Le pavillon de l’Aurore se situe au nord-est du parc de Sceaux (92). Il a été construit en même tant que le château et la peinture de la coupole a été apposée tout de suite par Charles Le Brun en 1672 (la signature est lisible en bas de la colonne). Au même moment il faisait le décor du Salon des ambassadeurs à Versailles, décor qui n’existe plus.
Ce pavillon, d’inspiration italienne, est le seul bâtiment du Grand Siècle qui a été conservé au Domaine.
La vaste peinture allégorique qui recouvre le dôme montre la déesse Aurore œuvrant au lever du jour et chassant les puissances obscures de la Nuit.
Une fois à l’intérieur, il suffit de lever la tête pour se perdre dans son merveilleux plafond, et avec un peu d’aide on en décode les symboles cryptés.
C’est la chance dont j’ai bénéficiée en suivant une visite spéciale et je vous encourage à faire de même, quoique j’ai appris depuis qu’on pouvait emprunter un casque de réalité virtuelle.
Une fois sous la coupole, il faudra se retourner plusieurs fois pour voir les personnages de bas en haut, sans qu’on puisse déterminer un début et une fin, pas plus que la limite entre la terre et le ciel. A moins de commencer par la guirlande fleurie qui émerge d’une nature abondante et d’une figure féminine allongée, que l’on peut considérer comme une allégorie du Printemps.
La visite est gratuite et s’effectue sans réservation préalable mais il faut malgré tout s’adresser au guichet des Anciennes Écuries. Annoncée comme visite flash d’une demi-heure, elle a duré plus du double et ce ne fut pas de trop.
C’est un des bâtiments les plus anciens. Il fut construit par le père du Colbert que l’on connait et c’est un des rares à subsister avec l’entrée d’honneur.
Le pavillon de l’Aurore était à l'origine un casino de plaisance construit comme un belvédère s'ouvrant sur la campagne. A l’époque, le lycée Lakanal n’était pas encore construit (il le sera en 1880). De plus, Colbert avait acheté des terrains supplémentaires si bien que le bâtiment se trouvait en plein centre, en hauteur, à l’extrémité Est du domaine donc bien situé pour accueillir le lever du soleil.
Il était d’usage de montrer ses jardins à ses invités au cours des soirées. Et ils ont été ici conçus par la Quintinie. Il est amusant s’apprendre qu’il y avait à l’époque des lits dorés dans les pièces voisines de manière à ce que les invités puissent s’y reposer.
Voilà pourquoi les plafonds de ces deux cabinets flanquant la rotonde centrale représentent Vertumne et Pomone (déesse des vergers) et Flore et Zéphyr en allusion à la cinquième Grande Nuit de Sceaux puisque les deux personnages posent la main sur le livre des fêtes que la cour de la duchesse du Maine organisa en ces lieux. Elles ont été réalisées par Nicolas Delobel.
Concentrons-nous sur la coupole qui représente un décor à la fois allégorique et mythologique, en rapport bien entendu avec Colbert, et qui n'est pas une fresque mais une peinture à l’huile.
Le sujet évoque une déesse (pas une allégorie), celle de l’Aurore qui arrive sur son char dans un tissu rose et orange, comme c’était toujours le cas pour représenter l’aurore. Elle annonce la venue du dieu Apollon Son action serait un écho à celle de Jean-Baptiste Colbert se débarrassant des ennemis du roi en bon ministre, donc de la Nuit, pour laisser place à Apollon, que l’on peut voir en roi-soleil.
La femme blonde est une allégorie. Elle tient un vase qu’elle renverse de rosée du matin.On reconnaît Flore en bas à gauche, et son mari Zéphyr qui est ce vent printanier si léger, et qui donc représente le signe du Bélier dans la constellation du zodiaque. Il porte la toison d’or dans ses bras et se trouve proche du mufle du Taureau.
Autre allégorie, celle du bruit avec la trompette, le marteau, la clochette et même le coq. Notre guide nous raconte l’origine du symbole associé à la combattivité des gaulois et qui est resté l’emblème des français.
Avant Jules César on disait Galliae pour désigner les Gaules. Voulant limiter les ambitions romaines des Pyrénées au Rhin, l’empereur inventa Gallia, la Gaule en tant que telle, et au singulier en l’enfermant dans des frontières prétendues naturelles alors que les Romains s’amusaient de la formule "Gallus Gallus" signifiant "un Gaulois de Gaule", mais aussi "un coq gaulois !" alors que rien ne pouvait expliquer pourquoi faire allusion au volatile. Toujours est-il qu’il devint l’emblème de la Gaule, puis de la France.
Et voici la nuit, avec la figure de Diane, soeur jumelle d’Appolon, devant le disque de la lune, avec le repentir du peintre. Les ailes de la chauve-souris forment un voile sombre autour de la nuit. Elles évoquent les monstres des cauchemars. La lutte entre le bien et le mal est représentée en plusieurs endroits du domaine. Avec sur la terrasse, un dragon avec un homme à tête de licorne, et ailleurs un loup vaincu par des chiens.
On reconnaît le dieu du sommeil (Hypnos ou Morphée) aux fleurs de pavot à ses pieds. Arrive la saison de l’hiver, avec Amalté (la chèvre donc le Capricorne). La silhouette de deux Poissons se profile dans un filet d’eau. L’époux de la déesse de l’Aurore (Tithon) se métamorphose en cigale.
Les Gémeaux sont représentés par un cavalier rouge et jaune avec ses demi-frères Castor et Pollux, fils de Léda et de Zeus.
Bacchus le dieu des vendanges, annonce l’automne. Il est accompagné par Cilène assoupie et deux panthères qui témoignent des effets négatifs de l’alcool. On remarque le Scorpion sur le bras du satyre et le centaure Sagittaire derrière Bacchus.
L'Aurore est surmontée du Point du Jour (Lucifer ou Phosphorus qui est le fils d'Apollon et qui porte la lumière) à côté du signe zodiacal de la Balance, censée être l’équinoxe, entre jour et nuit, et au milieu de la route du soleil qui, je le rappelle est le roi Louis XIV.
La Vierge est la saison de l’été et joue donc deux rôles. La Terre (la Nature), personnifiée par une femme appuyée sur une urne, fait jaillir le lait de son sein, en même temps qu'elle se débarrasse de son manteau, et quantité d'oiseaux se répandent dans les airs.
Pour exécuter une telle œuvre, Charles Le Brun a utilisé trois techniques. Celle du poncif (une poudre de charbon permettant une sorte de décalque), des dessins à la pierre noire avec des rehauts, et enfin des toiles marouflées en atelier, qu’il fit ensuite fixer par des petites semences (des clous). Il a recyclé un certain nombre de projets destinés au salon de Vaux-le-Vicomte et qui n’avaient pas abouti. Au nombre de onze, ces toiles ne représentent que 3% de la coupole.
Une première restauration fut entreprise en 1876-77, après la guerre, avec des repeints assez conséquents. La dernière fut entreprise fin 90, début 2000.
Pavillon de l’Aurore - Domaine de Sceaux
Ouvert les après-midis du samedi au dimanche
Parc en accès libre tous les jours
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En cliquant sur les images ci-dessous vous aboutirez à l'article concernant les autres expositions visitables dans le Domaine de Sceaux, notamment Allegoria, les clés de la symbolique baroque dans les anciennes Écuries du 15 septembre 2023 au 17 mars 2024. Les liens seront ajoutés au fur et à mesure de la rédaction des articles.
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