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jeudi 8 juin 2023

Promenade dans Heraklion, en Crète

Située à la jonction de deux plaques tectoniques, la Crète progresse de 6 cm par an vers l’Afrique. Voilà pourquoi, et les guides n’insistent pas sur ce point, Heraklion est le siège de très fréquents tremblements de terre, souvent peu intenses, mais que l’on ressent néanmoins. Plusieurs habitants m’ont montré l’application qu’ils ont sur leur téléphone pour suivre les secousses qui sont finalement quotidiennes.

La ville a été plusieurs fois détruite et ne subsistent que peu de vestiges, comme le fort vénitien qui illustre toutes les revues touristiques.

Il est peu accessible car placé au bout de la jetée et masqué le plus souvent par d’énormes paquebots.

J’aurais aimé suivre les remparts ceinturant la vieille ville, vestiges de la période vénitienne. Ils ont été achevés vers la fin du XVII° siècle alors que pendant plus de 100 ans, les Crétois participèrent à leur édification. C’est grâce aux derniers murs que Candia, comme s’appelait alors Heraklion, fut capable de résister au siège des Ottomans durant 20 ans (de 1648 à 1669).

Quoique miraculeusement très bien conservés ils souffrent, à certains endroits, d’un manque d’entretien mais offrent de superbes vues sur la ville. On peut visiter, au-dessus du bastion Martinengo, la tombe de l’écrivain Nikos Kazantzakis (1883-1957) qui est peut-être la figure la plus marquante de la littérature grecque au XX° siècle. Né à Heraklion, étudiant et disciple de Bergson à Paris, son roman le plus célèbre est Zorba le Grec, adapté au cinéma en 1964.
On peut voir une sculpture le représentant avec deux autres célébrités crétoises devant la banque Pancretan. Cette composition réalisée par Aspasia Papadoperaki, en cuivre (2003-2006) le montre en discussion fictive car anachronique avec le poète Vitsentzos Kornaros (1558-1613) et le peintre Domenikos Theotokopoulos (El Greco) – (1541-1614), né à Fodele, près d’Héraklion. Il profita vraisemblablement de l’enseignement de Damaskinos, avant de séjourner quelques années à Venise, puis dans toute l’Italie où il bénéficia de l’influence de Bassano et du Tintoret, pour ensuite travailler dans l’atelier du Titien.
Après son séjour à Rome, il prend en 1577 la direction de Tolède où il s’impose comme l’un des plus grands artistes du baroque espagnol. Son style se caractérise par l’allongement des f igures, l’étrangeté de l’éclairage, l’irréalité de la composition et le mysticisme. Les œuvres qu’ El Greco a pu peindre en Crète étaient inconnues jusqu’à la découverte en 1983, dans l’église d’Ermoupolis à Syros, d’une icône signée de sa main. Byzantine par son thème (la Vierge) et la disposition générale des personnages, cette peinture préfigure l’influence de la Renaissance dans ses motifs décoratifs.

En remontant le long des remparts on arrive à l’immense place Eleftherias qui marque l’entrée dans la vieille ville. Elle est large et moderne, avec quelques palmiers au centre et une importante circulation tout autour. Lieu de rencontre favori des habitants d’Héraklion, l’activité y est intense jour et nuit. En été plusieurs manifestations culturelles ont lieu sur la place : des concerts et des soirées consacrées à la danse et à la musique traditionnelles crétoises.
Au centre se dresse la statue de Eleftherios VenizelosNé en Crète en 1864, il figure parmi les plus importants Premiers ministres de la Grèce moderne. A la veille des guerres balkaniques, Venizélos, prône pour la Grande Idée, une Grèce renforcée et agrandie. Allié fervent de l’Entente, il voit des nouveaux territoires se rattacher à la Grèce à la signature des traités de Sèvres et de Lausanne. Exilé en France et condamné à mort par contumace par ses ennemis politiques, monarchistes et d’extrême droite, il meurt à Paris en 1936.
Le musée archéologique est un peu plus haut à quelques mètres. J’ai remarqué aussi plusieurs autres sculptures Comme celle que Manolis Tzompanakis a faite de Stefanos Xanthoudidis (1864-1928) en hommage à l’ancien directeur du musée archéologique d'Héraklion (ci-dessous à droite) réputé pour avoir donné une dimension quasi mystique à l’archéologie en la reliant à la vie et à l’émotion.

Elle est placée en face de ce musée dont la visite s’impose pour qui veut comprendre l’art minoen et aller ensuite voir Knossos. Il existe aussi une statue élevée à la mémoire de Yuri Gagarine que je n’ai pas vue. Par contre j’ai aperçu celle dite des 3 dauphins (ci-dessous à gauche) en allant dîner un soir près du port.
Les remparts vénitiens offrent une belle promenade jusqu’au port même si le regard doit se tourner vers la mer pour éviter de s’attarder sur les reconstructions hâtives de l’après-guerre et après séismes.
Ce que j’ai néanmoins préféré, c’est me perdre dans la vieille ville et admirer les murs peints qui sont une de ses spécificités, depuis des siècles. La fresque est une tradition picturale héritée de la culture byzantine et parcourir les rues promet de belles surprises.
Les thèmes, bien que variés, sont souvent traités de manière figurative et les dessins sont agréablement décoratifs. Souvent pour mettre en scène la vie quotidienne.
Animaux, visages peints en gros plan ou encadrant un message … qui se détache sur un fond bleu outremer, qui anime tant les façades et les portes, et qui est si fréquent qu’on en oublie de l’immortaliser en photo.
… mais aussi des peintures abstraites, il y en a de tous les styles et  pour tous les goûts.
Le graffiti fait à tel point partie de la vie de l’île que la capitale a lancé son festival de street-art en 2016. Durant quatre jours, tous les arts de la rue sont mis à l’honneur dans l’idée de promouvoir la jeune création avec musiciens, danseurs, peintres, graffeurs, acteurs de théâtre et circassiens.

Cette balade urbaine ne doit pas faire oublier que la Crète est avant tout un immense espace naturel dont la flore est magnifique.
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Article écrit suite à une mission d’affaires regroupant des acheteurs spécialisés en produits alimentaires, grossistes et distributeurs et quelques journalistes, coorganisé par l’ambassade de Grèce en France avec la participation du Bureau économique et commercial afin de promouvoir le programme européen pour les produits AOP et AOC de Crète. 

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