37 20 / lelaabo@gmail.com
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