Je l'attendais depuis le Salon du Livre. Je me préparais à une découverte heureuse et je n'ai pas été déçue un instant, retrouvant dans l'écriture de Myriam Chirousse un style qui m'a fait penser à celui de Claudie Gallais.
Née en 1973 à Cagnes-sur-mer, la jeune femme écrit depuis longtemps. Traductrice (de l'espagnol vers le français, notamment pour Métaillé) à plein temps depuis 2004, elle a commencé par écrire des livres pour enfants chez Thierry Magnier. Un premier roman pour adultes Miel et vin, a été publié en 2009, aux éditions Buchet Chastel. La paupière du jour est le second.
C'est à un poète et mathématicien persan, que l'auteur a emprunté l'idée du titre. La citation complète de Omar Khayyâm est « La nuit n'est peut-être que la paupière du jour ».
Un adage que la couverture met en scène en nous faisant entrevoir un chaton se faufilant dans une ruelle du village de Barjouls, un village perdu dans les montagnes du sud de la France nous dit-on en quatrième de couverture. Point de photo, et pour cause, puisque le lieu n'existe pas réellement, même si on peut penser à un endroit qui ressemblerait à Barjols, dans le Var.
Le contexte est donné en prologue, pour expliquer la venue de Cendrine Gerfaut dans ce village, dix ans après le meurtre de son fiancé. La jeune femme, qui doit son prénom à sa naissance le mercredi des Cendres, n'est aucunement une princesse de conte de fées. Elle est déterminée à trouver l'assassin dont elle ne connait que le nom, Benjamin Lucas.
Il vient de purger sa peine de prison et Cendrine ne supporte pas l'idée de le savoir vivant. Elle aurait pu négocier un congé sans solde. Par chance, son chef de service lui propose de faire des prélèvements pour constater les effets de l'explosion de Tchernobyl dans la région, lui assurant son salaire et lui fournissant une couverture qui va lui permettre de mener une enquête discrète.
La discrétion sera relative parce qu'à Barjouls, tout le monde se connait, s'épie, se soupçonne de tout un tas de choses réelles ou supposées. Les amitiés et les rancunes sont vives. Le moindre coup d'oeil est rapide comme une piqure de moustique (p. 105). La botaniste affrontera aussi bien les tracas matériels (un chauffe-eau récalcitrant, une machine à laver hors d'usage, des chats intrusifs et des intempéries) que des rencontres étranges et inquiétantes.
Elle va traquer les personnages un peu louches pensant y voir ce Benjamin qu'elle recherche inlassablement. Et ils sont nombreux. Nous suivrons sa quête de la vérité en découvrant une région rude mais attachante. Comme elle nous ferons des hypothèses en tentant de ne pas être influencé par les apparences. On devine que Myriam Chirousse nous lance sur de fausses pistes mais on se dit que ce n'est pas cher payé tant l'histoire est ficelée comme une intrigue policière et on se prend au jeu.
La Paupière du jour nous livre la transformation de la jeune femme qui doit lutter entre le désir d'un règlement de comptes radical et l'envie de permettre à un village de recouvrer la paix. Une des qualités de Myriam Chirousse est de rendre forts et sympathiques d'autre personnages que celui de Cendrine. Son point de vue n'est donc pas strictement celui de la jeune femme, ce qui offre d'autres perspectives.
Elle a construit par exemple un "homme aux oeufs" dont la vision romantique et quasi désespérée est touchante, à l'opposé des comportements machistes, voire quasi mafieux du maire du village.
Ce roman, imposant par ses 500 pages, se lit facilement. C'est aussi une ode à la nature et aux espaces sauvages. Il décrit une nature impétueuse qui façonne autant les paysages que le tempérament de ceux qui vivent là. On achève la lecture avec le sentiment d'avoir découvert un vrai auteur.
1 commentaire:
Comme toi, j'ai trouvé une ressemblance avec CLaudie Gallay.
Un roman que j'ai dévoré et adoré tout comme Les Déferlantes.
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