Comme je l'écrivais précédemment, travailler en famille permet de contrôler le process et de garantir une qualité d'état d'esprit.
Le terme de famille est d'ailleurs à entendre au sens large parce que dans les cuisines de Jean Coussau règne un véritable esprit de troupe. Ce n'est pas un chef qui a besoin de crier pour se faire entendre. Je m'y suis rendue plusieurs fois, sans prévenir, et j'y ai toujours été accueillie avec le sourire.
Un autre point est essentiel et il est devenu crucial.
C'est ce qu'on appelle le sourcing, autrement dit les approvisionnements.
Jean y a toujours fait attention et cela lui semble naturel. Comme ce ne l'est pas partout j'ai trouvé utile de le pointer.
C'est ce qu'on appelle le sourcing, autrement dit les approvisionnements.
Jean y a toujours fait attention et cela lui semble naturel. Comme ce ne l'est pas partout j'ai trouvé utile de le pointer.
Des champignons odorants
Il suffit d'être un peu attentif pour remarquer la livraison de magnifiques champignons : des cèpes parfumés ramassés tout près, des girolles dans un camaïeu d'oranges (c'est plus fort que moi je pense toujours aux récoltes que nous faisions dans les bois avec mon grand-père et la vision de ce champignon - quand il ne provient pas des pays de l'est- est émouvante), trompettes de la mort toutes noires, pieds de mouton si reconnaissable à ses aiguillons, morilles des pins à l'allure d'éponge. Le panier trônera quelques heures en salle avant de rejoindre la cuisine. Rien n'égale les saveurs des champignons sauvages.
Il suffit d'être un peu attentif pour remarquer la livraison de magnifiques champignons : des cèpes parfumés ramassés tout près, des girolles dans un camaïeu d'oranges (c'est plus fort que moi je pense toujours aux récoltes que nous faisions dans les bois avec mon grand-père et la vision de ce champignon - quand il ne provient pas des pays de l'est- est émouvante), trompettes de la mort toutes noires, pieds de mouton si reconnaissable à ses aiguillons, morilles des pins à l'allure d'éponge. Le panier trônera quelques heures en salle avant de rejoindre la cuisine. Rien n'égale les saveurs des champignons sauvages.
Jean a raison d'être fier de son producteur de foies gras de canard parce qu'il lui réserve le meilleur. Voilà pourquoi il ne fait pas d'oie, parce que c'est un oiseau plus fragile, qu'il faudrait de surcroit gaver trois fois par jour. L'oie que nous trouvons sur les tables françaises provient donc à 90% de Hongrie. Christian Pussacq apporte personnellement de très belles pièces de plus d'un kilo, chaque semaine depuis 20 ans. C'est l'occasion à chaque fois de discuter avec le chef qui le comprend comme un frère ... derrière un accent fortement enraciné dans son terroir.
Le plateau est impressionnant mais ne représente qu'une petite partie de ce qui est livré chaque semaine (jusqu'à 35 foies en août). Presque toute sa production arrive au Relais de la Poste de Magescq. D'abord parce que Jean Coussau a besoin d'un (très) grand nombre de pièces. Ensuite parce que Christian Pussacq n'élève pas une flopée de canards. Pas plus de 1200 par an, exclusivement du Mulard. Les animaux sont nourris de pur maïs, cultivé par ses soins, en circuit fermé et ne lui demandez pas s'il songe à faire pousser une variété OGM.
L'éleveur est intarissable sur sa passion. On devine combien il aime son métier ... et ses bêtes qui vont et viennent en liberté sur un parcours herbeux avant de rentrer le soir dans les cabanes. Les canard ne sont pas stressés. Rien d'étonnant à ce que les magrets soient fermes. Et que les foies aient de la consistance, offrant de la mâche en bouche et surtout ne "déchettant" pas, c'est-à-dire qu'ils ne rendent pratiquement pas de graisse à la cuisson, que Jean Coussau peut mener selon la recette codifiée par son père il y a près de soixante ans.
Tous les deux répondent à la rumeur lancée par les industriels prétendant que le poids idéal d'un foie ne pourrait pas excéder 600 grammes ... tout simplement parce que leurs producteurs sont incapables de faire mieux (et même pas plus de 400 grammes quand il s'agit d'élevages situés en Bulgarie). Christian Pussacq obtient un résultat tout à fait différent parce qu'il n'élève pas en batterie. Ses canards sont âgés de 14 semaines quand les grosses structures commencent le gavage à 12 et qu'il prend le temps de les gaver ... lui-même ... deux fois par jour, et beaucoup plus longtemps : 18 jours contre 12 dans l'industrie ... comment nommer autrement la pratique des multinationales du foie gras qui rêveraient de parvenir à étrangler les petits producteurs ? Evidemment le coût de revient n’est pas le même. Mais le résultat non plus.
Christian élève ses canards par cohorte de 300 canards en les choyant quand les grosses propriétés montent à 1000 ... pour un seul gaveur. Jean Coussau réfute les polémiques autour de la souffrance animale en rappelant que le gavage est un phénomène naturel, remarqué dans l'Antiquité en observant que l'oiseau migrateur se gavait l'été pour disposer de suffisamment de graisse début octobre avant d'entamer sa migration. Il compare le canard sauvage à un athlète de haut niveau parce qu'il est capable de traverser la France avec la seule force de ses ailes. Il reconnait évidemment que le gavage en batterie est condamnable et souhaiterait qu'il soit interdit. Un rêve quand on songe au poids du lobbying des grandes maisons !
Jean Coussau a besoin de qualité aussi pour garantir la réussite d'une spécialité emblématique du Relais de la Poste, le traditionnel foie gras de canard chaud aux raisins que sa nièce Clémentine sait désormais préparer aussi bien que lui. C'est le seul plat à ne jamais être sorti de la carte. Il sera cuit au four 23 minutes à 200°. Vous avez bien lu. Jean ne parle pas de basse température et ne craint pas de retrouver le foie baignant dans la graisse quand il ouvrira la porte du four.
Il est sûr à tous les coups du résultat et raconte volontiers combien il a épaté un aéropage de MOF à l'école Ferrandi lorsqu'il en a fait la démonstration. Gageons qu'ils modifieront leur conception !
Le foie rendra un peu de graisse, mais pas plus. Il n'est pas davantage nécessaire de le déveiner. Une fois cuit et refroidi il pourra être découpé en superbes tranches de belle taille, et surtout d'une fermeté exceptionnelle. Sa chair sera longue en bouche, avec surtout une véritable mâche.
Il ne restera "plus" qu'à le réchauffer dans une sauce préparée à base de fonds de canard, et de raisins de Corinthe (sans leur peau) qu'on aura fait crever dans le Jurançon doux et un peu de Porto et qui auront cuit 4 à 5 heures à petits bouillons ... et le secret, il me le donne, c'est un soupçon de piment.
Jean cuisine le foie de diverses manières, réservant l'épilobe en terrine. J'y reviendrai. Il a aussi plusieurs recettes avec les magrets, eux aussi très gouteux. Et si vous voulez déguster les produits de Christian Pussacq il vous faudra venir à Magescq parce que l'éleveur ne fait que du frais, aucune conserve.
Locavore depuis plus d'un demi-siècle
On attendra la saison de la truffe pour voir revenir 4 à 5 plats qui la célébreront. On attendra patiemment les légumes, à commencer par des petits pois, grands comme une larme, qui démarrent sous serres et bien entendu les fameuses asperges blanches des Landes, d'avril à juin.
Pareillement pour la lamproie puis le saumon. On comptait il y a 150 ans 200 pêcheurs professionnels. Ils ne sont plus que 15 aujourd'hui à pêcher encore le saumon sauvage de l'Adour. Jean reçoit en direct des pièces qui pèsent souvent 7 kilos du 1er mars au 1er juin. Imaginez le légèrement grillé, servi avec une vraie béarnaise.
Le relais est livré par deux fournisseurs de pain. Le classique vient d'en face. Les autres sont faits avec une farine du Gers, à base de maïs.
Jean Coussau privilégie systématiquement les producteurs locaux et on comprend qu'il affirme : je suis plus heureux ici qu'à Paris. Même les agrumes de l'époustouflant dessert en trompe-l'oeil (Marmelade Citron Meyer et Kumquat, Crémeux et Sorbet Citron) ont poussé dans le sud-ouest, chez Thierry Dupouy, pépiniériste spécialisé dans les agrumes à Eugénie-Les-Bains.
Vous le découvrirez sur la table dans l'épisode 3 de cette saga.
Des poissons et des crustacés archi-frais
Le plateau est impressionnant mais ne représente qu'une petite partie de ce qui est livré chaque semaine (jusqu'à 35 foies en août). Presque toute sa production arrive au Relais de la Poste de Magescq. D'abord parce que Jean Coussau a besoin d'un (très) grand nombre de pièces. Ensuite parce que Christian Pussacq n'élève pas une flopée de canards. Pas plus de 1200 par an, exclusivement du Mulard. Les animaux sont nourris de pur maïs, cultivé par ses soins, en circuit fermé et ne lui demandez pas s'il songe à faire pousser une variété OGM.
L'éleveur est intarissable sur sa passion. On devine combien il aime son métier ... et ses bêtes qui vont et viennent en liberté sur un parcours herbeux avant de rentrer le soir dans les cabanes. Les canard ne sont pas stressés. Rien d'étonnant à ce que les magrets soient fermes. Et que les foies aient de la consistance, offrant de la mâche en bouche et surtout ne "déchettant" pas, c'est-à-dire qu'ils ne rendent pratiquement pas de graisse à la cuisson, que Jean Coussau peut mener selon la recette codifiée par son père il y a près de soixante ans.
Tous les deux répondent à la rumeur lancée par les industriels prétendant que le poids idéal d'un foie ne pourrait pas excéder 600 grammes ... tout simplement parce que leurs producteurs sont incapables de faire mieux (et même pas plus de 400 grammes quand il s'agit d'élevages situés en Bulgarie). Christian Pussacq obtient un résultat tout à fait différent parce qu'il n'élève pas en batterie. Ses canards sont âgés de 14 semaines quand les grosses structures commencent le gavage à 12 et qu'il prend le temps de les gaver ... lui-même ... deux fois par jour, et beaucoup plus longtemps : 18 jours contre 12 dans l'industrie ... comment nommer autrement la pratique des multinationales du foie gras qui rêveraient de parvenir à étrangler les petits producteurs ? Evidemment le coût de revient n’est pas le même. Mais le résultat non plus.
Christian élève ses canards par cohorte de 300 canards en les choyant quand les grosses propriétés montent à 1000 ... pour un seul gaveur. Jean Coussau réfute les polémiques autour de la souffrance animale en rappelant que le gavage est un phénomène naturel, remarqué dans l'Antiquité en observant que l'oiseau migrateur se gavait l'été pour disposer de suffisamment de graisse début octobre avant d'entamer sa migration. Il compare le canard sauvage à un athlète de haut niveau parce qu'il est capable de traverser la France avec la seule force de ses ailes. Il reconnait évidemment que le gavage en batterie est condamnable et souhaiterait qu'il soit interdit. Un rêve quand on songe au poids du lobbying des grandes maisons !
Jean Coussau a besoin de qualité aussi pour garantir la réussite d'une spécialité emblématique du Relais de la Poste, le traditionnel foie gras de canard chaud aux raisins que sa nièce Clémentine sait désormais préparer aussi bien que lui. C'est le seul plat à ne jamais être sorti de la carte. Il sera cuit au four 23 minutes à 200°. Vous avez bien lu. Jean ne parle pas de basse température et ne craint pas de retrouver le foie baignant dans la graisse quand il ouvrira la porte du four.
Il est sûr à tous les coups du résultat et raconte volontiers combien il a épaté un aéropage de MOF à l'école Ferrandi lorsqu'il en a fait la démonstration. Gageons qu'ils modifieront leur conception !
Le foie rendra un peu de graisse, mais pas plus. Il n'est pas davantage nécessaire de le déveiner. Une fois cuit et refroidi il pourra être découpé en superbes tranches de belle taille, et surtout d'une fermeté exceptionnelle. Sa chair sera longue en bouche, avec surtout une véritable mâche.
Il ne restera "plus" qu'à le réchauffer dans une sauce préparée à base de fonds de canard, et de raisins de Corinthe (sans leur peau) qu'on aura fait crever dans le Jurançon doux et un peu de Porto et qui auront cuit 4 à 5 heures à petits bouillons ... et le secret, il me le donne, c'est un soupçon de piment.
Jean cuisine le foie de diverses manières, réservant l'épilobe en terrine. J'y reviendrai. Il a aussi plusieurs recettes avec les magrets, eux aussi très gouteux. Et si vous voulez déguster les produits de Christian Pussacq il vous faudra venir à Magescq parce que l'éleveur ne fait que du frais, aucune conserve.
Locavore depuis plus d'un demi-siècle
On attendra la saison de la truffe pour voir revenir 4 à 5 plats qui la célébreront. On attendra patiemment les légumes, à commencer par des petits pois, grands comme une larme, qui démarrent sous serres et bien entendu les fameuses asperges blanches des Landes, d'avril à juin.
Pareillement pour la lamproie puis le saumon. On comptait il y a 150 ans 200 pêcheurs professionnels. Ils ne sont plus que 15 aujourd'hui à pêcher encore le saumon sauvage de l'Adour. Jean reçoit en direct des pièces qui pèsent souvent 7 kilos du 1er mars au 1er juin. Imaginez le légèrement grillé, servi avec une vraie béarnaise.
Le relais est livré par deux fournisseurs de pain. Le classique vient d'en face. Les autres sont faits avec une farine du Gers, à base de maïs.
Jean Coussau privilégie systématiquement les producteurs locaux et on comprend qu'il affirme : je suis plus heureux ici qu'à Paris. Même les agrumes de l'époustouflant dessert en trompe-l'oeil (Marmelade Citron Meyer et Kumquat, Crémeux et Sorbet Citron) ont poussé dans le sud-ouest, chez Thierry Dupouy, pépiniériste spécialisé dans les agrumes à Eugénie-Les-Bains.
Vous le découvrirez sur la table dans l'épisode 3 de cette saga.
Des poissons et des crustacés archi-frais
Vous vous en doutez. Rien n'échappe à la surveillance du chef qui est tôt à pied d'oeuvre. Jean est arrivé à son bureau à 7 heures, comme Annick, et a vite rejoint les cuisines. Clémentine n'a pas tardé à suivre. Maxime écaille le cabillaud. Le chef découvre un turbot pour 7 personnes, et les Saint-Jacques qui seront utilisés pour le cours de cuisine de samedi.
Le téléphone sonne déjà dans sa poche du chef et l'équipe -car il faut souligner que la brigade est plutôt nombreuse- est en pleine action. Et il leur faut des doigts de fée pour plumer le gibier en saison.
Un sens constant du détail
Il faudrait aussi parler du choix attaché aux assiettes ... dont certaines -dites de présentation- proviennent de chez Bernardaud mais je vais plutôt poursuivre dans le prochain épisode en vous montrant ce que le chef y dépose.
Relais de la Poste, 24, avenue de Maremne - 40140 Magescq - 05 58 47 70 20
www.relaisposte.com
Le restaurant est ouvert le midi de 12 h 00 à 13 h 30 et le soir de 19 h 30 à 21 h 30
Il est fermé le lundi et le mardi toute la journée de septembre à juin
En juillet et août fermeture le lundi toute la journée, mardi midi et jeudi midi
Fermeture annuelle du dimanche 11 novembre au vendredi 14 décembre 2018 inclus et du mardi 1er janvier au vendredi 11 janvier 2019 inclus.
Côté Quillier, 26, avenue de Maremne - 40140 Magescq - 05.58.47.79.50
Ouvert tous les jours
de 12h00 à 14h00 et de 19h00 à 22h00
Fermeture annuelle du dimanche 11 novembre au vendredi 14 décembre 2018 et du dimanche 06 au vendredi 18 janvier 2019 inclus.
Restaurant "Jean des Sables", 121 boulevard de la Dune -
40150 Soorts-Hossegor - 05 58 72 29 82
www.jeandessables.com
Ouvert du mercredi au dimanche
de 12h à 14h et de 19h30 à 21h30
Du 1er au 31 août, fermeture hebdomadaire les lundi, mercredi et vendredi pour le déjeuner uniquement
Congés annuels du 7 janvier au soir au 28 février
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Les lecteurs pressés peuvent d'ores et déjà écouter la retransmission de l'émission qui est passée sur les ondes, et dont je redonnerai le lien dans chaque article. C’est une émission complète sur le département des Landes, de Magescq à Hossegor au cours de laquelle je raconte mes rencontres, avec le chef étoilé Jean Coussau, son frère Jacques, sommelier, sa nièce Clémentine, qui s’apprête à lui succéder, et l’artiste verrier Xavier Carrère. Vous découvrirez de nombreuses spécialités gastronomiques et entendrez une programmation musicale originale
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