Le musée national archéologique d'Héraklion est l'un des principaux musées de Grèce, parfois considéré comme le deuxième plus grand musée du pays. Il reçoit environ 5 millions de visiteurs par an.
Situé dans le centre-ville, il se trouve dans un bâtiment de style Bauhaus et abrite des trouvailles qui datent du Néolithique à l’époque romaine.
Il a été construit entre 1937 et 1940 par l'architecte grec Patroklos Karantinos (1903-1976) sur un site précédemment occupé par un édifice qui a été détruit par un séisme en 1926, lui-même déjà bâti sur les ruines vénitiennes du monastère catholique de Saint François ayant subi les ravages d'un tremblement de terre en 1856 et dont on aperçoit des restes dans le jardin du musée.
Il a été restauré et a pu réouvrir en mai 2014 après 8 années de travaux.
J’ai remarqué, en face du musée, la statue que Manolis Tzompanakis a faite de Stefanos Xanthoudidis (1864-1928). Il étudia la philologie et l'archéologie à l'université d'Athènes et devint enseignant. En 1988, après avoir mené d’importantes fouilles à Messara et Nirou Hani il est nommé surintendant des antiquités et directeur du musée archéologique d'Héraklion qui a été créé à partir d'une collection personnelle de découvertes archéologiques. Cet homme a donné une dimension quasi mystique à l’archéologie en la reliant à la vie et à l’émotion.
La rénovation qui a été faite pour correspondre aux normes et exigences actuelles va dans ce sens et on comprend que les employés se battent pour qu’il demeure public (il appartient au ministère de la culture) alors que des menaces de privatisation s’accentuent. D’où la présence d’une banderole sur la façade.
Sa visite est quasi indispensable pour qui voudra ensuite comprendre le site de Knossos. La collection minoenne est exceptionnelle avec des pièces marquantes et emblématiques de cet art comme le disque de Phaistos, les déesses aux serpents et le rhyton en forme de tête de taureau de Knossos, le pendentif en or des abeilles de Malia, ou le magnifique Sauteur du taureau (photo en haut de l’article) et le sarcophage d’Agia Triada...
Il faudrait disposer d’au moins 3 heures pour cette visite. J’ai eu l’immense chance de le parcourir en compagnie d’une guide ultra compétente qui m’a montré l’essentiel en un temps record tout en me donnant les informations nécessaires à la compréhension du contexte historique et dans la perspective de visiter ensuite le palais de Knossos d’où proviennent certaines oeuvres.
La rénovation a respecté la construction des années 50 et conservé tous les matériaux d’origine, en particulier les sols de marbre qui sont superbes et qui sont les mêmes qu’au Parthénon. Par contre la distribution a été revue de manière à ce que la présence des visiteurs (nombreux) ne résonne pas et les vitrines ont été repensées avec un éclairage qui magnifie les objets.
En voici quelques-un parmi les plus beaux :
Impossible de rendre compte de la visite en quelques lignes et je vous invite à pendre le temps de lire ce qui suit et que j’ai résumé au mieux.
Les textes des cartels sont écrits en marron foncé pour évoquer le monde agricole tandis qu’une vague bleue marque le contact entre un peuple agricole et le commerce. Les expositions actuelles couvrent une période chronologique du Néolithique (7000 av J.-C.) à la fin de la période romaine (III° siècle de notre ère). Nous avons commencé par les collections provenant de la période néolithique crétoise et la majestueuse période minoenne.
La cruche à fond arrondi (à gauche) est typique avec ses anses permettait de glisser une corde pour la descendre dans le puits. On remarque que les seules décorations observables sur les poteries sont des incisions sans ajout de couleur. Elles témoignent que les populations abandonnent le nomadisme pour s’installer. Les crétois connaissent déjà les différents oxydes, qu’ils posent avec des éponges. Et la fumée apporte une décoration involontaire à l’objet.
Sont ici exposés des récipients pour puiser et transporter des liquides. Ils ont été retrouvés avec plus de 30 navires similaires dans une fosse de 17 mètres de profondeur, creusé dans la roche, et qui était le plus ancien ouvrage technique de Crète. Phourni, Mirabella, 3300-3000 av JC. Le tour de poterie est inventé 2500 ans avant JC.
On est saisi par la beauté de ces bijoux en or et cristal de roche, épingles à fleurs, colliers, bracelets, bandes attachées aux vêtements, bandelette funéraire comme on en a vu sur les pharaons, bagues, boucles d'oreilles et pendentifs, des éléments dorés cousus aux vêtements, des diadèmes à bandes, feuilles de myrte et chaînes avec appendices. Mochlos, 2600-1900 av JC.
Les minéoens étaient d’excellents commerçants qui voyageaient beaucoup. Ils pouvaient acquérir du bronze à Chypre. Cette île comptait 700 000 habitants contre 60000 en Crète Plus tard ils utiliseront de l’ivoire provenant d’Afrique. On remarque ici de l’améthyste (violette), de la cornaline (rouge) et des feuilles d’olivier (prouvant que ces arbres existent déjà).
Le sceau est l’équivalent de notre carte d’identité. On les portait en pendentif pour les avoir à disposition pour signer. Ce pouvait être un animal, par exemple un lapin ou un cochon. La mouche était symbole de virilité.
Figurines de type cycladique. L'importation de figurines cycladiques en Crète et leur imitation par les ateliers crétois indiquent des affinités idéologiques avec les Cyclades. Archane Phourni, Hagios Onouphrios, Koumasa, Knossos-Tekes 2600-2200 av JC
Les idoles étaient associées à la mort et les objets accompagnant les défunts étaient cassés pour assumer la fin de la vie sur terre. On remarquera l’absence de barbe, en toute logique puisqu’ils disposaient de rasoir.
En bas a gauche : Longues et fines lames d'obsidienne aux attributs techniques et formels cycladiques, probablement fabriquées pour un usage funéraire. Platanos, 2600-2300 av JC. A droite : Lames, noyaux, éclats et déchets d'obsidienne. De grandes quantités d'objets importés de Melos, à divers stades, le processus de fabrication, étaient fo Poros Héraklion. La production dépassait la demande locale et était destinée à être commercialisée dans les parties virales de l'île. Poros 3000-2300 av JC
Ci-dessus (en bas de la première photo une boite à bijoux). A côté un plat ex-voto à a suite de la perte d’un son troupeau dont le berger montre une représentation à la divinité nature en offrande.
Pioche, ciseau, poignard et moules en pierre pour haches double - Chamaizi et Malia 1800-1700 av JC
En haut : Ustensile en argile, probablement utilisé pour la transformation des aliments, comme l'écrasement culinaire ou servir de passoire. Grotte de Kamares, 1900-1700 av JC. En dessous : Outil en pierre, peut-être pour enduire les murs comme on le ferait avec une taloche. Phaistos 1900-1700 av JC
Le pendentif d’or aux abeilles affrontées de Mallia, 1800-1700 av JC, représente deux abeilles disposées de façon héraldique de part et d’autre d’un gâteau de miel, obtenu par la technique de granulation que l’on connait depuis 1700 ans avant JC. L’opération consistait à mettre en contact un alliage en fusion avec de l’eau pour produire une fragmentation. Trois disques d’or complètent le bijou.
Matière première dite « anomalie sans régularité »
Les minoens étaient plus petits que nous. On le constatera à la taille des sarcophages (d’autant qu’on les y plaçaient en position fœtale). Ils datent de 2600 ans avant JC et c’est la mort qui nous parle de la vie.
Théière élaborée : les herbes étaient placées sur la passoire et de l'eau chaude était versée dessus dans le récipient pour préparer la tisane.
Armes et symboles d'autorité
Les épées et poignards luxueux trouvés à Malia sont destinés à être exposés plutôt qu'à être utilisés. Ils étaient des emblèmes de rang, de fonction et d'autorité pour les membres de la hiérarchie du palais (1800-1600) av JC. Un pommeau est recouvert d'une gaine d'or, décoré d'un acrobate. Un autre, en ivoire, représente un éléphant. on remarque des double haches (l’abris en grec, ayant donné labyrinthe).
Sans doute ce plateau avec cette dînette miniature est un autre ex-voto
Voici quelques exemples de la céramique de Camarès, un peu comparable à Limoges (cratère à pied ci-dessus trouvé à Phaistos) et d’une créativité immense. Avec un sens de la miniature et de la modestie fort subtiles et totalement modernes. Le cratère servait à mélanger l’eau et le vin. le cratère est le contenant de la lave, donc du pouvoir. Même étymologie que démocratie
Une maison miniature en argile
Superbe et imposant jeux de jaquet avec quatre pions en ivoire, mais dont on n’a jamais su la règle.
Palmier et fleurs d’olivier sur les vases.
Les motifs choisis renseignent sur les habitudes alimentaires des Minoens : figues, escargots, poissons, légumes et fruits, peut-être miel, bœuf, moutons et chèvres, constituaient entre autres leur régime alimentaire.
Animal sacré, cornes sont symbole de religion sur la Gourde du pèlerin (à l’extrême droite) dont la surface st presque entièrement occupée par un poulpe aux tentacules très réalistes.
Et voici, le disque de Phaistos, en argile cuite, d’un diamètre de 16 cm, comportant sur ses deux faces une écriture de 45 symboles suivant un ordre spiroïdal et allant de l’extérieur vers le centre. Ils se répètent en formant des mots, séparés entre eux avec des lignes verticales gravées sur le support en terre cuite, à l’aide d’un poinçon.
Datant très probablement du XVII° siècle av. J.-C. Il figure parmi les plus grandes énigmes de l’histoire universelle. Découvert miraculeusement intact en 1908 par l’archéologue Luigi Pernier, un italien, lors des excavations du palais minoen de Phaistos, on ignore encore aujourd’hui le but de sa création vu qu’il reste indéchiffrable. Il s’agit d’une source écrite unique du hiéroglyphe minoen.
Ce qui est certain, selon les archéologues, c’est que les symboles ont été gravés sur le disque à l’aide de sceaux, ce qui permet de considérer ce disque comme étant le premier indice témoignant d’une pratique d’impression sur un support.
Ces étranges « coussins » semblant être recouvert d’une peau d’animal sont de bronze et pèsent 15 kg pour le plus petit. Ils servaient de monnaie. Leur nom, talent, signifiait « qualité » et est de la même étymologie qu’étalon.
On peut aussi observer des objets du quotidien : hameçon, brochette, pince à épiler, scies, enfumoir pour abeilles, jeu de société de voyage avec dé … Ci-dessous quelques chaudrons :
Le Sauteur du taureau ou L’Acrobate de Crète est une merveilleuse sculpture en ivoire, datant de 1700 v JC, trouvée à Knossos, d’une esthétique exceptionnelle puisque l’artiste a réussi à représenter le jeune homme sautant en prenant appui sur les cornes pour retomber sur le dos de l’animal puis sur le sol. Il effectue au-dessus du taureau une rotation complète et libre en trois dimensions. Le taureau par contre a lui été perdu.
Derrière lui on remarque une fresque représentant ce sport dangereux, pratiqués par les hommes comme par les femmes, sans qu’il y ait mise à mort, et qui était probablement lié à des pratiques religieuses.
Ces vases à libations comportent un trou que l’on bloque avec la main et par lequel on peut faire couler des grains en guise d’offrande ou un liquide.
On admire la sculpture en pierre représentant une lionne (à gauche) et (à droite) la tête d’un taureau trouvée lors des excavations au Petit Palais de Knossos (1600-1400 av. J.-C.). C’est le rhyton le plus beau et le mieux conservé, véritable chef-d’œuvre témoignant de la finesse de l’art minoen. Il s’agit donc d’un vase à boire en forme de corne décoré d'une tête, comme on le faisait fréquemment. Il était percé d'une petite ouverture dans sa partie inférieure.
Les traits de l’animal sont d’une justesse rare. Il s’agit d’un objet utilisé lors de l’accomplissement d’une libation, comme en témoigne l’ouverture se situant derrière la nuque du taureau et qui aboutit au museau. On peut donc considérer qu’il s’agit d’une sorte de vase. Les cornes ont été restaurées pour faire ressortir la dorure du bois. Les yeux sont en cristal de roche peint avec réalisme et le museau en coquillage avec une perle de nacre.
La déesse aux serpents (1600 av. J.-C.) et ses deux adoratrices sont d’autres pièces majeures. Ces figurines en faïence de 35 cm de hauteur découvertes dans une fosse à parois de pierre, à Knossos, et appartenant aux objets de culte les plus importants du site. Elles combinent la grâce et le naturalisme typiques de l’art crétois. Les serpents symbolisent les forces chtoniennes alors que le félin sur la tête de la deuxième déesse (à droite) symbolise la domination sur la vie sauvage. Les seins dévoilés symbolisent la fertilité.
Très beaux pendentifs composé de deux cornes qui se refermaient dans l’oreille.
Les bras sont levés en signe d’invocation religieuse. A droite la balançoire avec une autre déesse.
A l’exception d’un seul qui est en pierre, les sarcophages sont de terre cuite pour adultes avec de quoi passer les cordes.
Au premier étage on trouve des fresques minoennes aux riches décors donnant un aperçu des scènes de vie, des rituels et de la nature en ces temps, des objets liés à des rituels religieux trouvés sur des lieux de culte (et notamment dans les grottes), ainsi qu’une série d’objets représentatifs de la Grèce et du monde oriental donnant un aperçu de l’évolution depuis l’époque minoenne jusqu’à l’époque moderne, et des collections des époques grecque et gréco-romaine (soit du XI e siècle avant notre ère au IV e siècle de notre ère). Les fresques trahissent une claire influence des fresques égyptiennes. Elles sont malheureusement fragmentaires et incomplètes suite à leur fragmentation provoquée par l’écroulement des murs et leur décoloration par le feu.
J’ai pu admirer La Parisienne (1450-1350/1300 av. J.-C.). Nommée ainsi par l’archéologue Evans à cause du maquillage et des traits assez prononcés du visage de la femme représentée, qui concernerait une prêtresse (non photographiée).
Le Prince aux fleurs de lys ou le prince de Knossos (1600-1450 av. J.-C.). Représentation emblématique d’une fresque en relief et en dimensions naturelles.
Fresque des Griffins
Fresque des Dauphins qui décorait la salle de bains de la Reine dans le palais de Knossos (ci-dessous) … qui fera l’objet d’une publication particulière.
Musée archéologique d'Héraklion
2 rue Xanthoudidou Tel +30 2810 279000 www.heraklionmuseum.gr
En saison : le lundi et du mercredi jusqu’au dimanche de 8h à 20h. Le mardi de 10h à 20h.
Entrée : 12 €. Réduit : 6 €. Il sera prudent de vérifier car les horaires d'ouverture peuvent fluctuer en Crète
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Article écrit suite à une mission d’affaires regroupant des acheteurs spécialisés en produits alimentaires, grossistes et distributeurs et quelques journalistes, coorganisé par l’ambassade de Grèce en France avec la participation du Bureau économique et commercial afin de promouvoir le programme européen pour les produits AOP et AOC de Crète.
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