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La publication des articles est conçue selon une alternance entre le culinaire et la culture où prennent place des critiques de spectacles, de films, de concerts, de livres et d’expositions … pour y défendre les valeurs liées au patrimoine et la création, sous toutes ses formes.

mardi 19 juillet 2022

Alsacienne d’Origine Contrôlée de Catherine Sandner au Théâtre Les Etoiles (Avignon 2022)

"Toi, tu ne t‘intéresses pas à l’humour", avait regretté à peu près en ces termes, mais avec le sourire, un attaché de presse, l’autre jour. 

"Mais non. J’adore par exemple … " (je ne vais pas faire de jaloux et ne citerai personne). C’est que j’aime particulièrement que l’humour soit une arme pour dénoncer des travers sociétaux, … et secouer les consciences. 

Mes choix de spectacles dans le Festival Off sont dictés par plusieurs critères mais je laisse toujours quelques portes ouvertes à l’inattendu pourvu que je devine la qualité et du potentiel derrière la proposition artistique.

Je n’aurais malgré tout sans doute pas découvert  Le Life-Up de Catoch' si elle ne m’avait pas elle-même persuadée que j’étais susceptible d’apprécier son humour. Comme elle a eu raison ! Je confesse que son Stand-Up est réjouissant à plus d’un titre. Il aura été ma (dernière) heureuse surprise, quelques heures avant de quitter Avignon.

J’avais gardé de mon séjour en Alsace un souvenir mitigé. L’entendre a réactivé les bons moments. Catherine Sandner, Catele pour les intimes, a un sens de la dérision qui renvoie dos à dos les gens de l’intérieur (en particulier les parisiens) et ceux qui vivent au-delà de la ligne bleue des Vosges. 

Ce spectacle est un vrai encouragement à la curiosité qui est, somme toute, la qualité essentielle du festivalier. Elle ferait un houblon dans toutes les salles françaises, … pardon un tabac. 
Avec l’accent, en tenue folklorique et sous des lumières stroboscopiques, elle déverse des flots de bonne humeur et d’énergie sur un public qui ressort positif à l’alsattitude. 

Amateurs d’humour ne la manquez pas. Vous la reconnaîtrez facilement à son immense noeud dans les cheveux. Elle vous convaincra de la suivre aussi sûrement que le joueur de flûte de Hamelin. Son talent, c’est pas du pipeau.

Cet article est le dernier de mes compte-rendus avignonnais (et il en aura eu 70) alors il peut être plus long que les autres. Cliquez sur le lien pour le lire, découvrir les photos et … en apprendre davantage sur cette région particulière. Bien sûr je ne vais pas tout vous raconter …

lundi 18 juillet 2022

Concert de Lize et Je t’aime à la folie de Yves Emmanuel pour le Festival If (Avignon 2022)

Je vais terminer la soirée dans un des jardins du Avignon IF, ce festival conçu par deux avignonnais, Stéphane Pellet et Frédéric Tort (ci-dessous), pour des avignonnais, dans la pure tradition d’accueil de cette ville.
 
Chacun peut s’y rendre, pourvu d’oser le demander (voir leur site), certes dans la limite des places disponibles qui, pour le moment, restent modestes en nombre.

J'ai déjà parlé de la spécificité de ce festival dont j'ai vu Antigone sous le soleil de midi il y a quelques jours.

J’ai hâte de connaitre, si mon petit doigt veut bien me parler dans quelques jours, la réaction d’une proche collaboratrice de Tiago Rodrigues, nouveau (et discret) directeur du festival, car je sais qu’elle va venir. Si le Off semble ignorer le In (oui, In, alors le If a fortiori), celui ci regarde ce qui s’y passe. C’est logique : le rêve du théâtre dit "public" a toujours été de ne pas subordonner une programmation à des transactions financières. Pour mener un combat on a toujours deux choix : l’argent qui est soit-disant le nerf de la guerre, ou la diplomatie.

Première découverte avec la voix, le charme, la jeunesse d’Elisa Moroldo, dont le nom de scène est Lize. Elle a donné ce soir son premier concert et nous avons compris notre chance d’assister à une éclosion. Beaucoup disent qu’elle est la petite sœur de Vanessa Paradis (j’ai eu le même sentiment, mais je la situe -vocalement- à mi-chemin avec Angèle).
C’est aussi une musicienne accomplie et son violon, dont elle joue depuis l’âge de 7 ans, est enchanteur. Elle a l'expérience d'une vie d’artiste itinérante en caravane et chapiteau. Elle se produit sur la scène européenne du néo-folk ainsi que dans la chanson française. Elle est maintenant installée à Marseille pour composer et écrire des chansons empreintes d’images et d’expériences de son passé, et travailler à la création d'un EP que j'ai hâte de découvrir.
Elle écrit en français des textes oniriques qui évoquent l’univers marin comme les étoiles. Elle a été accompagnée par Danton Eeprom, producteur de musique électronique à Berlin, à Londres et en France. Il a joué du clavier et a aussi soutenu par la voix.

Après cette parenthèse musicale, pop française sur fond d’électro et de violon, qui aurait pu suffire à notre bonheur, voici un texte de Yves Emmanuel, qui a adapté son propre livre et assuré la mise en scène.

Je t’aime à la folie raconte l’histoire d’une rencontre, dans le lycée d'une ville océane, entre Yves et Louis autour de la musique. Pour l’un, c’est une rencontre. Avec un attachement inconditionnel, des souvenirs intacts et une fascination qui conduira jusqu’à la folie. Pour l’autre, c’est un divertissement.
Perdu entre son passé et son devenir, l'amoureux va relater sans cesse son histoire pour en discerner les contours, jusqu’à recevoir une réponse pour le moins inattendue. Vrais sentiments ou jeu ? Décidément l’amour ne serait-il que cela ? Ce n’est pas Anatole qui dirait le contraire. 

Avec Arthur Minne, Valentin Bigoin, Joséphine Lefebvre et Yoann Pouet-Bocard dans une scénographie magique puisque nous sommes en décor naturel, sous un figuier majestueux, et que les lumières sont subtilement dosées.
Mention spéciale à Paul Berardi qui assure depuis presque dix ans la direction technique de ce "petit" festival qui a tout des grands.

Concert de Lize et Je t’aime à la folie de Yves Emmanuel vus le Lundi 18 juillet 2022. Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If. Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée.

Pour accéder aux photos du concert et du spectacle, suivre le lien :

Le jeu d’Anatole au Théâtre de l’Arrache-coeur (Avignon 2022)

Je ne l’avais pas vu au Lucernaire et je n’avais visionné que quelques extraits (avant de voter pour Les Trophées de la Comédie Musicale).

Le jeu d’Anatole ou les manèges de l’amour se joue et se chante à 15 h 15 à l’Arrache-Coeur.

C'est un récit sans commencement ni fin, qui tourne comme une valse de Vienne.

C'est dans la capitale autrichienne qu'Arthur Schnitzler nous embarque pour nous faire vivre cinq histoires d'amour à cinq époques différentes, 1010, 1930, 1950, 1970 et enfin 1990.

Les épisodes chantés et/ou dansés s'insèrent dans un dialogue qui réjouit les spectateurs, qui rient et applaudissent régulièrement.

On reconnait des airs célèbres, comme la Barcarolle, l'air du Brésilien, la lettre de Péricole, avec de nouvelles paroles et revus en version jazz, rock psychédélique et même Rhythm & blues. Les histoires se répètent et se font écho.

Aimer n'est pas gage de fidélité, revendique Anatole.

La troupe a été ovationnée par un public déchainé qui ne juge pas du tout les aventures de ce Casanova compulsif. La musique d’Offenbach adoucit les mœurs !

Juste après, à 17 h, toujours au même endroit, se produit Patrice Mercier, dit Patruche Mercier, que j‘avais applaudi en 2019. Il exécute un spectacle de poésie satirique, des Mélodies chroniques qui, d’année en année, égratignent toujours insolemment l’actualité en musique.
Le jeu d’Anatole ou les manèges  l'amoure de Tom Jones, Jacques Offenbach, Nancy Ford
D'après Arthur Schnitzler
Adaptation : Stéphane Laporte
Mise en scène : Hervé Lewandowski
Avec Gaétan Borg, Mélodie Molinaro, Yann Sebile, Guillaume Sorel, Jonathan Goyvaertz
Direction musicale : Sébastien Ménard
Costumes : Julia Allègre
Scénographie : Natacha Markoff
Lumières : Denis Koransky
Création sonore : Geoffrey Bouthors

Spectacle vu le Lundi 18 juillet 2022 au Théâtre de l’Arrache-coeur. Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If. Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée.

Pour accéder aux photos, suivre le lien :

Le petit chaperon rouge de Das Plateau aux Pénitents Blancs (Avignon 2022)

Lundi 18 juillet était mon avant-dernière journée avec un spectacle du Festival d'Avignon, un du Festival Off et un du Avignon IF. Plus une rencontre autour de l’humour. L’accord parfait.

N’ayant pas pu avoir la moindre miette de place pour Gretel, Hansel et les autres aux Pénitents blancs (je suis certaine que la création de Igor Mendjisky est exceptionnelle. Je me rattraperai en saison à L'Azimut et me consolerai ici avec ce petit chaperon). 

Le Petit Chaperon Rouge est un conte que tout le monde connaît, et apprécie diversement, annoncé tout public à partir de 4 ans par la Compagnie Das Plateau, invitée pour la première fois au festival.
Céleste Germe (à gauche sur la photo, avec Maélis Ricordeau), et je partage son point de vue, a été saisie, en relisant la version de Charles Perrault, par la pensée culpabilisatrice qu’elle véhiculait à l’égard des jeunes filles. La morale cautionne que le sexe féminin puisse mourir de sa curiosité. Et d'une certaine façon, l'homme représente un danger permanent. Les frères Grimm envisage une autre issue en faisant intervenir une figure positive, celle des chasseurs.

Par contre, elle ne s’est pas arrêtée à cette (première) fin heureuse. Elle a ajouté une suite (dont on parle peu même si beaucoup d’auteurs de littérature jeunesse s’en sont inspirés pour renverser l’histoire en ridiculisant le loup). Elle a eu l'idée de renvoyer la petite fille chez sa grand-mère et de rencontrer une nouvelle fois un loup. L'enfant, avertie par sa précédente mésaventure, mettra en place un véritable guet-apens et aura raison de l’animal dont elle s’emparera de la peau qu’elle portera, un peu à la manière de Peau d’âne.

L’histoire devient conte initiatique et la petite fille une héroïne. Dans cette version, elle prend acte du danger, apprend à le reconnaître et à le dépasser en se défendant. 
Si le jeune spectateur est confronté à la peur, il comprendra qu’on peut la dompter. Aucun enfant n’aura été effrayé ce matin. Ils ont bien au contraire été émerveillés. Céleste Germe est aussi architecte et travaille avec son décorateur à la manière de montrer l'invisible. Sur le plan visuel, la scénographie imaginée par James Brandily est un voyage en trois dimensions qui conduit le public, depuis le hameau où vit le petit chaperon jusqu’à la maison de la grand-mère en traversant une forêt qui prend parfois l’allure surréaliste de la Forêt de bouleaux de Gustav Klimt.
Avant d’entrer dans le décor, totalement inspiré par le romantisme allemand, le public sera averti par Maélis Ricordeau, assise au centre d’une scène rouge vif qui fonctionne comme un écrin, que l’histoire est à recoudre, autrement dit à revoir sous un autre angle. Antoine Oppenheim deviendra récitant à ses côtés. Les deux artistes sont autant comédiens que manipulateurs.
Dire le texte d’une voix calme avant de le jouer permet aux enfants de comprendre qu’il s’agit d’une histoire et d’en apprécier la saveur. Ils peuvent prendre plaisir ensuite à avoir peur … en toute sérénité…

Ce spectacle est un vrai encouragement à la curiosité qui est, somme toute, la qualité essentielle du festivalier.

Le public de la région parisienne est chanceux de pouvoir le voir dans de nombreuses salles (mais la tournée passe aussi par les régions et l'étranger):
Du 28 au 30 septembre 2022 • Théâtre de Châtillon (92)
Du 24 au 26 novembre 2022 • La Villette, Grande halle (75)
Du 1er au 4 février 2023 • Théâtre Gérard Philipe, CDN, Saint-Denis (93)
Du 9 au 11 février2023  • Théâtre de Sartrouville Yvelines CDN (78)
Du 7 au 9 mars 2023 • Théâtre de Brétigny-sur-Orge, scène conventionnée (91)
Du 23 au 25 mars 2023 • Nanterre-Amandiers, Maison de la musique de Nanterre (92)
Du 17 au 22 avril 2023 • Théâtre Jean Vilar, Vitry-sur-Scène (94)
Du 1er au 3 juin 2023 • Ferme du Buisson, scène nationale de Marne-la-Vallée (77)
Le petit chaperon rouge de Jacob et Wilhelm Grimm
Traduction de Natacha Rimasson-Fertin, Editions Corti, et des fragments de Futur, ancien, fugitif de Olivier Cadiot
Mise en scène Céleste Germe
Avec Antoine Oppenheim et Maëlys Ricordeau
Collaboration artistique Maëlys Ricordeau
Composition musicale et direction du travail sonore Jacob Stambach
Scénographie James Brandily
Création vidéo Flavie Trichet-Lespagnol
Dispositif son et vidéo Jérôme Tuncer
Création lumière Sébastien Lefèvre
Costumes Sabine Schlemmer

Spectacle vu le Lundi 18 juillet 2022 aux Pénitents Blancs. Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If. Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée.

Les photos qui ne sont pas logotypées A bride abattue sont de Christophe Raynaud de Lage
Pour accéder à celles de la Chapelle des Pénitents, suivre le lien :

dimanche 17 juillet 2022

Elise, la trilogie d’Elise Noiraud au Transversal (Avignon 2022)

La soirée n’est pas finie, loin de là. Elle démarre au Transversal à 20 h 15 pour la Trilogie d’Elise.

J’en connaissais deux épisodes. Il me manquait le premier et c’est un grand plaisir de les suivre dans leur continuité. C’est vrai que c’est 4 h 30 et qu’on ne sera pas rentré avant une heure du matin. Mais ça vaut le coup.

Le déroulement enchaine trois chapitres :
1. La banane américaine (l'enfance)
2. Pour que tu m'aimes encore (l'adolescence)
3. Le champ des possibles (l'entrée dans l'âge adulte)

Elise Noiraud est une comédienne accomplie (également metteuse en scène) qui s’est emparée des personnages de son enfance/adolescence/jeune adulte pour leur donner la parole plutôt que de parler à leur place. Ils sont le double fictionnel de l'actrice, de ses 9 ans à ses 19 ans.

Si, comme moi, vous avez vu (au moins) un des trois spectacles, ne craignez pas la répétition. Je ne me suis pas lassée un instant d’une seule scène. Sa manière de relater les rapports mère-fille est si juste …

L’épopée est une performance mais elle se suit sans effort pour nous spectateurs. On retiendra aussi le plaisir d’avoir revu une trentaine de personnes que nous avons, plus ou moins côtoyées dans notre propre chemin de vie. Le décor est minimaliste. Quelques accessoires, des lumières découpées au pinceau et un son adéquat, point n'est besoin de faire plus. Tout est dans le jeu. Du grand art !
Inutile d'en dire davantage, si ce n'est que la comédienne a été nominée aux derniers Molières dans la catégorie Seul en scène. Je vous invite à suivre les liens de mes précédents articles pour en savoir plus sur les chapitres.

Élise Noiraud avait présenté les Fils de la Terre en 2015. Elle travaille à une nouvelle mise en scène qui sera créé en octobre 2022 aux Plateaux sauvages. Elle a adapté le scénario du film Ressources humaines de Laurent Cantet : l'histoire d'un fils d'ouvrier, revenant dans l'usine où son père travaille comme manoeuvre, pour y effectuer un stage dans le service du personnel. Il se retrouve très vite dans une situation d'injonction paradoxale.
Elise, la trilogie, écriture, interprétation et mise en scène de Elise Noiraud
Création lumière et son : François Duguest
Collaboration artistique : Baptiste Ribrault

Spectacle vu le Dimanche 17 juillet 2022 au Transversal. Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If. Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée.

N’imPORTE quoi, la nouvelle création de la Cie Léandre Clown au Théâtre de l’Oulle (Avignon 2022)

Une huissière déjantée fait la misère à Viviane. En voilà maintenant 5 qui feront N’imPORTE quoi à 18 h 20 dans la nouvelle création de la Cie Léandre Clown.

Depuis plus de 30 ans, le clown espagnol Leandre, fait le tour du monde avec son humour chargé de poésie, s'inspirant du cinéma muet, du mime, du geste et de l'absurde. Il découvre le théâtre de rue en 1993 en voyageant en Australie. A son retour, en 1996, il connaît le succès avec plusieurs spectacles en solo qui feront le tour du monde. 

Leandre est devenu un référent du théâtre de rue et est considéré comme un des meilleurs clowns contemporains au niveau international. Mais après presque dix ans en solitaire, surgit en lui l’envie de construire une troupe,  grandir, créer avec d’autres artistes.  Il a souhaité concevoir le spectacle qu’il voulait voir. Un projet pour les clowns qu’il aime tant. L’offrir au public, pour l'embarquer dans son univers, le faire rêver et rire. Voilà l’origine de N’imPORTE quoi
Dans la rue une pluie de clés. Cinq clowns sonnent à la porte. L’humour et la poésie s'y retrouvent au seuil tandis que la solitude s’échappe par le trou de la serrure.
Une invasion d’intimité absurde, de folie et de rires. Les portes, ouvertes… dansent. 
Un spectacle de théâtre gestuel. Débordant de drôleries.
Sans paroles.
Sans limites.
Sans ordre. 
Tout est possible.
Ils ont l’art de prendre la porte. En charentaises et chapeau cloche, le premier qui fait une bêtise entraînera les autres. On parierait qu'ils se dédoublent.

Leurs allers et venues sont surprenantes, chorégraphiées au cordeau, fluides comme le sable un jour de tempête qui déverserait des seaux de clés. Avec des ralentis, des cafouillages minutieusement orchestrés.

Toutes les expressions de l'univers lexical de la clé sont mises en images avec beauté, énergie ou poésie. On sort de ses gonds et on nous offre la clé d'une histoire surréaliste comme un tableau de René Magritte.  

On jouera aux dames avec des verres. On repassera pour la difficulté des travaux ménagers. On se branchera avec eux pour avoir du jus. Le lancer de couteaux de Milly (la femme de Fabien dont je parlais précédemment) est ici un lancer de clés.

Il y aura du cirque, du dressage de portes et même un tapis volant magique. Mais vous y verrez peut-être plus encore.
N’imPORTE quoi de et mis en scène par Leandre Ribera
Mise en scène : Leandre Ribera
Avec Pere Hosta, Laura Miralbés, Andreu Sans, Cristina Solé, Leandre Ribera
Régisseur : Marco Rubio
Spectacle vu le Dimanche 17 juillet 2022 au Théâtre de l’Oulle. Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If. Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée.

La revanche de Viviane Rose de Charlotte Saliou et Bruno Gare au Théâtre de l’Oulle (Avignon 2022)

Il y a des spectacles que je ne prévois pas de voir très longtemps à l'avance. Je peux le reconnaitre, je n'ai vu La revanche de Viviane Rose que parce qu'elle s'intercalait dans la même salle à 16 h 45 entre Banana et N'imPORTE quoi.

Aucun regret : la prestation de la compagnie Jackie Star est à saluer. Laurent Rochut avait bien raison de dire dans sa conférence de presse de lancement que ce spectacle n'a "que" l'air d'être du boulevard.

Et puis il est enfin permis de rire franchement et sans arrière pensée, ce qui, sincèrement, fait du bien.
Viviane Rose, vêtue de satin bleu, le cheveux hirsute et la clope au bec, entame son 4ème whisky de la matinée… Viviane est chanteuse lyrique. Enfin était… Car après son dernier scandale à la Scala, en 1965, où elle a giflé, mordu et poussé dans le public son partenaire, le célèbre ténor Tito Ruggiero, elle s’est faite éjecter du milieu et descendre par la presse. Depuis Viviane ne chante plus. Les difficultés financières s’accumulent.
Il est presque 11h, ce matin, quand Georges, son majordome, lui apporte, dans le petit salon, son café, ses cachets et sa tartine beurrée des 2 côtés. C’est à ce moment que tout bascule. Un petit oiseau posé sur le rebord de la fenêtre se met à chanter. Viviane, entre deux raclements de gorge, égrène quelques vocalises. Miracle ! Georges a l’idée de la remettre sur scène par tous les moyens pour renflouer les caisses.
Noël, fils de Viviane et militaire, arrive à l’improviste. Georges dissimulant des secrets coupables, se retrouve dos au mur, et, bien incapable de lui avouer les problèmes d’argent, lui fait croire que sa mère est malade…
C’est alors le début d’un gigantesque imbroglio, qui ira de mensonges en quiproquos, de kidnapping en déguisement, de faux-semblants en cascades, mais jusqu’où ? Quoiqu’il arrive, Viviane doit rechanter !
Charlotte Saliou est totalement décoiffante. Je me demande si elle est clamartoise, ou subventionnée par le Théâtre Jean Arp de cette ville qu’elle cite à tout bout de champ. C’est peut-être un appel pour y être programmée. Ses fantaisies le méritent tout à fait.

Les cascades sont ébouriffantes. La comédienne danse le tango en faisant résonner les talons de ses claquettes. L’art de la pantomime et une tessiture de soprano colorature ajoutent au plaisir de voir les agitations de la comédienne qui m’évoque Micheline Presle.

Tout va très bien … Madame Rose, est-on tenté de chanter alors que tout part en cacahuètes. A voir !
La revanche de Viviane Rose de Charlotte Saliou et Bruno Gare
Mise en scène : Bruno Gare
Avec Charlotte Saliou, Bruno Gare, Alexandre Letondeur
Scénographie : Cirque Le Roux
Lumières : Pierre Berneron
Costumes : Charlotte Saliou, Philip Rosenberg, Grégory Arsenal

Spectacle vu le Dimanche 17 juillet 2022 au Théâtre de l’Oulle. Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If. Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée.

Bananas (and Kings), de et mis en scène par Julie Timmerman au Théâtre de l’Oulle (Avignon 2022)

Partons au Théâtre de l’Oulle, qui est la plus grande salle de La Factory, pour trois spectacles qui, eux aussi feront réfléchir.

Bananas (and Kings) dénonce à 14 h 50 les pratiques scandaleuses et pourtant éternelles des lobbys des riches au détriment des pauvres, … et de la planète, qui va finir par ne pas s’en remettre.

On sait pourtant que la monoculture est un boulevard pour les maladies. Et que l’extinction de plusieurs espèces animales, au profit d’une autre est à l’origine des pandémies.

Après moi le déluge, telle est la devise de ces rois du pétrole qui saccageront pays après pays pour y surexploiter leurs bananeraies tant qu’il sera plus facile de faire avec une mauvaise conscience qu’avec une mauvaise réputation, comme le disait Edward Bernays.

Il peut pourtant y avoir des "contre-lobbys". Gérard Philipe, en son temps, avait été un des premiers à signer la pétition de l'appel de Stockholm en 1950 contre l'armement nucléaire en pleine guerre froide et je rappelle l’exposition qui lui est consacrée à la Maison Jean Vilar.
Le spectacle s'appuie sur des faits hélas réels :
- En 1871, Minor Keith débarque au Costa Rica. Il plante des bananiers partout en Amérique centrale, exploite les hommes, trompe le fisc, empoisonne les sols, en faisant prospérer la United Fruit.
- 60 ans plus tard, son successeur Sam Zemurray, immigré, juif, végétarien, self-made-man proche de ses ouvriers, parlant des dialectes mayas, laisse entrevoir un avenir plus humain. Mais il va devenir expert en lobbying.
- 1953, Jacobo Arbenz est élu président du Guatemala. Ce socialiste est l'espoir des sans-terres. Sa réforme agraire nuit aux intérêts de la United Fruit Company qui représente alors 33% du marché mondial de la banane. Il sera renversé par un coup d'état organisé par Sam en 1954 avec des hommes de l'ombre, Edward Bernays, conseiller en Relations Publiques et les frères Dulles, occupant de très hautes fonctions à la CIA et à la Maison Blanche.
- 1989 l'UFC change de nom pour la Chiquita Brands International suite à la volonté de donner une nouvelle image à la marque dans le but de rassurer les investisseurs et les consommateurs après la série de scandales liés à la corruption, l'exploitation humaine et le trafic d'influence.
Le sujet est éminemment politique et  sulfureux. On ne ressort pas indemne de cet excellent spectacle qui secoue nos consciences. Le désastre écologique et humain qu'il retrace et dénonce est indubitable. Ce n'est pas une fiction.

Tout l'art de la compagnie est de le faire en s'inspirant de la tradition de la dénonciation par la bouffonnerie que les argentins ont élevé au rang d'art théâtral. Il suffit de se souvenir de Copi ou d'Alfredo Arias.

On passe du film de gansters au western, du clown à la tragédie, de la fresque historique à la BD, sans oublier l'imaginaire maya de nature magique.

C’est très drôle, sinon nous partirions en continuant de nous voiler la face. C’est onirique et magique grâce à la présence de la Llorona, cette femme fantôme qui hante les corrompus à la manière d’une Katrina mexicaine et qui est le seul personnage "inventé".

C’est très bien interprété par 4 comédiens qui endossent 34 rôles. Avec des dialogue percutants qui, souvent, font froid dans le dos puisqu'on sait qu'ils reposent sur la vérité historique. Quand on pens qu'à l'époque on donnait une banane à chaque immigré débarquant à New York, ce qui justifie le choix de l'affiche avec un montage remplaçant le flambeau de la statue de la Liberté par un régime de bananes

Je rappelle que, bien que très différent, le spectacle de Julia Duchaussoy à 10 h au Théâtre du Roi René Avignon est dans la même veine.

Enfin j'ajoute (mais je ne l'ai appris que bien après avoir quitté Avignon) que la compagnie présente une autre pièce, Un démocrate, à la Condition des soies à 11 h 25. Julie propose une traversée épique à l’humour impitoyable de la vie et de l’œuvre d’Edward Bernays (1891-1995), neveu de Freud, inventeur dans les années 20 de techniques de manipulation des masses sans précédent : la "Fabrication du consentement" dont se sont inspirés les dirigeants nazis.

Aucun doute que Julie Timmerman est une femme à suivre !
Bananas (and Kings), de et mis en scène par Julie Timmerman
Avec Anne Cressent, Mathieue Desfemmes, Jean-Baptiste Verquin, Julie Timmerman
Scénographie Charlotte Villermet
Lumière Philippe Sazerat
Costumes Dominique Rocher
Musique Benjamin laurent
Vidéo Jean-Baptiste Pigneur
Sélection 2020-2021 du Bureau des Lecteurs de la Comédie-Française

Spectacle vu le Dimanche 17 juillet 2022 au Théâtre de l’Oulle. Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If. Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée.

Pour accéder aux photos du spectacle, suivre le lien :

Fabien, mis en scène par Marc Pistolesi au Théâtre du Chêne noir (Avignon 2022)

Les affaires de famille sont au coeur de beaucoup de spectacles cette année, et particulièrement les violences conjugales. Si on avait été attentifs, on saurait que ce n’est pas un scoop.

Marc Pistolesi met en scène Fabien de Marcel Pagnol au Théâtre du Chêne Noir à 13 h 15. Le spectacle est une mise en garde à toutes les folles amoureuses qui, comme Milly, ne devraient pas attendre avant de s’enfuir, mais prendre leur valise à leur cou au premier … coup bas.
- De quoi parliez-vous?
- D'amour !
Ce sont les premiers mots échangés entre Fabien et Milly, couple phare de cette histoire. Amoureuse de Fabien, Milly l’est assurément, et totalement. Lui le photographe charismatique, adulé par toute la troupe hétéroclite et flamboyante de monstres de foires, de ce cirque hors du temps.
Les hommes l’admirent, les femmes le chérissent. Mais quand la porte de la roulotte se referme sur son intimité, c’est un tout autre masque qu’arbore Fabien. Celui d’un manipulateur qui se joue de tous et surtout de toutes.
Marinette, la jeune soeur de Milly, viendra comme dans un Luna Park, jouer les "Chamboule tout".
Celui qui n'a pas lu le programme pourrait croire que l'auteur a écrit avant-hier. Et pourtant cette pièce de théâtre en quatre actes a été créée en septembre 1956, au Théâtre des Bouffes-Parisiens, dans une mise en scène de Guy Rétoré. Comme quoi Marcel Pagnol n'a pas imaginé que des histoires bucoliques se déroulant dans la campagne provençale.
Ses mots sont d'autant plus percutants que l'histoire se déroule dans la joyeuse ambiance d'un cirque ambulant. La mise en scène de Marc Pistolesi fourmille d'idées, souvent empruntée au vaudeville. Le spectacle est très musical (qui n’est pas sans évoquer Britannicus que j’ai vu la veille au Théâtre du Balcon) car il y est là encore question de monstres.

Mais cette fois celui de la pire espèce pourrait être notre voisin, un frère, … notre meilleur ami. Et sous les paillettes de l'extraordinaire on découvre les bleus à l'âme de la si bonne et si dévouée Milly qui pose la question dont la réponse est si douloureuse : Aime-on bêtement ?

Les dialogues sont percutants comme les couteaux qui seront lancés dans un numéro impressionnant. Ils ont aussi leur capital d'humour. Pendant que l'ange gardien est au café, il est où le bon Dieu ?

C'est décoiffant. Dérision, tension, émotion, révélation …Les tours de magie s’enchaînent tandis que brutalement une chaîne se rompt, celle de la dépendance amoureuse. On peut rire de soulagement. La parade peut commencer ! 
Ce spectacle est aussi un acte militant. On prévient à la fin que, si la pièce est une fiction, il y a en France quantité de Fabien dont il faut avoir la force de se sauver.

Fabien de Marcel Pagnol
Mise en scène : Marc Pistolesi
Avec Nicolas Dromard, Solange Milhaud, Marie Colucci, Carlotta Moraru, Laure Dessertine, Olivier Césaro, Jean-Michael Rucheton, Damien D'Andrea, Stéphane Albertini ou Rémi Cresta

Spectacle vu le Dimanche 17 juillet 2022 au Théâtre du Chêne noir. Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If. Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée.

Au non du père de Ahmed Madani au 11 Avignon (Avignon 2022)

J'étais doublement motivée pour venir voir la dernière création d'Ahmed Madani. J'étais encore sous l'enthousiasme d'Incandescences que j'avais vu l'an dernier au Théâtre des Halles.

Et puis le thème de sa nouvelle proposition m'intéressait.

On m’avait critiquée, à la création du blog À bride abattue, pour son alternance entre le culturel et le culinaire. Pour moi il ne faisait aucun doute que la cuisine fait aussi partie du patrimoine, et je voulais par ce biais m’adresser prioritairement aux personnes qui n’étaient pas convaincues que le théâtre était aussi fait pour elles.

Le spectacle de Ahmed Madani, à 9 h 50 au 11 • Avignon prouve une nouvelle fois que j’avais raison. Le metteur en scène avait déjà dirigé Anissa, qui fut l’une des dix jeunes femmes participant au formidable Flamme(s), second volet d’une trilogie consacrée à la jeunesse des quartiers populaires.

Le décor de Au non du père (vous avez bien lu, oui, c’est un non !) me place dans l’univers familier des concours culinaires auxquels j’ai participé. Que de souvenirs ! Et c’est dans les règles de l’art qu’Anissa patissera sous nos yeux des fondants au chocolat et des pralines.
Anissa n'a pas connu son père, elle le recherche depuis son plus jeune âge. Un jour, elle retrouve sa trace d’une manière digne des téléfilms les plus mélodramatiques. Dix ans plus tard, Ahmed Madani, fasciné par son histoire, la pousse à partir à la recherche de cet homme pour en avoir le cœur net. Il propose à Anissa d’organiser son voyage et de l’accompagner. Ils débarquent tous les deux à New York le 22 mai 2019, puis prennent la route jusqu’à la frontière du Canada. Sur scène, pendant qu’Anissa prépare des pâtisseries qui seront partagées avec le public, ils racontent leurs péripéties. La pièce est une ode à l'espérance, à la résilience, au pardon et à la force de vie. Elle se déploie dans un suspense qui nous tient en haleine jusqu'à la résolution finale.
Si la jeune femme n’a pas connu son père, elle en a malgré tout une image, qui sera le point de départ d’une enquête quasi policière, qui va nous être restituée avec humour, dignité, un sens théâtral évident, presque comme Fabrice Drouelle dans Affaires sensibles (12 h 20 à La Scala Provence). L’histoire est plus proche de la fiction que d’une réalité classique.

Son lexique a grandi dans la modernité d’aujourd’hui. Ne soyez pas surpris d’entendre crevard, seum. Elle est cash et sans filtre mais pas sans valeurs. Pour elle, la compréhension prévaut sur la compassion et elle mènera l’investigation jusqu’à son terme alors que le parfum du sucre caramélisé se propagera dans les gradins.

Elle partagera deux choses : la recette des pralines (que je vous donnerai plus tard sur le blog) et la manière dont elle a modifié son destin.

Ses confidences sont aussi insolites que sa manière de faire. Elles s’amalgament avec l’histoire personnelle du metteur en scène, lequel, sur scène, à cour, derrière son ordinateur, ne perd pas une miette de nos échanges. Car Anissa a aussi le sens du dialogue et s’adresse personnellement aux spectateurs.

Nous serons invités à fermer les yeux et à repenser nous aussi à notre paternel. Et à réfléchir sur la complémentarité entre compréhension et compassion. Sur les motivations à refuser de suivre une injonction. Car désobéir, c'est choisir sa liberté, pour suivre sa route.

Anissa accepta le projet sous trois conditions : que la représentation se déroule plein feu, sans aucun jeu de lumières additionnelles et de manière à pouvoir regarder le public dans les yeux. Que ceux-ci ne soient pas trop nombreux. Et qu'Ahmed soit sur scène avec elle.

Il ne se prive pas d'intervenir pour donner des clés, ponctuer d'une anecdote. S'impliquer en relatant combien le destin de la jeune femme entre en collusion avec sa propre histoire. Il nous fait des confidences insolites : je m'empare de la vie des autres sans doute pour mieux raconter la mienne.

Je ne vous dirai pas si Anissa a retrouvé son père mais je vous dirai quand même que vous ne repartirez pas les mains vides … après un hommage à Jean-Claude Carrière dont Peter Brook, récemment disparu, avait monté la Conférence des oiseaux.

C'est un bonus mais c'est aussi la volonté de dire ce qu'elle fait autant que de faire ce qu'elle dit qui aura pour conséquence le partage des gourmandises cuisinées en direct avec tous les spectateurs, à la fin de la représentation. C'est un heureux moment de convivialité.
Au non du père est bien la preuve que la pâtisserie mène (aussi) au théâtre, même pour celle qui dit ne pas trop l'aimer et préfère s'ambiances avec des amies le temps d'une soirée.
Au non du père de et mis en scène par Ahmed Madani
Avec Anissa et Ahmed
Création son : Christophe Séchet
Images vidéo : Bastien Choquet
Spectacle vu le Dimanche 17 juillet 2022 au 11 Avignon. Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If. Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée.

samedi 16 juillet 2022

Dans la solitude des champs de coton par Marie-Claude Pietragalla au Théâtre du Balcon (Avignon 2022)

J'ai terminé cette journée du 16 juillet avec Dans la solitude des champs de coton à 22 heures.

J’avais adoré la mise en scène de Roland Auzet avec Anne Alvaro et Audrey Bonnet en août 2020, programmée par Mathieu Touzé pour le Théâtre 14, la nuit, sur un terrain de football. J’y avais fait l’expérience de la cécité.

Ce soir j’en ai faite une autre avec une chorégraphie qui relève somptueusement de la magie.

On dit du texte qu'il est "une bagarre verbale que l’on pourrait comparer à une bagarre de rue". Il fait se confronter un dealer et un client : deux oiseaux de nuit, deux solitudes, deux mondes que tout oppose dans un lieu isolé. 
Sur un terrain neutre et désert, que seuls des faisceaux laser viennent balayer comme une main tendue, les personnages sont amenés à se révéler et à se mettre à nu. L’offre et la demande, le marchand et le chaland, la lumière et l’obscurité…
La danse exprime ici l’inconscient poétique des deux personnages ; une parade où chacun se frôle, se provoque et se désire. Les mots de l’auteur comme la danse cherchent à impressionner, à tester l’adversaire, mais ils sont surtout une ritualisation de la rencontre avec la mort.
Marie-Claude Pietragalla signe une création époustouflante dansée par Julien Derouault et Pierre Dexter Belleka. Quand je dis "dansée" je fais un raccourci parce que le corps des artistes sculpte les ombres et la lumière. Il faut le voir pour me croire. Ce travail est très élaboré, surprenant, inoubliable de précision.

Le texte est dit en voix off, tel un surtitrage auditif, qui nous permet de comprendre le langage des corps si nous n’avons pas l’habitude de le déchiffrer. Et puis à un moment particulier, lorsque (je crois) les personnages sont placés à égalité d’orgueil ils prennent la parole et nous offrent la suite en théâtre dansé. Quel cadeau !

Cette mise en théâtre, en danse, en musique et en lumière de ce chef d’œuvre du théâtre contemporain est un face-à-face exceptionnel. Un vrai combat. Entre deux acteurs-danseurs qui s’affrontent dans une chorégraphie où krump et danse contemporaine se mélangent et se percutent. C'est une idée particulièrement juste que d'utiliser le lexique corporel du krump puisque c'est une danse née au cœur des quartiers pauvres de Los Angeles (dans les années 2000), marqués par les guerres de gangs, le trafic de drogue, les interpellations musclées de la police et les émeutes raciales de 1992.

Initialement le krump a été conçu pour permettre aux jeunes de canaliser leur colère, leur agressivité, leur haine, leur rage, leurs revendications et de les ressortir sous une forme plus positive. Il est de plus en plus présent au théâtre et au cinéma.

Je ne crois pas qu'il faille être spécialiste pour apprécier ce spectacle chorégraphique et théâtral inédit. mais il est probable que le film de Philippe Béziat sur Les Indes galantes (2021) m'a aidée à intégrer quelques clés de lecture.

Je vous souhaite de parvenir à avoir une place car ce soir, il n’en restait pas. Bernard-Marie Koltès aurait été surpris et heureux d’être là. 

Poésie, théâtre, danse, utopies humanistes, … tous les spectacles de cette journée sont liés entre eux.
Dans la solitude des champs de coton de Bernard-Marie Koltès
Chorégraphie et mise en scène : Marie-Claude Pietragalla et Julien Derouault
Avec Julien Derouault, Pierre-Claver Belleka dit Dexter
Lumières : Alexis David
Sélection officielle “World Duo Performing Arts Festival”, Séoul 2020
Spectacle vu le Samedi 16 juillet 2022 au Théâtre du Balcon. Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If. Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée.

Britannicus par Les Épis noirs au Théâtre du Balcon (Avignon 2022)

Changement de registre avec Britannicus à 19 h 55 où Les Épis noirs dynamitent le mythe racinien.

Le décor évoque l'univers du cirque. "Ils sont venus. ils sont tous là. Assis sur l'herbe de la verte prairie".

Ne protestez pas que je vous mente : Dans ce monde du théâtre, c'est l'imagination qui est au pouvoir. Et dans ce domaine, les Epis noirs règnent en empereur.

Suggestion nous est faite de nous libérer de notre monstre puisque nous avons le choix entre le divin et le néant, … sauf ceux d’entre nous qui croient au divan.

Les jeux de mots et d’esprit se bousculent à un rythme effréné.
Une troupe de théâtre ambulant, dirigée par un "Monsieur Loyal" tonitruant, mène ses comédiens à la cravache pour vous raconter la véritable, et non moins monstrueuse, histoire de Britannicus.
Tout se passe en un seul jour à Rome. En mai 68 de notre ère. Claude, l’empereur romain, meurt empoisonné par une omelette préparée par sa femme Agrippine qui peut ainsi nommer à la tête de l’empire, son propre fils, Néron. Ce dernier, dès l’aurore, a enlevé Junie, qui devait se marier ce jour-même à son frère Britannicus. Ce qui, évidemment, provoque une fureur incommensurable, chez son frère, chez sa mère, au palais et dans tout l’empire.
Narcisse et Albin, les deux conseillers de Néron, diamétralement opposés et néanmoins frères siamois, vont mettre Néron face à ses responsabilités et au premier choix de sa vie : Junie ou l’empire ?
Ou les deux… ?
La troupe mérite son label de tragédiens du rire. La mise en scène est éminemment spectaculaire. Le public, conquis, en redemanderait … si c'était possible.

Admirez le dressage de Monsieur Loyal ! Voilà que je suis -moi aussi- sous emprise. En traversant plus tard Avignon à vélo dans des rues encombrées par la foule, je ne penserai pas à l’homme du Navire Night (dont je viens de vous dire qu’il utilise le même engin que moi). Je me sentirai devenir un de ces pantins secoués par la main d’un joueur sur un plateau de baby-foot géant.

Britannicus de et mis en scène par Pierre Lericq
Avec Jules Fabre, Pierre Lericq, Gilles Nicolas, Tchavdar Pentchev, Marie Réache, Juliette De Ribaucourt
Costumes : Chantal Hocdé Del Pappas
Lumières : François Alapetite
Son : Jules Fernagut
Scénographie : Yves Kuperberg

Spectacle vu le Samedi 16 juillet 2022 au Théâtre du Balcon. Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If. Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée.

Le Navire Night, de Marguerite Duras, mis en scène par Frédéric Fage au Théâtre du Balcon (Avignon 2022)

La programmation du Théâtre du Balcon est aussi riche que variée. Arrêtons-nous, à 18 heures, pour Le Navire Night, de Marguerite Duras (décidément très présente au festival) mis en scène par Fréderic Fage et qui s’adresse d’abord à tous ceux qui aiment les beaux textes.

La pièce raconte une histoire d’amour inspirée de faits réels, et antérieure de presque 30 ans à l’émergence des réseaux sociaux (qui croient -à tort- avoir tout inventé en matière de relations humaines), quand, en 1978, on pouvait profiter de l’anonymat de lignes téléphoniques non attribuées, datant de l’occupation allemande, pour vivre, la nuit, de vraies passions.

C'est vertigineux de penser que des centaines d’hommes et de femmes se donnaient tous des rendez-vous, lesquels n'étaient jamais suivis de rencontres. Comme si l'appel était plus important que le résultat. Un appel lancé dans le gouffre, un cri qui, à lui seul, a le pouvoir de déclencher la jouissance, comme le précise le metteur en scène dans sa note intention.

L’appareil téléphonique est orange comme un soleil dans la nuit noire, ponctuée d’arabesques lumineuses qui se déploient comme des broderies sur un ciel de lit gonflé comme la voile d'un bateau. Comment rêver cadre plus romantique pour un amour hautement utopique ?

L'histoire de cet amour s’étale sur trois ans. D’elle, on apprendra qu'elle a vingt-six ans, et qu'elle est leucémiques. On saura juste l’initiale de son prénom. Vous aurez deviné qu’il s’agit d’un F … puisqu’il n’y a pas de hasard. De lui, qu’il se déplace à bicyclette. D’eux, qu’ils se défient au jeu de la mort … et des grands sentiments.

Au fil des conversations, la personnalité de la femme s’esquisse. Elle . Elle donne rendez-vous à son correspondant, mais ne s’y rend pas…

Le Navire Night, de Marguerite Duras
Mis en scène par Frédéric Fage
Avec Maroussia Henrich, Lorenzo Buttigieg
Piano : Roland Conil
Scénographie : Georges Vauraz
Musique : Mathieu Rulquin

Spectacle vu le Samedi 16 juillet 2022 au Théâtre du Balcon. Article rédigé après mon retour, à partir de mes notes et des publications faites chaque jour sur la page Facebook À bride abattue, rendant compte des spectacles vus la veille, aussi bien dans le In, que le Off ou le If. Les meilleures photos de la journée étaient publiées sur mon compte Facebook Marie-Claire Poirier peu après dans la matinée. 

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