Le film Mickey and the bear devait être programmé dans plus 80 salles à partir du 12 février 2020. Il sera de nouveau à l'affiche dès que les conditions sanitaires le permettront.
Wayna pitch (qui avait l'an dernier distribué le si touchant film 303), et les exploitants avec qui il collabore se mobilisent pour que le film puisse continuer sa vie au cinéma. Alors surveillez le #oniratousaucinema
En attendant j'ai pu le visionner en quelque sorte en avant-première, depuis chez moi grâce à un code spécial. Je peux donc vous en parler sans attendre.
Mickey est en dernière année de lycée. Elle vit dans une caravane avec son père, ex-marine revenu traumatisé de la guerre, désormais alcoolique et toxico. la jeune fille se sent obligée de prendre soin de lui. Elle a un petit ami, Aron, avec qui tout ne se passe pas très bien et l'arrivée de Wyatt au lycée pourrait lui faire remettre sa vie en cause, et sa promesse de ne jamais quitter son père.
L'histoire se déroule dans le Montana, une région où la beauté de la nature a inspiré une douzaine de grands auteurs de la littérature américaine. Si quelques scènes sont tournées en extérieur, dans un cadre montagnard, il semblerait que la réalisatrice, Annabelle Attanasio, ait pris le contrepied du schéma. Elle montre essentiellement des animaux morts, conservés avec l'apparence de la vie, dans l'atelier de taxidermie où la jeune fille se rend régulièrement.
Il faut sans doute y voir une métaphore de la fossilisation dans laquelle se fige le village. Rien ne semble avoir évolué, ni le mode de vie, ni les absurdes concours (à qui engloutira le plus de nourriture), ni la vie de famille, réduite à sa plus simple expression depuis que plusieurs membres ne sont pas revenus de la guerre.
Malgré une vie faite de deuil (la jeune fille a perdu sa mère d'un cancer fulgurant) et de difficultés financières car l'argent disponible est absorbé par les addictions de son père, Mickey réussit à irradier au sein de la communauté où on remarque qu'elle est appréciée, pour sa beauté, son courage, sa détermination.
Elle gère les soucis quotidiens en faisant face, tout en espérant que ce n'est que temporaire. Aron (Ben Rosenfield) la déçoit pourtant en volant les médicaments de son père, pile le joue de son anniversaire, son père multiplie les frasques dès qu'elle fait mine de s'émanciper, la police le lui rend de plus en plus amoché car son comportement imprévisible le conduit souvent en prison.
Le scénario pourrait être glauque mais l'esthétisme de la photographie et la qualité de jeu de Camila Morrone le font basculer parmi les films attachants. La rencontre avec Leslee Watkins, une femme médecin, (Rebecca Henderson), insufflera à la jeune Mickey la force qui lui fait défaut pour s'émanciper d'un père toxique.
L'arrivée dans son lycée de Wyatt (Calvin Demba), un nouvel élève, musicien, sportif, doux et aimant démontre que les rapports hommes-femmes ne sont pas forcément des rapports de force et de manipulation. Grâce à lui, elle envisage la possibilité d’aller étudier à l'autre bout du pays... Elle pourrait régler les frais avec l'argent hérité de sa mère, et que son père lui a promis, à condition qu'il n'ait pas menti, une fois de plus.
Le film, qui évoque parfois l'atmosphère étouffante de My Absolute Darling mais il reste néanmoins lumineux. Il pointe la destruction psychologique consécutive à l'enrôlement dans l'armée. Si les Etats-Unis n'ont pas connu de guerre sur leur territoire on compte, parmi les trois millions de soldats qui ont combattu en Irak et en Afghanistan, au moins un million de vétérans revenus physiquement indemnes mais psychologiquement atteints par un syndrome de stress post-traumatique, victimes de cauchemars, de crises d'angoisse, de paranoïa, incapables de se reconstruire, et dont la vie de famille est à jamais bouleversée.
Du fait du décès de sa mère, dont elle est le portrait vivant, Mickey est sous la coupe de la maladie mentale de son père (James Badge Dale). Elle le sait incapable de se débrouiller sans elle et joue un rôle protecteur alors que c'est elle l'enfant et lui l'adulte.
Ils ne discutent jamais des vrais problèmes. Leurs conversations sont restreintes. On remarque qu'il franchit les interdits en allant de plus en plus loin, à chaque fois que la jeune fille manifeste un semblant d'indépendance ou qu'il décèle le risque qu'elle ait envie de partir. Sa peur de l'abandon et une jalousie manifeste le poussent à commettre des actes sordides comme jeter les vêtements de sa mère, parce qu'elle les porte avec élégance (et qu'elle n'aurait pas d'argent pour s'en acheter) ou pire encore comme se battre avec son petit ami et surtout lui voler de l'argent.
Mickey porte un diadème de pacotille avec romantisme mais elle est néanmoins déterminée. S'il lui a fait jurer plusieurs fois de ne jamais partir elle finira par hurler sa révolte : Où est mon argent, où est ma vie ? Le film finira-t-il sur une note d'espoir ?
A l'instar de 303 auquel je faisais allusion dans les premières lignes, Wayna Pitch propose une fois de plus au public français la quête d'identité d'adolescents confrontés à des figures paternelles déficientes. Annabelle Attanasio doit être saluée pour son travail. A 21 ans, elle s’affirme comme la nouvelle égérie du cinéma indépendant américain. Elle a débuté comme comédienne mais décida très vite d’inverser les rôles en devenant réalisatrice. En 2016, son court métrage Frankie keeps talking est présenté dans plus d’une trentaine de festivals. Mickey and the bear, son premier long métrage a été présenté dans de multiples festivals.
Tous les acteurs sont impressionnants de justesse. A noter que Camila Morrone avait commencé sa carrière comme mannequin.
Mickey and the bear de Annabelle Attanasio
Avec : Camila Morrone (Mickey Peck), James Badge Dale (Hank Peck), Calvin Demba (Wyatt Hughes), Ben Rosenfield (Aron Church), Rebecca Henderson (Leslee Watkins), Rob Grabow (le photographe).
Etats-Unis - Drame - 2019 - 89 min
Présenté à SXSW Festival 2019, Festival de Cannes 2019 (Sélection ACID), Festival de Deauville 2019, Festival du Nouveau Montréal 2019, Gangneung International Film Festival 2019, Festival International du Premier film d'Annonay 2020
Wayna pitch (qui avait l'an dernier distribué le si touchant film 303), et les exploitants avec qui il collabore se mobilisent pour que le film puisse continuer sa vie au cinéma. Alors surveillez le #oniratousaucinema
En attendant j'ai pu le visionner en quelque sorte en avant-première, depuis chez moi grâce à un code spécial. Je peux donc vous en parler sans attendre.
Mickey est en dernière année de lycée. Elle vit dans une caravane avec son père, ex-marine revenu traumatisé de la guerre, désormais alcoolique et toxico. la jeune fille se sent obligée de prendre soin de lui. Elle a un petit ami, Aron, avec qui tout ne se passe pas très bien et l'arrivée de Wyatt au lycée pourrait lui faire remettre sa vie en cause, et sa promesse de ne jamais quitter son père.
L'histoire se déroule dans le Montana, une région où la beauté de la nature a inspiré une douzaine de grands auteurs de la littérature américaine. Si quelques scènes sont tournées en extérieur, dans un cadre montagnard, il semblerait que la réalisatrice, Annabelle Attanasio, ait pris le contrepied du schéma. Elle montre essentiellement des animaux morts, conservés avec l'apparence de la vie, dans l'atelier de taxidermie où la jeune fille se rend régulièrement.
Il faut sans doute y voir une métaphore de la fossilisation dans laquelle se fige le village. Rien ne semble avoir évolué, ni le mode de vie, ni les absurdes concours (à qui engloutira le plus de nourriture), ni la vie de famille, réduite à sa plus simple expression depuis que plusieurs membres ne sont pas revenus de la guerre.
Malgré une vie faite de deuil (la jeune fille a perdu sa mère d'un cancer fulgurant) et de difficultés financières car l'argent disponible est absorbé par les addictions de son père, Mickey réussit à irradier au sein de la communauté où on remarque qu'elle est appréciée, pour sa beauté, son courage, sa détermination.
Elle gère les soucis quotidiens en faisant face, tout en espérant que ce n'est que temporaire. Aron (Ben Rosenfield) la déçoit pourtant en volant les médicaments de son père, pile le joue de son anniversaire, son père multiplie les frasques dès qu'elle fait mine de s'émanciper, la police le lui rend de plus en plus amoché car son comportement imprévisible le conduit souvent en prison.
Le scénario pourrait être glauque mais l'esthétisme de la photographie et la qualité de jeu de Camila Morrone le font basculer parmi les films attachants. La rencontre avec Leslee Watkins, une femme médecin, (Rebecca Henderson), insufflera à la jeune Mickey la force qui lui fait défaut pour s'émanciper d'un père toxique.
L'arrivée dans son lycée de Wyatt (Calvin Demba), un nouvel élève, musicien, sportif, doux et aimant démontre que les rapports hommes-femmes ne sont pas forcément des rapports de force et de manipulation. Grâce à lui, elle envisage la possibilité d’aller étudier à l'autre bout du pays... Elle pourrait régler les frais avec l'argent hérité de sa mère, et que son père lui a promis, à condition qu'il n'ait pas menti, une fois de plus.
Le film, qui évoque parfois l'atmosphère étouffante de My Absolute Darling mais il reste néanmoins lumineux. Il pointe la destruction psychologique consécutive à l'enrôlement dans l'armée. Si les Etats-Unis n'ont pas connu de guerre sur leur territoire on compte, parmi les trois millions de soldats qui ont combattu en Irak et en Afghanistan, au moins un million de vétérans revenus physiquement indemnes mais psychologiquement atteints par un syndrome de stress post-traumatique, victimes de cauchemars, de crises d'angoisse, de paranoïa, incapables de se reconstruire, et dont la vie de famille est à jamais bouleversée.
Du fait du décès de sa mère, dont elle est le portrait vivant, Mickey est sous la coupe de la maladie mentale de son père (James Badge Dale). Elle le sait incapable de se débrouiller sans elle et joue un rôle protecteur alors que c'est elle l'enfant et lui l'adulte.
Ils ne discutent jamais des vrais problèmes. Leurs conversations sont restreintes. On remarque qu'il franchit les interdits en allant de plus en plus loin, à chaque fois que la jeune fille manifeste un semblant d'indépendance ou qu'il décèle le risque qu'elle ait envie de partir. Sa peur de l'abandon et une jalousie manifeste le poussent à commettre des actes sordides comme jeter les vêtements de sa mère, parce qu'elle les porte avec élégance (et qu'elle n'aurait pas d'argent pour s'en acheter) ou pire encore comme se battre avec son petit ami et surtout lui voler de l'argent.
Mickey porte un diadème de pacotille avec romantisme mais elle est néanmoins déterminée. S'il lui a fait jurer plusieurs fois de ne jamais partir elle finira par hurler sa révolte : Où est mon argent, où est ma vie ? Le film finira-t-il sur une note d'espoir ?
A l'instar de 303 auquel je faisais allusion dans les premières lignes, Wayna Pitch propose une fois de plus au public français la quête d'identité d'adolescents confrontés à des figures paternelles déficientes. Annabelle Attanasio doit être saluée pour son travail. A 21 ans, elle s’affirme comme la nouvelle égérie du cinéma indépendant américain. Elle a débuté comme comédienne mais décida très vite d’inverser les rôles en devenant réalisatrice. En 2016, son court métrage Frankie keeps talking est présenté dans plus d’une trentaine de festivals. Mickey and the bear, son premier long métrage a été présenté dans de multiples festivals.
Tous les acteurs sont impressionnants de justesse. A noter que Camila Morrone avait commencé sa carrière comme mannequin.
Mickey and the bear de Annabelle Attanasio
Avec : Camila Morrone (Mickey Peck), James Badge Dale (Hank Peck), Calvin Demba (Wyatt Hughes), Ben Rosenfield (Aron Church), Rebecca Henderson (Leslee Watkins), Rob Grabow (le photographe).
Etats-Unis - Drame - 2019 - 89 min
Présenté à SXSW Festival 2019, Festival de Cannes 2019 (Sélection ACID), Festival de Deauville 2019, Festival du Nouveau Montréal 2019, Gangneung International Film Festival 2019, Festival International du Premier film d'Annonay 2020
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