J'ai eu l'occasion de recueillir le ressenti de Catherine Locandro quelques jours après la sortie de son livre, L'histoire d'un amour, dont j'avais déjà écrit la chronique fin août. Elle me l'avait dédicacé. J'avais envie de la connaitre davantage, d'autant que j'avais sincèrement apprécié .
Elle m'a confirmé qu'elle était partie de la lecture d'un fait divers, publié en novembre 1995 dans le journal italien de La Stampa, mais qu'elle avait découvert longtemps après, alors qu'elle faisait des recherches sur Dalida, il y un peu plus d'un an seulement. Cet élément a confirmé son intuition : il y avait là matière à raconter une histoire qui soit à la fois une vraie histoire et une histoire vraie.
Dalida a baigné son enfance. Bien qu'elle ne soit pas une fan, sa personnalité l'a toujours fascinée, pour son coté très lumineux et très sombre, donnant envie d'explorer ce contraste sans pour autant s'engager dans une énième biographie. Il était essentiel pour Catherine de pouvoir entreprendre un travail dans l'imaginaire : C'est surtout la femme touchante qui m'intéressait : en quête d'elle-même. Qui n'a pas hésité à se remettre en question. Une femme romanesque.
Il faut dire que cet amour fulgurant, entre un jeune homme et une femme proche de la maturité, recèle un potentiel incroyable. C'était un point de départ possible pour tirer le fil de ce que fut son existence, mieux comprendre ce qu'elle fut et restituer aussi une histoire d'amour avec ses composantes essentielles : la rencontre, l'éclosion de la passion, la rupture, le manque.
Le talent de l'écrivain est de réussir à transcender un évènement personnel en une analyse de portée universelle.
Catherine Locandro est persuadée que Dalida a tenu à ce que "ça" reste secret. La mode des cougars n'était pas de mise dans l'Italie de la fin des années soixante. Et puis la chanteuse a connu des amours beaucoup plus spectaculaires par la suite (ses trois maris se sont suicidés). Du coup cet épisode pouvait sembler anodin, même s'il a eu des conséquences tragiques et définitives, avec un chagrin de maternité inconsolable. Il est resté dans l'ombre, et vivre une passion à l'égard des regards a dû ajouter du sel en son temps. Cela devait être palpitant de se retrouver dans des hôtels en essayant de passer inaperçue alors qu'elle était déjà célèbre.
On peut penser qu'elle avait aussi besoin d'entretenir une zone de jardin secret comme toutes les personnes qui sont si populaires. Le terme de secret est cependant un peu excessif car Orlando, le frère de Dalida, a mentionné cette passion dans la biographie qu'il a co-écrite en 1995, un ouvrage dans lequel Catherine a puisé largement pour disposer d'éléments véridiques.
Il est probable que si les évènements se produisaient aujourd'hui l'affaire connaitrait un dénouement très différent. D'abord parce qu'il est devenu quasiment impossible de préserver une histoire des oreilles et des téléphones portables indiscrets au-delà de quelques jours et que, paradoxalement, on supporte mieux l'étalage de sa vie privée. De plus les différences d'âge ne sont plus scandaleuses.
La chanson de Jean-Louis Murat qui est citée en exergue est une des chansons préférées de l'écrivain. Celle-ci résume particulièrement bien cette histoire qui ne veut pas finir. Elle l'a choisie aussi parce que le fait que ce soit un homme, un chanteur lui aussi, qui ouvre le livre, apportait une note d'originalité.
Dalida est toujours désignée dans son livre sous le terme de la Chanteuse, ouvrant ainsi les vannes de l'inspiration alors que la désignation nominative de Dalida aurait enfermé le personnage, entravant l'imaginaire de l'auteure comme celui du lecteur. Cette femme est un point de départ pour aller vers quelque chose de plus large. Enfin l'expression place le projecteur sur l'image publique. Il faudra que le lecteur passe outre pour découvrir la femme qui se profile derrière.
Les réactions des lecteurs sont très positives et font un plaisir immense à Catherine Locandro qui reçoit beaucoup de lettres lui expliquant que cette histoire est touchante de façon très personnelle, la confortant dans son intention d'écrire avant tout une histoire d'amour, et pas un épisode de la vie d'une star. Ça parle à beaucoup de gens, me confie Catherine et je reçois de nombreux témoignages très émouvants.
Interrogée sur ses projets elle affirme avoir le désir de continuer. Elle a déjà une piste pour un prochain livre mais elle ne l'a pas tout à fait commencé. Les recherches sont entamées. Là encore il y aura un travail préalable de documentation puisque c'est devenu sa manière d'entrer dans l'écriture. Elle cherche l'inspiration dans les livres, les films, la musique. Elle a besoin de baigner dans une ambiance propice.
Elle est passionnée de cinéma. Elle me recommande d'aller voir Sils Maria, d'Olivier Assayas, qu'elle a adoré. Elle le juge remarquablement écrit et interprété avec finesse. Coté musique, c'est le dernier album de Julien Doré qu'elle a beaucoup écouté ces derniers temps.
Elle lira probablement Nothomb, car le sujet lui semble intéressant, cette amitié particulière ... Elle se plongera dans le dernier Serge Joncourt car son talent est immense, me dit-elle. Elle ne résistera pas au prochain Emilie de Turckheim, qui publie elle aussi chez EHO et dont elle aime la fluidité. J'ai ouvert La disparition du nombril et je partage son opinion.
Catherine fait des allers retours réguliers entre Bruxelles et Paris qui sont à moins de deux heures l'une de l'autre. Elle a vécu à Paris mais la capitale française est devenue financièrement inaccessible. Bruxelles est une ville où l'atmosphère est plus détendue, une sorte de refuge, un endroit très propice pour écrire : On s'y sent bien, c'est plus simple pour un auteur, plus confortable. J'y suis installée depuis neuf ans et j'y suis très heureuse.
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