Quand on a eu la chance comme moi de passer la nuit sur le Mont-Saint-Michel on ne manque pas de faire le tour des remparts en pleine nuit avant d'y revenir le lendemain pour voir le site en plein jour. Ils ont été construits aux XIV° et XV° siècles pour défendre le Mont des assauts anglais lors de la Guerre de Cent ans.
L'architecture médiévale est encore perceptible au coeur de la Cité qui conduit à l’abbaye, véritable joyaux qui témoigne de la maîtrise et du savoir-faire des bâtisseurs du Moyen Âge.
Elle figure à juste titre parmi les premiers sites culturels les plus visités en France (3 millions de visiteurs en 2010). On y fait l'expérience du sacré. En fin de soirée on peut aussi assister au Spectacle des Imaginaires de 19 h 30 à 23 heures, magique et envoûtant, qui dévoile l’histoire du Mont-Saint-Michel à travers de nombreux effets spéciaux et une mise en scène originale.
On n'y pense peut-être pas, surtout quand on vient pour la première fois au Mont-Saint-Michel, mais il dispose d'un musée maritime et d'une demeure historique, celle du Chevalier Bertrand Du Guesclin (il a défendu le Mont des envahisseurs anglais qui tentaient d'aborder par bateau depuis Tombelaine occupé par les anglais de 1351 à 1434) et de son épouse Tiphaine De Raguenel, où l'on peut voir l’armure du chevalier, un beau mobilier d’époque, des peintures, des tapisseries, un cabinet d’astrologie, une ceinture de chasteté du Moyen-âge. Je les ai repérés mais pas visités.
J'ai par contre visité le musée historique et le périscope qui a été restauré dans le jardin suspendu.
Je vous invite à cliquer sur "plus d'info" pour suivre le déroulé entier de ce billet consacré à la visite touristique et bien sûr aussi sur la première photo pour regarder les clichés en diaporama plein écran.
Les remparts
Constitués de courtines et de nombreuses tours, ils offrent une vue incroyable sur la grève et la baie du Mont-Saint-Michel. C’est l’endroit idéal pour assister au spectacle des grandes marées.
Le chemin des remparts, ou le chemin de ronde, jalonné de petits jardins, sont un point de départ (et d'arrivée) de l'ascension du mont pour grimper jusque l'abbaye.
Le village médiéval
Les samedis et dimanches les rues de la Cité sont calmes. Le mont est plus agité en semaine. On accède par trois portes d'entrée successives. La plus légitime, en quelque sorte est la Porte du Roi. Elle est fortifiée et entourée d'un corps de garde. Elle abrite aujourd'hui la mairie.
Ne cherchez pas l'école. Elle a été fermée quand le nombre d'élèves est descendu à ... 3.
Implanté sur le mont depuis l'an 709, le village compte une soixantaine de demeures ou bâtiments classés au patrimoine. Le parcours commence par la Grande Rue (où se trouve, dès l'entrée, l'Auberge de la Mère Poulard) pavée bordée de maisons anciennes à partir de laquelle il ne faut pas hésiter à déambuler dans les ruelles. Elles sont pittoresques et on ne risque pas de s'y perdre.
Ne cherchez pas l'école. Elle a été fermée quand le nombre d'élèves est descendu à ... 3.
Implanté sur le mont depuis l'an 709, le village compte une soixantaine de demeures ou bâtiments classés au patrimoine. Le parcours commence par la Grande Rue (où se trouve, dès l'entrée, l'Auberge de la Mère Poulard) pavée bordée de maisons anciennes à partir de laquelle il ne faut pas hésiter à déambuler dans les ruelles. Elles sont pittoresques et on ne risque pas de s'y perdre.
Les maisons étaient construites en bois de châtaignier au XVII° siècle et il en reste des traces très visibles. Les premières ont été bâties pour accueillir les pèlerins. Quoique solides, elles résistaient mal aux incendies qui ont progressivement fait préférer la pierre. J'aime particulièrement la maison dite de l'artichaut, encore en bois, reconnaissable à son artichaut sur le faite.
Les toitures sont en bardeaux (donc de bois) clouté de bas en haut ou en lauze. Si la pierre a une durée de vie d'environ 150 ans le bois serait limité à 120 mais réclame un investissement nettement moindre. Et le châtaignier est d'une solidité proche de l'ardoise pour un coût bien plus raisonnable.
Les toitures sont en bardeaux (donc de bois) clouté de bas en haut ou en lauze. Si la pierre a une durée de vie d'environ 150 ans le bois serait limité à 120 mais réclame un investissement nettement moindre. Et le châtaignier est d'une solidité proche de l'ardoise pour un coût bien plus raisonnable.
Cette rue très étroite (d'où on aperçoit la flèche de l'abbaye,malheureusement pas photographiable) est appelée ruelle des cocus, parce qu'un cornu ne pourrait s'y engager ... On ne peut pas dire que les Normands manquent d'humour.
En journée les rues sont très commerçantes. On y trouve bien entendu les sablés qui ont fait la réputation de la Mère Poulard et beaucoup d'autre choses.
On ne circule qu'à pieds, sauf à proximité des remparts, par l'ouest où une rue pentue mène à une sorte de parking. Seuls les résidents (et ils sont peu nombreux) ont le droit de s'y garer. Comme Mme Lecoeur qui à 77 ans est la plus vieille habitante de l'île. Sa voiture est connue de tous. Elle habite au-dessus de la boutique où elle travaille toujours.
Toujours sur la Grande-Rue, sur la gauche en montant on remarquera l'église paroissiale, construite aux XV et XVI° siècles qui est dédiée à Saint-Pierre, le patron des pêcheurs.
A l'intérieur on découvre une réplique de Saint Michel, nettement plus "visible" que celui qui est au somment de la flèche. La seule différence est que celui-ci est en argent.
Un festival se déroule l'été et la musique résonne pleinement dans l'édifice.
Il faut savoir qu'il serait impossible de se perdre dans le dédale des ruelles. Toutes ramènent à la rue principale, qui est unique. Depuis la porte d'entrée jusqu'à ce qu'on appelle le Grand Degré de l'abbaye. Pour résumer se succèdent les fortifications, le village puis l'abbaye.
Le Mont reste un haut lieu de pélerinage. Ces jours-ci les rassemblements se font sous haute protection en raison des derniers attentats et cela fait une drôle d'impression d'entendre prier une foule cernée de militaires armés de fusils-mitrailleurs.
L'abbaye
On raconte que l'évêque Aubert a vécu trois apparitions de Saint Michel lui posant le doigt sur le crâne, y créant un trou. La légende veut que l'archange exigea la construction d'un monastère. Alors Saint Aubert vient sur le Mont, et y fait ériger en 708 un sanctuaire. Ce n'est alors qu'un promenoir. Mais une communauté de chanoines suit pour accueillir les pèlerins dès le VIII° siècle. Puis les moines bénédictins qui ont réellement construit dès 966 et jusqu'au XV° siècle au sommet du rocher une grande église dont le chœur est un chef d’œuvre de l’art roman, gothique et gothique flamboyant. L’abbaye devient alors un lieu de pèlerinage important de la chrétienté occidentale.
Un tiers du granit ayant servi à la construction provient de Chausey qui est en territoire normand. Le reste des Monts d'Arrêt donc de Bretagne.
L’ascension du Grand Degré est un prélude à la Merveille et à la visite de l’Abbaye. Ce qu'on désigne par "le Grand Degré" est l'extérieur alors que le bâtiment sur ses trois niveaux compose ce qu'on appelle la Merveille.
Depuis la vaste terrasse de l'Ouest (ci-dessus) on devine au loin les polders. L'entrée dans l'abbaye fait penser à celle de Vézelay (89) par sa sobriété. Les vitraux sont pâles.
On remarque la rougeur du granit qui indique les traces de l'incendie de 1834.
Le cloitre est bien entendu un endroit extrêmement émouvant. Il n'est pas situé, comme le veut l'usage, au centre du monastère. Sa fonction est ici purement spirituelle : amener à la méditation.
Les plumes qui pendent dans l'ancien réfectoire des moines ne sont là que comme élément de décor du spectacle sons et lumières de l'été.
J'ai eu la chance de traverser l'endroit avec un guide, Dominique Gilbert, qui connait le Mont par coeur et que je remercie. Il nous a fait observer les fenêtres, conçues pour diriger la lumière sans éblouir.
Les moines accueillaient les pèlerins pour y déjeuner, en respectant la règle du silence bien sûr, ce qui signifiait l'interdiction d'avoir des conversations personnelles. Mais on remarque un petit escalier, au bout de la salle, qui mène à une sorte d'estrade où montait le moine chargé de faire la lecture pendant le repas, qui donc ne s'effectuait pas dans le "silence".
Le pavage du sol est magnifique.
Sur la sculpture ci-dessus, intitulé Le Songe de saint-Aubert, Saint Michel apparait sans visage, selon la volonté du sculpteur, en signe de respect. Nous avons aussi parcouru la Chapelle Sainte Madeleine et la Crypte d'où s'élancent d'énormes piliers pour maintenir le chœur gothique. Un cimetière à côté, et en quelque sorte souterrain, accueillait les corps des moines. Une grande roue est encore visible. Cette "cage aux écureuils" était actionnée par des prisonniers et servait à remonter les vivres depuis la grève.
Une fois la balade achevée nous verrons cette fois, par l'extérieur, la rampe de treuillage portant les traces des rails sur lesquels coulissait le chariot.
Les agrandissements successifs de l’abbaye avaient fini par absorber la totalité de l’église abbatiale originale fondée en 966 jusqu’à la faire oublier pendant plusieurs siècles. Appelée Notre-Dame-Sous-Terre elle a été redécouverte en 1898 sous la nef de l’abbatiale et sera complètement dégagée en 1959 une fois installée une poutre en béton précontraint. C'est un magnifique exemple d’architecture préromane qui abritait à l'origine le tombeau du fondateur, Aubert.
Juste en face on remarque des cachots que des légendes prétendent avoir été aménagés par les moines dès le XI° siècle. Une prison d'État est attestée sous Louis XI qui édifie des cages de fer dont on peut encore voir un exemple dans le musée.
Sous la Révolution, le Mont devient alors uniquement une prison où sont incarcérés, dès 1793 plus de 300 prêtres réfractaires. Sous Louis-Philippe d'Orléans, jusqu'à 700 prisonniers travailleront dans des salles de l'abbaye transformées en ateliers. Confectionnant des chapeaux de paille dans l'église abbatiale, cette dernière subit en 1834 un incendie attisé par la paille. L’abbaye-prison sera fermée par décret impérial en 1863.
On essaiera, dès qu'on le peut de photographier, de jour comme de nuit, l’archange Saint-Michel qui couronne la flèche (définitivement achevée en 1898) du sculpteur Emmanuel Frémiet.
Le musée historique, son jardin suspendu et le périscope
Riche de plus de mille années d'histoire, le musée historique recèle les prisons, cachots et oubliettes, une belle collection d'objets anciens, comme ces Coqs de montres anciennes ...
... un Coffre de corsaire fait à Nuremberg à la serrure très complexe, ...
... et des objets encore plus insolites, tels que ces Bottes de facteur du XVII°. Elles étaient fixées en travers de la selle du cheval et servaient de protection pour traverser les différents cours d'eau dans les grèves.
Une fois sorti dans la cour, on accède par quelques marches à d'anciens cachots, assez impressionnants en terme de reconstitution. Voici, Dubourg, un pamphlétaire incarcéré pour avoir critiqué le gouvernement du roi Louis XV et qui mourut volontairement de faim en 1746.
Plus loin une de ces cages de fer où l'on ne pouvait tenir ni debout ni couché.
Les mannequins de François Raspail, chimiste et homme politique, incarcéré pour avoir pris part aux journées révolutionnaires de 1830, (libéré en 1848 il fut nommé sénateur de Paris, quelque temps plus tard), et d'Armand Barbès, homme politique français du XIX° qui tenta de constituer un gouvernement insurrectionnel, libéré en 1854 puis exilé en Hollande.
Comme dit plus haut, il y eut jusqu'à 700 prisonniers détenus dans l'abbaye au cours du XIX°. Les plus habiles effectuaient des travaux avec de la paille : chapeaux, chaises, tableaux et un atelier est reconstitué.
Comme un peu plus loin le scryptorium. En remontant à la surface on prend le temps d'admirer encore une fois l'horizon depuis le jardin du musée, embaumant la rose, et resplendissant de la couleur vive des lavatères, avant de découvrir son joyau, le périscope.
Au lointain, on aperçoit le barrage qui a permis au Mont de retrouver son caractère maritime.
Il s'agit d'un périscope itinérant, comme il y en avait beaucoup au XIXème siècle dans un but topographique. Il a été acquis grâce au mécénat de la Mère Poulard et c'est une chance car il n'en subsiste plus que 5 dans le monde.
L'appareil photo a rendu ce type d'instrument obsolète. Toutefois il reste en parfait état de fonctionnement. il est même plus "pratique" puisque la salle d'observation qui a été construite autour (autrefois on s'installait sous une étoffe noire) permet à plusieurs personnes de surveiller ensemble le panorama de la baie.
Une fois la porte fermée, et dans l'obscurité la plus profonde, chaque main peut guider le cône cylindrique suspendu sous le prisme triangulaire (qui dépasse au-dessus de la coupole de bois).
Les paysages apparaissent sur la table ronde en émail blanc grâce à la captation de la lumière extérieure. On règle la netteté en faisant monter ou descendre la table par un système de vis.
Outre la topographie (on remarque nettement le barrage sur la troisième photo), il a servi à des artistes pour préciser leurs croquis, aquarelles ou gravures.
On ressortira avec de nouvelles images et poursuivra la descente pour revenir à l'hôtel en reparcourant la Cité médiévale.
Sans se lasser de la contemplation de la Baie en redescendant, d'autant que le paysage est en constant remaniement et les ciels superbes.
La chapelle Saint-Aubert sera notre dernière halte, tout en bas, sur le piton rocheux du Nord-Ouest.
Quand je vous disais que l'on peut largement rester la journée sur le Mont-Saint-Michel je pense en avoir fait la démonstration, même au-delà.
Loin de moi l'idée d'imiter le goéland dont on s'interroge à propos du cri, qui parfois ressemble furieusement à un miaulement, si bien qu'on ne sait pas s'il rit ou se moque. Le voyage se termine avec ce 6ème épisode. Il est temps de m'envoler vers de nouvelles découvertes.
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