Victoire de la musique ou pas j'avais décidé bien avant de connaitre le palmarès d'aller écouter La Grande Sophie au Centre d'art de l'Onde. L'affluence était maximale ce soir et il ne restait pas un siège de libre dans la salle vélizienne.
La Place du fantôme a été couronné Meilleur album de l'année, et je peux vous dire que Sophie était à la fois très heureuse, très fière, et un peu génée par rapport à Françoise Hardy qui concourrait dans la même catégorie. Elle admire beaucoup cette artiste pour qui elle a écrit une chanson ... mais Françoise a du se réjouir pour sa cadette puisqu'elle lui a adressé un gentil mot de félicitations.
Françoise Hardy connait bien La Grande Sophie qui lui a écrit la chanson Mister pour l'album La Pluie sans Parapluie en 2010. Cette année là elle offre Personne à Sylvie Vartan qui l'inclue dans Soleil Bleu. deux ans plus tard ce sera Dans les bras d'un pompier (musique et chœurs), pour l'album concept ElleSonParis, titre chanté par Romane Bohringer.
Mais c'est surtout pour elle-même qu'elle compose. Des mélodies qui oscille entre le plein soleil et les zones d'ombre qui m'ont fait choisir un cliché un peu trop flou, certes, pris après le concert qui témoigne du coté insaisissable d'une artiste toujours souriante. Après une résidence au Café de la Danse en mars, et un Trianon en mai, c'était à l’Olympia que La Grande Sophie avait retrouvé le public parisien, dans le cadre de sa tournée pour La place du fantôme, et dont Vélizy fut une étape.
Une brève première partie a permis au duo composant Hi Cowboy de faire entendre leur talent prometteur, puissant et mélodique.
La Grande Sophie s'est installée à l'abri des projecteurs dardant leurs rayons sur le public. Elle dira plus tard que la salle est "drôlement impressionnante", sans doute en raison de son inclinaison. Le tour de chant commence avec un titre du dernier album Ma radio (piste 6) qu'elle chante sans sa traditionnelle guitare, en frappant des claves pour appeler d'entrée de jeu les spectateurs à taper des mains, ce qu'ils font volontiers sans se douter qu'ils sont partis pour deux heures d'accompagnement en oubliant le temps qui passe.
La scène est habillé d'un camaïeu de rectangles bleus et gris évoquant un Mondrian mélancolique et nostalgique des années 60/80.
Tu fais ton âge (piste 7)... même si ce n'est pas facile de compter les saisons s'accorde bien avec les arbres d'automne. La roue tourne, Sophie nous remercie d'être là,prend sa guitare, et poursuit avec un titre de l'album Des vagues et des ruisseaux, Quand le mois d'avril (piste 2) ... devant un décor kaléidoscopique et stroboscopique (rendant la photographie très aléatoire) qui la fait paraitre minuscule alors que plus tard, déchaussée de ses bottines à talons aiguilles elle paraitra bien plus grande.
Elle poursuit avec On savait, une chanson qui avait sa place dans deux albums, Toute seule comme une grande, Et si c'était moi qu'elle accompagne avec une guitare roue flamboyant, électrique en diable. Qui avait la solution pour ne jamais devenir grand ?
Grandir, pourquoi pas, mais vieillir, c'est effrayant. Surtout quand on ne pourra plus que Sucrer les fraises (piste 4 de La Place du fantôme) la haut sur la falaise ... un jour. Car rien n'arrête l'appétit du temps.
Mais rien n'arrête non plus la chanteuse qui enchaine en caracolant ma romance et c'est là le paradoxe de cet album, profondément intimiste et pourtant tout à fait adéquat pour faire se lever une salle entière qui se met à chanter à tue tête avec une vitalité joyeuse.
Faire exister le fantôme caché au fond de moi ne semble faire peur à personne. Sophie frappe sur le bois de sa guitare, tourne et tourne. Le public se déchaine.
Le ton est plus doux avec la suivante. Elle pourrait être un jour heureuse ... elle rêve d'une vie délicieuse, elle a du soleil dans la voix ...
L'ambiance reprend sa tonalité rock. Sophie laisse de côté sa guitare et nous défie : on va voir si votre joie tient au bout de vos doigts pour qu'on l'aide à trouver Du courage.
Retour à la Place du fantôme (piste 10) avec Suzanne, un titre très mélancolique qui évoque Léonard Cohen à qui elle dit ne pas avoir cherché à rendre hommage. C'est simplement un prénom qu'elle aime beaucoup et qui lui a inspiré une chanson lumineuse et nostalgique à la fois, ponctuée de longues vocalises, accompagnées par les notes aux accents métalliques de sa célèbre guitare à la bandoulière marquée d'une tête de mort.
Ne m'oublie pas (piste 3 de La Place du fantôme ) démarre sur quelques notes en boucle obsédante. Elle déchaine le public qui exécute une très longue reprise. Je ne pense pas qu'une seule personne soit restée assise et silencieuse. Le pleins feux sont allumés pour que la chanteuse réalise l'implication On ne risque pas de l'oublier sous la plume de l'oreiller ...
Ecris moi (piste 9)est une supplique plus paisible. Le camaïeu gris-bleu convient bien à sa tonalité. Bref moment lyrique avant le Bye bye etc (piste 1) qu'elle ponctue à coups de mailloches sur le tambour que l'on entend comme autant de bang-bang.
Je suis ton ombre
Je suis ton brouillard
Ton symptôme
Ou ton cauchemar
Je suis ta peur
Et ton échec
Dans ton royaume
Cette fois ce sont de simples maracas qui ponctuent les paroles de ce royaume (piste 5). Et pus retour de la guitare rouge pour accompagner mon docteur , une chanson un peu surréaliste d'un album plus ancien, Le porte bonheur, qu'elle exécute avec quelques mouvements de poupée mécanique.
Elle nous surprend avec Don't get me wrong, une reprise des Pretenders avant de chanter Quelqu'un d'autre, le célèbre titre de l'album Des vagues et des ruisseaux, de dire un peu brusquement au-revoir et à bientôt ... à Palaiseau (91) où elle donne un concert jeudi.
Premier rappel pour la très belle reprise de la chanson de Barbara, Dis quand reviendras-tu ? qui clôturait magnifiquement le précédent album. Elle s'assoit sur un haut-parleur pour poursuivre avec Petite Princesse, les yeux dans les yeux des spectateurs des premiers rangs.
C'est le moment qu'elle choisit pour descendre de scène et monter dans les gradins, sans cesser de chanter pour un public aux anges, très à l'écoute de ce qui peut se trouver derrière le rideau blanc.
Elle ordonne : ceux du fond passez devant, et vous qui êtes devant allez derrière. Mélangez-vous ! Soyons rassurés elle entonne Je ne changerai jamais avant de disparaitre en provoquant une exigence de rappel encore plus forte.
Elle revient pour Martin, un autre titre de l'album Toute seule comme une grande avant d'achever par Peut-être jamais (piste 2 de la Place du fantôme) où le mot "peut-être" est la touche optimiste qui contrebalance la fatalité ... dans une autre vie, un autre monde, une autre chance.
On a dit qu'elle avait eu besoin de se délester d'un poids, cela semble fait. Et même s'il est probable que son obsession du temps qui passe ne s'atténue que partiellement elle a su mettre des lots sur un ressenti que l'on partage facilement.
Elle nous promet de beaux rêves cette nuit, dès qu'on posera la tête sur l'oreiller pour peu qu'on ne l'oublie pas ...
Deux heures de concert avec un public debout la moitié du temps. A croire que cela donne une pêche d'enfer parce que Sophie est restée un long moment dans le hall de l'Onde, pour signer des autographes, répondre quelques questions, avec son sourire inoxydable, et sa voix douce.
Une poignée de fans ultra fidèles était là, évoquant avec elle le souvenir de la tension de la soirée des Victoires de la Musique. Les Sophistos, c'est leur nom, avaient une jolie surprise. Audrey, la guitare à la main a interprété une de ses chansons, paroles revisitées biens sûr, qu'elle a écoutée en compagnie de ses musiciens avec un plaisir non dissimulée, tranquillement assise sur la "banque".
La fatigue et la faim pointaient mais elle a accepté volontiers de partager la bouteille de champagne que ses admirateurs avaient apportée. Rendez-vous à Palaiseau ... évidemment ou sur une autre ville de la tournée.
Site officiel de La Grande Sophie
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